Question de M. GATTOLIN André (Hauts-de-Seine - RDPI) publiée le 04/02/2021

Question posée en séance publique le 03/02/2021

M. le président. La parole est à M. André Gattolin, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

M. André Gattolin. Ma question s'adresse à M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères.

Sale temps, très sale temps même pour la démocratie, l'État de droit et les droits humains à l'échelle internationale depuis le début de la semaine…

Lundi : coup d'État militaire en Birmanie et coup d'arrêt définitif porté au processus de transition démocratique ouvert il y a dix ans dans le pays.

Hier, à Moscou : condamnation d'Alexeï Navalny à près de trois ans de prison ferme dans un procès ubuesque et joué d'avance. Comme le disait il y a peu son bras droit, Leonid Volkov, « son seul crime, c'est de ne pas être mort » après l'empoisonnement dont il a été la victime en août dernier.

Hier soir, la BBC diffusait un documentaire édifiant sur les exactions conduites contre les Ouïghours dans les camps d'enfermement du Xinjiang en Chine : usage systématique du viol collectif à l'encontre des femmes, pratique de la torture, de traitements inhumains et dégradants… Insupportable !

Alors, que faire, monsieur le ministre ? Que faire au-delà des protestations officielles, certes bienvenues, mais généralement sans véritables effets ?

La France et l'Union européenne ne peuvent aujourd'hui sombrer dans la pusillanimité sur des sujets aussi graves. Des instruments existent !

En décembre dernier, l'Union européenne a adopté un régime mondial de sanctions ciblées contre les auteurs de graves violations des droits de l'homme. N'est-il pas temps d'ouvrir cette procédure à l'encontre des responsables de l'empoisonnement d'Alexeï Navalny ?

Concernant la Birmanie, je rappelle que ce pays bénéficie d'un système préférentiel de l'Union européenne, intitulé « Tout sauf les armes », dont les avantages sont conditionnés au respect de quinze conventions internationales, que ce pays bafoue aujourd'hui ouvertement. N'est-il pas temps d'enjoindre à la Commission européenne de rouvrir ce dossier et d'imposer les sanctions envisagées il y a deux ans, qui avaient été suspendues pour ne pas fragiliser à l'époque le gouvernement civil de Mme Aung San Suu Kyi ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées du groupe INDEP.)


Réponse du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 04/02/2021

Réponse apportée en séance publique le 03/02/2021

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Monsieur le sénateur Gattolin, votre constat est exact, c'est aussi celui que nous dressons : les droits de l'homme sont de plus en plus menacés dans le monde, tout comme la démocratie et l'État de droit.

Les pays autoritaires minent le système multilatéral de protection de ces droits. In fine, nous assistons aujourd'hui à une véritable bataille de modèles et, plus largement, à une remise en cause du principe fondamental d'universalisme des droits de l'homme, une exigence que la France porte dans toutes les enceintes multilatérales où elle siège : au Conseil de sécurité de l'ONU, qui s'est réuni sur la question de la Birmanie, ou encore au Conseil des droits de l'homme, dont elle est redevenue membre complet et où elle va faire entendre sa voix et sa vision du monde. Nous sommes également très mobilisés au niveau européen sur la mise en œuvre du régime de sanctions transversales que vous avez évoqué, à l'élaboration duquel nous avons largement participé.

Je ne reviendrai pas sur la situation de M. Navalny, le Premier ministre s'étant exprimé précédemment au nom du Gouvernement. À la suite de la visite exigeante du Haut Représentant de l'Union européenne, M. Borrell, nous serons amenés à prendre des décisions en fonction de ce que nous diront les autorités russes.

Concernant la Birmanie, le coup d'État militaire, l'arrestation de Mme Aung San Suu Kyi et l'emprisonnement du Président de la République minent la transition démocratique engagée depuis plusieurs années dans ce pays, qui avait permis d'engager les réformes qui auraient permis à terme de régler la question de la minorité ethnique des Rohingyas. Nous sommes aujourd'hui en discussion avec nos partenaires européens pour mettre en œuvre les sanctions indispensables.

La logique est la même pour la situation au Xinjiang. Nous avons proposé à de nombreuses reprises au président Xi – le Président de la République lui-même l'a dit – que Mme Bachelet, la haute-commissaire des Nations unies aux droits de l'homme, fasse une visite officielle.

M. le président. Il faut conclure !

M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Il paraît qu'il ne se passe rien de grave au Xinjiang. Constatons-le donc au niveau international !

Voilà, monsieur le sénateur, quelques exemples d'actions que nous voulons mettre en œuvre pour le respect des droits de l'homme. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

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