2. Les objectifs de dépenses de la branche maladie en 2002

a) L'objectif de dépenses de la branche maladie-maternité-invalidité-décès (articles 30 et 31)

L'article 30 du présent projet de loi de financement fixe pour 2002, en droits constatés, l'objectif de dépenses de la branche maladie-maternité-invalidité-décès à 125,27 milliards d'euros, soit 821,72 milliards de francs. Ce montant a été modifié à l'Assemblée nationale puisqu'il était initialement fixé par le présent projet de loi de financement à 125,05 milliards d'euros.

L'augmentation de 0,22 milliards d'euros décidée à l'Assemblée nationale se décompose ainsi :

- 0,04 milliard d'euros au titre du financement du futur dispositif d'indemnisation des victimes d'aléas thérapeutiques.

A ce égard, votre rapporteur pour avis souhaite rappeler que le projet de loi sur le droit des malades, qui sera discuté au Sénat en janvier 2002, met en place une procédure de règlement des litiges amiables et prévoit l'indemnisation de l'aléa thérapeutique. Les indemnités seront versées par un établissement public placé sous tutelle du ministre délégué à la santé, créé à cet effet : l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales. Les recettes de cet office proviendront notamment d'une dotation des régimes d'assurance maladie et des produits des recours exercés éventuellement contre les responsables du dommage. Au total, le coût du dispositif est évalué à environ 1,5 milliard des francs par an (0,23 milliard d'euros). Dès lors, l'inscription de 0,04 milliard d'euros supplémentaires à ce titre dans le présent projet de loi sera insuffisante pour couvrir les dépenses engendrées l'année prochaine par la mise en place de ce dispositif ;

- 0,11 milliard d'euros au titre de la dotation majorée du régime d'assurance maladie au FMES pour 2002 ;

- 0,02 milliard d'euros au titre du financement de la création de places nouvelles dans les établissements accueillant les enfants et adultes souffrant d'autisme et les personnes polyhandicapées ;

- 0,05 milliard d'euros au titre du financement de la mise en place d'un examen bucco-dentaire de prévention pour les enfants de six à douze ans.

En outre, et pour la première fois dans une loi de financement de la sécurité sociale, l'article 31 fixe pour 2001, en encaissements / décaissements, un objectif révisé de dépenses de cette branche à 785,60 milliards de francs (119,76 milliards d'euros). Ce montant résulte lui-même d'une modification votée à l'Assemblée nationale, puisque le projet de loi de financement mentionnait initialement un objectif révisé de 784,30 milliards de francs.

L'augmentation votée de 1,3 milliard de francs résulte de la prise en compte de la majoration de 300 millions de francs de la dotation des régimes d'assurance maladie au FMES au titre de l'année 2001 ainsi que l'abondement de l'ONDAM hôpitaux à hauteur d'un milliard de francs au titre de l'année 2001.

Les deux objectifs étant présentés selon des systèmes de comptabilité différents, il n'est pas vraiment possible de les comparer.

Votre rapporteur pour avis souhaite toutefois souligner qu'il accueille favorablement l'effort de clarification consenti, sous la contrainte du Conseil constitutionnel, par le gouvernement en fixant rétrospectivement un objectif révisé de dépenses de la branche maladie du régime général.

b) L'objectif national de dépenses d'assurance maladie (articles 32 et 32 bis)

En 2002, le passage en droits constatés constitue un changement majeur dans la définition des objectifs de dépenses d'assurance maladie. L'ONDAM en droits constatés se distingue de l'ONDAM en encaissements / décaissements par l'existence d'un provisionnement des dépenses correspondant aux soins effectués au cours de l'année considérée et qui seront liquidées les années suivantes. Ainsi, en droits constatés, les dépenses d'une année doivent refléter les consommations de soins de cette même année. La progression des dépenses revèle alors la réalité de la progression des consommations : il n'y a plus d'écart entre l'activité des professionnels et les dépenses sous objectifs comme c'est le cas dans une comptabilité en encaissements / décaissements. Les difficultés liées aux aléas de liquidation devraient également être supprimées.

Pour la première fois en 2002, le montant de l'ONDAM est donc fixé en droits constatés. A cet égard, la commission des comptes de la sécurité sociale précisait dans son rapport de septembre 2001 « dans l'attente du vote de la loi de financement, l'hypothèse retenue dans les comptes est celle d'un montant de dépenses nettes de la contribution conventionnelle de l'industrie pharmaceutique de 112,62 milliards d'euros. Ceci correspond à une augmentation de 3,8 % des dépenses par rapport à un objectif 2001 recalculé en droits constatés et rebasé en fonction des prévisions actuelles de dépenses sur l'année 2001 ».

Le montant de l'ONDAM en droits constatés est supérieur au montant calculé en encaissement / décaissement. En effet une partie des dépenses de santé de l'année sont liquidées dans les premières semaine de l'année suivante.

Compte tenu de la croissance tendancielle de la consommation de soins, l'écart constaté correspond à environ 350 millions d'euros.

L'article 32 du présent projet de loi de financement fixait initialement le montant de l'ONDAM pour 2002, en droits constatés, à 112,62 milliards d'euros, soit une progression de 3,8 % par rapport à l'ONDAM 2001 réalisé et lui-même recalculé en droits constatés.

La commission des comptes de la sécurité sociale dans son rapport de septembre 2001 avait souligné le caractère irréaliste de cet objectif : « l'hypothèse retenue en matière de dépenses d'assurance maladie est particulièrement ambitieuse. L'objectif de 3,8 % fixé pour 2002, qui inclut le financement de la réduction du temps de travail dans les hôpitaux, correspond à un objectif inférieur pour les autres dépenses. Sa réalisation supposerait un freinage considérable par rapport à la tendance moyenne des deux dernières années, supérieure à 5 %. On rappelle que les objectifs fixés pour 2000 et 2001 ont été dépassés d'environ 2,5 milliards d'euros (soit 16 à 17 milliards de francs ».

Votre rapporteur pour avis partage pleinement l'analyse fournie par la commission des comptes de la sécurité sociale.

Le chiffre initial de l'ONDAM 2002 (112,62 milliards d'euros) incluait une progression des soins de ville de 3 % par rapport aux dépenses réalisées en 2001, ce qui ferait passer l'enveloppe de 50 milliards d'euros (328 milliards de francs) à 51,5 milliards d'euros (337,8 milliards de francs).

Cet ONDAM prévoyait également une progression du budget des établissements sanitaires publics de 4,8 % en 2002 au lieu de 3,4 % en 2001. Le quart de cette progression (550 millions d'euros soit 3,6 milliards de francs) devait servir à financer la mise en oeuvre de la réduction du temps de travail dans les hôpitaux, qui entrera en vigueur le 1 er janvier 2002. Les dépenses hospitalières devront également intégrer l'abondement à hauter de 30 millions d'euros (200 millions de francs) de l'enveloppe destinée à financer l'arrivée de nouvelles molécules pour lutter contre le cancer et la polyarthrite rhumatoïde. Par ailleurs, une dotation supplémentaire de 230 millions d'euros (1,5 milliard de francs) est prévue pour l'innovation thérapeutique.

Le budget des cliniques privées augmenterait de 3,5 %. Il doit permettre, d'après le gouvernement, de financer la poursuite du plan pluriannuel de convergence des rémunérations des salariés du secteur privé et public, dans la logique de l'accord signé le 4 avril 2001 sur l'évolution des tarifs des cliniques privées. Qu'il soit cependant permis à votre rapporteur pour avis d'en douter, dans la mesure où l'objectif de création de 45.000 postes dans les hôpitaux publics d'ici trois ans, risque d'aggraver les distorsions de rémunérations entre secteur public et secteur privé.

L'évolution proposée du budget des établissements médico-sociaux a été fixée à 4,8 %. Ce taux a été calculé sur le fondement d'un ONDAM rebasé à la baisse par rapport à celui adopté par le Parlement. En effet, pour ce secteur, les dépenses en exécution ont été plus faibles que prévues. L'enveloppe pour 2002 incluera la poursuite du plan pluriannuel de création de places pour adultes lourdement handicapés avec l'inscription de 35,06 millions d'euros (230 millions de francs) ainsi que le deuxième volet du plan triennal 2001-2003 en faveur des enfants, adolescents et adultes handicapés pour un montant de 34,30 millions d'euros (225 millions de francs). Votre rapporteur pour avis doute du réalisme d'un tel objectif de progression, dans la mesure où le poids de certains contentieux, la mise en place d'un compte épargne temps et l'augmentation de l'indemnité de précarité des personnes employées sur des contrats à durée déterminée feront peser sur le secteur des charges très importantes.

L'ONDAM 2002 finalement voté à l'Assemblée nationale est supérieur à celui qui avait été fixé initialement par le gouvernement. Il s'établit désormais à 112,77 milliards d'euros, soit une augmentation de 0,15 milliard d'euros, qui se décomposent de la manière suivante :

- 0,08 milliard d'euros supplémentaires afin de prendre en compte la mise en place du nouveau régime de couverture des accidents du travail des exploitants agricoles ;

- 0,02 milliard d'euros supplémentaires afin de prendre en compte les mesures nouvelles annoncées lors de la discussion du présent projet de loi en faveur des autistes ;

- 0,05 milliard d'euros supplémentaires afin de financer la mise en place d'un examen bucco-dentaire de prévention pour les enfants de six à douze ans.

Dès lors, la croissance de l'ONDAM 2002 par rapport aux dépenses réalisées en 2001 est de 3,9 % et non plus 3,8 % comme initialement prévu par le gouvernement.

Votre rapporteur apprécie certes l'effort du gouvernement pour essayer d'ajuster son objectif de dépenses aux mesures mises en oeuvre, cependant il estime, au même titre que la commission des comptes de la sécurité sociale, que cet objectif de même nom ne correspond pas à la réalité tendancielle de la progression des dépenses d'assurance maladie. Il paraît évident, en l'état actuel des choses et en l'absence de réelle politique de maîtrise de dépenses de santé, que l'ONDAM 2002 sera dépassé, comme il l'a été tous les ans depuis 1998.

En outre, cette année le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 innove puisqu'il fixe pour la première fois , à l'article 32 bis , un objectif révisé de dépenses d'assurance maladie (un « ORDAM ») pour l'année précédente. Ainsi, pour 2001, en encaissements / décaissements, l'objectif révisé des dépenses d'assurance maladie est fixé à 710,3 milliards de francs. Ce montant intègre le soutien accordé aux établissements de santé financé par la dotation globale avec une majoration d'un milliard de francs de l'ONDAM 2001. Il s'agit bien sûr de l'ONDAM effectivement réalisé (709,2 milliards de francs) et non de l'ONDAM voté en loi de financement l'année dernière.

Comme son prédécesseur l'avait réalisé l'année dernière, votre rapporteur pour avis a souhaité dresser le tableau récapitulatif suivant, mobilisant à la fois les données du rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale datant de septembre 2001 et les données contenues dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002, ainsi que les lois de financement de la sécurité sociale antérieures.

Objectif national de dépenses d'assurance maladie

(en milliards d'euros)

1997

1998

1999

2000

2001

2002

Objectif voté

91,50

93,57

96,03

100,36

105,70

112,77

Objectif « rebasé »

-

93,50

97,54

102

108,56

115,25

Objectif révisé en PLFSS n+1

-

-

-

108,28

-

Objectif réalisé

91,39

95,07

97,58

103,1

108,11

-

Evolution votée (en %) (1)

-

+ 2,3

+ 2,6

+ 4,5

+ 5,3

+ 6,6

Evolution « rebasée » (en %) (2)

-

+ 2,4

+ 4,3

+ 5,7

+ 6,6

-

Evolution réalisée (en %) (3)

-

+ 4

+ 2,6

+ 5,66

+ 4,86

-

* Prévisions.

Source : Rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 2001 et projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002.

(1) L'évolution « votée » correspond au pourcentage de variation entre l'objectif voté de l'année n et l'objectif voté de l'année (n - 1).

(2) L'évolution « rebasée » correspond au pourcentage de variation entre l'objectif réalisé de l'année n et l'objectif rebasé de l'année (n - 1).

(3) L'évolution « réalisée » correspond au pourcentage de variation entre l'objectif réalisé de l'année n et l'objectif réalisé de l'année (n - 1).

La lecture de ce tableau montre tout à la fois la complexité des concepts et de leur utilisation, et l'absence totale de maîtrise des dépenses d'assurance maladie.Le concept le plus éloigné de la réalité - l'ONDAM voté - n'a par exemple pas cessé de dériver depuis 1998 sur un rythme toujours croissant. Il en va de même pour l'ONDAM « rebasé ». Quant à l'ONDAM réalisé, il aura augmenté de 1997 à 2001 de 16,72 milliards d'euros, soit une hausse de 18,30 % en cinq ans. Ce simple chiffre interdit au gouvernement de se targuer d'un bilan favorable en matière d'assurance maladie.

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