projet de loi de finances pour 2002 - Tome VIII : Recherche scientifique et technique

LAFFITTE (Pierre)

AVIS 88 - TOME VIII (2001-2002) - commission des affaires culturelles

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Table des matières




N° 88

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2001-2002

Annexe au procès-verbal de la séance du 22 novembre 2001

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires culturelles (1) sur le projet de loi de finances pour 2002 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME VIII

RECHERCHE SCIENTIFIQUE ET TECHNIQUE

Par M. Pierre LAFFITTE,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Jacques Valade, président ; MM. Xavier Darcos, Ambroise Dupont, Pierre Laffitte, Mme Danièle Pourtaud, MM. Ivan Renar, Philippe Richert, vice-présidents ; MM. Alain Dufaut, Philippe Nachbar, Philippe Nogrix, Jean-François Picheral, secrétaires ; MM. Jean Arthuis, François Autain, Mme Marie-Christine Blandin, MM. Louis de Broissia, Jean-Claude Carle, Jean-Louis Carrère, Gérard Collomb, Yves Dauge, Mme Annie David, MM. Fernard Demilly, Christian Demuynck, Jacques Dominati, Jean-Léonce Dupont, Louis Duvernois, Daniel Eckenspieller, Mme Françoise Férat, MM. Bernard Fournier, Jean François-Poncet, Jean-Noël Guérini, Michel Guerry, Marcel Henry, Jean-François Humbert, André Labarrère, Serge Lagauche, Robert Laufoaulu, Jacques Legendre, Serge Lepeltier, Pierre Martin, Jean-Luc Miraux, Bernard Murat, Mme Monique Papon, MM. Jack Ralite, Victor Reux, René-Pierre Signé, Michel Thiollière, Jean-Marc Todeschini, Jean-Marie Vanlerenberghe, Marcel Vidal, Henri Weber.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 3262 , 3320 à 3325 et T.A. 721

Sénat
: 86 et 87 (annexe n° 33 ) (2001-2002)


Lois de finances .

EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

Dans le budget de la France, comme dans celui de l'Europe, la recherche et la politique d'appui à l'innovation qui doit l'accompagner constituent une priorité absolue si l'on veut éviter le déclin.

C'est elle, en effet, qui nous permettra de nous préparer à une mondialisation, en partie inéluctable, qui voue les produits à faible valeur ajoutée à être élaborés ailleurs.

Or, le projet de budget pour 2002 ne traduit pas cette nécessité.

Le budget civil de recherche et développement, qui s'établit à 8,72 milliards d'euros, n'augmente qu'au même taux (2,2 %) que l'ensemble du budget de l'Etat, et celui du ministère de la recherche, que de 0,9 %, moins que l'inflation. Son poids relatif dans le produit intérieur brut diminue, même si le ministère gère le budget civil de recherche et développement et dans une certaine mesure la recherche universitaire.

Dans les comparaisons internationales, la France est en position honorable pour le nombre de chercheurs pour mille habitants, mais les données qui cernent la progression annuelle de l'emploi scientifique sur les dernières années de ce siècle lui sont, en revanche, beaucoup moins favorables, ce qui est inquiétant.

Malgré la loi sur l'innovation que la commission des affaires culturelles a beaucoup améliorée et fait adopter dès la fin de session d'été 1998/1999, nous sommes loin d'un grand élan, d'un grand dessein dont nous avons besoin et qui devrait constituer un acte politique majeur, indispensable et traversant les clivages traditionnels de notre paysage politique.

Je regrette que la recherche et l'innovation ne se manifestent pas comme une priorité nationale, et que le projet de budget ne reflète pas les ambitions affichées en mars 2000 par le Conseil européen de Lisbonne qui voulait faire de l'Union l'Economie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde.

Pour autant, les priorités définies par le ministre, et traduites dans le projet de budget ne sont pas contestables : recherche dans les sciences du vivant, technologies de l'information et de la communication, environnement... Elles correspondent d'ailleurs bien souvent à des orientations que nous prônions depuis longtemps. C'est donc une source de satisfaction.

On peut aussi se féliciter de l'effort consacré par le ministère à l'innovation et aux transferts de technologie.

La loi sur l'innovation et la recherche du 12 juillet 1999, à l'élaboration de laquelle la commission des affaires culturelles avait largement contribué par le dépôt d'une proposition de loi, a donné un choc psychologique salutaire dans la communauté scientifique.

Regrettons d'autant plus les retards pour le texte d'application, concernant les services d'activités industrielles et commerciales (SAIC). Les incubateurs publics sans structure professionnelle de valorisation sont bien démunis. Le transfert et le passage de l'idée innovante au projet d'entreprise et à son financement sont des activités professionnelles qui ne souffrent pas l'improvisation : politique de propriété industrielle, rédaction de brevets et de contrats de licence, levée de fonds, commercialisation des activités, tout ceci est de nature industrielle.

Il faut aussi saluer des initiatives comme le concours national d'aide à la création d'entreprises, l'appel à projets « incubation et capital amorçage des entreprises technologiques », ou encore la constitution du Fonds public pour le capital risque puis du Fonds de promotion pour le capital risque, dont la gestion est confiée à la Caisse des dépôts et consignations.

Il est clair, en outre, que le développement des entreprises innovantes et le renforcement de leurs investissements, phénomènes encore récents, sont dus dans une bonne mesure à l'appui qu'elles reçoivent de l'ANVAR. Or, les aides qu'apporte l'ANVAR aux entreprises prennent, le plus souvent, la forme d'avances remboursables.

Il faut, nous semble-t-il, envisager aussi d'autres formes d'interventions pour permettre à l'ANVAR de participer aussi -de façon modeste mais efficace- à la phase la plus délicate du capital risque, la phase de l'amorçage. La transformation dans certains cas d'avance remboursable, en participation au capital serait adaptée à des interventions dans des secteurs à la fois risqués et très rentables en cas de réussite.

Cette politique (concours de créations d'entreprises innovantes, incubateurs, capital amorçage) n'est pas étrangère au renforcement de l'effort de recherche des entreprises qui dépasse depuis 1995 l'effort de recherche public. Il convient donc de la renforcer et de l'adapter.

Parmi les motifs de satisfaction, il faut aussi relever la timide percée d'une fiscalité favorable avec la création, en 1998, des bons de souscription de parts de créateurs d'entreprises, qui permet à des entreprises de moins de 15 ans d'attirer des salariés en les intéressant à leur croissance. Il conviendrait d'élargir ce dispositif en mettant en place un système de stock options transparent et s'adressant à la majorité des salariés d'une entreprise, ou encore en permettant aux créateurs d'entreprises de mettre dans leur plan d'épargne en actions plus du quart des actions de leur société, bref, en promouvant une fiscalité plus flexible et plus propice aux créations d'entreprise.

D'autres aspects de la politique de recherche, telle qu'elle résulte du projet de budget, paraissent plus critiquables.

Il en va aussi, tout d'abord, de l'absence de politique massive de démocratisation de la culture scientifique et technique. C'est une grande carence. Car seule une action énergique en ce domaine permettra à l'homme du XXI e siècle de participer activement au développement durable et de ne pas céder à la tentation de l'obscurantisme, au retour en force duquel nous sommes en train d'assister.

Certes, le ministère consacre quelques crédits à des opérations, au demeurant sympathiques et positives, comme la fête de la science ou le train du génome, mais ces initiatives paraissent dérisoires rapportées aux enjeux en question.

La confiance dans un progrès maîtrisé, dans la rigueur des sciences, élargies aux sciences humaines (trop injustement délaissées), doit être encouragée par une large politique de démocratisation du savoir, fortement médiatisée et soutenue par toutes les forces vives et institutions.

La diffusion des sciences et techniques doit concerner tous les niveaux, tous les lieux publics et être accessible dans toutes les écoles, toutes les mairies, les services publics et les media.

Les nouvelles structures d'organisation qu'implique l'accès généralisé aux connaissances restent inconnues sauf de cercles restreints.

On ne peut se contenter, en ce domaine, de quelques grands organismes parisiens dont le coût de fonctionnement se compte en centaines de millions d'euros, alors que le reste du territoire, dix fois plus peuplé, obtient des crédits dix fois moindres.

Il faut donc créer d'autres centres, et utiliser d'autres méthodes qui permettent de toucher toutes les régions, et d'intéresser tous ceux qui, actifs ou retraités, ont le goût de transmettre leur enthousiasme, leur compétence et leur joie de connaître... et démontrer ainsi que seul le savoir maîtrisé permettra à l'humanité de poursuivre un progrès et d'éviter de retomber dans un obscurantisme moyenâgeux.

I. PRÉSENTATION DU BUDGET DE LA RECHERCHE POUR 2001

A. LA MISE EN PERSPECTIVE DE L'EFFORT DE RECHERCHE FRANÇAIS

1. Le contexte préoccupant d'une baisse prolongée de l'effort en faveur de la recherche française

L'effort global consacré par la France à la recherche, administrations et entreprises confondues, subit, depuis une dizaine d'années une évolution préoccupante, qui contraste avec les tendances plus favorables de la décennie précédente.

Entre 1979 et 1993 , les dépenses de recherche et développement exécutées en France ont connu une croissance plus rapide que le produit intérieur brut : alors qu'elles n'en représentaient que 1,68 % en 1978, leur poids relatif est passé à 2,40 % en 1993 .

Depuis cette date , en revanche, la proportion de la richesse nationale consacrée à l'effort public et privé de recherche n'a cessé de diminuer pour s'établir, d'après les dernières évaluations, à 2,14 % au tournant de l'an 2000 . Le ministère de la recherche fait valoir qu'une légère hausse aurait été enregistrée en 1999, mais le constat d'une nouvelle baisse en 2000 invite à ne pas en tirer de conclusions définitives : l'avenir seul indiquera s'il s'agissait d'une amélioration ponctuelle ou de l'amorce d'un retournement de tendance. Cette évolution paraît particulièrement préoccupante à votre rapporteur, qui regrette que la recherche n'ait pas davantage bénéficié des années de croissance économique que les pays industrialisés viennent de connaître. Elle lui paraît d'autant plus regrettable que nul aujourd'hui ne peut contester le rôle moteur joué par la recherche et par l'innovation dans la croissance des économies modernes.

Une analyse plus fine de l'évolution de la dépense intérieure de recherche et développement (DIRD) traduit une évolution significative de ses composantes. Cet agrégat statistique, qui mesure l'ensemble des financements consacrés à la recherche et développement sur le territoire national, quelle que soit l'origine de leur financement, comporte en effet deux composantes :

- la dépense de recherche des entreprises (DIRDE) qui représentait 43 % de l'effort national de recherche en 1982, en constitue aujourd'hui 56 % ; elle dépasse, depuis 1995, celle des administrations ; il est encourageant de constater que les entreprises ont, sur les dix dernières années, maintenu, voire accru leur activité de recherche-développement ; cette nouvelle tendance mérite d'être relevée, et encouragée, dans un pays traditionnellement marqué par une certaine faiblesse de son effort de recherche privée ;

- la dépense de recherche des administrations (DIRDA) n'a en revanche, mise à part la timide embellie de 1999, cessé de diminuer, et son poids relatif par rapport au PIB est retombé de 0,92 % en 1993 à 0,80 % en 1999 et pourrait même atteindre 0,77 % en 2000.

LE FINANCEMENT DE LA RECHERCHE
DANS LES PRINCIPAUX PAYS

Sources : OCDE/MEN-MR-DPD/C3

 

Part en % de la BIRD financée par :

Année 1999

les entreprises

l'administration

l'étranger

Etats-Unis

66,8

33,2

 

Japon

72,2

27,4

0,4

Allemagne

64,3

33,4

2,3

France

53,2

40,2

5,6

Royaume-Uni

49,4

33,0

17,6

Italie

43,9

51,1

5,0

2. La place de la recherche française dans la compétition mondiale

L'effort de recherche est un atout essentiel dans la compétition économique internationale où sont engagés les grands pays industrialisés.

Les statistiques réalisées par l'OCDE montrent en effet que les dépenses de recherche sont principalement le fait de sept pays qui, à eux seuls, représentent 86 % de la dépense intérieure de recherche et développement de l'ensemble des pays membres.

Avec une dépense évaluée, en 1999, à 29 milliards de dollars, la France se situe au quatrième rang, loin derrière les Etats-Unis (244 milliards de dollars) le Japon (95 milliards de dollars) et même l'Allemagne (48 milliards de dollars) ; elle se situe juste devant le Royaume-Uni (25 milliards de dollars) et la Chine (24 milliards de dollars).

Une récente enquête menée par le commissaire européen à la recherche Philippe Busquin, et intitulée « Key figures 2001 : towards a European Research Area » est venue corroborer en grande partie ces conclusions.

D'après la batterie d'indicateurs qu'il publie, la France, qui consacre 2,17 % de son produit national brut à la recherche, se situe au sixième rang mondial, derrière la Suède, la Finlande, le Japon, les Etats-Unis et la Grande-Bretagne.

Plus inquiétant, l'indicateur qui apprécie l'évolution de cet effort national de recherche sur les quatre ou cinq dernière années du siècle place la France en 17è et avant dernière position, juste devant le Luxembourg.

3. Le poids de l'emploi scientifique

C'est peut-être dans le domaine de l'emploi scientifique que les comparaisons mettent en évidence l'importance des moyens dont disposent certains de nos partenaires. Même si ces statistiques doivent être abordées avec quelques précautions, les Etats-Unis emploieraient plus de un million de chercheurs, le Japon de l'ordre de 600 000, l'Allemagne 240 000, la Grande-Bretagne 159 000 et la France 158 000.

Dans ce domaine encore, les indicateurs rendus publics par Philippe Busquin permettent d'affiner ces appréciations.

Un premier indicateur, qui mesure la proportion du nombre de chercheurs pour mille habitants, montre que la France se situe encore en bonne position parmi les pays industrialisés. Avec un taux de 6,14 %, elle se situe cependant loin derrière la Finlande (10,4 %), le Japon (9,26 %), la Suède (8,44 %), les Etats-Unis (8,08 %) ou le Danemark (6,46 %), mais devance cependant la Belgique (6,11 %), l'Allemagne (6,07 %) ou le Royaume-Uni (5,54 %).

Plus préoccupantes cependant sont les conclusions que l'on peut tirer de l'indicateur qui mesure la progression moyenne annuelle du nombre de chercheurs sur les dernières années du siècle : la France n'y figure qu'en quinzième position, certes devant l'Allemagne et l'Italie.

Ces chiffres devront être conservés en mémoire, lorsque l'on analysera la politique en faveur de l'emploi scientifique conduite, cette année, par le ministère de la recherche. Celle-ci ne peut prendre tout son sens que si elle correspond à un effort soutenu dans la durée.

B. LE BUDGET CIVIL DE RECHERCHE ET DÉVELOPPEMENT

1. L'évolution du budget civil de recherche et développement

Le budget civil de recherche et développement (BCRD) pour 2002 s'élève à 8 725 millions d'euros (soit 57 232 millions de francs) en dépenses ordinaires et crédits de paiements (DO + CP) soit une hausse de 2,2 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2001.

Avec un montant de 3 835 millions d'euros (soit 25 156 millions de francs) les autorisations de programmes inscrites au projet de budget 2002 connaissent une progression un peu plus soutenue, d'environ 2,9 % par rapport à la loi de finances initiales pour 2001.

Cet effort financier, comparable à celui qui a été effectué l'année dernière, n'est certes pas négligeable, mais est-il suffisant pour redonner à la recherche française la place qui est la sienne dans la recherche mondiale, et pour lui permettre d'irriguer notre économie des innovations technologiques nécessaires à son dynamisme ?

Votre rapporteur ne le pense pas et regrette qu'en dépit d'une solution positive de ses priorités, le projet de budget de la recherche pour 2002 ne soit pas à la hauteur des ambitions, exprimées lors du conseil européen de Lisbonne, de faire de l'Europe « l'économie la plus compétitive et la plus dynamique du monde ».

Il ne reconnaît pas le souffle de cette vaste ambition dans le projet de budget qui nous est proposé, alors que les données qu'il vient de citer montrent que la situation de la recherche, et en particulier de la recherche publique reste préoccupante.

2. La contribution des différents ministères au BCRD

La contribution des différents ministères est résumée dans le tableau suivant :

CONTRIBUTION DES DIFFÉRENTS MINISTÈRES AU BCRD (DO+CP)

(en millions d'euros)

 

LFI 2001

PLF 2002

Variation

Affaires étrangères

140,78

145,76

+ 3,5 %

Agriculture, pêche

21,35

21,22

- 0,6 %

Culture

113,76

116,75

2,6 %

Recherche

6 157,16

6 213,37

0,9 %

Education nationale

418,02

479,69

14,8 %

Défense

190,56

190,56

0 %

Environnement

215,88

252,20

16,8 %

Equipements et transports

320,33

342,28

6,9 %

Logement

26,43

26,98

2,1 %

Industrie

908,09

913,42

0,6 %

Divers

23,03

23,07

0,17 %

Total BCRD

8 535,39

8 725,28

2,2 %

La participation du ministère de la recherche représente 71 % de l'ensemble du BCRD mais croît moins vite que son enveloppe globale . Le poids relatif du ministère de l'industrie reste significatif, légèrement supérieur à 10 %, ainsi que celui de l'Education nationale, au titre de l'enseignement supérieur (près de 5,5 %). La contribution du ministère de l'environnement est en forte croissance, du fait de la forte progression des crédits consacrés à l'Institut de radioprotection et de sécurité nucléaire (IRSN), qui passent de 203 à 242 millions de francs en 2002 (30,95 à 36,89 millions d'euros).

L'effort de recherche duale porte pour l'essentiel sur le domaine spatial. Il est pris en compte dans le BCRD à deux titres différents :

- la contribution du ministère de la défense, qui doit s'élever en 2001 comme en 2002 à 190,56 millions d'euros (1 250 millions de francs) et qui bénéficie principalement au centre national d'études spatiales (CNES) ;

- la participation des organismes de recherche et principalement du CNES à la poursuite d'objectifs liés à la défense qui a été évalué en 2000 à 420 millions d'euros (2,75 milliards de francs).

3. Les grands domaines scientifiques couverts par le BCRD

Lors de son audition devant la commission, le ministre de la recherche a indiqué son intention de privilégier, dans le projet de budget pour 2002, trois champs disciplinaires prioritaires.

* Avec un budget, en dépenses ordinaires et autorisations de programme, de 8 779,5 millions d'euros (57 590 millions de francs) les sciences du vivant représentaient, en 2001 près du quart du BCRD. Après une progression de 5,3 % en 2001, cette enveloppe financière devrait encore augmenter de 4,6 % en 2002.

* Avec 772 millions d'euros (5 064 millions de francs) en 2001, les moyens consacrés aux recherches sur les sciences et techniques de l'information et de la communication (STIC) ont représenté 8,8 % du BCRD. Ils devraient progresser de 7,1 % en 2002 et s'élève à plus de 823 millions d'euros (5 400 milliards de francs).

* Les recherches sur l'environnement, l'énergie et le développement durable disposeront en 2002 de 1 445 millions d'euros (9 478 millions de francs) et représenteront désormais le deuxième poste de dépenses du BCRD, avec 16 % de son enveloppe globale. La progression des moyens financiers qui leur seront consacrés en 2002 est de 3,3 % par rapport à 2001.

Votre rapporteur se félicite de cette réorientation claire des priorités, qui rejoint les positions qu'il a régulièrement défendues, notamment en faveur des sciences et technologies de l'information.

Il convient cependant de ne pas oublier d'autres domaines, qui conservent un poids relatif important.

* La recherche spatiale restait en 2001 le deuxième poste de dépenses du BCRD avec une enveloppe de 1 427 millions d'euros (9 360 millions de francs).

Bénéficiant en 2002 d'une légère progression de ses crédits en valeur absolue avec 1 428,6 millions d'euros (9 371 millions de francs), elle connaît cependant une nouvelle diminution de son poids relatif, proche de 15,8 % et dispose dorénavant de moyens financiers inférieurs à ceux de la recherche environnementale.

L'essentiel de la recherche spatiale est réalisé par le centre national d'études spatiales , dont le budget est reconduit au même niveau qu'en 2001 avec 1 152,5 millions d'euros (7 560 millions de francs) (DO + CP).

* Les sciences humaines et sociales mobilisent près de 10 % du BCRD et leur budget pour 2002 est en augmentation de 4 % ; il s'établit à 870 millions d'euros (5,7 milliards de francs).

Le centre national de la recherche scientifique (CNRS) est le principal intervenant dans ce domaine et représente à lui seul 40 % de cette enveloppe globale, à côté d'un très grand nombre d'organismes de taille plus réduite.

C. LES CRÉDITS DU MINISTÈRE DE LA RECHERCHE

Le projet de budget du ministère de la recherche pour 2002 représente, avec 6 213 millions d'euros (40 754,61 millions de francs), 71 % de l'ensemble du budget civil de recherche et développement . Alors que ce dernier affiche une croissance honorable de 2,2 %, présentée non sans emphase par le ministre comme une rupture par rapport à la stagnation passée, le projet de budget pour 2002 du ministère de la recherche ne peut revendiquer qu'une croissance médiocre de 0,9 %. Cette faible progression n'est guère encourageante, particulièrement si l'on considère que le budget du ministère constitue le coeur de notre effort de recherche . Il est en effet consacré pour l'essentiel au financement des organismes de recherche, alors que le BCRD, dont il ne s'agit pas de contester ici la pertinence globale, ne dispose pas nécessairement d'un périmètre aussi défini.

Le « bleu » du ministère de la recherche distingue, au sein de son budget, deux agrégats :

- un agrégat correspondant aux interventions directes du ministère qui s'élèvent à 557 millions d'euros (3 653,68 millions de francs), en hausse de 1,8 % par rapport à 2001 et qui représentent 9 % des crédits du ministère ;

- un agrégat regroupant les crédits des organismes de recherche qui s'élèvent à 5 656 millions d'euros (37,1 milliards de francs), en hausse de 0,8 % et qui représentent 91 % des crédits du ministère.

1. Les interventions directes du ministère

a) Les moyens de fonctionnement des services : un poids marginal

Les moyens de fonctionnement des services du ministère n'occupent, dans cet agrégat, qu'une place marginale. Avec 8,5 millions d'euros (55,76 millions de francs), en progression de 1,9 % par rapport à 2001, ils ne représentent qu'à peine 0,14 % du budget du ministère, répartis à raison de :

- 7,8 millions d'euros (51,16 millions de francs) pour les services centraux ;

- 0,68 millions d'euros (4,46 millions de francs) pour les délégations régionales à la recherche et à la technologie.

Il convient d'y ajouter les crédits du comité national d'évaluation de la recherche reconduit à hauteur de 0,68 millions d'euros (4,46 millions de francs) en 2002.

La faiblesse de ces dépenses s'explique en partie par le fait que les crédits de personnel du ministère de la recherche demeurent inscrits au fascicule « enseignement scolaire ».

Il s'élèvent dans le projet de budget pour 2002 à 12,3 millions d'euros (80,68 millions de francs).

Les mesures d'économie et de transferts au profit de l'enseignement supérieur ont entraîné de nombreuses suppressions d'emplois entre 1996 et 2000. Le projet de loi de finances pour 2001, qui comportait la création de 30 emplois dans les services centraux a porté leurs effectifs à 3 500 ; la création de 31 emplois nouveaux est prévue dans le projet de budget pour 2002.

Dotées de 79 emplois, les 26 délégations régionales à la recherche et à la technologie -il en existe une par région, et une dans chaque département d'outre-mer-, travaillent en collaboration avec les services extérieurs des différents ministères concernés, et en particulier avec les directions régionales du ministère de l'industrie auxquels ils sont rattachés. Ils sont également, depuis le 10 janvier 2001, conseillers auprès des recteurs d'académie.

Ils remplissent une mission essentielle, puisqu'ils sont chargés de coordonner l'action des établissements publics et des organismes du ministère de la recherche, de développer des actions en faveur de l'innovation dans l'entreprise et d'encourager la diffusion de la culture et de l'information scientifique.

b) Le soutien à la formation : une légère reprise

Les crédits consacrés à la formation à la recherche, et à la formation par la recherche sont regroupés sur le chapitre 43-80. Ils s'élèvent dans le projet de loi pour 2002 à 255 millions d'euros (1 672,69 millions de francs), et connaissent une progression de 3,6 %, après la baisse de 7,4 % qu'ils avaient enregistrée en 2001.

Ces crédits ont vocation à financer tout un ensemble de mesures :

* Les allocations de recherche sont attribués sous forme de contrat à durée déterminée à des étudiants titulaires d'un diplôme d'études approfondies (DEA) qui préparent une thèse. L'effort engagé par le ministère a d'abord porté sur l'augmentation du nombre des allocataires, et le flux annuel des allocataires est ainsi passé de 3 600 en 1996 à 4000 en 2001. Il sera maintenu à ce niveau en 2002, avec un stock global de 12 000 allocations. Le montant de ces allocations maintenu à 1 128,12 euros (7 400 F) pendant de nombreuses années, fera, en 2002, l'objet d'une première revalorisation, qui le fera passer à 1 190,17 euros (7 807 F). Cette mesure, qui représente 14,56 millions d'euros (95,54 millions de francs) fera passer le montant de l'enveloppe consacrée à ces allocations à 215,65 millions d'euros (1 414 millions de francs).

Une proportion appréciable de ces nouveaux allocataires de recherche -67 % en 2001 bénéficient, en outre, d'une rémunération de moniteur d'un montant de 335,39 euros (2 200 F) par mois, en contrepartie d'un service d'enseignement de 64 heures par an.

* Les bourses d'information scientifiques et techniques (BIST) d'un montant de 329 euros (2 160 F) sont attribuées aux allocataires de recherche de deuxième année. Le nombre des bénéficiaires devrait passer de 3 750 en 2001 à 3 900 en 2001.

* Les conventions de recherche pour les techniciens supérieurs (CORTECHS) permettent d'assister les PME-PMI dans le recrutement, pour un an, d'un jeune technicien supérieur auquel elles confient un projet de développement technologique. Le projet de budget devrait permettre, comme en 2001, d'en financer 400, dotées d'une enveloppe unitaire de 13 000 euros (85 274 F).

* Les diplômes de recherche technologique (DRT ) sont des diplômes nationaux de troisième cycle, qui visent à favoriser la formation et le recrutement dans les PME de jeunes ingénieurs-maîtres ou ingénieurs. Les subventions accordées à l'entreprise, d'un montant de 11 000 euros (72 155 F) couvrent 50 % du salaire, et des charges. Leur nombre passera de 60 à 70 en 2002.

* La procédure des post-doctorants (POST-DOC) permet à des PME ou à des établissements publics industriels et commerciaux de recruter pour un an un jeune docteur qui mènera un projet de recherche soutenu par un laboratoire public. Le nombre de leurs bénéficiaires sera porté, en 2002, de 205 à 250 pour un coût unitaire maintenu à 27 000 euros (177 108 F).

* Les stages de longue durée sont destinés à favoriser l'accès des étudiants vers les PME-PMI. Au nombre de 400, comme en 2001, ils bénéficieront d'un appui financier de 4 573 euros (30 000 F).

* Les conventions industrielles de formation par la recherche (CIFRE) s'adressent à de jeunes diplômés désireux d'entreprendre un doctorat dans le cadre d'une entreprise. Le nombre de ses bénéficiaires, -800-, et son coût unitaire -14 635 euros (96 000 F)- restent constants en 2002.

c) La montée en puissance progressive du Fonds national de la science

Le Fonds national de la science a été institué par la loi de finances pour 1999, afin de renforcer les moyens d'incitation du ministère en faveur de la recherche fondamentale. Il est à la fois un instrument de financement et un instrument de coordination , qui permet de faire collaborer différents laboratoires sur des secteurs jugés prioritaires. Il est destiné à des organismes publics et à des organismes privés sans but lucratif.

Il intervient ordinairement dans le cadre des actions concertées incitatives (ACI). Celles-ci doivent permettre le développement de travaux pour lesquels l'appareil de recherche public n'est pas suffisamment adapté.

Les crédits de paiement du Fonds national de la science poursuivent en 2001 leur progression. Après la hausse de 27 % qu'ils ont enregistrée en 2001, ils connaissent encore une croissance de 4,5 % dans le projet de budget pour 2002 et s'établissent à 114 millions d'euros (750 millions de francs). Les autorisations de programme connaissent une progression encore plus forte, d'environ 13 % qui leur fait atteindre le seuil symbolique du milliard de francs (152,5 millions d'euros).

En 2000, lors de sa seconde année de fonctionnement, ses crédits ont été attribués :

- à des établissements d'enseignement supérieur pour des unités mixtes Université-CNRS (30 %) ;

- aux établissements de recherche (37 %) et principalement aux établissements publics scientifiques et techniques ;

- à des groupements d'intérêt public constitués dans le domaine de la génomique (27 %) ;

- à des institutions privées, comme les instituts Pasteur de Paris et de Lille (4 %).

En termes de programmes scientifiques , près de la moitié des financements -50 millions d'euros, 330 millions de francs ont été alloués au programme « Génomique ». D'autres actions concertées incitatives ont porté sur les recherches menées sur les agents infectieux (12,2 millions d'euros ; 80 millions de francs). Enfin, 9,15 millions d'euros (60 millions de francs) ont été accordés à des équipes de recherche afin de concourir au développement des champs disciplinaires nouveaux, associant sciences humaines et sciences exactes.

Votre rapporteur tient à souligner l'intérêt crucial qui s'attache, aujourd'hui, à ce type de recherches . Il est incontestable que les nouvelles technologies vont entraîner dans tous les domaines de la vie économique et sociale des mutations d'envergure dont nous ne pouvons encore prendre la mesure.

L'effort qui a été consacré au développement de ces technologies dont l'intérêt n'est plus contesté aujourd'hui par personne doit maintenant être relayé par un effort portant sur les utilisations de ces technologies .

Certes, un certain nombre de projets ont déjà été lancés, en ce domaine, par le ministère : une ACI « Cognitique » développe la collaboration entre les neuro-sciences, l'informatique et la psychologie, pour rattraper le retard pris par la recherche française dans le domaine des sciences de la cognition ; une ACI « villes » associe les sciences humaines et sociales, l'urbanisme, et les transports. Mais ces actions sont encore insuffisamment nombreuses, et il est indispensable d'accentuer les efforts en ce domaine. Les crédits consacrés à ce type de recherche, qui s'élevaient à 9,63 millions d'euros (63,17 millions de francs) en 2000 devraient atteindre 11,13 millions d'euros (73 millions de francs) en 2001. La programmation pour 2002 ne sera arrêtée qu'en début d'exercice.

d) La stabilisation des crédits du Fonds de la recherche technologique

Le Fonds de la recherche technologique (FRT) est un instrument financier au service du partenariat entre recherche publique et recherche privée. Il a en effet pour objet de permettre un transfert technologique des organismes de recherche publique vers le monde économique. A ce titre, il privilégie le développement de produits et de services reposant sur les nouvelles technologies.

Les crédits du Fonds de la recherche technologique s'élèvent dans le projet de budget pour 2002 à 104,4 millions d'euros (685 millions de francs), en hausse de 0,9 %, alors que les autorisations de programme sont reconduits au même niveau qu'en 2001 à hauteur de 152,45 millions d'euros (1 milliard de francs).

Les moyens du FRT privilégient les sciences du vivant, les technologies de l'information et le soutien direct à la création et au développement de jeunes entreprises innovantes.

• Le montant des crédits consacrés aux technologies liées aux sciences du vivant sont passés de 18,45 millions d'euros (121 millions de francs) en 1999 à 38,11 millions d'euros (250 millions de francs) en 2000, et à 38,11 millions d'euros (250 millions de francs) en 2001. Ils seront reconduits à ce niveau en 2002.

Dans ce domaine, le fonds de la recherche technologique intervient en complément du Fonds national de la science mais en privilégiant les projets de recherche orientés vers la demande sociale et les technologies applicables.

• Les financements consacrés au développement des nouvelles technologies de l'information et de la communication (NTIC) devraient passer de 27,44 millions d'euros (180 millions de francs) en 2000, à 38,11 millions d'euros (250 millions de francs) en 2001 ; ils sont accordés principalement :

- via le Réseau national de recherche en télécommunications (RNRT) qui regroupe les laboratoires publics, les industriels, et les opérateurs du secteur, en vue de développer les projets relatifs à l'internet haut débit, aux téléphones mobiles multimédia et aux installations de satellites ; 12,96 millions d'euros (85 millions de francs) ont été consacrés à ces actions en 2001 ;

- via le Réseau national de recherche et d'innovation en technologies logicielles (RNTL) qui lance des appels à projets dans le domaine des technologies de l'information et de la communication, et notamment dans le domaine des logiciels ; 12,96 millions d'euros (85 millions de francs) lui ont été consacrés en 2001 ;

- via le Réseau des nano et micro technologies (RMNT) dont une partie des 9,15 millions d'euros (60 millions de francs) est consacrée aux NTIC ;

- via le Réseau national « audiovisuel et multimédia » qui a été créé en 2001 et a été doté de 3,05 millions d'euros (20 millions de francs) ;

• Parmi les autres secteurs qui bénéficient de l'appui du FRT, on mentionnera notamment :

- le programme de recherche et de développement pour l'innovation technologique dans les transports (PREDIT) qui a reçu, en 2000, 3,81 millions d'euros (25 millions de francs) et devait recevoir 6,86 millions d'euros (45 millions de francs) en 2002 ;

- le réseau de recherche sur la pile à combustible (3,81 millions d'euros ; 25 millions de francs en 2001) ;

- le nouveau réseau « matériaux et procédés » (4,57 millions d'euros ; 30 millions de francs) ;

- le réseau de recherche génie civil et urbain (1,52 million d'euros ; 10 millions de francs) ;

- le réseau « eau et environnement » (2,29 millions d'euros ; 15 millions de francs) ;

- le réseau « pollutions accidentelles » (2,29 millions d'euros ; 15 millions de francs) ;

- le réseau « supersonique » (2,29 millions d'euros ; 15 millions de francs) ;

- le réseau terre-espace (4,57 millions d'euros ; 30 millions de francs) ;

- le financement de projets transnationaux retenus dans le cadre de la procédure européenne Eurêka (6,86 millions d'euros ; 45 millions de francs).

• Les deux procédures mises en oeuvre en 1999 sur le FRT pour soutenir directement la création et le développement d'entreprises innovantes seront poursuivies en 2002 :

- le concours national d'entreprises innovantes sera de nouveau doté de 30,5 millions d'euros (200 millions de francs) dont 12,20 millions d'euros (80 millions de francs) en provenance de l'ANVAR et du Fonds social européen.

- les engagements financiers sur les incubateurs seront, comme en 2001, maintenus au niveau de 1,52 million d'euros (10 millions de francs) en complément des financements dédiés à cette opération en 1999 et 2000 (24,70 millions d'euros ; 162 millions de francs) qui ont permis, sur trois ans, la mise en place de 31 incubateurs régionaux.

• La réorientation dans la répartition des crédits entre ses principaux bénéficiaires s'est poursuivie en 2000. La part des subventions allouées aux grands groupes, qui représentait 70 % de l'ensemble en 1996 n'en représentait plus que 21 % en 1999, pourcentage ramené à 8 % en 2000. Cette diminution s'est faite principalement au bénéfice des PME , qui ont perçu en 2000 près de la moitié des aides versées par le fonds, et des établissements d'enseignement supérieur et de recherche qui en ont perçu près de 35 %. Le commissariat à l'énergie atomique, le centre national de la recherche scientifique et l'institut national de recherche en informatique et en automatique en ont été les principaux bénéficiaires.

Cette réorientation de l'aide vers les PME innovantes joue un rôle favorable qui rencontre le plein soutien de votre rapporteur. Mais celui-ci déplore le caractère excessivement centralisateur des procédures d'octroi et de suivi des aides des fonds , source de difficulté de gestion dont le rapport de la Cour des comptes s'est fait l'écho.

La Cour des comptes relève que la répartition des crédits entre les différents programmes et le lancement des appels d'offres s'effectuent en début d'année, mais que plus des deux tiers des décisions d'attribution d'aide sont prises dans les trois derniers mois de l'année. « Ce calendrier tendu, ajouté au rattrapage des crédits de paiement intervenu dans les dernières lois de finances, explique que l'on soit passé d'une situation de dette du FRT envers ses attributaires, à une situation de reports de crédits en fin de gestion. Les crédits de paiement non consommés atteignent 59 millions d'euros (387 millions de francs) fin 1999, soit une hausse de 190 % et les autorisations de programme 16 millions d'euros (105 millions de francs), soit deux fois plus qu'en 1998 ».

2. Les organismes de recherche

Les moyens financiers consacrés par le projet de budget pour 2002 du ministère de la recherche aux organismes de recherche s'élèvent à 5 656 millions d'euros (37,1 milliards de francs) en crédits de paiements, en hausse de 0,8 % par rapport à 2001, et à 1 960 millions d'euros (1,28 milliard de francs) en autorisation de programmes, en hausse de 1,9 %.

Ces moyens financiers couvrent à la fois les dépenses de personnel, de soutien de base aux unités de recherche, et les crédits d'investissement destinés aux équipements moyens et lourds des laboratoires.

Ces organismes de recherche, variés par leur champ d'intervention et par leur dimension, sont traditionnellement répartis en trois grandes catégories, en fonction de leur statut juridique :

* Les 9 établissements publics à caractère scientifique et technologique (EPCST) bénéficieront en 2002 de 3,5 milliards d'euros (23 milliards de francs) de crédits de paiement, en hausse de 1,4 %.

Le centre national de la recherche scientifique (CNRS) qui exerce son activité dans tous les champs de la connaissance, et compte 1200 unités de recherche est à lui seul doté d'un budget de 2,17 milliards d'euros (14,23 milliards de francs) qui représente 60 % de l'ensemble.

Avec des budgets respectifs d'environ 550 et 450 millions d'euros (3,6 et 2,95 milliards de francs), l'Institut national de la recherche agronomique (INRA) et l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) pèsent également d'un poids relatif très significatif.

Pour être dotés d'enveloppes financières plus modestes, l'Institut de recherche pour le développement (IRD), l'Institut de la recherche en informatique et en automatique (INRIA), le Centre national du machinisme agricole, du génie rural, des eaux et forêts (CEMAGREF), le Laboratoire central des points et chaussées (LCPC), l'Institut national de recherche sur les transports et leur sécurité (INRETS) et l'Institut national d'études démographiques (INED) n'en jouent pas moins un rôle essentiel ;

* Les 6 établissements publics à caractère industriel et commercial (EPIC) auxquels s'ajoute un groupement d'intérêt public, bénéficieront en 2002 de 2 milliards d'euros (13,12 milliards de francs), en diminution de 0,2 %.

Les crédits destinés au centre national d'études spatiales (CNES) -1,15 milliard d'euros (7,54 milliards de francs)- représentent plus de 57 % de l'ensemble et couvrent à la fois la réalisation des programmes nationaux et la participation aux programmes de l'Agence spatiale européenne.

Avec près de 500 millions d'euros (3,28 milliards de francs), le Commissariat à l'énergie atomique (CEA) représente près du quart de cette enveloppe globale.

L'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME), le centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD), l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (IFREMER), le bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) et le groupement d'intérêt public qu'est l'Institut français pour la recherche et la technologie reçoivent des dotations plus modestes.

• Une enveloppe de 110 millions d'euros (721 millions de francs) est destinée à plusieurs fondations et organismes privés : instituts Pasteur, Institut Curie, ...

Les enveloppes financières globales consacrées à ces différentes catégories d'organismes connaissent, dans le projet de budget pour 2002, une assez grande stabilité. Une analyse plus poussée fait cependant apparaître un traitement différencié tant en matière de créations d'emplois que d'attribution de crédits qui traduisent des priorités assez fortement marquées.

a) Les créations d'emplois

Le projet de loi de finances pour 2001 avait créé 305 emplois , dont 265 dans les établissements publics scientifiques et technologiques. Ces créations d'emplois avaient été principalement attribuées à l'Institut national de la recherche en informatique et en automatique (INRIA) qui avait bénéficié à lui seul de 116 créations de postes, ainsi qu'à l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) pour 74 postes, ainsi qu'au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) pour 70 postes.

Le projet de budget pour 2002 accentue cet effort et prévoit la création de 500 emplois , dont 463 dans les établissements publics scientifiques et technologiques.

Ces créations d'emplois se répartissent entre :

- 100 emplois de chercheurs ;

- 163 emplois d'ingénieurs et techniciens auxquels s'ajoutent 200 emplois gagés sur les ressources propres des établissements.

Ces créations d'emplois présentent l'avantage d'être très volontairement ciblées sur les organismes qui correspondent aux priorités sectorielles du ministère et de récompenser des établissements qui ont fait la preuve de leur efficacité .

Elles bénéficient en effet principalement :

- à l'Institut national de la recherche en informatique et en automatique (INRIA) : 110 postes ;

- à l'Institut national de la recherche agronomique (INRA) : 100 postes ;

- à l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) : 80 postes.


 

Emplois de chercheurs

Emplois d'ingénieurs, techniciens et administratifs

Emplois gagés

INRIA

50

50

10

CNRS

20

35

85

INSERM

15

25

40

INRA

11

41

48

IRD

2

8

10

INRETS

2

2

3

CEMAGREF

-

2

2

INED

 
 

2

TOTAL

100

163

200

Le coût global de ces créations d'emplois n'est pas excessif au regard de l'importance stratégique des secteurs dont elle renforcera le potentiel de recherche un peu moins de 5 millions d'euros (32,8 millions de francs). L'étude du commissaire européen Philippe Busavin, citée précédemment, montre que la France a pris du retard en terme de nombre de chercheurs par habitant, même s'il est vrai que cette constatation reflète un moindre financement de la recherche par le secteur privé, conséquence de la lourdeur des prélèvements fiscaux et sociaux.

Il faut y ajouter 3,4 millions d'euros (22,30 millions de francs) de mesures catégorielles et de transformations d'emplois, destinées à améliorer les perspectives de carrière et à requalifier des emplois, ainsi qu'une mesure nouvelle de 5,5 millions d'euros (36,08 millions de francs) pour l'abondement des crédits indemnitaires des personnels ingénieurs, techniciens et administratifs.

b) Les dotations financières des organismes de recherche

L'évolution des moyens de paiement et des autorisations de programme des établissements publics industriels et commerciaux est retracée dans les tableaux suivants :

EVOLUTION DES MOYENS DE PAIEMENT DES ÉTABLISSEMENTS SCIENTIFIQUES ET TECHNIQUES (EPST)

 

DO LFI
2000

DO PLF
2002


En %

LP PLF 2001

CP PLF 2002


En %

DO + CP 2001

DO + CP 2002


En %

INRETS

28,1

28,8

+2,3

7,33

6,76

8,4

34,8

35,5

2,1

LCPC

34,8

34,7

-0,3

7,4

7,1

-4,3

42,3

41,8

-1

CNRS

1 743

1 760

+1

411

412

+0,2

2 153

2 172

+0,9

INRA

453

466

+2,7

96,4

87,2

-9,5

550

553

+0,5

CEMAGREF

34,5

35,4

+2,6

5,97

5,90

-1,1

40,5

41,3

1,9

INRIA

59,4

66,3

+ 11,6

28,1

30,6

+8,5

87,6

96,9

+10,7

IRD

135,5

136

+0,4

29,4

30,3

+3,4

165

166,3

0,8

INSERM

316

326

+3,1

113,9

119,4

+5,3

430

445,6

+3,6

INED

10

10,3

+2,5

3,9

4

3

13,9

14,3

2,6

(en millions d'euros)

EVOLUTION DES AUTORISATIONS DE PROGRAMME DES EPST

 

AP LFI 2001

AP PLF 2002

Evolution en  %

INRETS

6,7

7,3

+9

LCPC

7,4

7,9

+6

CNRS

427

457

+7

INRA

100,3

96,9

-3,4

CEMAGREF

6,15

6,61

+7,4

INRIA

29

37,6

+30

IRD

29,8

31,3

+5

INSERM

116,7

124,7

+6,8

INED

3,98

4,1

+3

(en millions d'euros)

Ces chiffres appellent un certain nombre de remarques.

Comme en 2001, la volonté affichée du gouvernement de procéder à un « renforcement très significatif des moyens des laboratoires publics de recherche » se traduit par une progression plus importante des autorisations de programme que des crédits de paiement . Votre rapporteur avait déjà souligné, l'année dernière, que cette volonté devrait être confirmée par les projets de budgets des prochains exercices, qui devront inscrire les crédits de paiement nécessaires à la réalisation de ces autorisations de programme. L'analyse du projet de budget pour 2002 montre cependant que ce rattrapage des crédits de paiement tarde dans la plupart des cas à se concrétiser.

Dans ces conditions, votre rapporteur met en garde le gouvernement contre le risque d'une nouvelle inflation des autorisations de programme « dormantes » déjà dénoncée, dans le passé par la Cour des comptes. Dans le rapport que celle-ci a rendu en juin 2000 sur l'exécution du projet de loi de finances pour 1999, elle avait salué l'effort d'apurement accompli par le ministère, pour un montant de près de 144,83 millions d'euros (950 millions de francs) qui ont été annulés. Elle avait cependant estimé qu'il restait des stocks importants d'autorisations de programme à l'INSERM, au CNRS et à l'INRA.

En revanche, l'examen détaillé des crédits montre effectivement un traitement différencié des établissements et des priorités marquées :

- la progression de 10,7 % des moyens de paiement et de 30 % des autorisations de programme de l'INRIA traduit une priorité très opportune en faveur des sciences et technologies de l'information ;

- la priorité en faveur des sciences du vivant
conduit à privilégier l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) dont les crédits de paiement progressent de 5,3 % et les autorisations de programme de 6,8 %.

- le centre national du machinisme agricole, du génie rural, des eaux et forêts (CEMAGREF) bénéficie d'une augmentation de 7,4 % de ses autorisations de programme, alors que ses crédits de paiement diminuent de 1 %.

EVOLUTION DES MOYENS DE PAIEMENT DES EPIC
(en millions d'euros)

 

DO LFI 2001

DO PLF 2002


%

CP LFI 2001

CP PLF 2002


%

DO+CP 2001

DO+CP 2002


%

IFRTP

10,9

11,1

+1,8

5

5,3

5,3

16

16,5

+3,1

BRGM

19,3

19,3

-

14

14,9

1,3

52,4

52,6

+ 0,4

CIRAD

89,8

91,6

+2

23,8

24,4

2,5

113,6

116

+2,2

CEA

449

442,4

-1,5

62,5

57,1

-8,6

511

499

-2,3

CNES

139,5

139,5

-

1 013

1 013

-

1 152,5

1 152,5

-

IFREMER

80,2

81,5

+1,5

66

70

+6

146,5

151,7

+3,6

ADEME

7,6

7,7

+1

20

19

-3,5

27,3

26,6

-2,5

EVOLUTION DES AUTORISATIONS DE PROGRAMME DES EPIC
(en millions d'euros)

 

AP LFI 2001

AP PLF 2002

Variation en %

IFRT

5,26

5,36

+1,9

BRGM

14,9

14,9

-

CIRAD

24

24,4

+1,6

CEA

62,5

57,1

-8,6

CNES

640

675

+5,6

IFREMER

72,5

68,9

-5

ADEME

19,6

19,6

-

II. QUELLES ORIENTATIONS POUR LA POLITIQUE DE RECHERCHE ?

A. POUR UNE NOUVELLE APPROCHE DES TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION ET DE LA COMMUNICATION

Depuis plusieurs années, le Sénat a insisté sur le caractère fondamental pour notre pays de la recherche sur les nouvelles technologies de l'information et de la communication, qui doivent lui permettre d'entrer dans la société de l'information. Aussi peut-on se féliciter de voir le gouvernement se rallier à cette analyse, et la compter au nombre de ses priorités. Il apparaît toutefois utile, dorénavant, de ne plus se focaliser exclusivement sur ces recherches proprement dites, mais de développer une approche plus transversale sur les conséquences qu'auront les applications de ces technologies.

1. Une priorité régulièrement défendue par le Sénat

Depuis longtemps déjà, les travaux du Sénat et de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques insistent sur le fait que, dans les années à venir, la croissance économique de la France dépendra du succès de son entrée dans la société de l'information. Il ne s'agit pas, bien entendu, d'affirmer que ce domaine est le seul à mériter un effort de recherche : les recherches dans le domaine des biotechnologies, de la santé, de l'environnement et de l'énergie, qui figurent également parmi les priorités affichées par le ministère sont importantes et à juste titre distinguées. Mais le secteur de l'informatique et de la communication, par son caractère transversal, recouvre tous les autres et les progrès y sont à la fois fulgurants et déterminants pour l'avenir.

C'est pourquoi, il importe que notre pays ne soit pas réduit au statut de consommateur de nouvelles technologies, mais qu'il participe, en tant qu'acteur, à la croissance industrielle qui découlera de la société de l'information.

Votre rapporteur insiste depuis longtemps sur le fait que la maîtrise de ces technologies constitue désormais un enjeu stratégique majeur. Elle déterminera, en effet, pour une large part la compétitivité des économies, la qualité des réseaux de communication, l'efficacité administrative et donc l'attractivité du territoire national pour les investisseurs étrangers. Il s'agit donc de déjouer un risque de sujétion non seulement économique mais également scientifique et culturelle.

Il a toujours insisté sur le potentiel que représente ce secteur comme moteur de la croissance et source de création d'emplois.

Aussi s'était-il félicité en particulier de l'adoption, par le conseil européen qui s'est tenu à Lisbonne les 23 et 24 mars 2000, d'une déclaration qui fixe à l'Union l'ambition de devenir l'économie de la connaissance la plus compétitive, et incite à ce titre à promouvoir le développement des technologies de l'information et des réseaux de télécommunications les plus modernes.

2. Une priorité transcrite dans le projet de budget pour 2002

Le conseil interministériel pour la société de l'information qui s'est tenu le 10 juillet 2000 a reconnu le caractère stratégique des sciences et technologies de l'information, et a décidé un effort important pour favoriser la recherche en ce domaine. Il a annoncé, en particulier, son intention d'augmenter de 25 % en cinq ans les effectifs de la recherche publique qui leur sont consacrés, et sa décision d'augmenter de 50 % dès 2001 les crédits que leur consacre le fonds national de la science et le fonds de recherche technologique.

Certaines de ces annonces trouvent une traduction dans le projet de budget pour 2002.

a) Le renforcement des moyens et des effectifs de l'INRIA

L'institut national de recherche en informatique et en automatique (INRIA) est au coeur du dispositif de recherche publique français dans le domaine des nouvelles technologies de l'information et de la communication. Il a pris, au sein de la communauté internationale une place de choix : son excellence scientifique, son rayonnement et le dynamisme de sa politique de transfert de technologies sont unanimement reconnus et appréciés.

Disposant en 2001 de 882 emplois budgétaires, dont 406 postes de chercheurs, l'INRIA accueille dans ses unités environ 2 400 personnes grâce à une politique active de partenariat développée avec de nombreux organismes de recherche, en France et à l'étranger.

La recherche est organisée en groupes de petite taille, appelés « projets de recherche », qui présentent une forte unité thématique et disposent d'une grande autonomie. Ces projets sont évalués tous les quatre ans, et leur rythme de renouvellement est très élevé. Il en résulte un renouvellement des responsables de projets de recherche qui favorise l'autonomie des jeunes chercheurs. Plus de la moitié de ces projets sont communs avec d'autres établissements.

La stratégie de développement de l'INRIA repose sur trois convictions fondamentales :

1) « le cercle vertueux » qui relie la recherche de base et les applications impose de raccourcir les délais de transferts de technologie ;

2) il existe des synergies très profondes entre l'informatique, les mathématiques appliquées et les autres sciences (sciences physiques, sciences du vivant, sciences économiques et sociales) ;

3) les partenariats et les échanges, au niveau national et international, sont d'une importance capitale.

Le contrat quadriennal passé entre l'Etat et l'INRIA, signé le 18 juillet dernier, formalise leurs engagements respectifs pour la période 2000-2003. Il prévoit que les effectifs de l'INRIA seront portés de 755 à 1 180 personnes d'ici 2003, et que les crédits accordés à l'Institut lui permettront d'accompagner l'augmentation de ses effectifs.

En contrepartie de l'effort consenti par l'Etat, l'INRIA s'est engagé à réaliser cinq objectifs définis avec précision :

• Contribuer au meilleur niveau mondial à la résolution des grands défis scientifiques dans le domaine des sciences et technologies de l'information et de la communication, mais également dans les secteurs où il joue un rôle clé, comme les sciences du vivant, avec la bio informatique ;

• Obtenir des succès de renom international en matière de transfert technologique , que ce soit par la valorisation des résultats de recherche en milieu industriel, par la création de sociétés de technologie, ou par la diffusion de logiciels, en renforçant notamment ses partenariats avec le monde industriel, son implication dans les incubateurs et les fonds d'amorçage, ou dans les centres nationaux de recherche technologique (CNRT) proches de ses thématiques de recherche, récemment créés ;

• Amplifier son effet d'entraînement et renforcer notablement ses partenariats pour favoriser la réussite de l'ensemble du dispositif national de recherche et d'enseignement supérieur dans le domaine des sciences et technologies de l'information et de la communication ; doubler ses partenariats au sein de projets communs de recherche, tripler le nombre de ses projets de recherche localisés en dehors de ses unités de recherche ;

• Accroître son rayonnement international et contribuer à renforcer la communauté scientifique européenne dans le domaine des sciences ;

• Mettre en place une politique de ressources humaines dynamique , améliorer le fonctionnement interne de l'Institut et renforcer son attractivité.

L'INRIA développe en outre une politique de transferts vers l'industrie particulièrement active. Ceux-ci peuvent prendre quatre formes principales :

- des associations avec des partenaires régionaux , en particulier des entreprises de technologie -principalement des PME- permettant d'échanger des informations, de détecter en amont et d'approfondir les besoins en recherche des entreprises et de leur offrir des services ;

- des coopérations bilatérales et ponctuelles sous forme de contrats de recherche ou d'expertise , parfois intégrés dans des accords de partenariat définissant sur une base pluriannuelle les relations avec les grands groupes ;

- des « actions de développement » , opérations finalisées à coût partagé constituées pour trois à cinq ans en association avec des grands acteurs ou usagers des STIC ; parmi celles-ci, la plus visible au plan international est le pilotage par l'INRIA, aux côtés du MIT aux Etats-Unis et de l'université Keio au Japon, du consortium W3C qui regroupe plus de 500 organisations dans le monde et a pour but, en développant des spécifications ou des logiciels de référence, de préserver l'interopérabilité des produits et des services du web ;

- l'essaimage : plus de 50 sociétés de technologie, rassemblant au total près de 1 500 salariés, ont été créées à partir de l'INRIA ; l'Institut s'est doté en 1998 d'une filiale, INRIA-Transfert, dont la vocation est de favoriser, notamment sur le plan du financement initial (fonds d'amorçage), la création d'entreprises à fort contenu technologique dans le secteur des STIC.

b) Le rôle joué par les réseaux de recherche et d'innovation technologique

Les réseaux de recherche et d'innovation technologiques (RRIT) en technologies de l'information et de la communication sont un instrument essentiel des actions menées par le ministère de la recherche en ce domaine.

Quatre réseaux portant sur les technologies de l'information et de la communication ont été mis en place :

• Le réseau national de recherche en télécommunications (RNRT) a été créé en 1998 et a lancé en 2001 son cinquième appel à proposition. Les orientations prioritaires qui lui sont fixées pour 2001 portent autour de la notion d'environnement privé. Son budget prévisionnel qui s'est élevé à 12,96 millions d'euros (85 millions de francs) contre (8,74 millions d'euros) 57,3 millions de francs attribués en 2000 a été entièrement affecté. L'analyse des aides 2000 montre que 32 % des fonds ont été attribués à des laboratoires publics, 35 % à de grands groupes et 33 % à des PME dont la part est en forte augmentation ;

Le réseau micro et nano-technologies (RMNT) a été créé en 1999 et sa logistique est assurée par le CEA-LETI. Aucun thème particulier n'est mis en position prioritaire, parmi les domaines couverts par le réseau, mais l'analyse des projets en cours montre que les secteurs privilégiés sont la micro-électronique, l'optoélectronique et les microcomposants.

• Le réseau national en technologies du logiciel (RNTL) a été lancé en 2000 et son deuxième appel à proposition en 2001 a mis l'accent sur la recherche sur les logiciels libres. Son budget qui est passé de 10,2 millions d'euros (67 millions de francs) en 2000 à 12,96 millions d'euros (85 millions de francs) en 2001, est totalement affecté. L'analyse des financements montre une répartition de 45 % pour les laboratoires publics et de 55 % pour les industriels.

• Le réseau de recherche et d'innovation sur l'audiovisuel et le multimédia ( RIAM) a été créé le 21 février 2001 pour amener une composante « contenu » et « création » dans le dispositif global.

3. La nécessité d'une réflexion sur les usages des nouvelles technologies

Les nouvelles technologies vont provoquer, dans tous les domaines du fonctionnement de nos sociétés, des bouleversements dont nous ne pouvons pas encore mesurer toute l'importance.

Celles-ci influenceront les sciences de l'organisation, car l'internet oblige à repenser les structures hiérarchiques en privilégiant le développement des structures du réseau. Elles affecteront les sciences de l'éducation, en facilitant le recours au télé-enseignement, et auront des conséquences révolutionnaires sur les politiques éducatives qui pourront être réalisées, par exemple, en direction du pays du Sud, ou au sein de l'espace francophone. Leur apport peut également être considérable en matière de biologie. Le programme du génome humain supposera la constitution de mégabanques de données, bien sûr, mais aussi les neurosciences qui peuvent, elles, apporter des contributions aux structures des ordinateurs du futur et réciproquement. Les géographes devraient être particulièrement concernés par les conséquences prévisibles du développement du télétravail sur l'aménagement du territoire. Les sciences et technologies de l'information devraient, bien sûr, également intéresser les psychologues, les sociologues et les spécialistes de la cognitique.

La création, le 5 octobre 2000, d'un nouveau département au sein du CNRS qui a vocation à regrouper différentes équipes travaillant en matière de sciences et de technologies de l'information constitue une première réponse à ce besoin fondamental. De par son caractère pluridisciplinaire, le CNRS paraît en effet l'organisme le mieux adapté à ce type de recherches transversales par nature.

Toutefois, ce type de recherche qui doit constituer aujourd'hui, un axe de recherches prioritaires doit concerner aussi les autres acteurs de la recherche.

Il est significatif, à cet égard, que l'INRIA dont le domaine de compétences est relativement ciblé sur le plan disciplinaire, s'attache également aux relations que ces technologies entretiennent avec les autres sciences, avec un effort particulier en direction des sciences du vivant : bio-informatique, neurosciences, technologies médicales, modélisation des éco-systèmes, ...

Le réseau national de recherche en télécommunications , a d'ailleurs également lancé à la fin 2000 un appel à proposition spécifique sur les usages de ces technologies en coopération avec les sciences humaines et sociales : 18 projets ont été proposés, et cinq labellisés en mars 2001 pour un montant de 0,46 million d'euros (3 millions de francs).

Ces efforts doivent être poursuivis et accentués à l'avenir.

B. LA RECHERCHE EN SCIENCES DU VIVANT

Le projet de budget pour 2002 renforce les moyens alloués aux sciences du vivant, à travers l'augmentation du budget de l'INSERM qui bénéficie de 80 créations d'emplois et de crédits en hausse de 3,6 % ; de celle du budget de l'INRA qui bénéficie de 100 créations d'emplois, et de l'enveloppe du Fonds national de la science (FNS).

Un effort particulier a été réalisé dans le domaine de l'étude du génome humain, grâce aux infrastructures lourdes mises en place à Evry : Centre national de séquençage (CNS), Centre national de génotypage (CNG), Centre de développement bio-informatique (Infobiogen) qui sont subventionnés par le programme Génomique, doté de 68,60 millions d'euros (450 millions de francs) en 2001.

Le réseau de recherche technologique « Génoplante », créé en 1998, associe quatre établissements publics (l'INRA, le CNRS, le CIRAD et l'IRD) et trois structures industrielles regroupant les entreprises semencières nationales.

Les programmes couvrent un champ allant des ressources génétiques à l'analyse génomique des espèces végétales.

Les recherches sur les maladies infectieuses font également l'objet d'un renforcement de leurs moyens. Le budget du fonds national de la science pour l'étude des maladies à prion, doté initialement de 3 millions d'euros (20 millions de francs) a été abondé par 21,4 millions d'euros (140 millions de francs) supplémentaires par la loi de finances pour 2001.

C. LA RECHERCHE EN MATIÈRE D'ENVIRONNEMENT

Les recherches portant sur l'environnement occupent une place croissante dans les moyens du ministère de la recherche ; elles disposeront en 2002 de 1 445 millions d'euros (10 milliards de francs) et représentent le deuxième poste du BCRD .

1. La nouvelle problématique de la sécurité environnementale

Celles-ci s'organisent autour de trois grandes problématiques , qui ont été définies lors de la conférence de Rio et qui correspondent à l'émergence d'une nouvelle exigence en matière de sécurité environnementale :

- les changements planétaires (effet de serre, évolutions climatiques) ;

- la biodiversité et la gestion des ressources renouvelables ;

- le cadre de vie et les relations environnement-santé.

2. Un dispositif de recherche éclaté

Le potentiel de recherche sur l'environnement est réparti entre les établissements publics, les universités et les grandes écoles. Aucun d'entre eux, toutefois, ne couvre l'ensemble de ce champ :

- les aspects liés à l'agriculture relèvent de l'INRA, du CIRAD et de CEMAGREF ;

- les zones littorales, océaniques, les questions relatives au climat et à l'atmosphère relèvent principalement du CNRS, de l'IFREMER, de l'IRD du CNES et de Météo France ;

- les questions urbaines et sociologiques relèvent notamment du CNRS, du BRGM et du LCPC ;

En outre, les ministères techniques jouent également un rôle important d'animation et d'orientation. Pour remédier à l'éclatement de ce dispositif, le ministère de la recherche a institué un conseil de la recherche sur le changement climatique et le développement durable chargé de la réflexion prospective, de l'analyse stratégique et de la coordination des programmes.

3. Les actions du ministère de la recherche

Les actions propres du ministère de la recherche se partagent entre les actions concertées incitatives et les réseaux de recherche et d'innovation technologiques.

Les actions concertées incitatives du domaine de l'environnement s'intitulent :

- eau et environnement (0,76 million d'euros ; 4,99 millions de francs) ;

- écologie quantitative (1,37 million d'euros ; 8,99 millions de francs) ;

- prévention des catastrophes naturelles (1,37 million d'euros ; 8,99 millions de francs) ;

- action planète-océan-atmosphère (0,6 million d'euros ; 3,94 millions de francs) ;

- observation de la terre (0,6 million d'euros ; 3,94 millions de francs).

Les réseaux de recherche et d'innovation technologiques portant sur ce même secteur sont :

- le réseau « terre et espace » (4,5 millions d'euros par an) ;

- le réseau « Eau et technologie de l'environnement » (5,5 millions d'euros par an);

- le réseau « Pollutions marines accidentelles » (3 millions d'euros par an).

Le soutien apporté par le ministère aux projets EUREKA, ou les actions conduites par l'ADEME sont également susceptibles de se rattacher à ce domaine de recherche.

4. La nécessité de renforcer et d'élargir l'étude des risques.

Les recherches en matière d'environnement, qui tournent autour de la notion de sécurité environnementale, témoignent de la prise de conscience , par nos sociétés, de la place centrale que doit occuper l'évaluation des risques et de leurs conséquences .

La question de l'évaluation de ces risques est déjà devenue un élément clef dans l'approche de la sécurité environnementale. Elle ne doit pas cependant se limiter au seul impact environnemental, mais s'étendre aux domaines les plus variés : qu'il s'agisse de l'étude des risques sociaux, politiques, épidémiologiques.

Cette étude, transversale par nature, doit naturellement s'intégrer au champ de réflexion de la plupart des chercheurs.

D. LE SOUTIEN AUX TRANSFERTS DE TECHNOLOGIE ET AUX ENTREPRISES INNOVANTES

Le soutien aux transferts de technologie et aux entreprises innovantes est un des axes de la politique de recherche en faveur duquel la commission des affaires culturelles du Sénat s'est le plus régulièrement engagée depuis plusieurs années.

Elle a d'ailleurs largement contribué à l'élaboration puis à l'adoption de la loi du 12 juillet 1999 sur l'innovation et la recherche, qui a rencontré un puissant appui au Sénat.

Aussi votre rapporteur se félicite-t-il des dispositions financières et fiscales prises en faveur de la création d'entreprises innovantes, même s'il estime que les dispositifs actuels doivent encore être améliorés et étendus.

1. L'application de la loi sur l'innovation et de recherche

La loi sur l'innovation et la recherche du 12 juillet 1999 a pour objet d'encourager les organismes de recherche et les universités à valoriser les résultats de leur recherche, et de permettre aux chercheurs et aux étudiants chercheurs de participer à la création d'une entreprise qui valorise leurs recherches.

a) La valorisation des résultats de la recherche publique

La loi du 12 juillet 1999 encourage les organismes de recherche et les universités à valoriser les résultats de leur recherche grâce à trois séries de dispositions :

- des dispositions qui les autorisent à assurer, par convention, des prestations de services, à exploiter des brevets et licences, à commercialiser les produits de leur activité, et pour les établissements publics à caractère scientifique et technique, à gérer des contrats de recherche ;

- des dispositions qui les autorisent, par convention et pour une durée limitée, à fournir à des entreprises ou à des personnes physiques, des moyens de fonctionnement, et notamment des locaux, des équipements et des matériels ; bref à créer des « incubateurs ».

- des dispositions qui précisent que l'ensemble de ces activités peuvent être gérées par des services d'activités industrielles et commerciales (SAIC).

Si le décret précisant les modalités de création des incubateurs a été publié dès le mois de septembre 2000, les textes précisant le régime financier et comptable des SAIC et les conditions dans lesquelles ils pourront recruter des agents non titulaires sur des contrats de droit public à durée indéterminée, ne sont toujours pas sortis. Ce retard inacceptable entrave le fonctionnement des incubateurs.

En effet, le transfert de technologie, et le passage de l'idée innovante au projet d'entreprise et à son financement sont des activités de nature industrielle qui ne souffrent pas l'improvisation, que ces activités aient trait à la politique de propriété industrielle, à la rédaction des brevets et des contrats de licence, à la levée des fonds, ou encore à la commercialisation des activités, qui nécessitent une approche très professionnelle.

Compte tenu du caractère interministériel de la rédaction de ces décrets d'application, le ministère de la recherche ne peut être tenu pour responsable de ce retard qui incombe plutôt au gouvernement.

b) L'encouragement à la mobilité et à la création d'entreprises

La loi n° 99-587 du 12 juillet 1999 a prévu trois séries de dispositions pour développer les liens entre les chercheurs et les entreprises qui valorisent leurs recherches. Ces dispositions sont contenues dans les articles nouveaux 25-1, 25-2 et 25-3 insérés par la loi de 1999 dans le dispositif de la loi n° 82-610 rectifiée du 15 juillet 1982 d'orientation et de programmation pour la recherche et le développement technologique.

L'article 25-1 autorise les personnels de recherche à participer à titre personnel, en qualité d'associé ou de dirigeant, à la création d'une entreprise dont l'objet est d'assurer la valorisation de leurs travaux de recherche ;

L'article 25-2 autorise ces mêmes personnels de recherche à apporter leur concours scientifique, pendant une période de cinq ans renouvelable, à une entreprise qui assure la valorisation de leurs travaux de recherche ;

L'article 25-3 autorise ces personnels de recherche à être, à titre personnel, membres du conseil d'administration ou du conseil de surveillance d'une société anonyme afin de favoriser la diffusion des résultats de la recherche publique.

Une circulaire en date du 7 octobre 1999 est intervenue rapidement pour préciser les modalités de mise en oeuvre de ces dispositions. Les décrets relatifs aux plafonds de rémunérations des chercheurs participant à des actions de transfert de technologies, ont été pris dans l'année.

Il reste cependant, dans un souci de cohérence juridique, à inscrire dans les statuts des différents personnels concernés, les droits que leur reconnaît la loi sur l'innovation et la recherche.

Le premier bilan que l'on peut tirer de ces dispositions est encourageant puisque, entre le 2 décembre 1999 et le 22 février 2001, la commission de déontologie chargée d'examiner les demandes, a reçu 130 dossiers, dont 111 ont, au 1 er mars 2001 obtenu un avis favorable.

2. Le soutien apporté à la création d'entreprises innovantes

Ces dispositions législatives sont complétées par des mesures financières destinées à favoriser la création d'entreprises innovantes.

a) L'appel à projet « incubation et capital amorçage des entreprises technologiques ».

Le ministère de l'éducation nationale, de la recherche de la technologie et le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie ont lancé en mars 1999 un appel à projets « Incubation et capital-amorçage des entreprises technologiques » à destination des établissements d'enseignement supérieur, des organismes de recherche, des professionnels de l'accompagnement des entreprises et des professionnels du capital-risque afin d'encourager la création d'entreprises technologiques innovantes susceptibles de valoriser le potentiel de recherche des laboratoires publics.

Dans sa partie « incubation » l'appel à projets vise à susciter la mise en place de nouvelles structures d'incubation émanant d'établissements d'enseignement supérieur ou de recherche. Le soutien du ministère s'est dirigé vers des projets nouveaux organisés en partenariat entre plusieurs établissements et bénéficiant du concours des collectivités locales.

Le volet « amorçage » vise à apporter aux établissements d'enseignement supérieur et de recherche une avance en capital qui leur permettra de constituer, avec des partenaires publics et privés, des fonds destinés à investir dans des entreprises en création.

L'appel à projets était initialement doté de 100 millions de francs (15,25 millions d'euros) pour le volet « incubateurs » et de 100 millions de francs (15,25 millions d'euros), mais compte tenu du nombre de projets présentés, ces enveloppes financières ont été portées respectivement à 161 millions de francs (24,5 millions d'euros) et à 150 millions de francs (22,86 millions d'euros).

En avril 2001, 31 incubateurs avaient été sélectionnés, soit au minimum un par région métropolitaine avec l'objectif d'accueillir, sur trois ans, 900 porteurs de projets de création d'entreprises innovantes, soit un potentiel de 750 créations effectives.

A la même date, les 10 fonds d'amorçage sélectionnés -3 fonds nationaux thématique et 7 fonds régionaux- représentaient un montant cible d'environ 887,8 millions de francs (135,35 millions d'euros), l'engagement de l'Etat représentant 81 % de l'enveloppe budgétaire.

L'investissement moyen d'un fonds d'amorçage national thématique est de 6,5 millions de francs (1 million d'euros) et celui d'un fonds d'amorçage régional peut atteindre 2 millions de francs (0,30 million d'euros).

b) Le concours national d'aide à la création d'entreprises innovantes

Lancé en 1999, le concours national d'aide à la création d'entreprises innovantes a connu, en 2001, sa troisième édition.

Son budget a été fortement renforcé : de 100 millions de francs (15,25 millions d'euros) en 1999, il a été relevé à 200 millions de francs (30,50 millions d'euros) en 2000 et 2001.

Il a permis de sélectionner 778 lauréats sur trois ans dont 462 sur des projets en émergence, et 316 en « création-développement », permettant, au total, la création de 280 entreprises.

c) Le rôle de l'ANVAR : un soutien essentiel dont les modalités sont à redéfinir.

Le développement des entreprises innovantes et le renforcement de leurs investissements, phénomènes encore récents, sont dus, dans une bonne mesure, à l'appui qu'elles reçoivent de l'ANVAR. Or ces aides prennent le plus souvent, la forme d'avances remboursables.

C'est ainsi qu'en 2000, son soutien s'est élevé à 217,8 millions d'euros (1 425 millions de francs) répartis entre 3 240 projets.

Ces montants sont appréciables, mais cette forme d'intervention n'est pas nécessairement la plus satisfaisante.

Comme tout responsable adapte son comportement aux critères suivant lesquels il sera jugé, cette forme d'intervention pourrait conduire les délégués régionaux de l'ANVAR à se focaliser trop exclusivement sur les seuls taux de réussite et d'échec, sans prendre en compte les très grandes réussites. Or, celles-ci peuvent se traduire par une envolée de la valorisation au centuple de la mise initiale mais sont au départ plus risquées.

Pour cette raison, il conviendrait que l'ANVAR puisse participer aussi -de façon modeste mais efficace- à la phase la plus délicate du capital risque, la phase de l'amorçage. Une intervention sous la forme, non plus d'avance remboursable, mais de participation au capital serait plus adaptée à des interventions dans des secteurs à la fois plus risqués et plus rentables en cas de réussite.

d) Les fonds publics pour le capital risque

Pour renforcer l'offre de capitaux à risque, encore insuffisante en France, deux fonds ont été créés et confiés à la caisse des dépôts et consignations.

Le « Fonds public pour le capital risque » (FPCR) est abondé par l'Etat, par la caisse des dépôts, et par la banque européenne d'investissement (BEI) à hauteur de 45,7 millions d'euros (300 millions de francs) chacun. Il a pour objectif d'investir dans des fonds de capital risque privés en exerçant un effet de levier. Au premier semestre 2001, l'engagement total du fonds se situait à environ 123,5 millions d'euros (810 millions de francs) sur un montant de 137,9 millions d'euros (905 millions de francs). Il privilégie des sociétés liées aux secteurs des biotechnologies et des technologies de l'information et de la communication.

Au dixième fonds public, le « Fonds de promotion pour le capital risque » répondant aux mêmes objectifs et d'un montant global de 150 millions d'euros (984 millions de francs) devrait être prochainement créé.

3. La percée d'une fiscalité favorable

a) Le crédit d'impôt recherche

Le crédit d'impôt recherche est une mesure fiscale d'ordre général, créée en 1983 et qui est en application jusqu'en 2003.

Elle consiste en l'attribution d'un allégement fiscal, qui est de droit, et fonctionne, pour les entreprises qui en sont les bénéficiaires, comme un apport de trésorerie.

En 2000, 6 623 entreprises ont souscrit une déclaration de crédit d'impôt au titre de l'année 1999. Parmi celles-ci, 3 271 ont déclaré un crédit positif pour un montant de 3 350 millions de francs (510 millions d'euros). Il est à noter que cette mesure profite particulièrement aux PME. Les entreprises de moins de 200 millions de francs de chiffre d'affaires réalisent en effet 15 % des dépenses globales de recherche et développement, mais obtiennent 35 % des crédits d'impôts consentis au niveau national. Les entreprises de plus de 500 millions de francs de chiffres d'affaires, qui totalisent 77,5 % des frais de recherche, ne bénéficient, en revanche, que de 55 % du crédit d'impôt.

b) La fiscalité du capital risque

Les souscriptions de parts de fonds commun de placement dans l'innovation (FCPI), effectués par les particulier depuis le 1 er janvier 1997, donnent droit à une réduction d'impôt de 25 % du montant investi. Le projet de loi de finances pour 2002 propose de relever le plafond de cette réduction d'impôt de 75 000 francs (11 433 euros) à 78 714,80 francs (12 000 euros) pour les célibataires, et de 150 000 francs (22 870 euros) à 157 430 francs (24 000 euros) pour les couples.

De plus, les fonds communs de placement dans l'innovation étant des fonds communs de placement à risques, les personnes physiques peuvent, sous certaines conditions, être exonérées d'impôt sur le revenu pour les sommes auxquelles ces parts donnent droit.

c) Les bons de souscription de parts de créateurs d'entreprise (BSPCE)

Ces bons, créés par la loi de finances pour 1998, permettent à de jeunes entreprises de moins de quinze ans, d'attirer des salariés en les intéressant à leur croissance. Le régime fiscal et social qui s'attache aux plus-values réalisées grâce à ces bons, est justifié par le fait que ces salariés prennent un risque en allant travailler dans des entreprises encore fragiles et qui ne peuvent leur offrir la rémunération auxquelles ils pourraient prétendre dans des sociétés plus mûres.

Ces bons sont réservés aux entreprises françaises passibles de l'impôt sur les sociétés, non cotées ou dont les titres sont cotés sur le nouveau marché, ou sur un marché similaire de l'espace européen, qui sont détenues de manière continue, pour au moins 25 % de leur capital par des personnes physiques, ou par des personnes morales elles-mêmes détenues par des personnes physiques.

Ce dispositif ouvre des perspectives intéressantes, mais est encore trop étroit. Il conviendrait de le compléter par un nouveau système de stock-options, plus transparent, qui pourrait consister en distribution d'actions s'adressant à la majorité des salariés d'une entreprise.

Il pourrait également être envisagé de permettre aux créateurs d'entreprises de mettre plus de 25 % de leurs actions propres dans les plans d'épargne en action.

E. LA NÉCESSITÉ DE DÉVELOPPER LA CULTURE SCIENTIFIQUE ET TECHNIQUE

Le recul de la culture scientifique et technique dans notre pays est préoccupant pour la recherche et pour le débat public. Il est préoccupant pour la recherche car il s'accompagne d'une certaine désaffection des jeunes pour les études et les filières scientifiques. Il est préoccupant pour le débat public car la démocratie suppose une bonne appréhension des savoirs nécessaires à notre temps.

Le ministère indique que les moyens prévus en 2002 pour des actions comme la fête de la science , ou l'animation d'ateliers scientifiques en milieu scolaire, s'élèvent à 2,35 millions d'euros (15 millions de francs) ; 4,4 millions d'euros (29 millions de francs) sont en outre consacrés au soutien des centres de culture scientifique et technique implantés en région.

Ces montants paraissent cependant dérisoires si on les rapproche des dépenses qui sont consacrées à la Cité des sciences et de l'Industrie de la Villette, au Muséum national d'Histoire naturelle, ou encore au Palais de la Découverte, qui sont tous les trois, pour l'essentiel implantés à Paris.

Un comité interministériel devrait imposer la décentralisation d'une partie de ces organismes -à l'instar de ce qui a été commencé au Muséum national d'histoire naturelle. Il faut en effet aider fortement à la naissance de sites en province, notamment auprès des technopoles les plus dynamiques, qui peuvent constituer des réservoirs de compétences pour les faire vivre. Une partie des crédits du FRT -et de la DATAR- devrait être mobilisée à cet effet.

Sans culture scientifique et technique démocratisée il n'y aura pas de vocations scientifiques chez les jeunes ; l'action actuelle de centres de culture scientifique et technique n'est pas à la hauteur des besoins et leur localisation dans les grandes métropoles régionales est parfois inadaptée dans la mesure où ils ne diffusent rien hors de leur localisation.

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Je terminerai par deux propositions.

La première est de rechercher une répartition des responsabilités plus claire en matière de financement public de la recherche :

- à l'échelon européen, la réalisation des grands programmes, le financement de grands équipements transnationaux, et l'incitation à une mobilité internationale des chercheurs ;

- à l'échelon de l'Etat, une politique de recherche appuyée sur des moyens plus importants que ceux dont il dispose aujourd'hui ;

- enfin, aux régions, départements et communautés d'agglomération ou communautés urbaines, l'appui donné aux centres d'excellence et aux technopoles, adossé au soutien de l'Etat. Les collectivités territoriales françaises seraient heureuses d'avoir, à l'image des Länder allemands, de plus gros moyens pour intervenir, de façon efficace, dans des domaines vitaux pour leur avenir.

La seconde est d'inciter les pouvoirs publics à mieux prendre en compte un axe de recherche transversal dont l'importance ne me semble pas avoir été encore appréciée à sa juste dimension. Je veux parler de la gestion des risques qui est au coeur de la fragilité de nos sociétés modernes. Il ne me semble plus possible de se contenter de les envisager a posteriori, à travers des plans ORSEC ; il faut envisager leur étude systématique, en amont, avec des équipes de recherche pluridisciplinaires, et en y associant des gens de terrain et les professionnels concernés, notamment les compagnies d'assurance, en s'appuyant sur les moyens des Fonds de la recherche technologique (FRT).

En conclusion, le projet de budget de la recherche pour 2002 n'est pas dépourvu de mérites :

- il confirme une clarification des priorités de la recherche salutaire ;

- il amorce une politique de l'emploi scientifique qui est indispensable dans le contexte démographique actuel, caractérisé par l'imminence de nombreux départs en retraite de chercheurs ;

Mais il présente aussi des insuffisances qui tiennent à la fois :

- à la faible progression de ses crédits qui ne permet même pas le maintien, hors inflation, de ses moyens ;

- et à l'absence de véritable politique de diffusion de la culture scientifique alors que la démocratisation du savoir est un des enjeux de l'avenir.

Pour ces raisons, je vous proposerai de vous en remettre à la sagesse du Sénat, dans l'attente des réponses que le ministre voudra bien donner à nos interrogations.

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EXAMEN EN COMMISSION

Au cours d'une séance tenue le mardi 20 novembre 2001 , sous la présidence de M. Jacques Valade, la commission a examiné le rapport pour avis de M. Pierre Laffitte sur les crédits de la recherche pour 2002 .

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur.

M. Philippe Richert a estimé, en accord avec le rapporteur pour avis, que la démocratisation de la culture scientifique constituait un enjeu essentiel, et que l'avenir de nos sociétés dépendrait beaucoup de l'intérêt que les jeunes générations éprouveraient pour les sciences. Il a déploré qu'il existe si peu de données disponibles sur les politiques qui sont accomplies en ce domaine dans les régions, et sur l'appui que l'Etat serait capable de leur apporter.

M. Jacques Valade, Président , faisant référence aux responsabilités qu'il avait exercées à la tête de ce ministère, a estimé que si des moyens certains étaient effectivement consacrés à cette politique, il était en revanche très difficile d'obtenir des services une définition d'objectifs qui permette effectivement de prendre la mesure des actions conduites, et que cela constituait en effet une grave carence.

M. Pierre Laffitte, rapporteur pour avis , a estimé que la décentralisation et la démocratisation de la culture scientifique devraient s'appuyer sur des structures d'interface, des associations ou des fondations, susceptibles d'organiser de façon continue des activités comparables à celles qui sont réalisées épisodiquement à l'occasion de la « Fête de la science ».

Citant l'exemple des actions menées à Sophia Antipolis qui suscitent régulièrement des vocations scientifiques, il a indiqué que ce genre d'initiatives, qui fait appel à la bonne volonté des chercheurs, doit s'appuyer sur des structures souples, pour permettre en particulier de régler les problèmes de responsabilité.

M. Philippe Nogrix a estimé que l'accès au monde de la recherche scientifique n'était pas possible sans un sens du travail et de la rigueur qui n'est, aujourd'hui, pas nécessairement très répandu et qu'il faut donc encourager. Il s'est demandé si les insuffisances du système français ne résidaient pas davantage dans le domaine de l'application des recherches et de la technologie, que dans celui de la recherche proprement dite.

M. Pierre Laffitte, rapporteur pour avis , a rappelé que ce constat avait précisément motivé l'adoption de la loi du 12 juillet 1999 sur l'innovation et la recherche, et que celle-ci avait incité les chercheurs à s'intéresser à l'usage de leurs découvertes. Il a jugé important de promouvoir aujourd'hui l'idée, que la science peut aussi se donner pour objectif le développement durable, pour combattre le préjugé trop répandu qui condamne toute forme d'innovation.

Au terme de ce débat, suivant les propositions de son rapporteur pour avis, la commission a décidé de s'en remettre à la sagesse du Sénat pour l'adoption des crédits de la recherche pour 2002 .

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CONCLUSION




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