Projet de loi de finances pour 2002 - Tome XXIII - Ville

ANDRÉ (Pierre)

AVIS 89 - TOME XXIII (2001-2002) - COMMISSION DES AFFAIRES ECONOMIQUES

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Table des matières




N° 89

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2001-2002

Annexe au procès-verbal de la séance du 22 novembre 2001

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan (1) sur le projet de loi de finances pour 2002 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,

TOME XXIII

VILLE

Par M. Pierre ANDRÉ,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Gérard Larcher, président ; Jean-Paul Emorine, Marcel Deneux, Gérard César, Pierre Hérisson, Jean-Marc Pastor, Mme Odette Terrade, vice-présidents ; MM. Bernard Joly, Jean-Paul Émin, Patrick Lassourd, Bernard Piras, secrétaires ; MM. Jean-Paul Alduy, Pierre André, Philippe Arnaud, Gérard Bailly, Bernard Barraux, Mme Marie-France Beaufils, MM. Michel Bécot, Jean-Pierre Bel, Jacques Bellanger, Jean Besson, Claude Biwer, Jean Bizet, Jean Boyer, Mme Yolande Boyer, MM. Dominique Braye, Marcel-Pierre Cleach, Yves Coquelle, Gérard Cornu, Roland Courtaud, Philippe Darniche, Gérard Delfau, Rodolphe Désiré, Yves Detraigne, Mme Evelyne Didier, MM. Michel Doublet, Paul Dubrule, Bernard Dussaut, André Ferrand, Hilaire Flandre, François Fortassin, Christian Gaudin, Mme Gisèle Gautier, MM. Alain Gérard, François Gerbaud, Charles Ginésy, Francis Grignon, Louis Grillot, Georges Gruillot, Charles Guené, Mme Odette Herviaux, MM. Alain Journet, Joseph Kerguéris, Gérard Le Cam, Jean-François Le Grand, André Lejeune, Philippe Leroy, Jean-Yves Mano, Max Marest, René Monory, Paul Natali, Jean Pépin, Daniel Percheron, Ladislas Poniatowski, Jean-Pierre Raffarin, Daniel Raoul, Paul Raoult, Daniel Reiner, Charles Revet, Henri Revol, Roger Rinchet, Claude Saunier, Bruno Sido, Daniel Soulage, Michel Teston, Pierre-Yvon Trémel, André Trillard, Jean-Pierre Vial.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 3262 , 3320 à 3325 et T.A. 721

Sénat
: 86 et 87 (annexe n° 19 ) (2001-2002)


Lois de finances.

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Votre Commission des Affaires économiques suit, depuis 1991, avec une attention toute particulière, l'évolution de la politique de la ville et du développement urbain. Celle-ci constitue, avec la politique d'aménagement rural, l'un des deux « poumons » de la politique d'aménagement du territoire.

75 % des Français vivent en zone urbaine. Au fil des années, l'existence de nombreux quartiers et parfois des villes entières, frappées par les difficultés économiques, l'inadaptation de l'habitat et des structures sociales, les carences en matière de planification urbaine et de préservation de la mixité sociale, rendent nécessaires la mise en oeuvre de moyens spécifiques importants pour la ville. L'équilibre de la société française en dépend largement, l'actualité le montre chaque jour.

Le présent rapport s'attachera à évoquer la politique de la ville dans sa diversité en montrant les résultats obtenus en matière de développement économique, d'action sociale, de renouvellement urbain et de sécurité.

Il tentera d'éviter la multiplication des sigles et des procédures et la sémantique obscure dans lesquelles pourraient se noyer les acteurs et les usagers de la politique de la ville.

Politique au service des citoyens qui habitent dans les quartiers en difficulté, la politique de la ville a, en effet, besoin de clarté.

CHAPITRE 1ER -

EXAMEN DES CRÉDITS

I. VUE D'ENSEMBLE

Le total des moyens financiers disponibles au titre de l'Etat, de ses établissements publics et des collectivités locales pour la politique de la ville s'élèvera, en 2002 , à sept milliards d'euros , en hausse de 238 millions d'euros, soit + 4 % . Cet accroissement se situe dans le droit fil des hausses qui sont survenues au cours de ces dernières années. Il marque cependant une stabilisation du taux de croissance des crédits par rapport à la l'évolution-record enregistrée en 2001 (+ 23 %).

Les crédits destinés à la politique des villes et du développement urbain sont présentés dans un fascicule budgétaire « jaune », qui retrace l'évolution de fonds dont l'origine et la nature sont profondément différentes : crédits de l'Union européenne, de l'Etat et des collectivités locales pour les uns, enveloppes de prêts susceptibles d'être consentis, sur plusieurs années pour les autres. C'est pourquoi votre rapporteur pour avis en présentera une vue d'ensemble avant de mettre en évidence les évolutions qui les caractérisent.

Ces moyens financiers proviennent, d'une part, respectivement de L'Etat, des fonds européens, de la Caisse des dépôts et consignations et d'autres établissements publics et, d'autre part, des collectivités locales, ainsi qu'il ressort du tableau ci-après :

2000

2001

2001/2000

2002

2002/2001

M€ (DO+CP) (1)

M€ (DO+CP) (2)

Variation
en %

M€ (DO+CP) (3)

Variation
en %

A-1. Crédits spécifiques ville

258,74

382,13

47,69

387,24

1,34

A-2. Crédits contractualisés relevant de divers ministères

67,39

67,39

-

67,39

-

A-3. Crédits relevant de divers ministères contribuant à la politique de la ville

1 852,32

2 356,56

27,22

2 374,53

0,76

A-4. Solidarité urbaine

700,97

713,39

1,77

745,01

4,43

TOTAL A

2 879,42

3 519,47

22,23

3 574,17

1,55

B. Dépenses fiscales et compensations

655,52

788,86

20,34

788,93

-

TOTAL A + B

3 534,95

4 308,33

21,88

4 363,10

1,27

C. Fonds européens

221,6

221,6

-

221,6

-

D.a) Intervention de la CDC

874,44

1 109,14

26,84

1 158,61

4,46

(intégralité des prêts et FRU)

D.b) Intervention de la CDC

209,77

297,58

41,86

350,63

17,83

(équivalent subventions)

E. Autres financements publics

151,38

159,45

5,33

167,69

5,17

TOTAL A + B + C + Da) + E

4 782,36

5 798,52

21,25

5 911,00

1,94

TOTAL A + B + C + Db) + E

4 117,60

4 986,96

21,11

5 103,02

2,33

F. Contribution des collectivités territoriales

725

975

34,48

1 100,00

12,82

TOTAL GÉNÉRAL (avec Da.)

5 507,37

6 773,52

22,99

7 011,00

3,51

TOTAL GÉNÉRAL (avec Db.)

4 842,60

5 961,96

23,11

6 203,02

4,04

(1) pour l'année 2000, est considérée la consommation effective des crédits votés en LFI et LFR.

 

(2) LFI

 
 
 
 
 

(3) PLF

 
 
 
 
 

Source : fascicule budgétaire « jaune »

Les crédits budgétaires d'Etat atteignent 3,57 milliards d'euros , en hausse de 2 % en euros courants, soit une stagnation en euros constants. Rapportés au total des moyens financiers consacrés par la puissance publique dans son ensemble (Etat, collectivités locales et établissements publics confondus) les crédits d'Etat ne représentent donc qu'à peine plus de 50 % du total .

Les dépenses fiscales et les compensations qui correspondent à l'estimation des exonérations qui occasionnent un « manque à gagner » pour l'Etat s'élèvent, pour leur part, à 788 millions d'euros en 2002 comme en 2001.

Les fonds européens sont, eux aussi, stables au cours des deux exercices considérés, à hauteur de 221 millions d'euros .

Les interventions des établissements publics d'Etat correspondent à des opérations de la Caisse des dépôts et consignations et à la mobilisation d'autres financements publics.

Les fonds mis à disposition par la Caisse des dépôts consistent :

- d'une part en des enveloppes de prêts , à hauteur de 1,158 milliard d'euros (+ 4 %) ;

- et d'autre part en l'équivalent de subventions pour 350 millions d'euros (+ 4 % également).

La quote-part des autres établissements publics intéressés s'élève, quant à elle, à 167 millions d'euros (+ 4 %).

Enfin la contribution des collectivités locales à la politique de la ville atteint 1.100 millions d'euros , en hausse de 125 millions sur deux ans, soit + 13% . En termes relatifs, la croissance de la contribution des collectivités locales est la plus forte de toutes celles enregistrées par le fascicule « jaune ». Elle explique, à elle seule, plus de 52 % de l'augmentation globale des moyens financiers qui sont destinés à cette politique, soit 125 millions sur 238 millions d'euros.

On constate, en outre, que désormais les collectivités locales assument, à elles seules, près de 16 % du total des dépenses en faveur de la politique de la ville , contre 14 % voici deux ans, soit 1,1 milliard sur un total général de 7 milliards d'euros . Si l'on considère que la majeure partie des aides consenties par la Caisse des dépôts et consignations consistent en des prêts aux collectivités locales, on est même conduit à majorer encore le montant de la contribution de celles-ci à la politique de la ville.

Votre commission des Affaires économiques tient à souligner le rôle de plus en plus déterminant que jouent les collectivités locales dans le financement de la politique des villes et du développement urbain. Elle s'interroge, en conséquence sur l'équilibre entre les transferts de compétences et les transferts de charges opérés par l'Etat au fil des ans dans ce domaine très sensible.

II. EXAMEN DÉTAILLÉ PAR ORIGINE ET PAR NATURE

L'examen détaillé des crédits permet de nuancer l'analyse, quelque peu sommaire, qui résulte de la lecture des agrégats précités. Elle montre notamment l'extraordinaire diversité de la nature des crédits qui sont additionnés dans le fascicule « jaune » .

Les crédits spécifiques « ville »

Comme le montre le tableau ci-dessous, le montant total des crédits spécifiques « ville » atteindra 387 millions d'euros en 2002, en hausse de 1 % en francs courants, soit une légère diminution en francs constants .

 

2000 (1)

2001 (2)

2001/2000

2002 (3)

2002/2001

 

M€ (DO+CP)

M€ (DO+CP)

Variation
en %

M€ (DO+CP)

Variation
en %

A-1. Crédits spécifiques ville

A-1-1.  Crédits ville inscrits au bleu

Fonctionnement de la DIV

2,12

2,7

27,36

7,17

Communication

1,09

0,76

-30,28

Animation et formation (national)

0,02

2,29

11 350,00

Expertises et colloques

0,49

0,61

24,49

Études

1,1

0,91

-17,27

SPQ, animation, formation

11,09

15,02

35,44

7,41

-50,67

Frais de soins des appelés ville

0,24

0,53

120,83

0,3

-43,40

FIV hors transferts en gestion

165,77

173,49

4,66

202

Opérations de DSU en Île-de-France

31,12

26,83

-13,79

Partenariat national

3,55

1,37

-61,41

5,34

Innovation-expérimentation

0

2,29

-

Grands projets

19,41

30,03

54,71

34,46

14,75

Ville-vie-vacances

7,59

7,62

0,40

7,62

-

Fonds de revitalisation économique

0

57,17

-

57,17

-

Adultes-relais

0,43

45,73

10 534,88

50,73

10,93

Sous-total A-1-1

244,02

367,36

 

372,2

1,32

A-1-2. Autres budgets

Transfert FIV (2)

9,15

9,15

-

9,15

-

Transfert VVV

3,06

3,06

-

3,06

-

Personnel DIV

2,51

2,56

0,02

2,83

10,55

Sous-total A-1-2

14,72

14,77

-

15,04

1,83

Sous-total A-1

258,74

382,13

0,48

387,24

1,34

(1) pour l'année 2000, est considérée la consommation effective des crédits votés en LFI et LFR.

 

(2) LFI

 
 
 
 
 

(3) PLF

 
 
 
 
 

Source : fascicule budgétaire « jaune ».

Parmi ces crédits , seuls quelques postes, d'importance assez mineure, en volume, enregistrent des diminutions , à l'instar :

- des crédits de communication de la Délégation interministérielle à la ville (DIV) soit - 30 %, ce qui prouve que les critiques émises par le Sénat au sujet de la hausse de ces crédits dans la loi de finances initiale pour 2001 étaient fondées ;

- des crédits d'études (- 30 %) ;

- et de ceux regroupés sous l'intitulé « partenariat national » qui correspondent au financement accordé, dans le cadre de conventions, à des fédérations nationales d'associations (- 61 %).

En ce qui concerne les crédits en hausse on retiendra ceux qui intéressent :

- l'animation et la formation (+ 113 % soit 2,29 millions d'euros au niveau national et + 35 %, soit 15 millions d'euros, pour les services publics de quartiers) ;

- les « adultes relais » (+ 105 %, soit 45,7 millions d'euros) ;

- et ceux versés au titre des « grands projets de ville » (+ 55 %, soit 30 millions d'euros).

Considérés sous l'angle des objectifs poursuivis par les pouvoirs publics, les crédits d'Etat sont destinés, pour près de 37 % aux « interventions relatives au lien social et aux services publics », poste qui enregistre une diminution de 8 % par rapport à 2001, atteignant 136,9 millions d'euros.

Le programme de revitalisation économique mobilise, quant à lui, 86,9 millions d'euros (plus de 23 % du total), en hausse de 9 %.

Les moyens de fonctionnement et d'animation croissent, pour leur part de 31 %, et atteignent 53,7 millions d'euros.

Les dépenses en matière de prévention et de sécurité passent de 46,3 à 52,7 millions d'euros (+ 14 %).

La diminution la plus importante touche le programme de renouvellement urbain qui diminue de 51 à 41 millions d'euros.

L'ensemble de ces éléments sont résumés dans le tableau ci-après.

2000 (1)

2001 (2)

2001/2000

2002 (2)

2002/2001

M€

M€

Variation
en %

M€

Variation
en %

A-1 (bis) Crédits spécifiques ville par composantes

 

Moyens de fonctionnement et d'animation

36,85

40,91

11,02

53,7

31,26

Politique d'intervention en matière de prévention et de sécurité

26,83

46,38

72,87

52,7

13,63

Politique d'intervention relative au lien social et aux services publics

121,98

148,38

21,64

136,91

-7,73

Programme de renouvellement urbain

56,6

51,91

-8,29

41,92

-19,24

Programme de revitalisation économique

13,97

79,78

471,08

86,97

9,01

TOTAL

256,23

367,36

43,37

372,2

1,32

 
 
 
 
 
 

(1)     exécution - y compris transferts en gestion mais hors crédits de personnel DIV

 

(2)     prévision - hors transferts en gestion et hors crédits de personnel DIV

 

Source : fascicule budgétaire « jaune ».

Les crédits contractualisés aux CPER

Au titre des contrats de plan Etat-régions (CPER) conclus pour la période 2000-2006, un montant total de 67,32 millions d'euros sera versé chaque année . Il concerne des actions en matière de logement, soit 40 % du total, et dans le domaine de l'emploi et de la solidarité pour un peu moins de 40 % de l'ensemble des CPER. Le solde est ventilé entre des crédits inscrits au titre du fonds national d'aménagement et de développement du territoire, du ministère de la justice et de celui de la jeunesse et des sports.

Les crédits relevant de divers ministères contribuant à la politique de la ville

Comme le montre le tableau ci-dessous, le montant des crédits des autres ministères consacrés à la politique de la ville atteint 2,37 milliards de francs.

2000

2001

2001/2000

2002

2002/2001

M€ (DO+CP) (1)

M€ (DO+CP) (2)

Variation
en %

M€ (DO+CP) (2)

Variation
en %

A-3. Crédits relevant de divers ministères contribuant à la politique de la ville

Équipement/logement/transports

146,52

192,14

31,14

189,54

-1,35

Culture

8,47

14,71

73,67

16,09

9,38

Intérieur

206,09

530,14

157,24

537,67

1,42

Education nationale

430,96

495,1

14,88

516,6

4,34

Jeunesse et Sports

14,37

16,13

12,25

18,1

12,21

Outre-mer

39,54

41,08

3,89

21,92

-46,64

Emploi et solidarité

790,9

810,89

2,53

815,61

0,58

Justice

40,34

51,89

28,63

55,82

7,57

Fonction publique

46,37

75,84

63,55

74,7

-1,50

Défense

16,41

13,46

-17,98

10,39

-22,81

Affaires étrangères et coopération

0,4

0,4

-

0,4

-

FAS (3)

111,95

114,78

117,69

117,69

2,54

Sous-total A-3

1 852,32

2 356,56

27,22

2 374,53

0,76

(1)     exécution

 
 
 
 
 

(2)     estimation

 
 
 
 
 

la contractualisation du FAS se fait sur les contrats de ville et non sur les CPER en 2000

 

Source : fascicule budgétaire « jaune »

L'essentiel, soit 815 millions d'euros (34 %), correspond à des crédits du ministère de l'emploi et de la solidarité consacrés notamment :

- au programme « nouveaux services, nouveaux emplois » (453 millions d'euros) ;

- à l'aide aux entreprises d'insertion et à l'insertion par l'économique (116 millions d'euros) ;

- à l'insertion par le logement (58 millions d'euros) ;

- aux foyers de travailleurs (54 millions d'euros) ;

- et au programme « trajet d'accès à l'emploi » (TRACE) pour 41 millions d'euros.

Puis viennent, à parts égales pour 537 et 516 millions d'euros (soit respectivement 20 %), les crédits du ministère de l'Intérieur et de ceux du ministère de l'éducation nationale .

Ils sont suivis des crédits issus de la dotation du ministère de l'Equipement ( 189 millions d'euros soit 7 %) et du fonds d'action sociale ( 117 millions d'euros soit 5 %).

Le solde se répartit, de façon décroissante, entre les crédits des ministères de la fonction publique, de l'Outre-mer, de la culture et de la défense.

Les crédits issus de la solidarité urbaine

La dotation de solidarité urbaine (DSU) atteint 606 millions d'euros en 2002, en hausse de 6 %, tandis que le fonds de solidarité des communes de la région (FSRIF) d'Ile-de-France -qui constitue une forme de solidarité « horizontale » entre ces communes- serait doté de 138 millions d'euros , soit un montant identique, en francs courant, à celui de 2001. Le montant total de ces dotations de péréquation destinées à combler les handicaps des communes les plus en difficulté est donc de 745 millions d'euros.

Les dépenses fiscales correspondant à des exonérations fiscales et sociales

Pour favoriser le maintien et le développement des entreprises dans les quartiers en difficulté, la loi n°95-115 du 4 février 1995, d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire et la loi n°96-987 du 14 novembre 1996 portant mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville ont institué des exonérations fiscales concernant l'impôt sur les bénéfices, les droits de mutation sur les fonds de commerce, la taxe professionnelle et les charges patronales, la taxe foncière sur les propriétés bâties et les cotisations de maladie des artisans et commerçants.

Selon les estimations du « jaune » budgétaire, le montant total de ces exonérations se serait élevé à 655 millions d'euros en 2000. Il s'établirait aux alentours de 788 millions d'euros en 2001 et 2002 , ainsi qu'il ressort du tableau ci-dessous.

Au vu des chiffres annoncés par le Gouvernement, votre rapporteur pour avis s'interroge sur les modalités de calcul des évaluations soumises au Parlement. Comme l'a fait remarquer M. Gérard Larcher dans son rapport pour avis sur le projet de loi de Finances pour 2001, les montants des exonérations fiscales estimées, de façon prospective ou rétrospective d'une année sur l'autre, pour un même exercice, varient de façon très importante.

Le tableau ci-après atteste du caractère très erratique des évaluations. L'évolution des deux principaux postes de dépenses fiscales (exonération d'impôts sur les bénéfices et exonération de cotisations patronales pour les cinquante premiers salariés) engagées par l'Etat illustre spécialement ce phénomène singulier.

La dépense fiscale correspondant à l'exonération de l'impôt sur les bénéfices était évaluée à 900 millions de francs dans le « jaune » publié en 1999, puis à 1 milliard dans le document paru en 2000, avant d'être estimée à 1,2 milliard de francs dans le dernier fascicule budgétaire. Entre le projet de loi de finances pour 1999 et celui pour 2002, le législateur aura donc eu à connaître de trois estimations différentes, étant entendu que la différence entre la plus élevée et la plus basse atteint 300 millions de francs !

Les indications figurant dans ce fascicule rendu public à l'automne 2001, pour justifier ces évolutions erratiques sont pour le moins sybillines : « L'évolution en « dents de scie » que connaît le coût de cette exonération est imputable au jeu conjugué de la durée du dispositif (5 ans) et du nombre de créations et nouvelles implantations d'entreprises depuis 1997 ».

Pour sa part, l'évaluation des dépenses relatives à l'exonération de cotisations patronales pour les cinquante premiers salariés pour l'année 2000 était chiffrée à 997 millions de francs dans le projet de loi de finances pour 2000, à 1,487 milliard de francs (+ 49 %) par le projet de loi de finances pour 2001, et enfin à 1.588 millions de francs dans le projet de loi de finances pour 2002. La différence entre l'évaluation « haute » et l'évaluation « basse », réalisée à trois ans d'intervalle atteint donc 591 millions de francs soit une différence de 59 % par rapport à l'estimation initiale !

Votre commission des Affaires économiques considère que, faute d'une information précise et circonstanciée, le Parlement n'est pas en mesure de connaître le montant véritable des dépenses fiscales consacrées à la politique de la ville.

EVOLUTION COMPARÉE DES DÉPENSES FISCALES ET SOCIALES AFFÉRENT AUX ZRU ET ZFU 2000-2001

2000 estimé en 1999 (1)

2000 estimé en 2000 (2)

(2)/(1)
Variation en %

2000 estimé en 2001
(3)

2001*
(4)

2001/2000
(4)/(3)

2002*

(5)

2002/2001

(5)/(4)

MF

M€

MF

M€

M€

MF

M€

MF

Variation
en %

M€

MF

Variation
en %

B. Exonérations fiscales et sociales et compensations (1)

B.1. Zones de redynamisation urbaine :

Exonération d'impôt sur les bénéfices (1)

900

137,2

1 000

152

11,11%

182,94

1200,01

167,69

1099,97

-8,34

182,94

1200,01

9,09

Réduction des droits de mutation sur fonds de commerce

150

22,87

80

12

-46,67%

12,2

80,03

12,2

80,03

-

12,2

80,03

-

Exonérations de taxe professionnelle

480

73,18

456

70

-5,00%

69,52

456,02

65,86

432,01

-5,26

65,86

432,01

-

Exonération de charges patronales pour les embauches

100

15,24

89

14

-11,00%

15,12

99,18

19,21

126,01

27,05

19,21

126,01

-

Sous-total B.1.

1 630

248,49

1 625

248

-0,31%

279,77

1835,17

264,96

1738,02

-5,29

280,2

1837,99

5,75

B.2. Zones franches urbaines (2) :

Exonération d'impôt sur les bénéfices

360

54,88

450

68,6

25,00%

70,13

460,02

76,22

499,97

8,68

80,8

530,01

6,01

Taxe professionnelle

287

43,75

320

48,78

11,50%

48,78

319,98

50

327,98

2,50

50

327,98

-

Taxe foncière sur les propriétés bâties

58

8,84

66

10,06

13,79%

10,06

65,99

10,98

72,02

9,15

10,98

72,02

-

Exonération de cotisations patronales pour les 50 premiers salariés

997

151,99

1 487

226,69

49,15

242,21

1588,79

263,68

1729,63

8,86

243,92

1600,01

-7,49

Exonération de cotisations maladie des artisans et commerçants

25

3,81

32

4,88

28,00%

4,57

29,98

5,64

37,00

23,41

5,64

37,00

-

Sous-total B.2.

1 727

263,28

2 355

359,02

36,36%

375,75

2464,76

406,52

2666,60

8,19

391,34

2567,02

-3,73

B.3. Exonération partielle TFPB

-

117,39

770,03

-

117,39

770,03

-

Total général B

3 357

511,77

3 980

606,75

18,56%

655,52

4299,93

788,86

5174,58

20,34

788,93

5175,04

-

(1) L'évolution en « dents de scie » que connaît le coût de cette exonération est imputable au jeu conjugué de la durée du dispositif (5 ans) et du nombre de créations et nouvelles implantations d'entreprises depuis 1997.

(2) La réforme du dispositif des ZFU visant à sa « moralisation » a dû commencer à produire ses effets mais ils sont masqués par l'augmentation globale du nombre d'emplois exonérés.

Les fonds européens

Avec 221 millions d'euros, les fonds européens représentent environ 6 % du total des crédits d'Etat inscrits au projet de loi de finances pour 2002 (soit 3,57 milliards de francs) au titre de la politique de la ville.

Depuis la réforme des fonds structurels européens, la France est éligible à deux objectifs régionaux (objectif 1 et objectif 2) et à un objectif national (Objectif 3). Elle bénéficie également de quatre programmes d'initiative communautaire (INTERREG, URBAN, LEADER, et EQUAL).

L'objectif 1 tend à la promotion, au développement et à l'ajustement structurel des régions en retard de développement , 3,8 milliards d'euros lui sont consacrés, à ce titre, pour la période 2000-2006. Il concerne le territoire des départements d'outre-mer (Réunion, Martinique, Guadeloupe, Guyane). Le montant total estimé des fonds structurels mobilisés dans le cadre de la politique de la ville sera d'environ 280 millions de francs sur la période 2000-2006.

La Corse et le Hainaut français feront quant à eux l'objet d'une procédure de sortie de l'objectif 1 , « en sifflet ». Ils bénéficieront, à titre transitoire, d'un soutien dégressif, du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2005.

L'objectif 2 soutient la reconversion économique et sociale des zones en difficulté structurelle . Ces zones comprennent des espaces en mutation socio-économique dans les secteurs de l'industrie et des services, les zones rurales en déclin, les zones urbaines en difficulté et les zones en crise dépendant de la pêche : 22,5 milliards d'euros seront consacrés, en six ans à la France. Les mesures correspondant à cet objectif s'appliquent aux quartiers en difficulté. Sur la période 2000-2006, environs deux tiers des contrats de ville seront concernés par l'objectif 2 et soutenus financièrement par les fonds structurels à hauteur de 895 millions de francs en moyenne annuelle.

L'objectif 3 soutient les politiques nationales en faveur de l'emploi par l'adaptation et la modernisation des politiques et systèmes d'éducation, de formation. Son enveloppe pour la France sur la période s'élève à 24,05 milliards d'euros . Ces fonds sont destinés à l'ensemble du territoire national (à l'exclusion des zonages objectif 1). Ils pourront donc être mobilisés sur tous les sites de la politique de la ville.

L'objectif 3 s'organise, en France, autour de six axes :

- la politique active du marché du travail ;

- l'égalité des chances et l'intégration sociale ;

- l'éducation et la formation tout au long de la vie ;

- l'adaptation des travailleurs, l'encouragement à l'esprit d'entreprise, et à la recherche et à l'innovation ;

- et des mesures spécifiques pour améliorer l'accès et la participation des femmes au marché du travail.

Parmi les programmes d'initiative communautaire (PIC) ce sont principalement les PIC Urban, Equal et Interreg qui seront mobilisés dans le cadre de la politique de la ville.

Au titre du nouveau PIC Urban , la France disposera d'une enveloppe de 96 millions d'euros destinés à promouvoir des démarches innovantes de développement urbain durable sur 9 sites confrontés à d'importants problèmes socio-économiques . L'ensemble des sites retenus à ce titre relève de la géographie prioritaire de la politique de la ville. Il s'agit de Clichy sous-Bois/Montfermeil (PIC URBAN I en cours), Grigny/Viry-Châtillon, Mantes-la-Ville/Mantes-la-Jolie (PIC URBAN I en cours). Sont aussi concernées : Val-de-Seine (Les Mureaux / Ecquevilly) (PIC URBAN I en cours), la Communauté d'Agglomération de Grenoble, la Communauté Urbaine de Strasbourg, Bastia (PIC URBAN I en cours), Bordeaux/Cenon/Floirac et Le Havre.

Le PIC EQUAL vise à « Promouvoir de nouvelles pratiques de lutte contre les discriminations et inégalités de toute nature en relation avec le marché du travail , dans un contexte de coopération transnationale ». En France, il est doté de 301 millions d'euros pour la période 2000-2006.

Dans le cadre des travaux interministériels qui visent à définir les priorités d'EQUAL en France, la DIV a formulé un ensemble de propositions afin que les quartiers en difficulté constituent une priorité à l'occasion de la mise en oeuvre de ce programme.

Le PIC INTERREG tend, en favorisant la « Coopération transfrontalière, transnationale et interrégionale à stimuler un développement harmonieux, équilibré et durable de l'ensemble de l'espace communautaire ». Sa dotation pour la période 2000-2006 se monte à 397 millions d'euros.

Les financements émanant de la Caisse des dépôts et consignations

Les sommes qui sont mises en oeuvre par la Caisse des dépôts
au titre de la politique de la ville sont, pour l'essentiel, d'une nature substantiellement différente de celle des crédits précédemment évoqués . Elles consistent, en effet, en des enveloppes de prêts dont le détail figure au tableau ci après :

 

2000

2001*

2001/2000

2002*

2002/2001

 

M€

M€

en %

M€

en %

D. Intervention de la CDC

Prêts projets urbains

489,51

503,08

0,03

503,08

0,00

PRU dont prêts démolition reconstruction

327,61

491,42

0,50

503,08

0,02

Fonds de renouvellement urbain

57,32

114,64

1,00

152,45

0,33

Equivalent en subventions (2)

209,77

297,58

0,42

350,63

0,18

Sous-total D a) intégralité prêts & FRU

874,44

1 109,14

0,27

1 158,61

0,04

Sous-total D. b) subventions

209,77

297,58

0,42

350,63

0,18

(1) Sources DGI, DGCL, DSS, DGEFP.

 
 
 
 
 

(2) Estimation DIV

 
 
 
 
 

Source : fascicule budgétaire « jaune »

Les encours de prêts de la Caisse des dépôts susceptibles d'être mobilisés au titre de l'exercice 2002 atteignent 1,1 milliard d'euros , en hausse de 4 % par rapport à 2001, année au cours de laquelle leur montant avait crû de 27 %. Ces prêts se répartissent en deux lignes :

- les « prêts projets urbains » (503 millions d'euros) ;

- les prêts « renouvellement urbain » (également 503 millions d'euros) ;

S'y ajoutent :

- des fonds prélevés sur le résultat net de la Caisse et affectés au fonds de renouvellement urbain (152 millions d'euros) ;

- des subventions , qui figurent sous le libellé « équivalent en subventions » estimé à 350 millions d'euros dans le tableau ci-dessus. Ce chiffre serait sujet à caution s'il s'avérait que l'évaluation dont il procède était entachée des mêmes approximations que celles observées en ce qui concerne les dépenses fiscales évoquées plus haut.

Les « autres interventions »

Sous ce libellé énigmatique (Cf. agrégat « E » du tableau général récapitulatif qui figure au début du présent chapitre) figurent, pour un montant total de 167 millions d'euros (+ 5 %) :

- des crédits du fonds d'intervention et de soutien à l'artisanat et au commerce (FISAC) (7,62 millions d'euros) ;

- des moyens de fonctionnement octroyés par des caisses d'allocation familiales (CAF) aux centres sociaux situés en zone urbaine sensible, ainsi qu'une quote-part des crédits consacrés notamment au financement des projets relatifs à l'accompagnement scolaire, à l'action sociale et à la petite enfance.

L'adjonction de ces sommes atteste de la volonté de « ratisser large » dans l'examen des crédits , sans doute pour en gonfler la masse, puisque l'on inclut dans l'effort financier dont le « jaune » rend compte, des sommes versées par les CAF qui consistent en des aides à des services sociaux. Ce choix est critiquable, dès lors que les caisses d'allocations familiales sont des organismes, dont le statut juridique relève du droit privé, qui ne reçoivent pas de subvention budgétaire de la part de l'Etat .

Les contributions des collectivités

La contribution des collectivités locales, estimée à 1,1 milliard d'euros a été calculée par la délégation interministérielle à la ville, sur la base des résultats d'une enquête menée auprès des préfectures de département et de région, en considérant que l'effet levier des crédits spécifiques de la politique de la ville jouerait pleinement son rôle sur ceux des collectivités locales. »

Au total, compte-tenu des imprécisions qu'il a évoquées, votre rapporteur pour avis s'interroge sur la « virtualité » ou la réalité des sommes inscrites au « jaune budgétaire ».

CHAPITRE II -

BILAN DES ZONES FRANCHES URBAINES
ET DES ZONES DE REDYNAMISATION URBAINE

Comme chaque année à l'occasion de la discussion du projet de loi de finances, votre rapporteur pour avis consacrera de substantiels développements au bilan des zones franches urbaines et à celui des zones de redynamisation urbaine.

Les zones de redynamisation urbaine (ZRU) sont au nombre de 416, tandis qu'il existe 44 zones franches urbaines (ZFU). Leur régime juridique, qui résulte de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en oeuvre du pacte de relance de la ville, a été légèrement modifié par loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains et par la loi de finances pour 2001. Ainsi que le montre le tableau ci-dessous, il consiste pour les deux types de zones, en des exonérations :

- de taxe professionnelle ;

- d'impôt sur les bénéfices ;

- de droits de mutation pour les acquisitions de fonds de commerces ;

- et de cotisations sociales.

Les entreprises situées en ZFU bénéficient, quant à elles, en outre, d'exonérations spécifiques de taxe foncière sur les propriétés bâties, et d'exonérations de cotisations sociales personnelles d'assurance maladie pour les artisans et les commerçants. A cela s'ajoute, en Ile de France, une exonération de la redevance sur la création de bureaux.

L'ensemble de ces exonérations sont détaillées dans le tableau ci-après :

Tableau récapitulatif des mesures en vigueur en 2001
Exonérations fiscales et exonérations de charges sociales
applicables à certaines entreprises implantées
dans les zones de redynamisation urbaine et les zones franches urbaines (1)

Mesures fiscales

et sociales

Zones de redynamisation urbaine

ZRU

Zones franches urbaines

ZFU

Taxe professionnelle

5 ans d'exonération

- réservée aux établissements de moins de 150 salariés

- dans la limite d'une base nette actualisée révisée annuellement : = 920 KF pour 2001 pour les créations, extensions d'établissements et les changements d'exploitants; cette base est réduite de moitié pour les établissements existants

- quelle que soit l'activité.

5 ans d'exonération

- réservée aux entreprises de moins de 50 salariés à la date de leur création

- dans la limite d'une base nette actualisée révisée annuellement = 2,482 MF pour 2001

- certaines activités sont exclues.

Impôt sur les bénéfices

(impôt sur les sociétés, impôt sur le revenu (BIC-BNC)

5 ans d'exonération

- réservée aux entreprises nouvelles

- dégressif sur 5 ans : 100% pour les années 1 et 2, puis 75 %, 50 %, 25 %.

- depuis le 1.1.2000, le bénéfice exonéré est également plafonné à 225.000 euros par période de trente-six mois.

- Sans limite d'effectif salarié.

5 ans d'exonération

- ouverte aux établissements existants au 1/01/97 et aux nouveaux établissements

- dans la limite d'un bénéfice annuel exonéré de 400.000 F

- sans limite d'effectif salarié.

Taxe foncière sur les propriétés bâties

NON

5 ans d'exonération totale

(immeubles affectés à une activité exonérée de taxe professionnelle)

Ile-de-France : redevance sur création de bureaux

NON

Exonération de la redevance

Droits de mutation pour les acquisitions de fonds de commerce

Exonération totale

à hauteur de 700.000 F

Exonération totale

à hauteur de 700.000 F

Cotisations sociales

1 an d'exonération

- pour les créations d'emploi dans la limite de 50 salariés embauchés et de 1,5 fois le SMIC par salarié.

Cotisations concernées : assurances sociales, allocations familiales, accident du travail.

Salariés concernés : CDI ou CDD de 12 mois au moins.

5 ans d'exonération à 100%*

- dans la limite mensuelle de 50 salariés et de 1,5 fois le SMIC par salarié

- à partir de la 3 e embauche, obligation d'embauche d'au moins 20% de résidents ZFU.

Cotisations concernées : dito ZRU + versement transport et fonds national d'aide au logement.

Salariés concernés : CDI ou CDD de 12 mois au moins (une durée hebdomadaire minimale sera fixée par décret).

Entreprises éligibles : dito exo TP ZFU.

* à compter du 01/01/2001, taux réduit à 50% pour les emplois transférés.

Cotisations sociales personnelles maladie artisans/commerçants

NON

5 ans d'exonération dans la limite de

1,5 fois le SMIC

Source : « jaune » budgétaire.

I. LES ZONES DE REDYNAMISATION URBAINE

D'après les statistiques de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) chaque année, l'exonération de charges sociales pendant 12 mois, applicable aux embauches, a permis de créer sur la période 1998-2000, environ 4.300 emplois équivalents temps-plein exonérés dans 1.400 établissements employeurs.

En 1999, l'essentiel des embauches exonérées étaient concentrées dans les petites entreprises : 73% des emplois ont été créés par une entreprise de moins de 10 salariés. L'effectif moyen des entreprises ayant bénéficié de l'exonération étant de 2,9 salariés au total en ZRU.

Le coût total de l'exonération de cotisations sociales patronales de sécurité sociale se serait élevé à 79 millions de francs en 1998, à 91 millions en 1999 et à 89 millions de francs en 2000.

Quant au coût des dispositions fiscales applicables en ZRU, leur montant se situerait, selon le « jaune » budgétaire, aux alentours de :

- 1200 millions de francs (182 millions d'euros) pour l'exonération d'impôt sur les bénéfices ;

- 80 millions de francs (12 millions d'euros) au titre de la réduction des droits de mutation sur les fonds de commerce ;

- 456 millions de francs (69 millions d'euros) pour l'exonération de taxe professionnelle.

II. LES ZONES FRANCHES URBAINES

Depuis la discussion du projet de loi de finances pour 1998, votre commission a réclamé qu'un bilan soit établi afin de déterminer l'impact des mesures prises par la loi relative à la mise en oeuvre du pacte de relance. Le Gouvernement a publié, en juillet 2001, un Bilan des zones franches urbaines qu'il a adressé au Parlement et qui permet de préciser tant l'évolution de l'emploi en ZFU que le coût des mesures prises. Votre rapporteur pour avis s'est référé au contenu de ce document, qui montre que les ZFU ont contribué à créer des emplois, conformément à l'intention de leurs créateurs et contrairement aux allégations de leurs détracteurs.

A. L'ACCROISSEMENT DU NOMBRE D'EMPLOIS SALARIÉS ET D'ÉTABLISSEMENTS CRÉÉS EN ZFU

1. Les emplois créés

Le ministère de l'emploi et de la solidarité a réalisé, en 2001, une étude auprès des établissements employeurs situés dans les ZFU. Il en résulte que, calculé en équivalent temps plein, l'effectif total salarié qu'ils employaient (que ces emplois bénéficient ou non d'exonérations) était de 57.000, à la fin 1999, contre 44.000 un an auparavant. Cette hausse de +29 % résultait aussi bien de l'implantation de nouvelles entreprises en ZFU que de l'embauche de salariés. Il convient, en outre, de souligner que le nombre des salariés dont les emplois ont été transférés de l'extérieur des zones franches à l'intérieur de leur périmètre s'est élevé à 3000 équivalents temps plein environ.

Sur le total de 57.000 précités, l'effectif des salariés qui ouvre droit à une exonération s'élève à 49.000, en hausse de 11.000 par rapport à la fin 1998. Huit contrats sur dix conclus par les salariés concernés sont à durée indéterminée.

La loi prévoit que lorsqu'un employeur a embauché deux salariés ouvrant droit à une exonération de cotisations sociales patronales, le maintien de cette exonération est subordonné à ce qu'après tout nouvelle embauche l'effectif total salarié de son entreprise soit constitué, pour au moins un cinquième, de personnes qui résident dans la ZFU. Cette condition de résidence, qui tend à ce que les premiers bénéficiaires du dispositif soient les personnes qui habitent dans les ZFU, est de mieux en mieux respectée puisque 26 % des salariés exonérés sont des résidents, contre 24 % en 1998. Il est à noter que le chiffre de 26 % constitue une moyenne. C'est donc que dans beaucoup de zones franches où l'on a su tirer parti de la loi de 1996, le taux atteint lui est bien supérieur. Votre rapporteur pour avis constate, à titre d'exemple, que dans la ZFU de Saint-Quentin, ce taux dépasse 30 %.

Votre commission des Affaires économiques tient à souligner que contrairement aux déclarations des détracteurs des zones franches, les premiers bénéficiaires de ce dispositif sont bel et bien les personnes qui y vivent, comme l'a souhaité le législateur en 1996.

2. Les établissements concernés

L'essor des créations d'entreprises dans les ZFU s'est amplifié au fil du temps . C'est ainsi que les trois quarts des entreprises implantées en ZFU du fait de la création du régime dérogatoire ont été créés après 1997. On constate, en outre, qu'entre 1997 et 1999, la taille moyenne des établissements a légèrement augmenté, et que plus d'un tiers d'entre eux a connu une hausse de ses effectifs.

Il convient, en outre, de souligner que certains investissements lourds qui nécessitent des travaux importants réalisés à la suite procédures complexes par des collectivités locales (par exemple pour la création de zones d'activité) n'ont été que récemment mis en service, ce qui donne à penser que le mouvement de création d'entreprises n'a pas atteint son maximum. Au demeurant, plusieurs comités d'orientation et de surveillance de ZFU ont souligné que dans nombre de ces zones, on a enregistré une pénurie de foncier qui a fortement limité l'incidence bénéfique du développement des entreprises induit par la ZFU.

Tout comme elle l'avait fait dans son rapport pour avis sur le projet de loi de finances pour 2001, votre commission se félicite de l'implantation de nouvelles entreprises dans les ZFU car elle traduit une forme de « mixité économique » qui constitue le pendant de la « mixité sociale » à laquelle elle s'est toujours déclarée particulièrement attachée.

B. LE COÛT DU DISPOSITIF

1. Le coût des exonérations de charges patronales

Selon le rapport au Parlement établi en juillet 2001, le coût estimé des exonérations de charges patronales aurait été de 350 millions de francs en 1997, 909 millions en 1998, 1.043 millions en 1999 et 1.487 millions en 2000 (ce dernier chiffre étant estimé). Le coût de la même exonération pour 2000 est évalué à 1.588,79 millions de francs (242 millions d'euros) dans le fascicule budgétaire « jaune ».

2. Le coût des exonérations fiscales.

Comme on l'a vu au chapitre premier, le coût total des exonération fiscales pour 2000 est estimé par le « jaune » à :

- 460 millions de francs (70 millions d'euros) pour l'exonération d'impôt sur les bénéfices ;

- 319 millions de francs (48 millions d'euros) au titre de l'exonération de taxe professionnelle ;

- 65 millions de francs (10 millions d'euros) pour l'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties.

Selon la même source, le taux de croissance de chacune de ces exonérations était respectivement estimé, pour 2001, à 9 % pour la première et la deuxième, et à 3 % pour la troisième, ce qui prouve que l'on attend un renforcement des effets bénéfiques du système des zones franches.

Le Gouvernement note d'ailleurs, dans son rapport, que l'interprétation exacte de ces variations et de l'impact des mesures sur les finances publiques suppose que soit menée une analyse globale puisque l'accroissement de l'activité a aussi une incidence positive sur les recettes de TVA, de même que la hausse de l'emploi salarié majore le produit des cotisations sociales perçues sur les emplois non soumis aux exonérations.

L'expérience prouve donc, a posteriori, l'inanité des critiques qu'un rapport de l'Inspection générale des Affaires sociales avait émises à l'encontre d'un dispositif qui, s'il a pu être amendé par le gouvernement à l'occasion de la loi « SRU », n'en a pas moins montré toute sa validité.

Votre commission
constate d'ailleurs qu'aux dires mêmes du rapport présenté par le Gouvernement, « le dispositif des zones franches urbaines a pu se traduire sur le terrain par des résultats positifs lorsque sa mise en oeuvre et sa gestion se sont inscrites dans une dynamique de développement et que les acteurs locaux ont su mettre en place une stratégie globale d'accompagnement des entreprises, d'accès à l'emploi pour les habitants et de revitalisation des quartiers ». Elle se félicite de ce que certaines réticences émanant de l'exécutif se soient, avec le temps, tempérées au vu des résultats obtenus .

III. L'AVENIR DES ZFU ET DES ZRU

La loi du 14 novembre 1996, a prévu que le dispositif des zones franches urbaines durerait cinq années. Il vient donc à échéance à la fin 2001. Cependant, compte tenu des délais initialement nécessaires pour sa mise en oeuvre, le Gouvernement a envisagé de prévoir un mécanisme spécifique pour accompagner l'extinction des aides en vigueur, afin que leur cessation brutale ne porte pas préjudice aux entreprises qui sont installées en ZFU ou à leurs salariés. Votre commission prend acte de l'orientation générale de cette politique, conforme à ce qu'elle réclame depuis l'examen du projet de loi de finances pour 2000. Elle en soulignera cependant les limites.

Le projet de loi de finances pour 2001 institue un dispositif de sortie des zones franches , qui tend :

-
d'une part à instituer un mécanisme dégressif de sortie sur trois ans, (article 71 du projet de loi, rattaché au budget de la ville) ;

- d'autre part à unifier le régime fiscal et social des ZFU et des ZRU à compter du 1 er janvier 2002 dans les ZRU qui comprennent, rappelons-le, les zones franches actuelles (article 8 du même projet de loi).

L'ensemble de ces modifications figurent dans le tableau récapitulatif ci après.

NOUVEAU RÉGIME ENVISAGÉ ET PROLONGATION DÉGRESSIVE

Mesures fiscales et sociales

Zones franches urbaines
régime actuel

Zones de redynamisation urbaine
régime actuel

« Nouveau régime unique » au 1 er janvier 2002

Dispositions de sortie ZFU et ZRU

Exonérations de cotisations sociales

 

Texte réformant le dispositif

 
 

Article 7 du PLFSS pour 2002 + décret

 

Cotisations sociales

- 5 ans d'exonération à 100 %*, dans la limite de 50 salariés et de 1,5 fois le SMIC.

- obligation d'embauche d'au moins 20 % de résidents ZFU, à partir de la troisième embauche.

Cotisations concernées : dito ZRU + versement transport et fonds national d'aide au logement.

Salariés concernés : CDI ou CDD de 12 mois au moins. Durée hebdomadaire minimale.

Entreprises éligibles : dito exo TP ZFU.

* taux réduit à 50 % en cas de transfert d'emploi.

- 1 an d'exonération pour les créations d'emploi dans la limite de 50 salariés et de 1,5 fois le SMIC.

Cotisations concernées : assurances sociales, allocations familiales, accident du travail.

Pour les entreprises appliquant une durée de travail de 35 heures hebdomadaires au plus :

- Majoration annuelle de l'allégement de charges sociales de 1.400 F par salarié, jusqu'à 1,8 fois le SMIC, comme en ZRR.

- Pas de limite de durée.

Article 71 du PLF 2002 (rattaché au budget de la Ville)


Uniquement en ZFU :
Prolongation de 3 ans à taux dégressif (60 %, 40 %, 20 %) à l'issue des 5 ans de droits ouverts.

Cotisations sociales personnelles maladie-maternité des artisans et commerçants

- 5 ans d'exonération dans la limite de 1,5 fois le SMIC

-

- 5 ans d'exonération dans la limite de 1,5 fois le SMIC.

- ouverture des droits limitée à fin 2004

 

Modifications prévues par l'article 8 du présent projet de loi de finances

Impôt sur les bénéfices (impôt sur les sociétés, impôt sur le revenu : BIC-BNC)

5 ans d'exonération
- ouverte aux établissements existants au 1/01/97 et aux nouveaux établissements
- dans la limite d'un bénéfice annuel exonéré de 400.000 F sans limite d'effectif salarié.

5 ans d'exonération
- réservée aux entreprises nouvelles sans limite d'effectif.
- dégressif sur 5 ans : 100 %, 100 %, 75 %, 50 %, 25 %.
- le bénéfice exonéré est plafonné à 225.000 euros par période de trente-six mois.

Uniquement en ZFU :
-  Prolongation de 3 ans à taux dégressif (60 %, 40 %, 20 %) à l'issue des 5 ans de droits ouverts.

 
 
 

Ouverture des droits limitée à fin 2004

 

Taxe professionnelle

5 ans d'exonération

- réservée aux entreprises de moins de 50 salariés à la date de leur création.
- dans la limite d'une base nette de 2.835 MF pour 2000 (révisée annuellement).
- certaines activités sont exclues.

5 ans d'exonération

- réservée aux établissements de moins de 150 salariés.
- dans la limite d'une base nette révisée annuellement (990 KF pour 2000)

- La limite de base nette s'applique aux créations et extensions d'établissements ; elle est réduite de moitié pour les établissements existants

En ZFU et ZRU :
- Prolongation de 3 ans à taux dégressif (60 %, 40 %, 20 %) à l'issue des 5 ans de droits ouverts.

 
 
 

Ouverture des droits limitée à fin 2004

 

Taxe foncière sur les propriétés bâties

5 ans d'exonération totale

-

-

Modification de nature réglementaire, annoncée dans l'exposé des motifs de l'article 68 du présent projet de loi de finances

Prime à l'embauche

-

-

L'employeur bénéficiera de la prime maximum afférente au CIE pour tout demandeur d'emploi résident en ZUS qui a cumulé 12 mois de chômage dans les 18 derniers mois précédant son recrutement.

-

Sources : Ministère délégué à la ville, Bilan des zones franches urbaines, rapport au Parlement, juillet 2001 ; Projet de loi de finances pour 2002 ; Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 ; Rapport de M. Eric Doligé, au nom de la Commission des Finances du Sénat.

CHAPITRE III -

ETAT D'AVANCEMENT DE LA POLITIQUE
DE RESTRUCTURATION DES QUARTIERS EN DIFFICULTÉ
EN 2000-2001

La restructuration des quartiers sensibles constitue une priorité pour les pouvoirs publics . Elle passe par une politique du logement active, dont la finalité -la mixité sociale- est unanimement reconnue, mais dont les modalités sont contestées par votre commission des Affaires économiques. Elle procède également d'interventions sectorielles, telle que celle qui devrait être menée de façon plus volontariste pour restructurer des zones commerciales et favoriser l'installation et la poursuite de l'activité des artisans et des commerçants.

I. LA POLITIQUE DU LOGEMENT ET LA LOI «  SRU »

La loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains a tenté de rééquilibrer l'offre de logements et de favoriser la mixité sociale, d'améliorer la situation des copropriétés dégradées, et de résorber l'habitat insalubre.

1. L'équilibre de l'offre de logements et la promotion de la mixité sociale

Depuis la publication, en 1992, du premier rapport du Président Gérard Larcher sur la politique de la ville, le Sénat s'est déclaré favorable au renforcement de la mixité sociale , seule de nature à éviter la « ghettoïsation » des quartiers et la stigmatisation de leurs habitants au sein de la ville. A l'occasion de la discussion du projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains, votre commission a, cependant, fait part de son désaccord sur les principes que le Gouvernement entendait voir mis en oeuvre dans ce domaine et critiqué la création d'un mécanisme « coercitif et contraignant », permettant au préfet de se substituer à la commune pour faire en sorte que celle-ci atteigne les objectifs fixés par la loi en matière de logements sociaux .

La loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains a néanmoins institué un système qui résulte du texte adopté par l'Assemblée nationale. C'est ainsi qu'à compter du 1er janvier 2002, les communes d'Ile-de-France situées au-dessus du seuil de 1.500 habitants et celles sont la populations dépasse 3.500 habitants dans les autres régions devront, lorsqu'elles appartiennent à des agglomérations de plus de 50.000 habitants, et que leur parc de logement comprend moins de 20 % de logements sociaux, acquitter à un prélèvement d'au moins 1.000 francs par logement social manquant par rapport à ce seuil. Elles seront, en outre, tenues d'engager un programme pour rattraper ce retard en vingt ans et de réaliser, par période de trois ans, au moins 15% des logements manquants (art. 55, de la loi « SRU » applicable au 1 er janvier 2002).

Votre Commission des Affaires économiques déplore l'entrée en vigueur de ces dispositions contraignantes et coercitives dont l'efficacité est, au demeurant, douteuse.

2. La situation des copropriétés dégradées

L'article 32 de la loi de 1996 relative au Pacte de relance pour la ville a institué la procédure du « plan de sauvegarde », afin de requalifier des copropriétés en difficulté. En 1999, une prime à l'amélioration de l'habitat (PAH) spécifique a, en outre, été instaurée afin d'aider des travaux réalisés sur les parties communes des immeubles. Enfin, en 2000, la loi « SRU », a amélioré cette procédure pour :

- faciliter l'intervention des HLM et des OPAC pour l'acquisition et la revente de lots en portage provisoire ;

- faciliter la mise en oeuvre des plans de sauvegarde à l'initiative du maire et élargir leur champ d'application, initialement limité aux seules ZUS, à tout le territoire ;

- allonger la durée du plan à 5 ans et étendre la couverture du FSL aux dettes correspondant aux charges dues par les propriétaires occupants.

Au 1 er mai 2001, 20 plans de Sauvegarde étaient en cours d'étude et 31 en application à des degrés divers, soit un total de 51 plans. Ils représentent plus de 20.000 logements . De même 26 opérations programmées d'amélioration de l'habitat (OPAH) sont à l'étude, tandis que 30 sont en cours, soit un total de 56 OPAH concernant 12.000 logements. Les régions Rhône-Alpes, Ile de France et PACA sont les plus concernées.

3. La résorption l'habitat insalubre (RHI)

Les procédures d'intervention au titre de la RHI ont été également modifiées par la loi « SRU » qui a prévu le renforcement des pouvoirs respectifs du préfet et du maire, ainsi que des mesures plus contraignantes pour les propriétaires et plus protectrices pour les occupants avec la création de la notion de « logement décent garantissant un équipement minimum de confort ».

Pour éviter que les travaux exécutés d'office par la collectivité publique ne soient jamais remboursés, leur paiement est désormais garanti par une hypothèque légale sur l'immeuble, publiée aux frais du propriétaire. En outre, dès qu'un immeuble est déclaré insalubre ou menaçant ruine, il ne peut plus être loué ni mis à disposition d'une manière quelconque. Si les travaux nécessaires pour rendre un logement décent ne sont pas exécutés, le juge peut en réduire le loyer. Enfin, si ses biens sont frappés d'une interdiction d'habiter, le propriétaire a l'obligation de procéder au relogement ou à l'hébergement des occupants (selon que l'interdiction est définitive ou temporaire) ou d'y contribuer.

A côté de ces modifications de la législation, dont les effets utiles ne sauraient se faire sentir qu'à long terme, les pouvoirs publics mènent à bien des opérations lourdes de restructuration urbaine, de nature à modifier plus rapidement l'apparence des quartiers en difficulté.

II. LES OPÉRATIONS DE DÉMOLITION-RECONSTRUCTION

Deux types d'opérations de reconstructions seront évoquée par votre rapporteur. Les premières concernent la démolition, puis la reconstruction de logements . Les secondes intéressent l'activité de l'établissement public de restructuration et d'aménagement des espaces commerciaux et artisanaux .

A. LE SECTEUR DU LOGEMENT

Ces opération consistent, d'une part, en des démolitions pures et simples de logements et, d'autre part, en des modifications substantielles de l'habitat existant.

1. La démolition

Entre 1999 et 2000, le nombre de logements démolis enregistre une progression de + 11,4% (soit 632 logements), qui s'avère, cependant, nettement inférieure à celle constatée de 1998 à 1999 (+56%).

Parmi les 22 régions française, l' Île-de-France arrive en tête avec 1.543 logements démolis, suivie par la Bourgogne (747) et de la région Provence-Alpes-Côte-d'Azur (673). Un tassement du nombre de logements financés est observé en Rhône-Alpes (367 logements).

Les opérations les plus importantes concernent :

- PACA (432 logements de la Cité G. Apollinaire à Avignon) ;

- l'Île-de-France (312 logements de l'immeuble « grand L » à Antony, (Hauts de seine) et 265 logements du bâtiment « Capucine » à la Pierre Collinet (Meaux) ;

- la Bourgogne (296 logements de l'immeuble les Lochères aux «Grésilles » à Dijon ;

- l'Alsace (228 logements aux « Côteaux » à Mulhouse).

Le nombre de logements dont la démolition est financée s'élève à 6.107 pour l'année 2000 . Selon les informations communiquées à votre rapporteur pour avis, l'objectif consistant à assurer la démolition de 10.000 logements à démolir financés en 2001 serait susceptible d'être atteint. Pour l'année 2002, une enveloppe de 500 millions de francs de crédits serait ouverte afin d'atteindre 15.000 logements démolis.

Votre commission serait désireuse que le Gouvernement rende public un échéancier des démolitions envisagées dans les années à venir ainsi qu'une évaluation du coût de ces opérations.

Entre 1996 et 2000, on observe un quadruplement du nombre de logements démolis chaque année, ainsi qu'il ressort du tableau ci-après :

NOMBRE DE DÉMOLITIONS DE LOGEMENTS SOCIAUX
FINANCÉES DE 1996 À 2000


Régions


1996


1997


1998


1999


2000

Dont

déconcentrés

en 2000

Alsace

70

 

40

120

333

75

Aquitaine

360

441

10

50

192

 

Auvergne

132

0

0

0

0

 

Bourgogne

0

104

368

43

747

 

Bretagne

12

0

0

40

66

 

Centre

0

60

273

258

514

98

Champagne-Ardenne

12

0

0

84

121

100

Franche-Comté

108

369

70

64

0

 

Ile de France

180

545

648

1418

1543

427

Languedoc Roussillon

0

0

10

165

222

 

Limousin

0

16

0

48

0

 

Lorraine

80

272

206

559

136

66

Midi-Pyrénées

0

0

128

265

104

14

Nord pas de Calais

441

56

51

310

410

133

Basse Normandie

0

0

320

0

127

 

Haute Normandie

0

48

18

567

286

127

Pays de la Loire

0

318

94

211

266

100

Poitou-Charentes

0

0

0

140

0

 

PACA

98

360

292

272

673

 

Corse

0

65

0

0

0

 

Picardie

0

0

52

248

0

 

Rhône Alpes

250

657

768

640

367

 

France métropolitaine

1743

3311

3518

5502

6107

1140

Source : DIV

Votre Commission des Affaires économiques prend acte de l'accroissement du nombre de démolitions de logements.

A côté des opérations de démolition pure et simple sont parfois menées des opérations plus limitées tendant à requalifier les logements existants.

2. La requalification des logements existants

En 2000, 16 opérations ont été financées. Elles sont, pour l'essentiel, de petites tailles (1 à 10 logements transformés en rez-de-chaussée). La plus importante concerne l'implantation d'activités dans le bâtiment « Bergson » sur le site de la « Grande Résidence » à Lens. Elle touche 32 logements.

Par rapport aux années antérieures, le coût de transformation par mètre carré de logement passe de 4.676 francs à 5.282 franc. Ce coût se rapproche donc du coût moyen d'une construction neuve qui tourne autour de 6.000 francs le mètre carré.

On notera que compte tenu des difficultés tenant au « montage » de ces opérations et au caractère parfois aléatoire de leur équilibre financier, le nombre de logements transformés a baissé de 67% entre 1999 et 2000.

3. L'échec des associations foncières urbaines

La loi du 14 novembre 1996 a autorisé la constitution d'office d'associations foncières et urbaines (AFU), personnes privées investies de prérogatives de puissance publique telles que l'expropriation, afin de permettre des interventions sur des immeubles dégradés ou en voie de dégradation qui appartiennent à des copropriétés dont les membres ne parviennent pas à s'entendre pour y remédier. Afin de créer une telle AFU, il est nécessaire que la disposition des parcelles intéressées compromette la mise en oeuvre d'un programme de restructuration urbaine d'un grand ensemble ou d'un quartier d'habitat dégradé.

Selon les informations communiquées à votre rapporteur pour avis, ces dispositions sont peu utilisées parce que l'exercice du droit de délaissement par les propriétaires opposés au remembrement oblige les collectivités concernées à des acquisitions coûteuses.

Votre commission s'interroge sur la possibilité de mobiliser certains crédits affectés au programme de renouvellement urbain afin d'utiliser le mécanisme des AFU.

B. LE CAS SPÉCIFIQUE DU COMMERCE

La loi du 14 novembre 1996 a prévu la création d'un établissement public spécifique destiné à restructurer les espaces commerciaux des quartiers en difficulté. Régi par le décret n° 97-130 du 12 février 1997 l' Etablissement national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux (EPARECA) a pour principale mission de faciliter les opérations de remembrement des espaces commerciaux et artisanaux implantés dans les quartiers urbains en difficulté en procédant à la création, l'extension, la transformation ou la reconversion de surfaces commerciales et artisanales.

L'article 90 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU) a étendu le champ d'intervention de l'EPARECA, initialement limité aux seules zones urbaines sensibles, à l'ensemble des quartiers reconnus comme prioritaires par les contrats de ville conclus pour la période 2000-2006, qu'ils soient ou non classés en ZUS.

Comme l'avait souligné votre rapporteur pour avis devant votre commission à l'occasion de l'examen des projets de loi de finances pour 2000 puis pour 2001, la mise en oeuvre de l'EPARECA connu quelques vicissitudes. Bien qu'il ait été organisé par le décret précité du 12 février 1997, son premier conseil d'administration ne s'est réuni que le 2 septembre 1998. Il n'a pas effectué d'opération d'investissements en 1999.

Essentiellement consacré à des dépenses de personnel, le budget 1999 s'est élevé à 5,2 millions de francs. En 2000, le budget le budget prévisionnel était de 93,8 millions de francs. Les dépenses d'investissement se sont montées à 9,8 millions de francs et les charges de personnel à 4,5 millions de francs. Ainsi, le total cumulé des charges de personnel des deux premières années était équivalent aux investissements ! Pour 2001, le budget prévisionnel s'établit à 91,4 millions de francs, les charges de personnel étant estimées à 5,2 millions de francs.

En 2000, l'EPARECA a pris des participations dans des sociétés destinées à réaliser des investissements à des fins de restructuration. Le nombre des demandes de participation qui lui ont été adressées s'élevait à 127 à la date du 2 mai 2001. Selon les informations communiquées à votre rapporteur pour avis, 56 de ces dossiers ont été traités parmi notamment lesquels :

- un (Créteil) correspond à une opération qui est réalisée ;

- 5 sont au stade de l'appel d'offres ou à celui des travaux (Argenteuil, Châlon-en-Champagne, Clichy-sous-Bois, Floirac et Hérouville-Saint-Clair) ;

- 7 sont en phase opérationnelle (Bron, Cenon, Mulhouse, Pantin, Reims, Saint-Ouen-L'Aumône et Roubaix) ;

- et 41 sont à l'étude.

Trente neuf autres demandes n'ont pas pu être prises en compte, étant inéligibles ou ayant été abandonnées par les villes concernées. Le reste, des dossiers est en attente.

Votre commission s'interroge sur les raisons pour lesquelles 73 % des demandes « traitées » étaient encore à l'étude le 2 mai 2001.

Elle
souhaite également connaître les raisons pour lesquelles l'EPARECA ne parvient pas encore à répondre à la mission qui lui est confiée par la loi. Elle souhaiterait savoir si c'est réellement faute de moyens humains, ou plutôt à défaut d'une réelle volonté politique qu'une proportion conséquente des demandes adressées à cet établissement public industriel et commercial reste en attente. Elle désire enfin connaître les mesures que le gouvernement, qui assure, au nom de l'Etat, sa tutelle entend prendre pour remédier à une situation inacceptable que le Parlement critique depuis plusieurs années.

III. LES MOYENS DE FINANCEMENT

La Caisse des dépôts et consignations est le principal organisme qui finance les investissements réalisés dans les quartiers en difficulté . Elle a créé, en 1989, les « prêts projets urbains » (PPU) qui sont destinés à la réalisation des investissements et équipements nécessaires à la revalorisation urbaine, sociale et économique de ces quartiers. Ils concernent des opérations situées dans des sites appartenant aux grands projets urbains, aux zones urbaines sensibles, aux zones de redynamisation urbaine et aux zones franches. Il sont également destinés à des opérations de résorption de l'habitat insalubre, et à celles réalisées dans des zones d'éducation prioritaire sur des établissements scolaires. Leur programmation fait l'objet d'un examen concerté par la Délégation interministérielle à la ville, les préfets et la Caisse des dépôts.

Les enveloppes ouverte par la Caisse au titre des PPU ont progressé de façon régulière depuis leur création. Leur montant annuel était de 1 milliard de francs de 1989 à 1992 , puis de 1,5 milliard de francs en 1993 et 1994, de 1,7 milliard de francs en 1995. Il est passé à 7,5 milliards de francs pour la période triennale 1996-1998 (soit 2,5 milliards par an), et enfin à 10 milliards de francs pour la période triennale 1999-2001 (soit 3,3 milliards de francs par an ).

Le montant des versements (prêts consentis), qui s'élevait à 2,9 milliards de francs en 1997, atteint 3,2 milliards en 2001. En 2000, 18% des versements sont réalisés en Ile-de-France où sont concentrés 3 grands projets de ville sur 10, une opération de renouvellement urbain sur 6, et 1 contrat de ville sur 5.

La structure des emprunteurs reste stable : les communes et leurs groupements se situe au niveau de plus de 80 %. Ces éléments attestent du caractère primordial de l'intervention des collectivités locales dans la gestion des opérations dont le financement est assuré par la PPU.

CHAPITRE IV -

LA POLITIQUE DE LA VILLE :
UNE POLITIQUE INTERMINISTÉRIELLE

La politique de la ville revêt, par nature, un caractère interministériel , au confluent des politiques du logement, de la sécurité, et des politiques sociales de l'Etat et des collectivités locales. Elle est également liée à la politique économique et à la politique de l'emploi qui ont une incidence directe sur les conditions de vie des habitants des quartiers en difficulté. C'est pourquoi vote rapporteur présentera, dans le présent chapitre, différents éclairages relatifs à ces différents volets, à commencer par la question de la sécurité.

I. UNE MISSION FONDAMENTALE POUR L'ETAT : ASSURER LA SÉCURITE

Votre Commission des Affaires économiques le rappelle chaque année à l'occasion de l'examen du budget de la ville devant le Sénat : le premier droit auquel prétendent nos concitoyens qui résident dans des quartiers en difficulté est de pouvoir vivre en sécurité . Le gouvernement s'est montré, au moins en paroles, sensible à cette idée, et à semblé faire son aggiornamento sur les questions de sécurité, ce dont votre commission s'est, en son temps, félicitée. L'expérience a cependant prouvé que la violence est, dans certains quartiers véritablement endémique : la découverte d'armements de guerre au cours de l'été et la multiplication des violences contre les agents de la force publique -quand il n'agit pas de leur assassinat pur et simple !- conduisent cependant à s'interroger sur l'efficacité des mesures prises.

Votre rapporteur s'interroge, à ce titre, sur le contenu de la loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne. Suffit-il que son article premier proclame que « La sécurité est un droit fondamental » pour lutter contre le sentiment d'insécurité ?

Il tient, en outre, à souligner le rôle des collectivités locales en matière de sécurité quotidienne et, notamment, celui des centres intercommunaux de prévention de la délinquance.

Le présent rapport s'intéressera principalement à la mise en oeuvre des contrats locaux de sécurité et à la lutte contre la délinquance juvénile.

A. LES CONTRATS LOCAUX DE SÉCURITÉ

Les contrats locaux de sécurité (CLS) conclus entre l'Etat (préfet et procureurs intéressés) et les maires tendent à prévenir la délinquance et à fixer des objectifs précis pour l'intervention de la police et de la gendarmerie, compte tenu des spécificités locales. Les représentants d'autres collectivités locales et d'institutions qui contribuent à la sécurité (éducation nationale en particulier) sont appelés à en être signataires.

Depuis 1997, 544 CLS ont été signés et 213 sont en cours de négociation. Sept sur dix concernent une seule commune et six sur dix des sites faisant l'objet d'un contrat de ville. On constate, en outre, que la quasi totalité des sites faisant l'objet d'un contrat de ville (86 %) sont concernés par un CLS.

L'Etat consacre 230 millions de francs en 2001 à la mise en oeuvre des CLS, outre 110 millions destinés aux traditionnelles opération villes-vie-vacances.

En termes de moyens humains, le Conseil de sécurité intérieure a décidé un renforcement des effectifs destinés à la mise en oeuvre des CLS :

- 4.000 « adultes relais » sur les 10.000 dont la création est prévue sont affectés à la des espaces publics et employés dans des actions d'aide aux familles et de médiation sociale ;

- 16.000 adjoints de sécurité sont employés par la police nationale ;

- 8.000 agents de médiation sociale sont affectés dans les transports, les collectivités locales ou les bailleurs sociaux.

Votre Commission des Affaires économiques considère que l'accroissement des moyens humains précédemment évoqués constitue un complément utile à l'action des services de police. Celui-ci ne saurait, cependant, nullement suppléer le manque de moyens dont souffre la police nationale. C'est pourquoi votre commission réclame un renforcement rapide de ces moyens, dans la mesure où la pénibilité des tâches des policiers dans les quartiers sensibles nécessite que des agents chevronnés y soient affectés.

B. LA LUTTE CONTRE LA DÉLINQUANCE JUVÉNILE

L'action de la justice

Afin de faire face à la diminution constante de l'âge des primo-délinquants, l'ordonnance de 1945 relative à l'enfance délinquante a été modifiée par une loi du 1 er juillet 1996. Le bilan d'application de ce texte montre que les deux procédures les plus utilisées sont :

- la convocation par officier de police judiciaire (le délai de convocation est de dix jours à un mois) ;

- la convocation par officier de police judiciaire aux fins de jugement.

Le délai de passage en audience est d'environ un mois pour chacune de deux procédures.

Selon les informations communiquées à votre rapporteur pour avis, il est à noter que  même si les tribunaux pour enfants tentent de réduire les délais de comparution et de jugement : « actuellement, le temps consacré aux affaires pénales par les juges des enfants dans les tribunaux situés dans les départements comportant de nombreux quartiers en difficulté (Hauts-de-Seine, Val-de-Marne, Seine-Saint-Denis, ...) est environ de 40 à 50% du temps total et continue d'augmenter (à comparer à 25 à 33% il y a une dizaine d'années), et ce parallèlement à la croissance des procédures alternatives aux poursuites . »

Il s'avère, en outre, que le manque d'éducateurs crée des «listes d'attente » avant la prise en charge de la mesure d'enquête ou de contrôle et aide. Il convient toutefois de relever la création des 40 centres de placement immédiat et des 42 centres éducatifs renforcés que réclamait votre commission depuis plusieurs années.

Votre commission réclame que des moyens suffisants soient dévolus au service public de la justice, en ce qui concerne tant le nombre de magistrats que celui des personnels chargés de la protection judiciaire de la jeunesse.

La lutte contre la violence scolaire

En novembre 1997, un plan de prévention et de lutte contre la violence en milieu scolaire a été lancé dans dix sites expérimentaux répartis sur six académies. Il a étendu, en 2000, à quatre nouvelles académies et concerne désormais 20 sites, 506 établissements du second degré et 2338 écoles.

Votre commission souhaiterait connaître les résultats quantifiés de ce plan.

II. LA DIMENSION SOCIALE DE LA POLITIQUE DE LA VILLE

Pour lutter contre les handicaps structurels que connaissent les habitants des quartiers en difficultés (taux de chômage supérieur à la moyenne, illétrisme...), les pouvoirs publics mènent des actions spécifiques les intéressant au sein des politiques globales de l'Etat, à commencer par la politique de l'emploi et par celle de la jeunesse.

A. LA POLITIQUE DE L'EMPLOI

1. Les actions en faveur des chômeurs qui rencontrent des difficultés spécifiques

Plusieurs programmes ont été lancés afin de venir en aide aux chômeurs qui rencontrent des problèmes spécifiques sur le marché du travail : chômeurs de longue durée, personnes très faiblement qualifiées notamment, et celles dont les problèmes sociaux diminuent fortement les chances de trouver un emploi. Il s'agit d'une part programme « nouveaux services, nouveaux emplois », et d'autre part des contrats emploi solidarité et des contrats emploi consolidés, auxquelles s'ajoutent les actions des entreprises d'insertion.

Le programme « nouveaux services, nouveaux emplois »

Créé par la loi n° 97-940 du 16 octobre 1997 le programme « nouveaux services, nouveaux emplois » est destiné à soutenir des activités nouvelles répondant à des besoins non satisfaits par le jeu du marché. Il permet, en outre, à des jeunes d'avoir une première expérience professionnelle.

Le 6 juin 2001, la ministre de l'emploi et de la solidarité a annoncé un ensemble de mesures qui traduisent, selon le « jaune » budgétaire « une nouvelle étape dans l'engagement collectif en faveur des jeunes et des activités », formule qui revient, selon votre Commission des Affaires économiques, à reconnaître que les critiques formulées par la majorité sénatoriale à l'occasion du lancement de ce programme (précarisation des emplois, déconnexion des activités proposées par rapport aux besoins du marché ...) étaient fondées. Il s'avère en effet, qu'au vu des résultats de ce programme la ministre se préoccupe de :

- d'assurer l'avenir professionnel de ces jeunes ;

- de consolider les nouvelles activités qui apportent des services devenus indispensables, et par conséquent de pérenniser ces emplois.

Sans méconnaître la nécessité de permettre aux titulaires d'emplois jeunes de trouver et de conserver un emploi, votre commission considère que la nécessité de proroger le dispositif atteste que celui-ci était bel et bien déficient, et qu'il n'a pas permis créer des emplois durables, sauf pour ceux-ci à être financés par l'Etat.

En termes quantitatifs, on constate que 230.000 emplois ont été créés dont 176.000 dans des associations et des collectivités locales, -dont on notera de nouveau le rôle majeur-.

Le pourcentage des jeunes issus des quartiers en difficulté parmi ceux embauchés dans le cadre de ce programme était de 14 %, ce qui eu égard aux crédits totaux annuellement destinés au programme, correspond à un coût de 455 millions d'euros.

Les contrats emploi solidarité et les contrats emploi consolidés

Les contrats emploi-solidarité
(CES) sont destinés à favoriser l'insertion professionnelles des personnes qui rencontrent des difficultés particulières à l'accès à l'emploi, grâce à l'acquisition de compétences. La durée hebdomadaire de ces contrats est de 20 heures, leur durée maximale de 12 mois, susceptible d'être prolongée jusqu'à 24 mois. Ils sont offerts par des collectivités publiques ou des personnes privées à but non lucratif. La rémunération est fonction du SMIC horaire, l'Etat en prend en charge de 65 à 90 %, le taux étant modulé selon le handicap des personnes employées. Les contrats emplois consolidés (CEC) sont offerts aux titulaires de CES, au terme de ceux-ci.

Selon une étude publiée en octobre 2000, il s'avère que 37 % des titulaires de CEC sont embauchés de façon définitive à l'issue de celui-ci et que plus d'un an après la fin d'un CEC les titulaires de ces contrats ont conservé leur emploi .

En 2001, 298.000 CES seront réellement budgétés, sur les 310.000 prévus par la loi de finances. Pour 2002, 260.000 contrats sont prévus, correspondants à une charge budgétaire de 1,01 milliard d'euros (6,66 milliards de francs). Le nombre de nouveaux CEC susceptibles d'être financés en 2002 est, quant à lui, de 45.000, pour un montant total de 849 millions d'euros (5,57 milliards de francs) inscrits en loi de finances.

L'insertion par l'économie

Deux types de structures contribuent à l'insertion par l'économie : les entreprises d'insertion et les associations intermédiaires . Elles permettent à des personnes dont l' « employabilité » serait faible sur le marché du travail de se réinsérer.

Les entreprises d'insertion
produisent des biens et des services destinés au marché. Toutefois, si leurs ressources proviennent principalement de leurs vente, les aides que leur accorde l'État compensent l'effort spécifique qu'elles consentent pour l'embauche de personnes en difficulté et notamment les surcoûts liés au fort « taux de rotation » des personnes en difficulté et à leur plus faible productivité, aux coûts spécifiques entraînés par leur encadrement et leur l'accompagnement social.

En 2000, 947 de ces entreprises d'insertion étaient conventionnées par l'Etat. Elles avaient embauché 25.440 personnes en insertion (correspondant à 9.825 postes équivalents temps plein), dont environ 21.440 en contrat à durée déterminée (durée maximale de deux ans) sur des postes aidés par une subvention forfaitaire et 4000 dans le cadre de contrats aidés classiques (contrats initiative emploi, contrats d'insertion en alternance).

Ces entreprises interviennent principalement dans le secteur du bâtiment et des travaux publics (23 %), de l'industrie (4 %), de l'environnement et de l'entretien d'espaces verts ou de forêts (17 %), des activités de déchetterie, récupération et commerce d'occasion (20 %), des services culturels et sportifs et des services rendus aux entreprises (11 %), aux particuliers (4 %).

Selon les informations communiquées à votre rapporteur pour avis, les salariés en insertion sont majoritairement des hommes (67 %). Les jeunes représentent 27,8 %, les personnes dont l'âge est compris entre 26-49 ans, 64,3 % et les personnes de plus de 50 ans 7,9 %. Ces personnes recherchent un emploi depuis plus d'un an pour 68,4 % d'entre elles, et 18,4 % sont chômeurs de très longue durée (plus de 3 ans de chômage).

La subvention forfaitaire par poste d'insertion de 50.000 francs pour un équivalent temps plein a été revalorisée de 8.500 francs dans les entreprises d'insertion qui appliquent un accord négocié de réduction du temps de travail. Sur 9.825 postes, 6.790 ont été financés à hauteur de 50.000 francs et 3035 à 58.500 francs.

En 2000, le montant de l'aide de l'Etat aux entreprises d'insertion, qui s'élevaient à 484 millions de francs, a permis de financer 9.825 postes d'insertion en entreprise d'insertion. Les dépenses totales se sont élevées à 559, 2 millions de francs en 2000. Les crédits inscrits dans la loi de finances initiale 2001 (527,2 millions de francs) étaient destinés à financer 10.000 postes d'insertion et 700 postes d'accompagnement. Les crédits inscrits dans le projet de loi de finances pour 2002 (610 millions de francs), permettront de financer 12.000 de ces postes.

Les associations intermédiaires sont des structures qui facilitent l'emploi de personnes précarisées ou en voie de précarisation et assurent un suivi social auprès d'elles. A la fin 2000, on comptait 954 de ces associations qui assuraient l'emploi de 40.805 salariés (en baisse de 7,19 % par rapport à 1999). Les salariés des associations intermédiaires sont majoritairement des femmes (59,3 % du total) et, pour les deux-tiers, de personnes dont l'âge varie entre 26 et 49 ans. Ces salariés effectuent principalement des travaux peu qualifiés, qui constituent à eux seuls près des deux tiers des activités effectuées : emplois auprès de particuliers (51,9 % des heures travaillées), emplois en entreprise ou collectivités (48,1 %) principalement emplois de manutention 8,7 % et emplois d'entretien ou de nettoyage (16,9 %). La durée moyenne d'un contrat annuel est de 64 heures chez les particulier contre 247 heures en moyenne dans les entreprises du secteur marchand et les organismes du secteur non marchand. En 2002, une aide de 35,1 millions de francs (5,35 millions d'Euros) sera destinée à l'accompagnement des publics en difficulté pris en charge par les associations intermédiaires.

2. La lutte contre le chômage des jeunes

Les emplois de ville , créés en 1996, sont destinés au recrutement de jeunes de niveau IV (titulaires du baccalauréat) qui résident en zone urbaine sensible. D'une durée de cinq ans, ces contrats sont rémunérés sur une base allant jusqu'à 120 % du SMIC pour 30 heures hebdomadaires. Ils visent à assurer de nouveaux services au public afin de satisfaire des besoins collectifs non satisfaits (emplois d'agents de médiation sociale, services de proximité notamment). A la fin 1997, 12.300 emplois de ville avaient été créés.

Les emplois jeunes , institués en 1997, les ont remplacés. C'est pourquoi il ne restait plus que 1.700 titulaires d'emplois de ville au 30 juin 2001). Ils sont offerts aux jeunes de 18 à 25 ans, quel que soit le lieu de leur résidence et leur niveau de qualification et aux personnes de 26 à 30 ans qui ne peuvent bénéficier des allocations chômage. En 1999 et 2000, 9.600 jeunes ont été embauchés au titre de ces programmes, ce qui correspondait à 8,4 % des embauches réalisées dans le cadre de ce système. Ce pourcentage tend à diminuer au deuxième semestre 2000 où il atteint 6 %. Selon l'objectif initial fixé par le gouvernement, ce taux aurait dû atteindre 20 %.

D'après les informations communiquées à votre rapporteur pour avis, une forte proportion des jeunes issus des quartiers en difficulté titulaires d'un emploi jeune, et exerce des fonctions d'agents de sécurité ou de médiateurs locaux. Votre commission des Affaires économiques, s'interroge sur les moyens de permettre à ces jeunes de suivre un véritable parcours professionnel à la fin de leur contrat, dans des emplois autres que le gardiennage ou la sécurité. Elle souhaiterait connaître les mesures -et spécialement les actions de formation- que le gouvernement entend prendre à cette fin, pour éviter une « relégation professionnelle » qui cantonnerait ces personnes dans des emplois non qualifiés.

B. LA POLITIQUE DE L'EDUCATION

Le comité interministériel des villes du 30 juin 1998 a souligné la contribution de la politique de l'éducation à la politique de la ville. Cette politique qui est menée dans la continuité depuis plusieurs années passe notamment par un renforcement des moyens du service public de l'éducation nationale dans les quartiers en difficulté.

1. Les résultats en 2000-2001

Le rétablissement de la mixité sociale, l'ouverture de l'école sur la société sont les principaux axes de la politique éducative dans les quartiers sensibles.

L'opération « Ecole ouverte »

Menée depuis près d'une dizaine d'années le mercredi et pendant les vacances scolaires, l'opération « école ouverte » tend à permettre l'accueil des enfants et des jeunes. Initialement réservée aux élèves du second cycle, elle concerne désormais également les élèves des écoles élémentaires.

En 2000, 468 établissements et 63.000 élèves y ont participé.

Cette opération est menée et financée de concert par les ministères de l'éducation nationale, de l'emploi et de la solidarité et par le Fonds d'action sociale. La dotation qui lui est consacrée est de 40 millions de francs.

La prise en charge spécifique des jeunes en difficulté

Le Gouvernement souhaite que les contrats de ville prennent en compte les besoins des jeunes en voie de marginalisation scolaire qui sont menacés de quitter le système éducatif sans y avoir reçu une formation qualifiante.

Des classes relais ont été créés à cette fin. Elles visent à resocialiser et à rescolariser les collégiens qui sont en voie de rejeter l'institution scolaire ou d'être rejetés par celle-ci. Leur fonctionnement repose sur une coopération avec les services de la protection judiciaire de la jeunesse et les collectivités territoriales. Ces dispositifs permettent un accueil temporaire adapté des collégiens dans les classes, offrent une pédagogie différenciée, des parcours individualisés, un encadrement pédagogique et éducatif renforcé combinant les compétences d'enseignants et d'éducateurs. Durant l'année scolaire 1999/2000, 180 dispositifs relais ont été ouverts, dont la plus grande majorité sur les sites concernés par la politique de la ville. A la fin 2001 leur nombre devrait atteindre 250, permettant l'accueil de 5.500 jeunes.

Les internats relais devraient, quant à eux, permettre l'accueil de jeunes qui connaissent des difficultés sociales ou familiales pouvant les conduire à la déscolarisation ou à la violence.

2. Les mesures indemnitaires en faveur des enseignants

La nouvelle carte des zones d'éducation prioritaire (ZEP) établie en 1999 concerne 58.000 enseignants du premier degré et 56.000 du second degré. L'ensemble de ces personnels perçoivent une indemnité de sujétion spéciale de 6.900 francs par an, ce qui correspond à une dotation budgétaire de près de 700 millions de francs.

En outre, les principaux et les principaux-adjoints de collèges classés en ZEP bénéficient, depuis la rentrée 1999, du surclassement de leur établissement. Enfin les personnels administratifs, techniques, ouvriers et de service (ATOSS) qui accomplissent l'intégralité de leur service en ZEP perçoivent une nouvelle bonification indiciaire (NBI).

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Sur proposition de son rapporteur pour avis, la commission a donné un avis défavorable à l'adoption des crédits consacrés à la ville inscrits dans le projet de loi de finances pour 2002.


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