II. LA GESTION DES PERSONNELS ET DES MATÉRIELS : ATOUTS ET DIFFICULTÉS

L'armée de l'air, du fait de la technicité des métiers qu'elle regroupe, a pu accéder sans à-coup au modèle d'armée professionnelle. Cependant, cet atout a des contreparties : les personnels que cette armée recrute et forme sont appréciés du secteur privé, qui est en mesure d'offrir à ces spécialistes reconnus des avantages financiers et de carrière supérieurs à ceux proposés dans le cadre militaire.

Des primes d'attractivité et de technicité, financées sur le Fonds de consolidation de la professionnalisation, ont donc été instaurées pour tenter de réduire la « fuite » de certains de ces spécialistes.

Par ailleurs, la dévolution de tâches annexes de gestion et d'entretien des bases aériennes, antérieurement accomplies par les appelés du service national, à des entreprises privées spécialisées , constitue une solution efficace, mais parfois coûteuse, pour en dispenser le personnel militaire.

Quant à l'entretien programmé des matériels, qui avait atteint un seuil critique à la fin de la précédente programmation , il a été nettement amélioré avec la mise en place de la SIMMAD (Structure intégrée de maintenance des matériels aéronautiques de défense) ; les nécessaires progrès supplémentaires auront cependant un coût marginal élevé, du fait de la technicité accrue des tâches d'entretien restant à accomplir. Cet élément a été souligné devant la Commission par le Général Wolsztynski lors de sa présentation du projet de budget, le 16 octobre 2004.

A. L'ARMÉE DE L'AIR POSSÈDE UNE FORTE ATTRACTIVITÉ QUI FACILITE LA MAJORITÉ DES RECRUTEMENTS

Des difficultés en matière de recrutement peuvent toucher certains métiers annexes, mais pas l'encadrement.

En effet, le métier de pilote, tout comme ceux qui l'accompagnent -navigateurs, contrôleurs...- suscite un attrait constant qui garantit un haut niveau de compétences. De plus, les recrutements portent sur des effectifs limités, ce qui les facilite.

Le renouvellement régulier du personnel est assuré, pour les officiers, par le statut d'officier sous contrat, et pour les sous-officiers et les hommes du rang, par des carrières courtes.

Les recrutements et départs prévus pour 2003 et 2004 sont décrits dans les tableaux suivants :

Recrutement des officiers

Origine

Recrutement

 

2003

2004

Polytechnique

2

2

Ecole de l'air

79

80

Ecole du commissariat de l'air

9

9

Admission sur titre

7

4

Ecole militaire de l'air

79

80

Rang

77

70

Officier sous contrat du personnel navigant

92

110

Officier sous contrat du personnel non navigant

61

60

Total

406

415

Recrutement des sous-officiers

Filières

Recrutement

 

2003

2004

Filière de Rochefort

1 530

1 700

Filière de Saintes

160

160

Total

1 690

1 860

Recrutement des militaires techniciens de l'Air

Recrutement

2003

2004

2 200

1 500

Etat des départs 1997-2003

Officiers

Départs normaux

Départs anticipés

dont pécules

1997

98

313

47

1998

104

328

396

1999

161

306

26

2000

153

307

27

2001

143

282

34

2002

114

298

31

2003

124

300

 

Sous-officiers

 
 
 

1997

NC

2 044

640

1998

302

2 084

819

1999

182

1 896

690

2000

298

2 093

670

2001

126

2 524

849

2002

262

2 098

509

2003

237

1 549

 

Les données 2003 et 2004 sont prévisionnelles.

Rappelons que les officiers de l'armée de l'air sont recrutés pour l'essentiel en vue de carrières longues , c'est-à-dire se déroulant sur au moins 25 ans de service . Pour leur part, les officiers issus du rang, ou recrutés sous contrat, effectuent des carrières plus brèves, ce qui facilite la gestion de l'ensemble de cette catégorie de personnels.

L'armée de l'air considère que « la situation des officiers est satisfaisante, tant sur le plan quantitatif que qualitatif ». Elle enregistre cependant une légère baisse des départs des pilotes sous contrat depuis 2002, essentiellement du fait de la dégradation du marché du travail.

La catégorie des sous-officiers présente un sous-effectif de 1 450 personnes au regard des postes prévus par le budget pour 2003. Pour tâcher d'y remédier, diverses mesures catégorielles ont été arrêtées, dont la création d'une « prime d'attractivité » en faveur de certaines spécialités dont la liste est fixée par arrêté. Ce mode de détermination présente la souplesse requise pour suivre avec efficacité le caractère évolutif des métiers déficitaires.

De plus, les sous-officiers du grade de major peuvent bénéficier d'une prime de technicité.

Le recrutement des militaires du rang engagés (MTA), catégorie créée en 1997 dans la perspective de l'armée de l'air professionnelle, est effectué directement par les commandants de base aérienne dans le vivier local d'emploi . Il s'adresse à une population de niveau scolaire compris entre la troisième et le baccalauréat professionnel.

Ces militaires techniciens de l'air reçoivent une formation en deux phases :

- une phase militaire de six semaines à Saintes, sanctionnée par le certificat militaire élémentaire (CME) ;

- une phase professionnelle dispensée en deux périodes dont le contenu varie suivant chaque domaine d'activité :

. soit une formation professionnelle théorique en école ou centre de formation d'une durée de deux à plusieurs semaines au profit de quelques spécialités ;

. soit une formation professionnelle, en unité, de deux mois, dispensée sous forme de parrainage par l'unité d'affectation du MTA.

Cette formation vise à alterner les cours théoriques et les applications pratiques.

Il est envisagé de réduire le temps de la formation théorique des MTA possédant un acquis professionnel validé par l'éducation nationale , et d'instituer, au profit des MTA de la spécialité « mise en oeuvre avion », une formation théorique afin de leur donner, avant leur formation pratique en unité, des connaissances aéronautiques de base.

Le recrutement des MTA visait initialement à instaurer des carrières courtes pour satisfaire les besoins nés de la professionnalisation ; les jeunes engagés retournaient à la vie civile munis des atouts nécessaires pour réussir leur reconversion. Depuis 2001, ce dispositif a été adapté pour permettre aux plus compétents d'entre eux de se voir offrir des perspectives de carrière au sein de l'armée.

Les recrutements se situent à un niveau qui permettra, à partir de 2004, d'assurer le renouvellement des MTA dont la carrière militaire vient à expiration.

Certains métiers présentent des difficultés spécifiques de recrutements, soit en raison du volume des effectifs, soit en raison de la concurrence qui s'exerce sur le marché de l'emploi. C'est pourquoi l'armée de l'air a réalisé en 2003 une première campagne nationale de recrutement.

Les MTA se répartissaient entre les spécialités suivantes en 2003 :

Spécialité

Répartition au 01 août 2003

Sécurité cabine

109

Mise en oeuvre avion

230

Agent de télécommunication

374

Armements opérationnels

125

Electrotechnicien

217

Mécanicien véhicules

178

Conducteur routier

1 009

Mécanicien atelier

57

Sécurité incendie

1 156

Magasinier

798

Agent d'opérations

457

Exploitant SIC

124

Fusilier commando

3 368

Conducteur de chien

672

Structures des aéronefs

12

Opérateur défense sol-air

174

Entretien des installations

659

Agent bureautique

2 187

Agent de restauration

1 983

Auxiliaire sanitaire

232

Musicien

102

Total MTA

14 223

Mille cinq d'entre eux devraient être recrutés en 2004 . S'agissant des métiers déficitaires, comme les fusiliers commandos ou les conducteurs de chien, les primes d'attractivité peuvent, depuis le 1er janvier 2003, être triplées pour rendre leur rémunération comparable avec celle pratiquée dans le secteur privé.

Quant aux volontaires de l'armée de l'air , leur formation est assurée, depuis janvier 2001, par le commandement des écoles de l'armée de l'air (CEAA), au centre de formation militaire élémentaire (CFME) de Saintes. Cette formation se décompose en trois phases successives :

- une phase d'incorporation et de présentation générale de trois jours ;

- une phase de formation militaire de deux semaines pour les volontaires, et de trois semaines pour les volontaires aspirants ;

- une phase d'adaptation professionnelle en unité de deux mois.

La formation des volontaires a été modifiée en 2002 , pour l'adapter à la population disponible et au emplois accessibles. La délivrance du certificat de formation militaire de base (CMFB) a été confiée au commandant de la base aérienne d'affectation de l'intéressé, à l'issue d'une période probatoire, et non plus au commandant du centre de formation militaire élémentaire.

Cette catégorie regroupe un faible volume de personnels, mais les objectifs de recrutements ont toujours été supérieurs aux recrutements effectifs , comme le décrit le tableau suivant :

 

2001

2002

2003
(01.07.2003)

2004
(prévisions)

 

Aspirants

Volontaires

Aspirants

Volontaires

Aspirants

Volontaires

Aspirants

Volontaires

Objectifs de recrutement

70

360

100

700

100

700

40

120

Contrats signés

49

225

85

601

30

369

 
 

Dossiers à l'étude

 
 
 
 

11

0

 
 

Les prévisions pour 2004, en baisse marquée au regard des années antérieures, prennent acte des difficultés de recrutement qui ont toujours caractérisé cette catégorie de personnel.

B. LE BILAN POSITIF DE L'EXTERNALISATION

Cette pratique, imitée du modèle militaire britannique, mais utilisée pour des tâches beaucoup plus restreintes dans l'armée de l'air française, permet de confier certaines tâches non militaires à des entreprises privées spécialisées.

En 2003, environ 70,5 millions d'euros ont été consacrés à la construction, l'entretien et le gardiennage des infrastructures (20 millions d'euros), le transfert des personnes et des marchandises (24 millions d'euros), la propreté (10 millions d'euros), la maintenance informatique (4,5 millions d'euros) et la formation (5,5 millions d'euros).

L'armée de l'air présente aussi cette initiative : « la professionnalisation, et la réduction de format qui l'ont accompagnée, impliquent un recentrage sur les activités militaires et sur les missions opérationnelles. L'externalisation contribue à la préservation des capacités de combat de l'armée de l'air, tout en dégageant le personnel de l'exercice d'activités non spécifiquement militaires.

C'est pourquoi, depuis l'année 2000, a été généralisée, au profit de toutes les bases aériennes, l'externalisation de l'entretien des locaux et des espaces verts, du ramassage des ordures ménagères et industrielles ainsi que du nettoyage des tenues. Le transport du personnel, l'entretien des installations, le filtrage de certains sites et le soutien bureautiques ont été expérimentés dans une quinzaine de sites en métropole.

L'ensemble des fonctions de soutien du détachement air de Varennes-sur-Allier a été externalisé.

L'armée de l'air a disposé, en 2003, d'une dotation de 25,25 millions d'euros sur son budget de fonctionnement. En 2004, cette dotation budgétaire est portée à 27,25 millions d'euros.

Cette somme ne permettra cependant pas de pérenniser l'ensemble de ses expérimentations. Ainsi, l'externalisation de certaines fonctions de soutien sur le site de Romorantin, prévue en 2004, est reportée ».

L'expérience britannique qui a inspiré ces actions touche un large spectre d'activités ; ainsi, la Royal Air Force confie à des entreprises privées des actions de formation, de soutien général ou technique, de modernisation des systèmes informatiques ou de communication, ainsi que de ravitaillement en vol. S'agissant de ce dernier domaine, cette expérience alimente les réflexions en cours dans l'armée de l'air française sur les modalités optimales d'acquisition d'un futur appareil MRTT (Multi Role Transport Tanker) qui pourrait assurer alternativement des tâches de transport ou de ravitaillement aérien à longue distance et, éventuellement, être obtenu par un financement non conventionnel (crédit-bail), qui permettrait de réduire son coût initial.

C. LA RESTRUCTURATION DES BASES AÉRIENNES A ATTEINT UN PALIER

Dans ce domaine, les innovations observées en 2003, et prévues pour 2004, sont limitées :

- en 2003, le détachement air (DA 114) d'Aix-les-Milles (Bouches du Rhône) a été dissous, et le site sera totalement libéré en 2004 ;

- à Toul, il est prévu de dissoudre, en 2004, les structures de soutien du détachement air 136 ;

L'armée de l'air poursuit par ailleurs certaines adaptations de son organisation : ainsi un escadron de drones sera créé sur la base aérienne de Cognac, et l'ensemble des Mirage IV seront retirés du service , ce qui entraînera la dissolution de l'escadron de renseignement stratégique (ERS) de Mont-de-Marsan et de l'escadron de soutien technique spécialisé (ESTS) de Bordeaux.

Les sommes retirées des aliénations seront reversées au titre V de l'armée de l'air par l'intermédiaire de fonds de concours.

D. LA DISPONIBILITÉ DES MATÉRIELS EST REMONTÉE À UN NIVEAU ACCEPTABLE QU'IL SERA COÛTEUX D'AMÉLIORER

Le taux de disponibilité des matériels aéronautiques avait atteint un niveau critique en 2001, année où elle était globalement évaluée à 50 % du parc. Depuis, la création de la SIMMAD a permis de rationaliser les procédures et d'améliorer nettement ce taux.

Cette structure assure les fonctions qui participent au maintien en condition opérationnelle (MCO) de tous les aéronefs (avions et hélicoptères) et des matériels associés, qui étaient jusqu'ici dispersés au sein des trois armées, de la gendarmerie et de la DGA.

Ce regroupement sous une autorité unique vise à améliorer la disponibilité des aéronefs grâce à une meilleure exécution des activités de MCO (réparations, achats de pièces de rechanges, gestion des stocks) et une maîtrise des coûts, obtenue notamment par la globalisation des marchés.

Le bilan des deux premières années d'exercice de la SIMMAD, conforme aux objectifs, montre une augmentation de la disponibilité moyenne des aéronefs de la défense de 12,2 %, ce qui correspond à 145 appareils supplémentaires disponibles.

Cependant, la poursuite de cette amélioration nécessitera des moyens financiers accrus, car le coût des nouveaux marchés globaux est élevé, du fait du vieillissement des flottes et d'un marché moins concurrentiel pour les matériels spécifiques. Ces éléments s'ajoutent au rattrapage des difficultés antérieures dues à des marchés non passés. Mais l'économie attendue des contrats globaux de longue durée devrait être perceptible à moyen terme.

Depuis sa mise en place, la SIMMAD a élargi ses activités :

- depuis le 1er septembre 2002, elle intègre le MCO des artifices, munitions et armements aéronautiques ;

- depuis le 1er janvier 2003, la SIMMAD assure la maîtrise d'ouvrage déléguée à la distribution des rechanges aéronautiques et de la maintenance des matériels aéronautiques ;

- de ce fait, les effectifs de la SIMMAD sont passés de 580 à 910 personnes ;

- les perspectives de cette structure sont ambitieuses, puisqu'elles portent sur son ouverture à l'international pour le soutien des aéronefs acquis en coopération, comme les hélicoptères NH90, TIGRE, et l'avion de transport A400M.

La forte augmentation des coûts du maintien en condition opérationnelle a conduit le ministère de la défense à lancer, en septembre 2003, un audit de la fonction « Entretien du matériel aéronautique », dont les conclusions sont attendues pour le début de l'année 2004.

La diminution des coûts de maintenance constitue une priorité pour l'armée de l'air : l'adaptation des périodicités d'entretien des matériels à leurs conditions d'emploi et à leur état constaté, la réduction des délais d'immobilisation, l'élimination des matériels sans emploi et l'amélioration des circuits logistiques sont ainsi étudiées.

La disponibilité globale de l'ensemble du parc aérien a atteint 64 % en mai 2003. Cependant, le rétablissement espéré pour 2003 ne pourra être totalement réalisé du fait essentiellement des points suivants :

- retard accumulé dans la passation des commandes (période 98-99),

- réglementation stricte de l'achat public,

- longueur des délais de fabrication des matériels aéronautiques.

Les objectifs de disponibilité fixés à la SIMMAD par le comité directeur le 17 juillet 2001 s'établissaient ainsi :

Année

Disponibilité

Indisponibilité technique

Indisponibilité logistique

2001

> 60 %

< 25 %

< 15 %

2002

> 67 %

< 23 %

< 10 %

2003 1 ( * )

> 75 %

< 20 %

< 5 %

Ces objectifs sont revus annuellement par le comité directeur après affinage du besoin réel des forces.

Le niveau des autorisations de programme attribuées à la SIMMAD pour la mise à niveau des stocks de pièces de rechange a bénéficié, en 2001, d'une augmentation de 88,41 millions d'euros. Cette mesure, qui correspond à environ 10 % des crédits d'entretien programmé des matériels (EPM) Air de la LFI, a été financée par redéploiement provenant d'autres chapitres budgétaires Air. Elle constitue un effort important pour rétablir la disponibilité des appareils. Les montants d'AP alloués en 2002 et en 2003 s'élèvent respectivement à 980 millions d'euros et à 930 millions d'euros 2 ( * ) . Un décret de virement du 22 août 2003 a augmenté cette somme à hauteur de 220 millions d'euros d'AP.

Pour améliorer la disponibilité des flottes aériennes, l'armée de l'air poursuit les objectifs suivants :

- meilleure synergie dans la gestion des stocks ;

- sensibilisation des industriels ;

- études d'amélioration dans le domaine technique ;

- mise en oeuvre de solutions innovantes afin de préserver les matériels.

* 1 Cet objectif est le suivant par type de flotte :

- 75 % pour les flottes Mirage 2000 et Mirage F1

- 65 % pour la flotte Transall C160 et Epsilon

Il est traduit par un nombre d'avions pour les types de flottes suivants :

- 50 avions pour la flotte Alphajet

- 21 avions pour la flotte Tucano

- 9 avions pour la flotte C130

* 2 Les crédits de l'EPM air ont été abondés de 80 M€ de CP en LFR 2002.

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