C. LE DÉVELOPPEMENT DE LA TÉLÉMÉDECINE

L'Assemblée nationale a adopté, sur proposition de notre collègue député Jean Dionis du Séjour, deux nouveaux articles tendant à favoriser le développement de la télémédecine, qui a vocation à soigner le malade à distance.

Ces deux nouveaux articles découlent des réflexions menées par l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST), retracées dans un rapport à paraître sur « les télécommunications à haut débit et Internet au service du système de santé ».

1. La définition de la télémédecine

L'article 18 ter du présent projet de loi définit la télémédecine comme permettant, entre autres, d'effectuer des actes médicaux dans le strict respect des règles de déontologie mais à distance, sous le contrôle et la responsabilité d'un médecin en contact avec le patient par des moyens appropriés à la réalisation de l'acte.

2. Des dispositions relatives aux ordonnances électroniques

L'article 18 quater du présent projet de loi, sous-amendé par le gouvernement, dispose qu'une ordonnance comportant des prescriptions de soins ou de médicaments peut être formulée par courriel, dès lors que trois conditions sont remplies : son auteur doit pouvoir être dûment identifié ; l'ordonnance doit avoir été établie, transmise et conservée dans des conditions propres à garantir son intégrité et sa confidentialité ; un examen clinique du patient doit au préalable avoir été réalisé, sauf, à titre exceptionnel, en cas d'urgence.

Ces éléments devraient être de nature à favoriser le développement de la télémédecine, dont l'OPECST comme le Conseil économique et social 71 ( * ) ont souligné l'intérêt, tout en offrant des garanties nécessaires au patient.

D. LES NOUVELLES MISSIONS DES ORGANISMES GESTIONNAIRES DE L'ASSURANCE MALADIE EN TERMES DE LIQUIDATION MÉDICALISÉE DES DÉPENSES DE SANTÉ

L'article 10 du présent projet de loi constitue une innovation incontestable s'agissant du fonctionnement de notre système de soins. Il permet, en effet, aux caisses d'assurance maladie, avec l'appui du service médical de l'assurance maladie, de vérifier, au moment de la liquidation, sur la base des informations fournies par les assurés ou les professionnels de santé, le respect des dispositions relatives aux règles et référentiels associés au remboursement.

Cet article propose de réécrire le chapitre IV du titre 1 er du livre III du code de la sécurité sociale et son article unique L. 314-1, chapitre qui serait désormais intitulé « Dispositions relatives aux soins pris en charge par l'assurance maladie ».

1. La vérification par les caisses d'assurance maladie des conditions ouvrant droit à la prise en charge des soins des assurés

La nouvelle rédaction de l'article L. 314-1 du code de la sécurité sociale, proposée par l'article 10 du présent projet de loi, dispose que, lorsqu'elles reçoivent les documents établis pour l'ouverture du droit aux prestations de l'assurance maladie, les caisses d'assurance maladie, avec l'appui du service médical de l'assurance maladie, dans le respect du secret professionnel et médical, vérifient trois types de critères conditionnant la prise en charge des frais engagés.

a) Le respect de l'ensemble des conditions générales auxquelles est subordonnée la prise en charge

Le 1° de la rédaction proposée pour l'article L. 314-1 du code de la sécurité sociale fait référence à la vérification par les caisses d'assurance maladie de l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée la prise en charge des soins.

Ces conditions concernent notamment :

- l'exigence, prévue par l'article L. 162-4 du même code, selon laquelle le médecin est tenu de signaler sur l'ordonnance du patient le caractère non remboursable par l'assurance maladie de certains produits, actes et prescriptions ;

- l'exigence, prévue par l'article L. 162-4-1 du même code, selon laquelle le médecin doit indiquer les éléments d'ordre médical motivant l'interruption de travail ou la prescription de transport en vue d'un remboursement ;

- l'exigence, prévue par le nouvel article L. 161-36-2 du même code, introduit par l'article 2 du présent projet de loi, selon laquelle chaque professionnel reporte sur le dossier médical personnel (DMP) du patient les éléments diagnostique et thérapeutiques concernant la personne prise en charge, et selon laquelle le niveau de prise en charge est conditionné par l'autorisation d'accès au DMP donnée au professionnel de santé ;

- le contrôle médical des indemnités journalières organisé par l'article L. 315-2 du même code ;

- le respect des dispositions des articles L. 322-3 et L. 324-1 du même code, liées à la prise en charge des personnes atteintes d'une affection de longue durée (ALD).

b) Le respect de conditions plus spécifiques relatives aux listes de prestations et biens dont le remboursement est assuré par l'assurance maladie

Le 2° de la rédaction proposée pour l'article L. 314-1 du code de la sécurité sociale fait référence à la vérification par les caisses d'assurance maladie que les actes pratiqués ou les traitements prescrits :

- n'excèdent pas les limites et indications prévues par la liste des actes ou prestations réalisées par un professionnel de santé pris en charge par l'assurance maladie (il s'agit de la nomenclature générale des actes professionnels et de la classification commune des actes médicaux), la liste des médicaments pris en charge par l'assurance maladie et la liste des dispositifs médicaux à usage individuel, des tissus et cellules issus du corps humains, quel qu'en soit leur degré de transformation et de leurs dérivés, et de certains produits de santé, pris en charge par l'assurance maladie ;

- respectent les recommandations de bonnes pratiques des cliniques et des références professionnelles mentionnées à l'article L. 162-12-15 du même code.

c) Le respect du contenu des outils conventionnels à disposition des professionnels de santé

Le 3° de la rédaction proposée pour l'article L. 314-1 du code de la sécurité sociale fait référence à la vérification par les caisses d'assurance maladie que les dépenses présentées au remboursement ne méconnaissent pas les engagements conventionnels ou le règlement arbitral, ainsi que les engagements prévus dans les contrats suivants : contrats de bonne pratique, contrats de santé publique, contrats conclus entre les unions régionales des caisses d'assurance maladie (URCAM) et des réseaux de professionnels de santé conventionnés exerçant leur activité à titre libéral, enfin les accords de bon usage des soins.

d) La nécessaire coopération des assurés et professionnels de santé

L'article prévoit également que les assurés sociaux et les professionnels de santé ayant réalisé des actes ou prestations, ou délivré les produits, sont tenus, le cas échéant, de fournir à la caisse ou service médical du contrôle médical les éléments nécessaires aux vérifications.

2. La possible sanction des anomalies constatées par les caisses d'assurance maladie

Lors de l'examen de cet article à l'Assemblée nationale, le gouvernement a fait adopter, avec l'avis favorable de la commission spéciale, un amendement visant à compléter la rédaction proposée pour l'article L. 314-1 précité par un alinéa disposant que, lorsqu'une anomalie est constatée par la caisse ou le service médical, ceux-ci apprécient les responsabilités respectives de l'assuré ou du professionnel de santé dans l'inobservation des règles prévues à cet article.

En fonction de cette appréciation et des irrégularités relevées, il est fait application des procédures prévues au présent code et notamment les mécanismes de sanction introduits par les articles 13, 14 et 15 du présent projet de loi, qui concernent respectivement l'instauration de pénalités financières en cas d'abus ou de fraude des professionnels, des établissements de santé et des assurés ; le renforcement du contrôle des prescripteurs de transports ou d'arrêts de travail ; le renforcement du contrôle des bénéficiaires d'indemnités journalières.

En outre, si l'irrégularité est imputable à l'assuré ou à son ayant droit, la caisse peut décider de ne pas procéder à la prise en charge des soins.

Votre rapporteur pour avis estime que cet ajout adopté à l'Assemblée nationale est indispensable à l'application effective de l'article 10 du présent projet de loi et, par extension, à l'application de l'ensemble des mécanismes de maîtrise médicalisées des dépenses de santé mises en place par le présent projet de loi.

3. Un moyen pour les caisses d'assurance maladie de faire respecter les mécanismes de maîtrise médicalisée des dépenses de santé

Lors de l'examen de cet article à l'Assemblée nationale, M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale, a donné quatre exemples particulièrement significatifs permettant de mieux appréhender les nouvelles missions de « liquidation médicalisée » des organismes gestionnaires de l'assurance maladie.

« Premier cas : un arrêt de travail n'a pas été motivé. La liquidation médicalisée n'a pas pour but de bloquer le paiement des indemnités journalières pour cette raison. Par contre, si la même anomalie est constatée de façon répétée pour les arrêts prescrits par le même médecin, alors la caisse doit le mettre ne demeure de se conformer à l'obligation prévue.

« Deuxième possibilité : le patient atteint d'une affection de longue durée a omis de présenter à plusieurs reprises son PIRES 72 ( * ) . Le dispositif doit permettre une alerte automatique du médecin-conseil qui convoque le patient pour faire le point sur cette situation anormale, en connaître les raisons et voir, avec le médecin qui l'a signé, si le protocole soulève des difficultés de mise en oeuvre ou s'il faut l'ajuster.

« Troisième cas : le patient a présenté au remboursement, dans un délai court, des actes identiques. S'il y a des actes répétés (...), le médecin-conseil doit convoquer la personne, l'entendre sur cette situation et étudier ensuite la situation avec les médecins prescripteurs, notamment le médecin traitant. (...)

« Quatrième cas : le patient a présenté au remboursement, dans un délai court, des prescriptions répétées, redondantes ou comportant des incompatibilités. Là encore, il est possible de générer des alertes automatiques, lesquelles doivent conduire le médecin-conseil à analyser la situation, puis intervenir auprès du patient pour l'entendre sur cette situation et lui faire des recommandations adaptées éviter qu'elle ne se reproduise. Le médecin-conseil doit aussi intervenir auprès des prescripteurs pour les sensibiliser dans un premier temps aux problèmes rencontrés et trouver les moyens d'éviter qu'ils ne se posent de nouveau ».

Votre rapporteur pour avis ne peut qu'approuver les dispositions de cet article qui témoignent d'une réelle modification de perspective s'agissant de la gestion de notre système de santé. Il s'agit bien de donner aux organismes gestionnaires de l'assurance maladie les moyens de faire respecter les dispositifs de maîtrise médicalisée des dépenses de santé .

* 71 Aménagement du territoire et établissements de santé, rapport présenté par M. Michel Picard, juin 2004.

* 72 Protocole inter-régimes d'examen spécial.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page