B. LA CRÉATION D'UNE PARTICIPATION FORFAITAIRE À LA CHARGE DES ASSURÉS

L'idée de mettre en place une franchise à la charge des assurés n'est pas nouvelle. L'article L. 322-2 du code de la sécurité sociale prévoit déjà le principe d'une participation restant à la charge de l'assuré après remboursement par l'assurance maladie.

Toutefois, l'instauration de cette participation n'avait pas eu d'effet responsabilisant dans la mesure où les régimes complémentaires avaient pris en charge ce ticket modérateur qui, en outre, ne s'appliquait pas aux personnes prises en charge à 100 %. Par ailleurs, le déploiement d'un système de dispense d'avance de frais - dit de tiers-payant - a également conduit à masquer la réalité de la dépense et le coût des soins prodigués aux assurés.

C'est la raison pour laquelle l'article 11 du présent projet de loi, qui doit être lu conjointement avec l'article 32, prévoit la mise en place d'un nouveau ticket modérateur en tirant les leçons des échecs passés.

1. Un élément fort de responsabilisation et de modération de la dépense

Ainsi que l'a souligné le Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie, diverses études mettent en lumière l'impact significatif de la participation financière des assurés sur la demande de soins, ainsi que l'impact limité, voire nul, de la participation financière sur l'état de santé des assurés, à l'exception des plus pauvres et des plus malades d'entre eux, dont l'accès aux soins est dégradé.

Une étude menée par la RAND au cours des années 1970 a ainsi montré que plus le ticket modérateur est élevé, plus les individus limitent leur consommation de soins. Un ticket modérateur à 95 % réduit ainsi la dépense totale d'environ 30 % par rapport à ce qui observé lorsque les soins sont totalement gratuits. D'après cette étude, la baisse de la dépense la plus significative est enregistrée lorsque le taux de ticket modérateur passe de 0 % à 25 %. Inversement, dans le cas français, une étude récente a montré que la couverture par une assurance complémentaire accroît de 13 points, pour un assuré, la probabilité d'avoir recours au système de santé.

2. Un mécanisme qui tire les leçons des expériences antérieures

L'article 11 du présent projet de loi prévoit ainsi que les assurés acquittent une participation forfaitaire pour chaque acte ou pour chaque consultation pris en charge par l'assurance maladie et réalisé par un médecin, en ville ou dans un établissement ou centre de santé. Il est toutefois précisé que les actes ou consultations réalisés au cours d'une hospitalisation ne seront pas concernés par cette participation forfaitaire. En outre, l'Assemblée nationale a précisé que l'assuré acquitterait également cette participation pour tout acte de biologie médicale.

Celle-ci se cumulerait avec le ticket modérateur prévu par l'article L. 322-2 précité du code de la sécurité sociale 18 ( * ) . Son montant sera fixé par l'Union nationale des caisses d'assurance maladie (UNCAM), dans des limites et conditions prévues par décret en Conseil d'Etat. Toutefois, jusqu'à l'intervention de la décision de l'UNCAM, le montant de la participation sera fixé par décret. Il devrait s'établir à un euro.

Le II de cet article réécrit l'article L. 322-4 du code de la sécurité afin de prévoir que la participation de l'assuré n'est pas exigée :

- pour ses ayants droit mineurs ;

- pour les bénéficiaires de CMU complémentaire, soit environ 4,7 millions de personnes à la fin 2003.

En procédant à cette réécriture, le II de cet article supprime une disposition régulatrice qui n'a jamais été utilisée. L'article L. 322-4 du code de la sécurité sociale prévoit, en effet, que les taux de participation des assurés « peuvent être modifiés en fonction des résultats financiers du régime sur le plan national ».

Ces dispositions devraient notamment permettre d'éviter de dégrader l'accès aux soins des populations les plus fragiles. En outre, il a été indiqué à votre rapporteur pour avis que, en application de l'article L. 331-1 du code de la sécurité sociale, cette participation ne serait pas exigée pour les femmes enceintes de plus de six mois et les femmes venant d'accoucher, qui relèvent de l'assurance maternité.

L'Assemblée nationale a par ailleurs, sur proposition du gouvernement, fixé deux limites à la participation des assurés :

- d'une part, un décret fixera le nombre maximum de participations forfaitaires supportées par chaque bénéficiaire au titre d'une année civile . M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat à la réforme de l'assurance maladie, a indiqué que le montant fixé devrait avoisiner 50 euros. Sur cette base, d'après les informations transmises à votre rapporteur pour avis, 95 % des assurés n'atteindraient pas ce plafond ;

- d'autre part, il est prévu que, lorsque plusieurs actes ou consultations sont effectuées par un même professionnel de santé au cours d'une même journée, le nombre de participations forfaitaires supportées par le bénéficiaire ne pourra être supérieur à un maximum fixé par décret . Cet ajout est nécessaire pour que l'assuré n'acquitte qu'une seule participation lorsqu'il ira, par exemple, voir un médecin qui effectuerait plusieurs actes (par exemples plusieurs radiographies), ce qui correspond bien à la visée de l'article.

Cette contribution devrait être imputée sur les remboursements. Pour les personnes en dispense d'avance de frais, il a été précisé à votre rapporteur pour avis qu'un « compte créance » serait créé.

En application du III de cet article, le régime local d'assurance complémentaire obligatoire du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle ne pourra pas prendre en charge cette participation.

En outre, celle-ci sera également applicable aux bénéficiaires du livre IV du code de la sécurité sociale, relatif aux accidents du travail et aux maladies professionnelles.

Toutefois, un doute peut subsister sur l'application de ce nouveau forfait aux régimes d'assurance maladie autres que le régime général, la CANAM et la CCMSA. Il a été indiqué à votre rapporteur pour avis que cette participation serait étendue aux autres régimes par voie réglementaire, ce qui est tout à fait essentiel afin de garantir l'égalité de traitement des assurés.

Sur la base d'un euro, cette contribution à la charge de l'assuré dans les conditions ainsi définies pourrait, d'après les informations fournies à votre rapporteur pour avis, permettre à l'assurance maladie de réaliser environ 570 millions d'euros d'économies.

* 18 Cet article est modifié par l'article 23 du présent projet de loi. Sur ce point, cf. infra.

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