EXAMEN EN COMMISSION

Au cours d'une séance tenue le mercredi 17 novembre 2004, la commission a procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Pierre Laffitte sur les crédits pour 2005 de la recherche et des nouvelles technologies .

Un large débat a suivi l'exposé du rapporteur pour avis.

M. Ivan Renar a estimé que le budget de la recherche pour 2005 allait dans le bon sens, mais que beaucoup restait à faire, compte tenu des efforts réalisés par les Etats Unis, le Japon et des pays émergents tels que l'Inde et la Chine. Il s'est félicité que les Assises de la recherche aient permis, sans caractère corporatiste, des prises de conscience et des débats dont l'impact est loin d'être négligeable sur le rapport des citoyens à la science.

Evoquant ensuite la promesse du Gouvernement de consacrer 1 milliard d'euros supplémentaires en faveur de la recherche, il s'est interrogé sur la traduction concrète de cet engagement dans le projet de budget.

Il a souhaité que la responsabilité de la recherche soit confiée à un ministère à part entière, plutôt qu'à un ministère délégué.

Après avoir relevé que le ministère de la recherche consacrait davantage de crédits à la diffusion de la culture technique et scientifique que le ministère chargé de l'enseignement, il a estimé qu'il s'agissait d'une oeuvre de longue haleine et que des progrès restaient à accomplir.

Il a enfin regretté la faible présence des femmes chercheurs aux postes de responsabilité au sein des laboratoires et organismes.

Mme Marie-Christine Blandin a estimé que la hausse des crédits du BCRD et, au sein de celui-ci, du ministère de la recherche, permettait un « redémarrage lent », mais que, compte tenu de la faible progression des crédits de la recherche depuis 2001, le secteur avait en réalité subi un « gigantesque coup de frein ».

Elle s'est ensuite interrogée sur la nature des aides à la recherche. Après s'être déclarée favorable à la synergie que peut permettre la coopération entre secteurs public et privé, elle a jugé que la contribution des entreprises françaises aux fondations ou leur recours au crédit d'impôt recherche ne devait pas les dédouaner d'une plus forte contribution à l'effort de recherche national, alors qu'elles font aujourd'hui preuve d'une trop grande frilosité en la matière.

Elle a ensuite évoqué le contenu même des programmes de recherche ; à cet égard, elle a considéré que les aides apportées par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) aux entreprises permettaient, certes, d'améliorer l'efficacité énergétique mais pas de répondre aux grands enjeux du développement durable. Elle s'est également inquiétée de la nature des programmes de recherche financés par des actions de mécénat. Ainsi, par exemple, les Français contribuent au financement de la recherche dans le domaine de la santé, mais des pans entiers de celle ci peuvent être délaissés ; c'est ainsi que dans le cadre du « plan cancer », les recherches sur les thérapies sont financées, mais que paradoxalement, celles qui concernent l'épidémiologie et la recherche des causes du cancer manquent cruellement de financement. Dans ces conditions, elle a souhaité que des commandes publiques permettent de faire face aux grands défis de l'avenir.

M. Michel Thiollière s'est déclaré partisan de la création d'un grand ministère de la recherche. Il a demandé si les crédits en faveur des pôles de compétitivité bénéficiaient d'ores et déjà d'un « fléchage » dans le projet de budget pour 2005.

Compte tenu du nombre limité des pôles de compétitivité envisagé, à savoir une vingtaine, M. Jean-Léonce Dupont a demandé comment serait résolue l'équation entre la mise en place de ces pôles et l'aménagement du territoire.

Il a ensuite souligné le lien entre l'articulation des secteurs de la recherche et de l'enseignement supérieur et celle des deux ministères aujourd'hui concernés.

S'agissant de la place des femmes au sein des établissements, il a estimé qu'elle progresserait parallèlement à l'évolution des carrières des nombreuses jeunes chercheuses.

M. Jacques Valade, président , a jugé que la future Agence nationale pour la recherche pourra utilement contribuer au financement de projets prioritaires, mais que la création de cette nouvelle agence de moyens nécessitera une redéfinition de la place du Centre national de recherche scientifique (CNRS).

Il a estimé que la répartition des responsabilités entre les différents départements ministériels ne devrait pas pouvoir être remise en cause à chaque changement de Gouvernement mais être fixée définitivement.

M. François Picheral a demandé ce qu'étaient devenus les 550 emplois statutaires supprimés par le projet de loi de finances de 2004.

En réponse aux différents intervenants, M. Pierre Laffitte, rapporteur pour avis , a apporté les précisions suivantes :

- il est possible que le budget pour 2005 soit une préfiguration de la future loi de programmation et d'orientation de la recherche avec, notamment, la création d'un nouvelle agence de moyens, mais il ne résout pas de nombreux problèmes débattus ces derniers mois, y compris à l'occasion des Assises récemment tenues à Grenoble ;

- seule la responsabilisation des laboratoires et des responsables d'équipes peut permettre, grâce à une plus grande flexibilité et souplesse, de libérer les énergies dans les établissements ;

- les grands établissements devraient être associés au fonctionnement de l'Agence nationale pour la recherche et recevoir un financement complémentaire pour certains programmes prioritaires ; certains d'entre eux souhaitent fonctionner eux mêmes comme une agence de moyens ;

- le milliard d'euros supplémentaires consacré à la recherche comprend 350 millions d'euros de crédits extra-budgétaires ainsi que le coût du crédit d'impôt recherche ;

- les crédits consacrés à la diffusion de la culture scientifique restent très concentrés sur la capitale, mais on peut se réjouir de leur utilisation croissante pour des opérations menées en province ;

- les responsabilités en matière de recherche et d'enseignement supérieur devraient être regroupées au sein d'un ministère unique ;

- le budget du ministère de la recherche et le BCRD pour 2005 font suite à deux années peu fastes, mais leur progression est substantielle cette année ;

- il serait nécessaire qu'un budget européen soit consacré à l'innovation, compte tenu de la situation des finances publiques des Etats membres de l'Union européenne ; la proposition du Président de la République de sortir les dépenses de recherche du pacte de stabilité européen doit être soutenue ; par ailleurs, compte tenu du retard pris par l'Europe, et qui s'est accru depuis l'adhésion des nouveaux Etats membres, l'idée d'un grand emprunt de 150 milliards d'euros en faveur de la recherche, auprès de la Banque européenne d'investissement, voit sa crédibilité croître ; d'après les évaluations des services du ministère des finances, le remboursement d'un tel emprunt pourrait être effectué si les investissements qu'il permet de financer contribuent suffisamment à la croissance du PIB (4 fois plus que son coût) ; tel est largement le cas en particulier des investissements en électronique ou en matière d'économie d'énergie ;

- il est nécessaire de mettre en oeuvre un grand programme dans ce dernier domaine, notamment par exemple en matière de normes d'isolation ;

- l'appel d'offres concernant les pôles de compétitivité n'est pas encore paru et la mise en place de ces pôles fait encore l'objet de discussions interministérielles ainsi qu'avec la Délégation à l'aménagement du territoire et à l'action régionale (DATAR) ; néanmoins, les réflexions menées à ce sujet ainsi que sur le développement de zones d'excellence a d'ores et déjà entraîné de nombreux échanges entre industriels ;

- l'ensemble des emplois est maintenu en 2005, y compris les 550 emplois statutaires qui avaient été supprimés, puis rétablis, en 2004.

La commission a ensuite donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la recherche et des nouvelles technologies pour 2005, les groupes socialiste et communiste républicain et citoyen s'abstenant.

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