CHAPITRE II -

UNE POLITIQUE DU COMMERCE EXTÉRIEUR DOTÉE D'UN
SOUFFLE NOUVEAU

I. UNE POLITIQUE DU COMMERCE EXTÉRIEUR REDYNAMISÉE

A. UNE VISION STRATÉGIQUE PRATIQUEMENT FINALISÉE

1. Le recentrage géographique des efforts français : les 25 pays-cibles

Les échanges extérieurs de la France sont nettement dominés par le commerce avec nos partenaires de l'Union européenne (66 % en 2003). Les dix dernières années, toutefois, ont été marquées par une progression de la part de l'Amérique du Nord, jusqu'en 2001 (9,5 % en 2002, soit + 1,7 points depuis 1994), suivie d'un fléchissement du fait du recul du dollar (7,6 % en 2003). Enfin, les pays d'Europe centrale et orientale ont vu leur poids s'accroître sensiblement (4,1 % en 2003, soit + 2,5 points depuis 1994).

A contrario , alors que les parts de l'Amérique latine et de l'Afrique dans nos exportations sont restées stables (respectivement 2,1 % et 5,5 % en 2003), le poids des pays émergents d'Asie s'est réduit en termes agrégés (4,5 % en 2003 après 5,2 % en 1998), suite notamment à la crise financière des années 1997/98, qui a en particulier touché les économies d'Asie du Sud-Est. Et ce alors même qu'à l'importation, la structure de nos échanges a été marquée par la progression des achats en provenance des pays d'Asie émergente (+ 2,3 points).

Comparée à la répartition géographique de la demande mondiale, la structure du positionnement de la France à l'exportation apparaît donc déséquilibrée. Les trois zones Europe occidentale, Proche et Moyen Orient et Afrique absorbent trois quarts de nos exportations, alors qu'elles représentent moins de 45 % du commerce mondial. A contrario, les zones Asie, Amérique du Nord et Amérique du Sud ne contribuent qu'à hauteur de 20 % à nos exportations, alors qu'elles pèsent plus de la moitié du commerce mondial.

Un tel tropisme régional n'est pas en soi une anomalie. Les flux commerciaux ne sont pas seulement déterminés par des facteurs de demande (PIB, population, etc), mais obéissent également à des considérations de distance (géographique, historique et culturelle). Toutefois, l'inadéquation de la structure géographique des exportations françaises à la demande mondiale constitue un désavantage pour la France : les zones sur lesquelles notre présence est forte ont compté parmi les moins dynamiques au cours des deux dernières décennies, alors que les régions sur lesquelles notre présence est faible ont affiché les taux de croissance les plus rapides.

Si rien n'était fait pour réorienter nos flux d'exportations 12 ( * ) , la part de marché mondiale de la France serait ramenée de 5,1 % en 2003 à 4,6 % en 2012. En effet, au cours des cinq dernières années, les dix pays ayant affiché les plus fortes progressions de leur commerce se situent dans le monde émergent, et ce rattrapage devrait logiquement se poursuivre.

L'importance d'une meilleure allocation géographique des échanges est démontrée par les performances allemandes à l'exportation comparativement à celles de la France : alors même que les études tendent à prouver une dégradation de la compétitivité allemande par rapport à celle de la France 13 ( * ) , l'Allemagne a enregistré depuis trois ans de meilleurs résultats à l'exportation que la France en raison d'un meilleur positionnement géographique - l'Allemagne exporte cinq fois plus que nous vers les pays de l'Est et deux fois plus que nous vers l'Asie-, doublé en outre d'une spécialisation dans les secteurs porteurs de l'équipement et de l'automobile. La DREE estime ainsi que, si les exportations françaises avaient été réparties, dès 1995, de la même façon que l'Allemagne, le niveau de nos ventes serait aujourd'hui supérieur de 6 % à ce qu'il est.

C'est pourquoi M. François Loos, ministre délégué au commerce extérieur, a décidé la mise en oeuvre d'un plan de soutien aux exportations vers 25 pays cibles afin d'inciter les entreprises à renforcer leur présence dans les marchés lointains et dans les pays à fort potentiel tout en confortant leur position sur le marché européen.

La DREE a défini cette liste de pays à l'aune de trois critères, deux concernant la demande -la taille du marché et le dynamisme- et le troisième relatif à l'offre -le défaut de présence française-. Deux aménagements ont pondéré cette procédure de sélection : les marchés les plus vastes (dont la part dans les importations mondiales dépasse 3 %) et les priorités diplomatiques, notamment concernant les pays du Maghreb.

Vingt-cinq pays cibles ont ainsi été retenus pour autant de plans d'action commerciales : les Etats-Unis, l'Allemagne, le Japon, le Royaume-Uni, l'Italie, le Canada, la Chine 14 ( * ) , les Pays-Bas, la Corée du Sud, le Mexique, Taiwan, la Malaisie, le Brésil, la Thaïlande, la Turquie, la Pologne, l'Inde, la Russie, Israël, la République tchèque, la Hongrie, l'Afrique du Sud, le Maroc, l'Algérie et le Tunisie.

Généralement, chaque plan d'action commerciale comprend cinq volets :

- mieux cibler l'information produite par le réseau sur les pays considérés ;

- accroître la présence française via les salons professionnels et les opérations de promotion collective ;

- augmenter le nombre de Volontaires Internationaux en Entreprises (VIE) ;

- renforcer la concertation et la mobilisation des partenaires à l'exportation ;

- défendre nos intérêts stratégiques.

D'ores et déjà, des fruits de ces plans d'action commerciale géographiques ont été récoltés, au travers de plusieurs indicateurs mesurant le degré de satisfaction des cinq objectifs visés par le plan. Notamment, un indicateur permet de mesurer la pertinence de l'information proposée sur ces pays : ainsi, le nombre de visites des sites internet des missions économiques, sur douze mois, pour les pays cibles, s'est accru de 23 %. Par ailleurs, un doublement des opérations de promotion sur ces pays-cibles a déjà été opéré entre 2003 et 2004.

Votre rapporteur salue ce travail important qui dessine une stratégie prospective pour notre commerce extérieur . Comment la France peut-elle continuer à exporter quasiment autant en Autriche qu'en Chine 15 ( * ) , et seulement deux fois plus en Inde qu'à Malte 16 ( * ) ?

* 12 Et dans l'hypothèse où nos parts de marché par zone restent stables au cours des dix prochaines années, et chaque région croît au même rythme qu'entre 1990 et 2002.

* 13 Cf. « L'évolution en 2004 de l'écart de croissance entre l'Allemagne et la France : une approche par le commerce extérieur », in Bulletin d'informations économiques et financières n°326 de novembre 2003 (Mission économique de Berlin).

* 14 Si les exportations françaises vers la Chine ont crû de 40 % en 2003, la France représente toujours la même part dans les importations chinoises, du fait de la forte croissance de ces dernières.

* 15 Les ventes de la France à l'Autriche s'élevaient en 2003 à 3,14 Md€, contre 4,5 Md€ vers la Chine.

* 16 Les ventes françaises à l'Inde ont atteint 1 milliard d'euros en 2003, celles à Malte représentant 530 M€.

Page mise à jour le

Partager cette page