EXAMEN DES ARTICLES

ARTICLE 3 - Crédit d'impôt en faveur de l'apprentissage

Commentaire : le présent article propose d'une part, d'étendre le crédit d'impôt majoré en faveur de l'apprentissage aux apprentis juniors concluant un contrat d'apprentissage, et d'autre part, d'instituer un nouveau crédit d'impôt en faveur des entreprises qui accueillent des « apprentis juniors ».

I. LE DROIT EXISTANT

L'article 15 de la loi de programmation de cohésion sociale a institué un crédit d'impôt au bénéfice des entreprises qui emploient des apprentis , en insérant un nouvel article 244 quater G au sein du code général des impôts.

A. LES PERSONNES BÉNÉFICIAIRES

L'article 244 quater G prévoit que les entreprises imposées d'après leur bénéfice réel ou exonérées en application des articles 44 sexies , 44 sexies A, 44 octies et 44 decies du code général des impôts, employant des apprentis peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt égal à 1.600 euros ou à 2.200 euros par apprenti.

Outre les entreprises mentionnées ci-dessus, les associés de certaines sociétés de personnes ou de groupements peuvent bénéficier du crédit d'impôt, calculé par les sociétés ou les groupements concernés, proportionnellement à leurs droits dans ces organismes .

Ces associés doivent pour cela être redevables de l'impôt sur les sociétés , ou participer , en tant que personne physique, à l'exploitation de l'activité de façon personnelle, continue et directe (au sens du 1° bis du I de l'article 156 du CGI).

B. LE MONTANT DU CRÉDIT D'IMPÔT

Le montant total du crédit d'impôt dont peut bénéficier une entreprise est égal au produit du montant de 1.600 euros - ou 2.200 euros - par le nombre moyen annuel d'apprentis.

La majoration de 600 euros par apprenti s'applique lorsque :

- l'apprenti a la qualité d'un travailleur handicapé ;

- l'apprenti, sans qualification, est âgé de 16 à 24 ans, et bénéficie de l'accompagnement personnalisé prévu par l'article L. 322-4-17-1 3 ( * ) du code du travail ;

- l'apprenti est employé par une entreprise portant le label « Entreprise du patrimoine vivant » 4 ( * ) .

Le montant total du crédit d'impôt est calculé en fonction du « nombre moyen annuel d'apprentis ». Ce nombre correspond au nombre d'apprentis dont le contrat avec l'entreprise a été conclu depuis au moins un mois . Ce seuil, déterminé par la loi du 26 juillet 2005 relative au développement des services à la personne et à diverses mesures en faveur de la cohésion sociale, était auparavant fixé à 6 mois afin de réduire les effets d'aubaine. Toutefois, l'appréciation de la durée minimale de 6 mois s'est avérée complexe, de nombreuses entreprises ne pouvant pas être éligibles au crédit d'impôt compte tenu des cycles de formation débutant bien souvent en septembre ou en octobre, soit, 3 ou 4 mois avant la fin d'année. Le seuil a été par conséquent abaissé à un mois.

En outre, le décret d'application de l'article 244 quater G en date du 31 mars 2005 a prévu une forme de proratisation du crédit d'impôt , c'est-à-dire que le montant du crédit d'impôt est calculé en fonction du temps de présence de l'apprenti au sein de l'entreprise durant l'année et plafonné à 1.600 euros ou 2.200 euros par an et par apprenti. L'entreprise doit toutefois avoir employé l'apprenti au moins un mois pour être éligible au crédit d'impôt.

Enfin, le crédit d'impôt ne peut excéder le montant des dépenses afférentes aux apprentis, minorées des subventions publiques reçues en contrepartie de leur accueil par l'entreprise.

C. LES MODALITÉS D'IMPUTATION DU CRÉDIT D'IMPÔT

Les règles d'imputation du crédit d'impôt sont identiques :

- qu'il bénéficie à un associé d'une société ou d'un groupement, qui le déduira alors de l'impôt sur le revenu dont il est redevable, conformément à l'article 199 ter F du CGI ;

- ou qu'il bénéficie directement à l'entreprise ou à une société mère, qui le déduira alors de l'impôt sur les sociétés qu'elle doit acquitter, conformément à l'article 220 G du CGI ;

Si le montant du crédit d'impôt excède l'impôt dû, l'excédent est restitué .

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A. L'EXTENSION DE LA MAJORATION DU CRÉDIT D'IMPÔT EN FAVEUR DE CERTAINS APPRENTIS

Le du I du présent article propose de compléter l'article 244 quater G du code général des impôts relatif au crédit d'impôt en faveur de l'apprentissage.

Il s'agit d'ajouter une nouvelle catégorie d'apprentis donnant droit au taux majoré du crédit d'impôt, à savoir les apprentis juniors qui signent un contrat d'apprentissage conformément à l'article 1 er du présent projet de loi.

Le du I du présent article apporte une clarification rédactionnelle quant au mode de calcul du crédit d'impôt.

B. LA CRÉATION D'UN NOUVEAU CRÉDIT D'IMPÔT EN FAVEUR DES ENTREPRISES QUI ACCUEILLENT UN « APPRENTI JUNIOR »

Le du I du présent article propose de réécrire le IV de l'article 244 quater G du code général des impôts afin d'instituer un nouveau crédit d'impôt en faveur des entreprises qui accueillent des « apprentis juniors » dans le cadre de « l'initiation aux métiers ».

Le montant du crédit d'impôt s'élève à 100 euros par élève accueilli et par semaine de présence dans l'entreprise .

Le crédit d'impôt est plafonné à 2.600 euros annuel , ce qui correspond à l'accueil, au sein de l'entreprise, d'un apprenti junior à hauteur de 26 semaines par an.

La nouvelle rédaction proposée pour le IV de l'article 244 quater G du CGI entraîne la suppression de la durée minimale de présence de l'apprenti dans l'entreprise pour que celle-ci puisse bénéficier du crédit d'impôt au titre des apprentis qu'elle accueille.

C. ENTRÉE EN VIGUEUR

Conformément au II du présent article, les entreprises pourraient bénéficier de l'extension de la majoration du crédit d'impôt en faveur de l'apprentissage ainsi que du nouvel crédit d'impôt lié aux apprentis juniors à compter des exercices ouverts au 1 er janvier 2006.

III. LES MODIFICATIONS ADOPTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté le présent article sans modification.

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A.UN APPUI FISCAL AU DISPOSITIF « D'APPRENTI JUNIOR »

L'article 1 er du présent projet de loi met en place une nouvelle forme d'apprentissage ouverte aux élèves ayant atteint l'âge de 14 ans. Baptisée « apprentissage junior », cette formation comprendrait deux phases :

- l'apprentissage junior initial , avec d'une part, une initiation aux métiers ouverte aux élèves âgés de 14 ans au moins , sous statut scolaire , dans un lycée professionnel ou un centre de formation des apprentis (CFA), avec des stages en milieu professionnel . Les élèves concernés pourraient à tout moment réintégrer un établissement scolaire. Par ailleurs, le projet de loi prévoit une gratification financière lorsque les périodes de stage dépassent une durée fixée par décret. Cette initiation a vocation à remplacer les classes de préapprentissage (CPA) et de classes d'initiation préprofessionnelle en alternance (CLIPA)

- l'apprentissage junior confirmé , avec un contrat d'apprentissage pouvant être signé par un jeune d'au moins 15 ans , avec l'accord de son représentant légal et sur recommandation de l'équipe pédagogique. Ce contrat pourrait avoir une durée supérieure à 2 ans.

L'article 3 du projet de loi a ainsi pour objet d'appuyer fiscalement les entreprises qui participent à ce dispositif.

L'augmentation du nombre de places en apprentissage n'est pas une préoccupation franco-française comme en témoigne la récente reconduction jusqu'en 2010 du pacte national d'apprentissage en Allemagne et dont l'objectif est de créer 30.000 nouvelles places d'apprentis par an.

Compte tenu du taux élevé du chômage des jeunes en France ainsi que la proportion d'élèves sortant sans qualification du système scolaire (15.000 jeunes), votre rapporteur pour avis approuve la mise en place d'un dispositif d' « apprenti junior », qui offre la possibilité aux jeunes qui le souhaitent de s'orienter rapidement vers une voie professionnelle et d'avoir une connaissance du milieu de l'entreprise.

Cela étant votre rapporteur pour avis souhaite faire les remarques suivantes.

En premier lieu, il convient de s'interroger sur le caractère réellement incitatif du crédit d'impôt mis en place en faveur des entreprises accueillant des jeunes dans le cadre de l'apprentissage junior initial . En effet, le crédit d'impôt accordé à l'entreprise est de 100 euros par semaine, cette somme étant destinée à compenser les dépenses occasionnées par l'accueil d'un apprenti junior. Ces dépenses recouvrent non seulement les dépenses liées à la mise à disposition de personnel pour l'accueil de ce (ces) jeune(s) mais également les frais afférents à la gratification dont peut bénéficier l'apprenti , de l'ordre de 50 euros par semaine.

En second lieu, votre rapporteur pour avis s'interroge sur l'opportunité de supprimer toute condition minimale de présence des apprentis au sein de l'entreprise pour que cette dernière puisse être éligible au crédit d'impôt en faveur de l'apprentissage. Si initialement, l'entreprise ne pouvait bénéficier de ce crédit d'impôt qu'au titre des apprentis qu'elle employait depuis au moins six mois, ce seuil est passé à un mois en juillet 2005 5 ( * ) et disparaît dans l'actuel projet de loi . Certes, le décret d'application du 31 mars 2005 a prévu une forme de proratisation du crédit d'impôt (cf. supra ).

Votre rapporteur pour avis souligne toutefois que la diminution, puis suppression, de toute condition de durée minimale de présence dans l'entreprise ne favorisent pas une diminution des ruptures rapides ou anticipées des contrats d'apprentissage, ruptures que souhaitait limiter la loi de programmation pour la cohésion sociale . Par ailleurs, il ne serait pas satisfaisant qu'une entreprise bénéficie d'un crédit d'impôt, même calculé sur un mois, alors que l'apprenti n'a pas été présent au sein de l'entreprise durant l'ensemble de cette période . Dans ce cadre, il vous proposera un amendement tendant à maintenir la condition minimale de présence de un mois.

B. UNE ESTIMATION DIFFICILE DU COÛT FISCAL

L'estimation du coût fiscal des mesures proposées par le présent article est délicate.

S'agissant de l'extension du crédit d'impôt majoré aux contrats d'apprentis juniors :

- il est difficile, d'une part, d'estimer combien de jeunes parmi la population des élèves de CPA et de CLIPA (futur public de l'apprentissage junior initial), sont susceptibles de signer un contrat d'apprentissage dans le cadre de l'apprentissage junior confirmé. Actuellement, 10.000 jeunes fréquentent ces classes ;

- il convient, d'autre part, de souligner que l'impact budgétaire de cette mesure n'interviendra pas avant l'exercice 2008, puisque les premiers contrats d'apprentis juniors seront signés au plus tôt à la rentrée 2007.

S'agissant de la mise en place d'un nouveau crédit d'impôt en faveur des entreprises qui accueillent des jeunes dans le cadre d'une initiation aux métiers, le ministère de l'emploi et de la cohésion sociale estime le coût maximal de la mesure à 26 millions d'euros en année de démarrage . Il s'agit d'une estimation haute et théorique , correspondant à l'accueil en entreprise de l'ensemble des élèves actuellement en CPA ou CLIPA dans la limite de 26 semaines annuelles. L'évaluation du coût est malaisée car la réussite de ce dispositif est tributaire de l'accueil qui sera réservé par les entreprises à ce dispositif.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'émettre un avis favorable sur cet article ainsi modifié.

* 3 « Toute personne de seize à vingt-cinq ans révolus en difficulté et confrontée à un risque d'exclusion professionnelle a droit à un accompagnement, organisé par l'Etat, ayant pour but l'accès à la vie professionnelle. »

* 4 Cf. loi du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises.

* 5 Cf. article 26 de la loi n° 2005-481 du 26 juillet 2005.

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