CHAPITRE IV (NOUVEAU) : FAVORISER LA CONCERTATION DANS L'ENTREPRISE

ARTICLE 14 quinquies (nouveau)
Organisation de débats par l'employeur sur l'évolution de la démarche participative

Commentaire : adopté par l'Assemblée nationale, avec l'avis favorable du gouvernement, le présent article est issu de deux amendements identiques de nos collègues députés Jean-Michel Dubernard, rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles, et Patrick Ollier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Il prévoit l'organisation par l'employeur de débats sur l'évolution de la démarche participative.

Le présent article, adopté par l'Assemblée nationale avec l'avis favorable du gouvernement, est issu de deux amendements identiques de nos collègues députés Jean-Michel Dubernard, rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles, et Patrick Ollier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.

Cet article prévoit l'organisation par l'employeur de débats, en comité d'entreprise, sur l'évolution de la démarche participative, dans les entreprises où a été mis en place un dispositif d'épargne salariale .

Votre rapporteur pour avis approuve pleinement l'initiative de nos collègues députés. Il estime toutefois que la notion de « démarche participative » est floue : en effet, l'épargne salariale a bien comme objet d'instituer une logique de « gestion participative », laquelle place l'homme au coeur des préoccupations de l'entreprise tout en soulignant la responsabilité de gestion du chef d'entreprise.

Il vous est ainsi proposé un amendement pour introduire la notion de « gestion » participative dans le code du travail .

Décision de la commission : votre commission émet un avis favorable sur cet article ainsi modifié.

TITRE II : DÉVELOPPER L'ACTIONNARIAT DES SALARIÉS
CHAPITRE 1ER : AMÉLIORER LA PARTICIPATION DES SALARIÉS À LA GESTION DE L'ENTREPRISE

ARTICLE 15
Représentation des salariés actionnaires dans les organes de direction des sociétés cotées

Commentaire : le présent article modifie les articles L. 225-23 et L. 225-71 du code de commerce afin de redéfinir l'obligation et les modalités de mise en oeuvre de la représentation des salariés actionnaires dans le conseil d'administration ou le conseil de surveillance des sociétés cotées, dès lors que ces actionnaires possèdent plus de 3 % du capital de l'entreprise.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LE RENFORCEMENT RÉCENT DE LA GOUVERNANCE D'ENTREPRISE

La période récente, marquée par la thématique du « gouvernement d'entreprise » a vu l'adoption d'un certain nombre de mesures tendant à réhabiliter les actionnaires et à renforcer l'équilibre des pouvoirs entre l'assemblée générale et l'organe de direction ou d'administration. On peut ainsi notamment mentionner :

- l'abaissement à 5 % du seuil de détention du capital ouvrant diverses prérogatives (demande en justice de récusation pour juste motif des commissaires aux comptes, question écrite au président sur des opérations de gestion de la société, expertise de gestion, inscription de résolutions à l'ordre du jour de l'assemblée générale) aux actionnaires et à leurs associations ;

- l'obligation de vote ou d'explication de l'abstention pour les gérants d'organismes de placement collectif en valeurs mobilières ;

- l'assouplissement des conditions d'agrément ou de représentativité des associations d'investisseurs et de leur recours à la publicité ;

- l'amélioration de l'information des actionnaires sur l'affectation des rachats d'actions aux différents objectifs ;

- ou le rôle central conféré à l'assemblée générale dans l'adoption de mesures de défense contre une offre publique d'acquisition et l'activation ex ante de la clause dite « de réciprocité ».

B. L'IMPARFAITE REPRÉSENTATION DES SALARIÉS ACTIONNAIRES

Les salariés constituent toutefois une catégorie particulière d'actionnaires en ce qu'ils sont à la fois immergés dans la vie de l'entreprise et parties prenantes du contrôle et de la vigilance exercés par les actionnaires-propriétaires. Cette conjonction est susceptible de leur conférer la possibilité, prévue par certaines dispositions légales, d'accéder aux organes dirigeants de la société.

S'agissant des salariés , qu'ils soient ou non actionnaires, l'article L. 225-27 du code de commerce permet aux statuts sociaux de prévoir que le conseil d'administration comprenne des administrateurs élus par le personnel de la société, ou le cas échéant, du groupe . Le nombre de ces administrateurs ne peut être supérieur à quatre ou, dans les sociétés cotées, à cinq, ni excéder le tiers du nombre des autres administrateurs.

L'article L. 225-23 du code de commerce, successivement modifié par la loi n° 2001-152 du 19 février 2001 sur l'épargne salariale, la loi relative aux nouvelles régulations économiques n° 2001-420 du 15 mai 2001, et par la loi de modernisation sociale n° 2002-73 du 17 janvier 2002, est plus particulièrement dédié aux actionnaires salariés et définit les conditions de leur représentation obligatoire au sein du conseil d'administration . L'article L. 225-71 du même code prévoit des dispositions analogues pour les sociétés « dualistes » à directoire et conseil de surveillance.

L'article L. 225-23 prévoit ainsi que lorsque les actions détenues par le personnel de la société ou du groupe représentent une fraction supérieure à 3 % du capital social , un ou plusieurs administrateurs doivent être nommés par l'assemblée générale sur proposition des actionnaires, parmi les salariés actionnaires ou, le cas échéant, les salariés membres du conseil de surveillance d'un fonds commun de placement d'entreprise (FCPE) détenant des actions de la société. Ces administrateurs ne sont pas pris en compte pour la détermination du nombre minimal et du nombre maximal d'administrateurs.

Si l'assemblée générale extraordinaire ne s'est pas réunie dans un délai de dix-huit mois, tout salarié actionnaire peut demander au président du tribunal statuant en référé d'enjoindre sous astreinte au conseil d'administration de convoquer une assemblée générale extraordinaire et de soumettre à celle-ci les projets de résolutions tendant à modifier les statuts en vue de la représentation des salariés actionnaires.

Ces dispositions sont toutefois mal appliquées, compte tenu de la non publication des décrets d'application afférents aux conditions de nomination de ces administrateurs, ce qui « traduit les résistances multiples rencontrées pour développer l'actionnariat salarié et pour définir de nouvelles règles de gouvernance », ainsi que le soulignaient nos collègues députés François Cornut-Gentille et Jacques Godfrain dans leur rapport de septembre 2005 sur le développement de la participation 34 ( * ) ,

Il convient enfin de mentionner l'article L. 443-5 du code du travail, qui prévoit que les sociétés peuvent procéder à des augmentations de capital réservées aux adhérents d'un plan d'épargne d'entreprise.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article modifie les articles L. 225-23 et L. 225-71 du code de commerce, précités, pour redéfinir l'obligation et les modalités de mise en oeuvre de la représentation des salariés actionnaires dans le conseil d'administration ou le conseil de surveillance des sociétés cotées , dès lors que ces actionnaires possèdent plus de 3 % du capital de l'entreprise, conformément au seuil actuel.

Le A du I du présent article dispose donc que les dispositions des articles L. 225-23 (s'agissant des sociétés « monistes » à conseil d'administration) et L. 225-71 (pour les sociétés « dualistes ») sont applicables « dans les sociétés dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé ». Le B apporte une précision importante puisqu'il prévoit que les conditions de nomination des salariés actionnaires en tant qu'administrateurs ne sont pas fixées par décret, mais par les statuts . Il en résulte que le régime de nomination des administrateurs serait désormais d'application directe.

Le II du présent article tend à conforter cette effectivité en imposant un délai de modification des statuts . Il précise ainsi que cette modification doit intervenir par décision de l'assemblée générale extraordinaire, qui se réunit au plus tard à la date de la prochaine assemblée générale ordinaire suivant la publication de la loi.

Ce dispositif se veut donc réaliste puisqu'il renforce le caractère obligatoire de la représentation des salariés actionnaires, mais en restreint le champ aux sociétés cotées. Néanmoins, ainsi que le rappelle l'exposé des motifs du présent projet de loi, dans les sociétés non cotées et plus particulièrement dans les petites et moyennes entreprises, les actionnaires représentant plus de 5 % du capital peuvent déposer une résolution en assemblée générale tendant à présenter des candidats aux organes de direction, en application de l'article L. 225-105 du code de commerce.

III. LES MODIFICATIONS ADOPTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté deux amendements :

- un amendement du gouvernement remplaçant le troisième alinéa du présent article et prévoyant que la désignation des représentants des salariés actionnaires s'effectue sur la base d'un vote préalable de l'assemblée générale . La rédaction proposée permet ainsi de garantir que ces représentants sont eux-mêmes des salariés actionnaires ;

- sur proposition de nos collègues députés Jean-Michel Dubernard, rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles, et Dominique Tian, et avec l'avis favorable du gouvernement, un amendement précisant d'une part, que la durée du mandat d'un administrateur représentant les salariés actionnaires est conforme au droit commun, fixé par l'article L. 225-18 du code de commerce 35 ( * ) , et d'autre part, que ce mandat prend fin par l'arrivée du terme ou la rupture du contrat de travail, la qualité de salarié étant un élément déterminant de l'éligibilité aux fonctions d'administrateur représentant des salariés actionnaires.

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre rapporteur pour avis considère que les dispositions du présent article sont de nature à permettre la nécessaire applicabilité réelle du régime de représentation des salariés actionnaires . La nature même des sociétés cotées, dont l'accès à l'épargne publique implique un régime particulier de gouvernance et des principes d'organisation plus stricts, justifie le caractère impératif de ces dispositions.

L'élection des salariés actionnaires impliquera certes une procédure de vote que les organes dirigeants des sociétés cotées pourront juger lourde, mais elle constitue un facteur de démocratie actionnariale à laquelle votre commission se montre traditionnellement attachée.

Décision de la commission : votre commission émet un avis favorable sur cet article.

ARTICLE 15 bis (nouveau)
Pérennité de la représentation des salariés dans les organes de direction des sociétés anciennement privatisées

Commentaire : le présent article modifie la loi n° 86-912 du 6 août 1986 relative aux modalités des privatisations afin de prévoir que les statuts des sociétés privatisées en application de l'article 4 cette loi ne pourront être modifiés, de telle sorte que le nombre des représentants des salariés ou des salariés actionnaires au sein du conseil d'administration ou du conseil de surveillance, selon le cas, ne puisse être inférieur à un certain seuil, fonction de la taille de l'instance.

I. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Sur proposition de notre collègue député Jean-Michel Dubernard, rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles, et avec l'avis de sagesse du gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté un amendement - originellement inspiré par notre collègue député Edouard Balladur - tendant à pérenniser un seuil minimal d'administrateurs salariés et salariés actionnaires dans l'organe de direction (conseil d'administration ou de surveillance) des sociétés qui ont fait l'objet d'un transfert au secteur privé dans le passé .

Dans sa rédaction issue de l'article premier de la loi n° 94-640 du 25 juillet 1994 relative à l'amélioration de la participation des salariés dans l'entreprise, l'article 8-1 36 ( * ) de la loi n° 86-912 du 6 août 1986 relative aux modalités des privatisations prévoit que les statuts des entreprises publiques, dont la privatisation a été ultérieurement décidée en application de l'article 2 de la loi de privatisation n° 93-923 du 19 juillet 1993, doivent stipuler que le conseil d'administration ou le conseil de surveillance, selon que la société est « moniste » ou « dualiste », doit comprendre deux ou trois membres représentant les salariés, selon le nombre de membres composant ces instances. Les salariés actionnaires sont quant à eux représentés par un administrateur ou un membre du conseil de surveillance.

En ce qui concerne les entreprises publiques privatisées entre 1986 et 1988, en application de l'article 4 37 ( * ) de la loi n° 86-793 du 3 juillet 1986 autorisant le gouvernement à prendre diverses mesures économiques et sociales, la présence d'administrateurs salariés constituait l'une des conditions de fait - et non de droit - auxquelles la privatisation était soumise. Cette condition a été respectée dans les faits par les entreprises privatisées entre 1986 et 1988, en dépit de la différence de régime juridique entre les sociétés issues des deux cycles de privatisations.

Il importait néanmoins, ainsi que l'a rappelé lors des débats à l'Assemblée nationale notre collègue député Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, d'harmoniser les deux régimes et d'asseoir le fondement législatif de la représentation des salariés dans les sociétés privatisées sous l'empire de la loi de 1986.

En outre, un certain nombre de ces sociétés ont vu ultérieurement la composition de leurs instances dirigeantes modifiée à la suite de fusions ou d'acquisitions et ont été tentées de revenir sur cette règle . Il est dès lors apparu utile, aux yeux des promoteurs de l'amendement, de prévoir que les entreprises publiques privatisées ne puissent s'en affranchir , quelles que soient les modifications apportées par la suite à la composition de leurs instances dirigeantes.

Le présent article dispose donc que les statuts de toute société privatisée en application de l'article 4 de la loi précitée du 3 juillet 1986, qui ont prévu que le conseil d'administration ou le conseil de surveillance, selon le cas, comprend au moins deux membres représentant les salariés ou les salariés actionnaires, ne peuvent être modifiés de telle sorte que ce nombre soit inférieur à un certain seuil .

Ce seuil, fixé dans l'amendement à deux représentants, a été précisé par un sous-amendement de notre collègue député Patrick Ollier, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques, qui établit une distinction selon la taille de l'organe dirigeant :

- un représentant si le conseil d'administration ou de surveillance compte moins de quinze membres ;

- deux représentants s'il compte plus de quinze membres.

M. Patrick Ollier a justifié cet aménagement par la nécessité de tenir compte des situations de rapprochement des entreprises françaises avec d'autres entreprises européennes, et par la conformité au principe de proportionnalité établi par la loi du 25 juillet 1994 relative à l'amélioration de la participation des salariés dans l'entreprise, précitée.

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre rapporteur pour avis comprend les motivations du présent article, qui entend garantir une représentation minimale des salariés et salariés actionnaires dans les organes dirigeants de sociétés privatisées ayant connu un certain nombre de transformations.

Il s'interroge néanmoins sur l'atteinte éventuelle à la liberté statutaire des sociétés comme au principe d'équivalence de régime entre entreprises issues de deux cycles de privatisations, et sur le caractère potentiellement rétroactif de ce dispositif, près de vingt ans après la privatisation des sociétés concernées.

Il subsiste donc des incertitudes sur la constitutionnalité de ces dispositions , déjà soulevées par Mme Christine Lagarde, ministre déléguée au commerce extérieur, lors de l'examen du présent projet de loi à l'Assemblée nationale le jeudi 5 octobre 2006. Votre rapporteur pour avis estime, dès lors, que des précisions pourraient être utilement apportées par le gouvernement lors de l'examen au Sénat.

Il rappelle, en outre, que nombre des sociétés anciennement privatisées sont aujourd'hui cotées , et sont dès lors soumises aux nouvelles modalités de mise en oeuvre de la représentation des salariés actionnaires au sein du conseil d'administration et de surveillance, et en particulier au seuil de 3 %, telles qu'elles sont modifiées par l'article 15 du présent projet de loi.

Décision de la commission : sous le bénéfice de ces observations, votre commission émet un avis favorable sur cet article.

* 34 « Une ambition, la participation pour tous », rapport au Premier ministre de MM. François Cornut-Gentille et Jacques Godfrain, remis le 29 septembre 2005, p. 60.

* 35 Cet article précise en particulier que la durée du mandat des administrateurs est déterminée par les statuts sans pouvoir excéder six ans en cas de nomination par les assemblées générales et trois ans en cas de nomination dans les statuts.

* 36 Cet article dispose ainsi :

« Les statuts de toute société dont le transfert au secteur privé a été décidé (...) sont modifiés par une assemblée générale extraordinaire tenue avant ce transfert pour stipuler que le conseil d'administration ou le conseil de surveillance, selon le cas, comprend :

« - deux membres représentant les salariés et un membre représentant les salariés actionnaires, s'il compte moins de quinze membres ;

« - trois membres représentant les salariés et un membre représentant les salariés actionnaires, s'il compte quinze membres ou plus ».

* 37 L'annexe actualisée et consolidée à laquelle fait référence cet article donne la liste des entreprises dont la privatisation était prévue, parmi lesquelles on trouve Havas, Saint-Gobain, la Compagnie des machines Bull, la Compagnie générale d'Electricité (aujourd'hui Alcatel), Pechiney, Rhône-Poulenc S.A., Matra, Elf-Aquitaine, Thomson S.A., Assurances générales de France (AGF), l'Union des Assurances de Paris (UAP), la Banque Hervet, la Banque Indosuez, les banques Paribas et Banque nationale de Paris (aujourd'hui BNP-Paribas), le Crédit commercial de France, le Crédit industriel et commercial de Paris, le Crédit lyonnais, le Crédit du Nord, la Société générale, la Société marseillaise de crédit.

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