b) L'application de la tarification à l'activité (T2A) et ses corollaires
(1) Dispositions relatives à la mise en oeuvre de la T2A (article 39)

L'article 39 du présent projet de loi de financement contient diverses dispositions relatives à la mise en oeuvre de la tarification à l'activité et vise à corriger certaines dispositions contenues dans les lois de financement de la sécurité sociale antérieures.

Pour mémoire, votre rapporteur pour avis rappelle que la T2A, introduite par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 11 ( * ) , a instauré un nouveau mode de financement des établissements de santé. Se substituant à la dotation globale de financement pour les établissements publics ou participant au service public hospitalier et à la tarification à la journée ou à la prestation pour les cliniques privées, elle vise à harmoniser les modes de financement des secteurs public et privé.

Sa mise en place s'effectue de manière progressive dans le secteur public et l'année 2005 a constitué une année transitoire en termes organisationnels, d'impact de trésorerie et de suivi comptable de l'activité des établissements publics de santé.

Bilan de la mise en oeuvre de la tarification à l'activité

Les principes fondateurs de la tarification à l'activité ont été définis par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 précitée. La T2A s'applique, d'une part, dans les cliniques privées, depuis le 1er mars 2005, d'autre part dans les établissements publics de manière progressive, sur la période 2005-2012, pour ce qui concerne les activités de médecine, chirurgie, obstétrique et odontologie (MCO) . Durant la période de montée en charge, les établissements de santé anciennement sous dotation globale perçoivent une part de dotation globale, appelée dotation annuelle complémentaire (DAC), qui complète le financement par les tarifs.

En 2006, les tarifs représentaient 35 % du financement des hôpitaux publics et la dotation annuelle complémentaire (DAC) 65 % .

1 - Le champ d'application de la T2A

La loi fixe, d'une part, le champ des activités et, d'autre part, le champ des établissements concernés par la tarification à l'activité. Celle-ci s'applique à l'ensemble des activités de médecine, chirurgie, obstétrique et odontologie (MCO), quel que soit le statut de l'établissement, public ou privé. Seuls les hôpitaux locaux, les établissements dispensant des soins aux personnes incarcérées (Fresnes), les établissements du service de santé des armées et les établissements de Saint Pierre et Miquelon et Mayotte sont maintenus en dehors du champ de la tarification à l'activité.

La loi a cependant modifié en conséquence les dispositions relatives au financement et à la régulation des activités de soins de suite ou de réadaptation et de psychiatrie pour tenir compte de la réforme .

Elle a restreint ainsi le système de tarification et de régulation des établissements privés anciennement sous objectif quantifié national (OQN) à ces seules activités . Pour les activités de soins de suite ou de réadaptation et de psychiatrie des établissements anciennement sous dotation globale, la loi prévoit le maintien pour partie d'un financement par dotations annuelles (la dotation devient toutefois une dotation de recettes, sans lien automatique avec les dépenses). De même, les hôpitaux locaux, les établissements dispensant des soins aux personnes incarcérées (établissement de Fresnes), les établissements du service de santé des armées et les établissements de Saint Pierre et Miquelon et Mayotte reçoivent, pour la part des dépenses relatives aux soins dispensés aux assurés sociaux, une dotation annuelle de financement. Ces dépenses demeurent régulées par des enveloppes annuelles limitatives, réparties entre régions puis, entre établissements par les agences régionales de l'hospitalisation (ARH).

Le champ d'application est destiné à s'étendre aux grandes disciplines de soins de suite et de réadaptation (SSR) pour lesquels, à l'issue d'une période d'expérimentation, la généralisation pourrait être envisagée pour 2008-2009. Des travaux sont en cours afin de se doter d'un modèle adapté à ce secteur, polymorphe, mais qui est fondamental en matière d'offre de soins.

2 - Le financement à l'activité des activités de MCO

L'activité MCO des établissements publics et privés de santé est désormais rémunérée par l'assurance maladie par :

- des tarifs par séjour : première source de financement des établissements, les tarifs (GHS) correspondent à la répartition des cas traités dans des groupes homogènes issus de la classification en groupe homogène de malades ;

- des paiements supplémentaires : afin de garantir l'accès des patients aux innovations thérapeutiques, certaines spécialités pharmaceutiques et certains dispositifs médicaux implantables, dont la liste est fixée par arrêté, sont pris en charge en plus du tarif des séjours. Il en est de même pour certains dispositifs médicaux dont la liste est également fixée par arrêté ;

- des tarifs par prestations : certaines activités non décrites par les GHS sont financées grâce à un tarif par prestation, tels que les services d'urgence autorisés bénéficient d'un financement mixte, l'activité de prélèvement d'organes sur personne décédée, les consultations et actes externes ; les soins réalisés en réanimation ou soins intensifs, depuis 2006, la prise en charge du patient en dialyse , l'utilisation de matériel de petite chirurgie lors de la prise en charge non programmée de patient dans des établissements qui ne sont pas autorisés à pratiquer l'activité d'accueil et de traitement des urgences.

- les missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation (MIGAC) : certaines missions par nature, n'ont pas vocation à voir leurs ressources dépendre de l'activité réalisée. D'autres y ont été placées temporairement dans l'attente de réflexions complémentaires, car relevant plus équitablement d'une prise en compte de l'activité sur la base de grands indicateurs.

3 - La régulation des dépenses MCO

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 a modifié profondément les mécanismes de régulation des dépenses.

L'enveloppe MCO commune aux secteurs public et privé constituée de l'ensemble des activités financées par tarifs est régulée par un dispositif de type prix volume. Ce dispositif a été mis en oeuvre en 2006 au vu de l'augmentation des dépenses et s'est soldé par une baisse homothétique des tarifs dans les deux secteurs de 1%.

4 - Le statut comptable des établissements

La première étape, opérée en 2004, a maintenu la procédure budgétaire, mais l'allocation de ressources a été ajustée sur la base de l'activité mesurée par le PMSI et des tarifs de prestations nationaux, pris en compte à hauteur de 10% de leur valeur.

En 2005 , les recettes liées à l'activité sortent de la dotation globale et le lien entre dépenses encadrées et recettes est rompue. Les données relatives à l'activité et prestations facturables en sus transitent par les ARH qui les valorisent aux tarifs nationaux et notifient ensuite à la caisse pivot de l'établissement le montant à payer à ce titre. L'allocation de ressources est calculée sur la base d'une prise en compte des tarifs à hauteur de 25% .

Une étape supplémentaire a été réalisée en 2006 avec l'entrée en vigueur de la réforme du régime budgétaire et comptable des établissements , caractérisée par le passage du budget limitatif à un état prévisionnel des recettes et des dépenses (EPRD) reposant sur des crédits évaluatifs et par une évolution profonde de la tutelle budgétaire des ARH. Corrélativement, la part tarifs a été fixée à 35% .

Il est prévu que cette part soit de 50% pour l'année 2007 .

5 - La montée en charge de la T2A

La convergence intra sectorielle qui s'appuie sur le mécanisme de financement mixte sous la forme d'une fraction des tarifs des prestations et d'une dotation annuelle complémentaire pour les établissements antérieurement financés par dotation globale et pour les établissements privés auparavant sous OQN, sur un mécanisme de coefficients correcteurs de transition est régulièrement appliquée et devrait permettre l'atteinte de l'objectif 100% en 2012 .

Pour être menée à bien ( convergence des tarifs à 50% en 2008 ), la convergence intersectorielle introduite par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 doit s'appuyer sur une transparence totale des différentiels de coûts entre secteurs. Des travaux engagés en 2006 se poursuivent pour mettre en place une étude de coût à méthodologie commune sur les deux secteurs et pour avancer sur un certain nombre d'études complémentaires visant à éclairer les différences d'activités ou de dépenses nécessaires à cet éclairage.

6 - Impact sur le financement des établissements

Le changement de mode de financement entraîne des effets de transferts de ressources importants entre établissements :

Sur le secteur antérieurement sous dotation globale de financement ce changement de mode financement conduirait à transférer environ 1,3 milliard d'euros entre les établissements pour lesquels la réforme est défavorable et ceux pour lesquels elle est favorable .

Pour le secteur antérieurement sous OQN, le montant du transfert serait de l'ordre 143 millions d'euros.

En 2005 comme en 2006, les dépenses d'assurance maladie versées aux établissements de santé ont augmenté, sans que les chiffres ne soient totalement stabilisés, entraînant l'application d'une régulation sur les tarifs courant 2006 .

Ainsi, en 2005, les dépenses de l'ensemble des établissements de santé ont progressé de 4,2 % .

Source : ministère de la santé et des solidarités

L'article 39 du présent projet de loi de financement propose divers aménagements techniques aux conditions de mise en oeuvre de la tarification à l'activité .

Le paragraphe I de cet article a pour objet d'avancer la date d'entrée en vigueur des forfaits annuels qui rémunèrent les activités de prélèvements, de transplantation et d'urgence du 1 er mars au 1 er janvier de l'année en cours. Ainsi, à partir de 2007, les forfaits annuels prendront effet au 1 er janvier, comme les dotations annuelles (DAC, DAF et MIGAC). Les tarifs nationaux de prestations d'hospitalisation et les coefficients géographiques continueront d'entrer en vigueur le 1 er mars de l'année.

Le paragraphe II proroge, au plus tard jusqu'au 31 décembre 2008, plusieurs dispositions transitoires concernant la facturation des prestations par les établissements de santé, le calcul de la participation de l'assuré et les modalités de versement de la dotation annuelle complémentaire, des forfaits annuels et des MIGAC.

Le paragraphe III prévoit la suppression progressive du coefficient de haute technicité et le redéploiement des sommes qu'il produisait dans les tarifs nationaux des prestations d'hospitalisation (GHS). Dans le droit actuel, le coefficient de haute technicité permet à un tiers des établissements antérieurement financés par un prix de journée de bénéficier d'un supplément de recettes de 1 % à 25 % grâce à une majoration de l'ensemble des tarifs des GHS et des suppléments journaliers au titre des lits classés en soins particulièrement coûteux. Ces suppléments représentaient 200 millions d'euros en 2005. Le III de cet article propose donc de réduire progressivement le coefficient de haute technicité, sur une période de six ans, pour le ramener à la valeur 1 en 2012. En outre, l'écart entre la valeur du coefficient et la cible 2012 devra être réduit d'au moins 50 % en 2009.

Le paragraphe IV supprime l'agrément ministériel des conventions collectives de travail, conventions d'entreprise ou d'établissements et accords de retraite applicables dans les établissements de santé privés à but non lucratif et le caractère opposable de ces conventions à l'autorité de tarification. Les paragraphes V et VI relèvent de la même logique que le paragraphe IV.

Enfin, les paragraphes VII à IX étendent les règles relatives à la tarification à l'activité aux activités de MCO des hôpitaux des armées en précisant que l'application de ces nouvelles dispositions devra intervenir au plus tard le 1 er juillet 2009.

(2) La modération des pénalités associées au non-respect des objectifs quantifiés de l'offre de soins par les établissements de santé (article 39 bis)

L'article 39 bis du présent projet de loi de financement, adopté par l'Assemblé nationale, à l'initiative de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, avec l'avis favorable du gouvernement, vise à modifier le régime des pénalités financières prévues en cas de non-respect des objectifs quantifiés des activités de soins et équipements lourds fixés par les contrats d'objectifs et de moyens des établissements de création d'activités ou d'équipements .

En effet, l'article L. 6114-1 du code de la santé publique dispose que les agences régionales de l'hospitalisation concluent avec les établissements de santé, les groupements de coopération sanitaire et les autres titulaires de l'autorisation mentionnée à l'article L. 6122-1 du même code des contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens d'une durée maximale de cinq ans.

En outre, l'article L. 6114-2 du même code précise que ces contrats déterminent les orientations stratégiques des établissements, groupements de coopération sanitaire et titulaires d'autorisations sur la base des schémas d'organisation sanitaire et, notamment, qu'ils fixent, le cas échéant par avenant, les objectifs quantifiés des activités de soins et équipements lourds pour lesquels une autorisation a été délivrée et en définissent les conditions de mise en oeuvre, au plus tard trois mois après la délivrance de cette autorisation. A défaut de signature du contrat ou de l'avenant dans ce délai, l'agence régionale de l'hospitalisation inscrit ces objectifs quantifiés ainsi que les pénalités applicables en cas de non-respect de ces objectifs.

L'article 39 bis du présent projet de loi de financement vise à compléter les dispositions de l'article L. 6114-2 précité du code de la santé publique afin de préciser que les pénalités susmentionnées ne sont applicables qu'en cas de non-respect « substantiel » de ces objectifs .

Il propose la même modification à l'article L. 6122-8 du même code qui traite de l'autorisation de l'ARH à laquelle sont soumis les projets relatifs à la création de tout établissement de santé, la création, la conversion et le regroupement des activités de soins, y compris sous la forme d'alternatives à l'hospitalisation, et l'installation des équipements matériels lourds, autorisation qui fixe les objectifs quantifiés des activités de soins ou des équipements lourds autorisés lorsqu'ils n'ont pas été fixés dans le contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens conformément et qui prévoit les pénalités applicables en cas de non-respect de ces objectifs.

Lors de l'examen de cet article à l'Assemblée nationale, le ministre de la santé et des solidarités, M. Xavier Bertrand, interrogé sur la notion de non-respect « substantiel » par notre collègue député Claude Evin, a précisé qu'un « décret en Conseil d'Etat, soumis à concertation, notamment avec les fédérations, viendra préciser les choses ».

Dès lors, votre rapporteur pour avis, qui partage les préoccupations de notre collègue député Claude Evin sur la difficulté à mesurer le caractère substantiel du non-respect d'objectifs quantifiés d'offre de soins, souhaite corriger l'oubli qui s'est glissé dans la rédaction de l'article 39 bis car celle-ci ne prévoit, à ce stade, pas de décret en Conseil d'Etat pour l'application de cet article, contrairement aux propos tenus par le ministre à l'Assemblée nationale .

(3) Dispositions relatives au financement des activités de psychiatrie et de soins de suite (articles 39 quater et 39 sexies)


L'article 39 quater du présent projet de loi de financement, adopté par l'Assemblée nationale à l'initiative de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, avec l'avis favorable du gouvernement, vise à assouplir le dispositif de modification des tarifs des activités de psychiatrie et de soins de suite ou de réadaptation des établissements des centres anciennement sous objectif quantifié national (OQN) .

Lors de la présentation de cet article, notre collègue Jean-Marie Rolland, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales a, en effet, indiqué que, dans le droit existant, « la modification des tarifs des activités de psychiatrie et de soins de suite ou de réadaptation des établissements des centres anciennement sous objectif quantifié national ne peut intervenir que sur la base des données de l'année antérieure ou du premier trimestre de l'année en cours ».

Dès lors, l'article 39 quater précité vise à assouplir le dispositif en prévoyant la possibilité de faire jouer la régulation prix-volume sur la base des données collectées tout au long de l'année, en tant que de besoin. Il propose ainsi de modifier les dispositions de l'article L. 162-22-3 du code de la sécurité sociale afin de prévoir que, lorsqu'il apparaît que l'état définitif des charges au titre des soins dispensés l'année antérieure ou le montant des charges constatées au fur et à mesure de l'année en cours n'est pas compatible avec l'objectif de l'année en cours, l'Etat peut modifier les tarifs des prestations d'hospitalisation.


L'article 39 sexies du présent projet de loi de financement, adopté par l'Assemblée nationale à l'initiative de notre collègue député Yves Bur, rapporteur pour avis au nom de la commission des finances, vise à permettre au gouvernement d'expérimenter, à compter du 1 er janvier 2007, pour une période n'excédant pas cinq ans, de nouveaux modes de financement des activités de psychiatrie et de soins de suite ou de réadaptation des établissements de santé , fondés sur leurs activités et établis en fonction des informations qu'ils recueillent et transmettent relatives à leurs moyens de fonctionnement et à leur activité.

En outre, cet article précise que les expériences pourront être menées dans une zone géographique déterminée, pour les établissements de santé de la zone ou pour une partie d'entre eux, selon des modalités définies par décret. Il est également précisé que les dépenses mises à la charge de l'ensemble des régimes obligatoires de base qui résultent de ces expériences sont prises en compte dans l'ONDAM.

Enfin, cet article prévoit l'abrogation des dispositions du code de la santé publique qui prévoyait la possibilité d'expérimentation, à compter du 1 er janvier 2000 et pour une période n'excédant pas cinq ans, de nouveaux modes de financement des activités MCO dans le but de préparer la mise en oeuvre de la T2A avant son entrée en vigueur, ces dispositions étant devenues caduques.

Votre rapporteur pour avis accueille favorablement cette possibilité d'expérimentation ouverte au gouvernement et souhaite que ce dernier l'exploite pleinement .

* 11 Loi n° 2003-1199 du 18 décembre 2003.

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