IV. LA DÉFENSE DE LA LANGUE FRANÇAISE ET DE LA DIVERSITÉ CULTURELLE EN FRANCE ET DANS LES ORGANISATIONS INTERNATIONALES

La défense de la langue française et de son statut dans les organisations internationales relève des compétences de la Délégation générale à la langue française et aux langues de France, placée sous l'autorité du ministre de la culture et de la communication.

Ces missions revêtent une importance stratégique de premier plan.

Le ministre des affaires étrangères, le ministre de la culture et de la communication, mais aussi l'ensemble du Gouvernement doivent mener une action volontaire et coordonnée pour garder à la langue française son rayonnement international.

Cette défense internationale de notre langue ne pourra cependant être convenablement assurée que si les pouvoirs publics sont également décidés à défendre notre langue sur notre territoire.

A. LES MISSIONS ET LES MOYENS DE LA DÉLÉGATION GÉNÉRALE À LA LANGUE FRANÇAISE ET AUX LANGUES EN FRANCE

Aux termes du décret du 18 août 2004, la Délégation générale à la langue française et aux langues de France (DGLFLF) a pour mission d'assurer la préparation, la coordination et la mise en oeuvre des politiques publiques et la promotion des activités privées qui concourent à la diffusion, au bon usage et à l'enrichissement de la langue française ainsi qu'à la préservation et à la valorisation des langues de France.

La Délégation générale à la langue française et aux langues de France assure traditionnellement le secrétariat du Conseil supérieur de la langue française.

Le conseil a pour mission d'étudier les questions relatives à l'usage, à l'aménagement, à l'enrichissement, à la promotion et à la diffusion de la langue française en France et hors de France, et à la politique à l'égard des langues étrangères.

Elle comporte en outre un Observatoire des pratiques linguistiques , chargé, depuis sa création en 1999, de recenser, de développer et de rendre disponibles les connaissances relatives à la situation linguistique en France.

1. Les missions de la DGLFLF

Ces missions portent respectivement :

- sur l'emploi et la diffusion de la langue française ; à ce titre, elle est chargée du suivi de l'application de la loi du 4 août 1994 dite « loi Toubon » sur l'emploi de la langue française ;

- sur la maîtrise de la langue française, la lutte contre l'illettrisme et l'action territoriale ; à ce titre, elle a élaboré en 2004 un référentiel de compétences linguistiques qui a vocation à s'inscrire dans une grille de certification en français correspondant aux critères retenus par le Conseil de l'Europe ; ce référentiel et la certification qui lui est liée constitueront le coeur du volet linguistique du contrat d'accueil et d'intégration qui sera généralisé en 2006 ;

- sur les langues de France ; dans ce cadre, ont été organisées le 4 octobre 2003, les « Assises nationales des langues de France » ;

- sur le développement et la modernisation de la langue , par le contrôle qu'elle exerce sur les 19 commissions spécialisées de terminologie et de néologie, placées sous la tutelle de 13 ministères différents ; elle assure en outre le secrétariat de la commission générale de terminologie et de néologie qui examine les propositions des commissions spécialisées et transmet les termes retenus au Journal officiel, après accord de l'Académie française et du ministre intéressé ; elle assure, en outre, avec la délégation aux usagers et aux simplifications administratives, le secrétariat du comité pour la simplification du langage administratif créé en juin 2001 ;

- sur la communication et la sensibilisation à la langue française, en direction du grand public, avec des opérations telles que « le français comme on l'aime », ou en direction de milieux spécifiques.

2. Les moyens financiers de la DGLFLF

Pour réaliser ses missions, la DGLFLF disposera en 2007 d'une enveloppe de crédits d'intervention de 2,28 millions d'euros inscrits à l'action n° 7 « Patrimoine linguistique », du programme « Patrimoines » de la mission « Culture » , identique à celle de 2006.

B. LA DÉFENSE DU FRANÇAIS EN FRANCE

Assurer la prééminence du français sur notre territoire national, et affirmer la place du français sur la scène internationale sont, aux yeux de votre rapporteur pour avis, deux objectifs indissociables.

Si le français chez nous cesse d'être communément utilisé par certains milieux - le monde scientifique ou la communauté financière - s'il n'est plus présent dans certains domaines comme la recherche ou les nouvelles technologies, croit-on vraiment qu'il conservera longtemps son statut de langue à rayonnement international ? Croit-on vraiment qu'il continuera d'être appris, aimé dans le monde entier ?

Votre rapporteur a eu l'occasion de rappeler l'an dernier ces vérités d'évidence à l'occasion de la discussion devant le Sénat d'une proposition de loi d'origine sénatoriale, qui se proposait d'apporter quelques compléments à la loi du 4 août 1994 sur l'emploi de la langue française.

Il souhaite les réaffirmer avec force alors que se profile à nouveau la perspective d'une ratification de l'Accord de Londres qui réviserait à la baisse nos exigences linguistiques en matière de brevet européen.

1. Une proposition de loi sénatoriale actualisant la Loi Toubon

Une proposition de loi d'origine sénatoriale s'est proposée de compléter la loi du 4 août 1994 dite Loi Toubon, relative à l'emploi de la langue française.

Rapporteur de ce texte, comme il l'avait été quelques dix années plus tôt de la loi de 1994, votre rapporteur s'est attaché à tracer le bilan approfondi de ce dispositif pour mieux évaluer les dispositions qui méritaient d'être actualisées ou complétées.

Il a pu constater avec satisfaction que, dix années après son adoption par le Parlement, la loi du 4 août 1994 est devenue un élément emblématique de notre paysage législatif, et que sa légitimité est maintenant parfaitement reconnue par l'opinion publique. Un sondage réalisé en 2000 par la SOFRES a même montré que 93 % des personnes interrogées jugeaient les dispositions de la « loi Toubon » relative à l'information en français du consommateur très ou assez utile, et que cette proportion montait même à 98 % chez les cadres et les professions intellectuelles.


• Défendre notre position sur l'information en français du consommateur

Ces dispositions, qui figurent à l'article 2 de la loi sont d'ailleurs les mieux appliquées, grâce au rôle actif que jouent la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), et, dans une moindre mesure, de la Direction générale des douanes et des droits indirects (DGDI).

Or elles font l'objet, depuis quelques années, d'un débat entre les autorités françaises et les autorités européennes qui porte sur la conciliation entre la libre circulation des marchandises au sein de l'Union, et les atteintes qui porteraient à ce sacro-saint principe le droit des consommateurs à être informés dans leur langue.

Après avoir résumé les arguments des deux parties, votre rapporteur avait estimé acceptable à titre transitoire la solution de compromis qui consistait à ne pas remettre en cause l'article 2 de la loi Toubon, et à n'en suspendre l'effet que dans les cas où il contreviendrait aux directives européennes. Il invite cependant le Gouvernement français à se rapprocher des autres Etats membres et en particulier des nouveaux Etats, qui partagent souvent notre façon de voir, pour faire évoluer dans un sens positif les instances européennes, tout en rappelant notre attachement au caractère intangible du principe posé par la loi.


• Apporter quelques compléments utiles et pratiques à la loi

Sur la proposition de votre rapporteur et de votre commission, le Sénat a adopté un certain nombre de dispositions tendant à compléter le dispositif de la loi du 4 août pour mieux prendre en compte certains enjeux sectoriels.

Une première série de dispositions tendent à garantir l'information des consommateurs, des voyageurs et du public en général.

Elles imposent la traduction, ou l'explicitation - la notion est nouvelle - des termes étrangers utilisés dans la formulation d'une enseigne dès lors qu'ils sont susceptibles de contribuer à l'information du consommateur.

De la même façon, elles imposent la traduction ou l'explicitation des vocables étrangers utilisés dans la formulation d'une dénomination sociale, dès lors que ceux-ci sont de nature à indiquer l'activité de la société concernée.

Elles rendent également obligatoire l'usage du français dans les annonces faites dans les transports internationaux en provenance ou à destination du territoire national.

Une seconde série de dispositions complètent la loi de 1994, dans le monde du travail et de l'entreprise qui constitue aujourd'hui un enjeu essentiel dans la préservation du rôle du français.

Quelques retouches ponctuelles ont ainsi été adoptées dans le domaine social :

- pour ériger les pratiques linguistiques des entreprises en élément du dialogue social, à travers la présentation, devant le comité d'entreprise, d'un rapport sur l'emploi de la langue française ;

- pour rendre obligatoire l'emploi du français dans la rédaction de l'ordre du jour sur lesquels sont convoqués les comités d'entreprises, les comités de groupe et les comités d'établissement, ainsi que dans celle de procès verbaux dans lesquels sont consignées leurs déclarations ;

- pour ne dispenser de l'obligation d'une rédaction en français que les documents destinés à des salariés étrangers ou à des salariés dont l'emploi nécessite une parfaite connaissance de la langue utilisée.

Votre rapporteur se réjouit que cette proposition de loi ait été adoptée en première lecture par le Sénat à l'unanimité , témoignant du fait que la défense de notre langue en France est bien considérée comme une grande cause nationale qui transcende les clivages partisans.

Il invite maintenant le Gouvernement à inscrire ce texte sans tarder à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale.

2. La réforme du brevet européen

Créé par la Convention de Munich du 5 octobre 1973, le brevet européen n'est pas un instrument de protection communautaire.

Contrairement au projet de « brevet communautaire » actuellement en discussion, et qui viendrait se greffer en quelque sorte sur le brevet européen, il relève du droit conventionnel classique entre Etats et réunit des pays qui ne sont d'ailleurs pas tous membres de l'Union européenne.

La convention de Munich a institué une organisation européenne des brevets, un Office européen des brevets, et une procédure unique de délivrance à l'issue de laquelle le brevet européen prend la valeur d'un brevet national dans chacun des pays contractants, et est soumis aux règles nationales en vigueur sur le territoire de ces derniers.

Ses langues officielles sont l'allemand, l'anglais et le français (article 14). Celles-ci sont dotées d'un statut privilégié : les demandes de brevet doivent être déposées dans une de ces trois langues, qui devient par la suite la langue de procédure et la langue dans laquelle est publié le fascicule du brevet.

Ces fascicules comportent obligatoirement une traduction des revendications dans les deux autres langues officielles de l'Office européen des brevets (article 14 alinéa 7) sachant que ces revendications constituent le coeur du dispositif de protection, puisque ce sont elles qui déterminent l'étendue de la protection (article 69), la description et les dessins ne servant qu'à interpréter les revendications.

L'organisation européenne des brevets permet :

- aux demandeurs ou aux titulaires de brevets français francophones de déposer leur demande en français sans être obligés d'y joindre une traduction ;

- aux entreprises françaises ou francophones de disposer soit de fascicules complets en français pour les brevets délivrés en français, soit de la traduction en français des revendications des brevets délivrés en allemand ou en anglais.

Une disposition de la Convention, l'article 65 , ouvre la possibilité pour les Etats de renforcer leurs exigences en matière de traduction . Il les autorise en effet à prescrire que le texte des brevets qui ne sont pas rédigés dans leur langue officielle est réputé sans effet sur leur territoire si une traduction n'est pas produite dans un délai de trois mois. Cette faculté est ouverte aux Etat dont les langues ont le statut de langues officielles de l'Office comme aux autres.

La plupart des Etats ont fait jouer cette clause, et la France également (article L. 614-7 du code de la propriété intellectuelle).

Toutefois, la volonté de réduire le coût du brevet européen, sensiblement supérieur au coût des brevets octroyés par les principaux partenaires commerciaux de l'Europe a conduit à la rédaction d'un accord consistant dans une renonciation aux exigences de traduction prévues à l'article 65 précité .

Cet accord a été proposé à la signature des Etats membres à la conférence intergouvernementale de Londres les 15 et 16 octobre 2000.

CONTENU DE L'ACCORD SUR L'APPLICATION DE L'ARTICLE 65 DE LA CONVENTION SUR LA DÉLIVRANCE DE BREVETS EUROPÉENS

Les Etats parties à l'accord sont convenus des dispositions suivantes :

1. Les Etats ayant une langue officielle en commun avec les trois langues officielles de l'Office européen des brevets renoncent aux exigences de traduction de l'article 65 ; les autres Etats y renoncent si le brevet est délivré ou traduit dans une de ces trois langues à leur choix, mais conservent la possibilité d'exiger une traduction des revendications.

2. En cas de litige, le titulaire du brevet fournit à ses frais une traduction complète du brevet au contrefacteur présumé et au juge.

3. La signature de l'accord est ouverte jusqu'au 30 juin 2001.

4. L'accord ne peut entrer en vigueur que si huit Etats parties y ont adhéré, dont l'Allemagne, la France et le Royaume-Uni.

Le projet d'accord a suscité une vive inquiétude et votre rapporteur avait tenu à rappeler dès l'origine les inconvénients d'un texte qui prévoit que des titres juridiques, partiellement rédigés dans une langue étrangère, pourront créer, en France, des droits et des obligations.

Il avait tout particulièrement regretté que, sur ce point pourtant essentiel du combat pour le multilinguisme, la France se soit désolidarisée de ses alliés naturels : l'Espagne, l'Italie, le Portugal qui ont, eux, refusé de signer l'accord.

Il s'était en revanche réjoui de la position claire prise par M. Christian Poncelet, Président du Sénat, énoncée une première fois à Brive le 8 novembre 2002, qui avait exprimé de vives réserves à l'égard du protocole et avait estimé qu'un réexamen attentif de la question s'imposait.

Il rappelle que le bureau de l'Assemblée parlementaire de la francophonie, réuni à Strasbourg les 14 et 15 janvier 2003 avait, à son tour, adopté une résolution très ferme sur le Protocole de Londres pour s'opposer fermement à une « mesure contribuant à accentuer le recul de la diversité linguistique en Europe » et inviter la France à ne pas ratifier cet accord.

Votre rapporteur regrette en conséquence que les délégations pour l'Union européenne de l'Assemblée nationale 1 ( * ) et du Sénat 2 ( * ) , consultées par le Premier ministre sur l'avenir du brevet en Europe, se soient toutes deux prononcées en faveur de la ratification de l'accord de Londres.

Il invite le Sénat, dans l'hypothèse où il aurait prochainement à se prononcer sur un projet de loi autorisant l'approbation de ce protocole, à ne pas sous-estimer un certain nombre d'inconvénients que la délégation pour l'Union européenne du Sénat a relevés avec un souci d'honnêteté intellectuelle qui lui fait honneur.

L'intérêt économique attendu du protocole de Londres est une diminution du coût d'accès au brevet favorisant leur dépôt. Mais, comme le relève la délégation du Sénat, cette diminution sera « d'une ampleur encore incertaine et nécessairement variable ». Elle dépendra notamment du nombre d'Etats ayant ratifié l'accord de Londres. Or actuellement seuls 10 des 31 Etats membres de l'Office européen des brevets sont engagés dans sa ratification, dont des Etats comme l'Islande, la Lettonie ou la Slovénie dont le poids relatif est marginal en matière de brevets. Elle sera d'autant plus limitée qu'aucun des Etats ayant ratifié l'accord de Londres n'a renoncé à exiger la traduction des revendications dans sa langue nationale.

En outre, cet impact financier limité pourrait également entraîner des effets indésirables, en incitant des entreprises extra-européennes à multiplier les dépôts de brevets en Europe.

Les risques linguistiques d'une ratification de l'accord de Londres sont loin d'être négligeables et notamment ceux d'un appauvrissement de notre langue, faute d'une traduction en français des nouveaux concepts qui sous-tendent une invention. Cette « perte de domaine », pour reprendre l'expression des linguistes, est déjà sensible. Peut-on prendre le risque de l'accentuer ?

De ce risque découle un risque juridique , tenant à ce que soient opposables en France des documents qui ne seraient que partiellement traduits en français. Certes, le Conseil d'Etat, dans un avis de septembre 2000, a estimé que l'accord de Londres n'était pas contraire à la Constitution, dans la mesure où la traduction reste obligatoire en cas de litige.

Mais la traduction n'intervient-elle pas alors de façon trop tardive et ne pourrait être davantage utile dans la prévention des litiges que dans leur règlement juridictionnel ?

C. LE MULTILINGUISME ET LA DIVERSITÉ CULTURELLE : UN DES AXES ESSENTIEL DE NOTRE POLITIQUE ÉTRANGÈRE

La défense de la langue française et, plus généralement, le combat pour la diversité linguistique et culturelle sont au coeur de notre politique étrangère et de notre action sur la scène internationale.

1. L'adoption de la Convention de l'UNESCO sur la diversité culturelle : un succès majeur

L'adoption, le 20 octobre 2005, par la Conférence générale de l'UNESCO, de la Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles, à la quasi-unanimité des Etats, marque une étape importante dans le combat que la France et ses partenaires de la francophonie mènent depuis de nombreuses années.

Une première « déclaration universelle sur la diversité culturelle » avait déjà été adoptée par acclamations à la 31 e conférence générale de l'UNESCO d'octobre 2001.

Lors du Sommet du développement durable de Johannesburg, en septembre 2002, le Président de la République avait proposé d'aller plus loin et s'était prononcé en faveur de l'adoption par la communauté internationale d'une « convention mondiale sur la diversité culturelle » qui donnerait force de loi internationale aux principes de la déclaration que venait d'adopter l'UNESCO.

La mobilisation des partenaires de la francophonie a contribué à l'aboutissement de ce projet.

Son adoption à une très large majorité, par 148 voix contre 2 et 4 abstentions, témoigne de l'écho que rencontre aujourd'hui dans le monde notre combat en faveur de la diversité culturelle et du multilinguisme.

Fruit d'un long processus de maturation et de deux années de négociation, ce texte qui revêt la forme d'un instrument juridique international renforce l'idée déjà exprimée dans la déclaration de 2001, suivant laquelle la diversité culturelle doit être considérée comme un « patrimoine commun de l'humanité » et sa défense comme « un impératif éthique indispensable au respect de la dignité de la personne humaine ».

La convention réaffirme dans son article premier le droit souverain des Etats d'élaborer des politiques culturelles en vue de « protéger et promouvoir la diversité des expressions culturelles », et de « créer les conditions permettant aux cultures de s'épanouir et d'interagir librement de manière à s'enrichir mutuellement ».

Les principes posés par l'article 2 garantissent que toute mesure destinée à protéger et à promouvoir la diversité des expressions culturelles n'entrave pas le respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales « telles que la liberté d'expression, d'information et de communication, ainsi que la possibilité, pour les individus de (les) choisir... ». Au nom du principe d'ouverture et d'équilibre » elle invite les Etats à prendre en compte l'ouverture aux autres cultures du monde.

Les articles 5 à 11 précisent les droits et obligations des Parties en matière de protection et de promotion de la diversité culturelle : création d'un environnement favorable, respect des minorités, reconnaissance du rôle des artistes et des créateurs.

Les articles 12 à 19 s'attachent à la promotion de la coopération internationale, particulièrement en direction des pays en développement, avec l'appui d'un Fonds international pour la diversité culturelle alimenté notamment par les contributions volontaires des Etats membres.

L'article 20 précise les relations de la Convention avec les autres instruments juridiques existants. Tout en affirmant la non-subordination de la convention aux autres instruments , il ajoute que rien dans celle-ci « ne peut être interprété comme modifiant les droits et obligations des Parties au titre d'autres traités auxquels elles sont Parties ».

L'article 29 de la Convention prévoit que celle-ci entre en vigueur trois mois après le dépôt du 30 e instrument de ratification.

Actuellement, 13 Etats dont 10 Etats membres de l'organisation internationale de la francophonie ont déposé leur instrument de ratification de la convention et 12 Etats, dont 7 membres de l'OIF ont achevé les procédures internes préalables à la ratification.

En France , le projet de loi autorisant l'approbation de la Convention a été voté à l'unanimité , à l'Assemblée nationale comme au Sénat.

La ministre déléguée a indiqué, au cours de son audition devant la commission, que la France déposerait ses instruments de ratification en même temps que tous les autres membres de l'Union européenne, au plus tard le 19 décembre 2006, mais que cette date pourrait toutefois être rapprochée si l'imminence de l'entrée en vigueur de la Convention le commandait.

2. La place du français dans les institutions européennes

Le français occupe traditionnellement une situation relativement privilégiée dans le fonctionnement des institutions européennes. Toutefois, on assiste, depuis plusieurs années, à une érosion de ses positions, notamment comme langue de travail et langue de rédaction des rapports de la commission.

L'Europe des vingt-cinq comporte 21 langues officielles et 450 millions de citoyens, parmi lesquels 70 millions de francophones et 12 millions « d'apprenants de français ». La connaissance de notre langue par les citoyens européens de demain et le maintien de sa place parmi les quelques grandes langues de l'Union européenne auront valeur de test pour la vitalité de la langue française dans le reste du monde.

Pour répondre à ce défi, le ministère des Affaires étrangères a élaboré pour l'Europe une stratégie de promotion du français qui va de pair avec celle du plurilinguisme et se traduit principalement par la mise en oeuvre d'un plan pluriannuel ainsi que par des actions ciblées en direction des institutions européennes et des systèmes éducatifs des pays partenaires.


• Le plan pluriannuel pour le français dans l'Union européenne

Le ministère des affaires étrangères a lancé, en 1995, un programme spécifique de formation au français en direction des fonctionnaires des institutions dans les pays candidats à l'élargissement (hauts fonctionnaires et particulièrement diplomates, traducteurs interprètes). Le Centre européen de langue française (CELF) a été créé dans ce cadre à Bruxelles en tant que pôle de formation spécialisé pour les publics des institutions de l'Union européenne. Ce programme a été rejoint en 2002 par le Luxembourg, la communauté française de Belgique et l'Agence intergouvernementale de la francophonie (AIF). Officiellement signé le 11 janvier 2002, il porte désormais la dénomination de « plan pluriannuel pour le français dans l'Union européenne ».

Le plan regroupe des dispositifs de formation variés qui ont en commun d'être destinés à des publics spécialisés : fonctionnaires et diplomates des pays de l'Union ou de pays candidats, fonctionnaires, traducteurs, ou interprètes des institutions européennes, journalistes accrédités auprès de l'Union, et étudiants des grandes institutions diplomatiques.

Certains pays tels la Roumanie, la Hongrie, la Slovénie, la Bulgarie, la Lituanie, la Slovaquie, la Croatie, la République tchèque, l'Estonie, et l'Autriche ont signé des mémorandums par lesquels ils s'engagent à former leurs diplomates et fonctionnaires au français durant trois ans et à tenir compte des compétences francophones acquises dans leurs promotions et leurs affectations ultérieures. La grande majorité d'entre eux cofinancent les formations.

Le nombre de bénéficiaires de ces formations en français a fortement crû au cours des dernières années : en 2005, plus de 8 900 formations individuelles ont été organisées à travers l'Europe, contre 1 600 en 2001.

Le ministère des Affaires étrangères finance également au plan bilatéral l'organisation de stages de formation en français destinés à des administrateurs de la Commission européenne ou à des hauts fonctionnaires des pays qui assureront la présidence de l'Union européenne en 2007.

Il apporte aussi une contribution financière aux formations de fonctionnaires assurées par l'Alliance française de Bruxelles, qui compte plusieurs milliers d'inscrits chaque année et prend en charge la formation individuelle à la langue française de hauts responsables des institutions européennes. Il cofinance avec les pays partenaires la formation en français des fonctionnaires des pays voisins de l'Union européenne (Albanie, Bosnie-herzégovine, Macédoine, Moldavie, Monténégro, Serbie, Ukraine).

Le ministère participe également au financement d'un cours pour jeunes diplomates et fonctionnaires d'Europe du Sud-Est et de l'Est organisé par l'académie diplomatique de Vienne et de cours de français diplomatique à l'OSCE pour les diplomates des nouveaux Etats membres de l'Union européenne.

Adossée à ce plan, la formation des professeurs de français qui dispensent ces enseignements de français spécifiques constitue un enjeu stratégique : aussi est-elle un des axes prioritaires du ministère des affaires étrangères en 2006 avec l'organisation de 3 stages de formation et de perfectionnement des professeurs au Centre européen de langue française à Bruxelles et à Sofia.

La France contribue à hauteur de 1,5 million d'euros au financement de ces actions dont le budget global est de 2,5 millions d'euros.


• La place du français dans les institutions européennes

A l'occasion de la négociation du nouveau statut de la fonction publique communautaire, la France a veillé à l'adoption de dispositions propres à promouvoir le multilinguisme et, à travers lui, la place de la langue française dans les institutions européennes :

- la maîtrise d'une seconde langue, en plus de la langue maternelle, sera dorénavant exigée de tout candidat aux épreuves de recrutement des fonctionnaires européens ;

- la maîtrise d'une troisième langue sera en outre exigée pour obtenir une première promotion.

La représentation permanente doit continuer de veiller au strict respect de l'utilisation des langues de travail dans les institutions, ainsi qu'à la préservation de la place du français lors de la création de nouvelles agences européennes, dont les régimes linguistiques peuvent être très variés.

Votre rapporteur souhaite qu'une attention vigilante et active soit portée à la présence de ressortissants français dans les institutions parmi les fonctionnaires européens et experts nationaux détachés, et ce aux divers échelons de la hiérarchie administrative, car il y voit un enjeu important du point de vue linguistique.


• Une action en direction des systèmes éducatifs

En plein accord avec la Commission européenne, le réseau diplomatique et culturel s'attache à conforter la présence du français au sein des systèmes éducatifs nationaux en promouvant la généralisation de deux langues vivantes obligatoires pendant la scolarité, car l'introduction d'une seconde langue obligatoire bénéficie toujours au français. Dans la plupart des pays membres de l'UE, le français est enseigné dès le secondaire, et parfois dès le primaire, en langue vivante 1 ou en langue vivante 2. Le français y occupe la 3 e ou 4 e position parmi les langues étudiées derrière l'anglais et l'allemand.

Un effort sur la formation du corps enseignant se traduit par l'organisation de stages pédagogiques en France, l'octroi de bourses, la mise à disposition de lecteurs ou encore par le développement de partenariats avec les instituts de formation des maîtres (IUFM) en France. Un plan triennal de formation de 2 000 enseignants de français des pays d'Europe centrale et orientale est venu compléter ce dispositif.

L'accent a également été mis sur les établissements bilingues francophones qui scolarisent 50 000 élèves en Europe et constituent le fleuron de l'enseignement du français et un vivier de recrutement des filières francophones universitaires.

3. La place du français dans les organisations internationales

Lancé en 1997 à l'initiative de la France, au Sommet de la francophonie de Hanoi, « le Plan d'urgence pour la relance du français dans les organisations internationales » était destiné à renforcer la place de la langue française et à accroître le nombre de francophones, ressortissants des pays du Sud, très peu représentés dans ces instances. Il était géré par l'Agence intergouvernementale de la francophonie, sous l'autorité d'un comité de pilotage comprenant des représentants de toutes les grandes zones géographiques de l'espace francophone.

Toutefois une évaluation externe du programme de formation à la fonction publique internationale et sur le programme des jeunes experts francophones a conclu à son faible impact sur l'utilisation de la langue française dans les organisations internationales et a conduit à l'exclure de la programmation quadriennale 2005-2009.

Conscient de la nécessité d'une véritable discipline collective pour faire respecter le statut de la langue française, le Président Diouf, secrétaire général de l'OIF, a fait adopter, lors du sommet de Bucarest, un mémorandum qui fixe aux diplomates et fonctionnaires des pays membres un code de conduite sur l'usage du français dans la vie internationale.

Les pays membres s'engagent ainsi à utiliser le français dans leurs interventions et à réclamer la diffusion de documents officiels en langue française. Les pays ayant une langue nationale autre que le français s'engageront à utiliser le français lorsqu'il leur est impossible de s'exprimer dans leur propre langue.

* 1 « Pourquoi la France doit ratifier l'accord de Londres sur le brevet européen » rapport d'information n° 3093 par MM. Daniel Garrigue et Pierre Lequillier, députés, au nom de la délégation pour l'Union européenne de l'Assemblée nationale.

* 2 Réunion de la délégation pour l'Union européenne du Sénat, le 30 mai 2006.

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