3. L'instauration d'une taxe sur le chiffre d'affaires des fabricants de tabac (article 9 bis)

A l'initiative de notre collègue député Jean-Marie Le Guen, soutenu par la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, l'Assemblée nationale a adopté, contre l'avis du gouvernement, un nouvel article 9 bis.

Celui-ci prévoit d'instaurer une taxe de 0,22 % assise sur le chiffre d'affaires des fabricants de tabac, dont le produit est versé aux régimes obligatoires d'assurance maladie. Il est précisé que le chiffre d'affaires pris en compte est celui « défini aux articles 575 et suivants du code général des impôts », mais ceux-ci se rapportent au droit de consommation sur les tabacs, et non au chiffre d'affaires des fabricants.

Cet article apparaît inopportun à plusieurs titres :

- d'une part, d'après les informations recueillies auprès du ministère de l'économie, des finances et de l'emploi, la notion de fabricants revêtant un caractère territorial, seuls les fabricants français - essentiellement Altadis - seraient assujettis à cette taxe . Les autres producteurs de tabac ne pourraient en effet être considérés comme fabricant leurs produits en France et échapperaient donc à la taxation. Or il paraît curieux de vouloir pénaliser l'industrie française par rapport aux industries étrangères ;

- dans sa rédaction actuelle, le dispositif présente de nombreuses lacunes qui le rendent difficile, sinon impossible, à mettre en oeuvre : la notion de chiffre d'affaires est en l'espèce floue (prendrait-on en considération uniquement le chiffre d'affaires lié à la fabrication de tabacs ?) et les éléments nécessaires à la taxation (assiette claire, fait générateur, modalités de recouvrement...) font défaut ;

- enfin, il n'apparaît pas conforme au droit communautaire , et notamment à l'article 3 paragraphe 2 de la directive 92/12/CEE du Conseil, du 25 février 1992, relative au régime général, à la détention, à la circulation et aux contrôles des produits soumis à accise, qui dispose que les tabacs manufacturés « peuvent faire l'objet d'autres impositions indirectes poursuivant des finalités spécifiques, à condition que ces impositions respectent les règles de taxation applicables pour les besoins des accises ou de la taxe sur la valeur ajoutée pour la détermination de la base d'imposition, le calcul, l'exigibilité et le contrôle de l'impôt ». Or une finalité exclusivement budgétaire n'est pas considérée comme une finalité spécifique au regard du droit communautaire.

Lors des débats à l'Assemblée nationale, notre collègue député Yves Bur, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général, a fait part, à titre personnel, de réserves similaires, tandis que le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, M. Eric Woerth, a indiqué que cette taxe « ne frapperait que le chiffre d'affaires hors taxes des seuls fabricants concernés et ne rapporterait que 5 millions d'euros. Nous sommes donc défavorables à cette mesure touchant un secteur déjà lourdement taxé et largement réglementé ».

Pour ces motifs, votre rapporteur pour avis vous propose de supprimer cet article.

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