b) Le développement des dispositifs de concertation entre la PJJ et les conseils généraux
Lors de son audition par la commission des lois le mardi 10 novembre 2009, Mme Michèle Alliot-Marie, garde des Sceaux, a indiqué à votre rapporteur qu'elle attachait une grande importance à ce que les décisions des magistrats au profit des enfants en danger puissent être mises en oeuvre sans délai et sans mettre en difficulté les finances des conseils généraux. Elle a fait valoir qu'il appartiendrait à la DPJJ, dans le cadre de sa compétence générale de coordination de la justice des mineurs posée par le décret du 9 juillet 2008, de veiller, sur chaque territoire, à la qualité des articulations entre les différentes prises en charge des mineurs. Une circulaire relative au rôle de l'institution judiciaire en matière de protection de l'enfance, actuellement en préparation, donnera prochainement un certain nombre d'instructions pour que l'institution judiciaire s'implique davantage, aux côtés des conseils généraux, dans la définition d'une véritable politique coordonnée de la protection de l'enfance.
Le développement de dispositifs de concertation avec les conseils généraux n'est pas nouveau.
Ces dispositifs ont tout d'abord été développés sur la base de la démarche dite « de complémentarité », à partir de la fin des années 1980, autour des thèmes suivants :
- la mise en place de dispositifs d'accueil d'urgence : le thème de l'accueil d'urgence fait l'objet de concertations régulières et anciennes dans les départements et a donné lieu à des formalisations diverses selon le contexte local. Aujourd'hui, 75 départements bénéficient d'un dispositif d'accueil d'urgence et 6 ont entamé les démarches nécessaires ;
- la participation à des commissions « parcours » ou « cas difficiles », qui sont des instances de concertation pluridisciplinaires centrées sur la recherche de solutions concrètes à la situation individuelle de jeunes rencontrant des difficultés sur le plan comportemental, scolaire ou psychiatrique ;
- enfin, les services de la PJJ sont toujours associés à l'élaboration du volet « enfance » des schémas d'organisation sociale et médico-sociale, dont la plupart sont signés conjointement.
En outre, les services territoriaux de la PJJ contribuent aux instances créées par la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance :
- d'une part, les cellules de recueil des informations préoccupantes clarifient les compétences entre les autorités administratives et judiciaires. Début 2009, 45 départements disposaient d'une cellule opérationnelle et 13 travaillaient à son élaboration ;
- d'autre part, les observatoires départementaux de la protection de l'enfance. Encore peu mis en oeuvre (21 seulement en 2008), ils constitueront le cadre institutionnel de concertation privilégié. Les services territoriaux de la PJJ y participent aux côtés des juridictions et contribuent à une analyse partagée des besoins des juridictions.
L'ensemble des dispositifs permettant de mieux articuler les actions de l'autorité judiciaire, des services territoriaux de la PJJ et des services d'aide sociale à l'enfance doivent ainsi être encouragés.
A cet égard, la Cour des comptes, après avoir remarqué que les conditions d'exécution des décisions de justice influaient très directement sur les décisions judiciaires elles-mêmes (la plupart des juges des enfants tenant compte, dans leur décision, de la possibilité d'obtenir une exécution effective et rapide), a souhaité dans son rapport thématique de septembre 2009 consacré à la protection de l'enfance, que l'Etat soit plus attentif aux conditions dans lesquelles les décisions des juges des enfants sont exécutées . Or, « les délais d'exécution des décisions judiciaires ne font pas l'objet d'un suivi global fondé sur des méthodes homogènes. Au plan national, la PJJ dispose certes d'indicateurs précis sur les délais d'exécution des mesures et le nombre de mesures en attente. [...] Ces indicateurs ne portent cependant que sur les mesures que la PJJ exécute (au sein de son secteur public) ou qu'elle finance, c'est-à-dire, en dehors des mesures d'investigation, une part très limitée des mesures d'assistance éducative. Au plan local, les délais de mise en oeuvre des décisions judiciaires et le nombre de mesures en attente ne sont pas toujours suivis, et, lorsqu'ils le sont, c'est le plus souvent de manière partielle et informelle, en dehors de tout système d'information global ».
Or, la Cour a pu constater au cours de son enquête que, si certains ressorts ou départements avaient mis en place des dispositifs systématiques de suivi des délais d'exécution, un certain nombre de situations difficiles avaient néanmoins pu être identifiées. La Cour a notamment constaté qu'à Auxerre, par exemple, le délai de prise en charge des mesures de milieu ouvert s'élevait, lors de sa visite, à trois mois en moyenne et que certains placements au foyer de l'enfance n'avaient été exécutés que six mois après la décision judiciaire.
Ces observations plaident en faveur de la mise en place de mécanismes de régulation adaptés . En outre, la Cour estime qu'il pourrait être souhaitable de tirer les conséquences de délais excessifs de prise en charge en aménageant la faculté, pour les services de l'Etat, de se substituer au département dans l'exécution des mesures, la charge financière restant à ce dernier 25 ( * ) .
* 25 Cour des comptes, rapport précité, pages 122-123.