C. DES CONSÉQUENCES LIMITÉES SUR LES FINANCES PUBLIQUES

1. Un impact modeste sur le déficit au sens du traité de Maastricht

L'impact du « grand emprunt » sur les finances publiques peut être apprécié selon une compatibilité budgétaire, qui retrace les encaissements et les décaissements au cours de l'exercice, mais aussi selon une compatibilité en droits constatés, qui a notamment pour conséquence de requalifier certains flux budgétaires en constitution ou destruction d'actifs. C'est cette dernière approche qui est retenue par la comptabilité nationale et Eurostat pour apprécier le déficit public et la dette publique au sens du traité de Maastricht et qui, de fait, est la plus pertinente pour apprécier la situation financière de l'État, dans la mesure où elle tient compte de l'impact patrimonial des choix budgétaires.

Si l'on raisonne en comptabilité de caisse, la mise en oeuvre du « grand emprunt » se traduit bien entendu par l'ouverture de 35 milliards d'euros de crédits supplémentaires par rapport à la loi de finances initiale pour 2010, et donc, toutes choses égales par ailleurs, par un creusement d'un montant équivalent du déficit. Le déficit prévisionnel établi par le projet de loi de finances rectificative est cependant inférieur à 35 milliards d'euros (en l'occurrence 31,9 milliards), car le projet de loi anticipe également d'autres mouvements de caisse (surplus de rentrées fiscales, coût de la charge de la dette générée par le « grand emprunt », annulations de crédits...).

Si l'on raisonne en comptabilité nationale, l'impact du « grand emprunt » sur les finances publiques pour 2010 apparaît beaucoup plus modeste . En effet, une part majoritaire des dépenses du « grand emprunt » (22 à 25 milliards d'euros, soit entre 63 % et 71 % du total des crédits) ne correspond pas à des dépenses de fonctionnement ou d'intervention, mais à des constitutions d'actifs sous forme de prises de participations (3,6 milliards d'euros), de prêts (2,9 milliards d'euros) et de dotations non consomptibles 6 ( * ) (15,5 milliards d'euros). Il y a encore une incertitude quant au fait de savoir si les avances remboursables, qui représentent 8 % des dépenses du « grand emprunt », correspondent à du « déficit maastrichtien » ou pas. Cela dépendra du traitement que fera Eurostat de la question. Cet examen se fera au cas par cas, selon les conditions encadrant le remboursement. Quoi qu'il en soit, en tenant compte de cette incertitude, le « déficit maastrichtien » peut être estimé entre 10 et 13 milliards 7 ( * ) d'euros sur le total de la période de mise en oeuvre des dépenses du « grand emprunt », soit cinq ans. Si l'on prend comme hypothèse un rythme des paiements progressif et uniforme des dépenses sur cinq ans, au fur et à mesure de la sélection des projets d'investissements 8 ( * ) , on obtient un impact budgétaire au sens du traité de Maastricht de 2 à 2,6 milliards d'euros par an .

* 6 Une dotation non consomptible est une dotation en capital qui ne peut être consommée. Elle est obligatoirement placée et son propriétaire dispose seulement de la libre utilisation des revenus générés par le capital. Les dotations non consomptibles dans le cadre du grand emprunt ont ceci de particulier que leur bénéficiaire n'est même pas libre de les placer : elles sont en effet obligatoirement déposées sur un compte au Trésor. Elles ne génèrent pas véritablement un revenu financier, puisque c'est l'État qui décide de la rémunération qui leur sera attribuée.

* 7 10 milliards d'euros de dotations consomptibles et 3 milliards d'euros d'avances remboursables.

* 8 Il s'agit bien d'une hypothèse car aucun programme d'investissement opérationnel n'est évidemment disponible pour l'heure.

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