B. UNE MOINDRE DENSITÉ CARCÉRALE

Au 1 er octobre 2010, le nombre des personnes écrouées détenues en métropole et outre mer s'élevait à 61.142 contre 61.781 au 1 er octobre 2009, soit une quasi stabilité. Cette population se répartissait de la manière suivante :

- 15.851 prévenus (contre 15.602 au 1 er octobre 2009), soit 26 % ;

- 2.336 femmes (contre 2.115 au 1 er octobre 2009), soit 3,8 % ;

- 692 mineurs (contre 630 au 1 er octobre 2009), soit 1 %.

Au total, le nombre de personnes écrouées (effectif de personnes détenues auquel s'ajoute les personnes condamnées sous surveillance électronique ou en placement à l'extérieur) s'élevait à 66.925 (soit + 0,9 %) 14 ( * ) .

L'analyse de la composition de la population confirme trois caractéristiques :

- la baisse continue du nombre de prévenus. En outre, avec la possibilité introduite par la loi pénitentiaire de prévoir l 'assignation à résidence des personnes prévenues contrôlées par un bracelet électronique fixe ou mobile, le nombre de personnes prévenues détenues pourrait diminuer. Ce dispositif constitue une formule intermédiaire entre la détention provisoire et le contrôle judiciaire. Contrairement au régime retenu pour ce dernier, la durée de l'assignation serait intégralement déduite de la durée de la peine qui pourrait être prononcée (art. 137 à 142-13 du code de procédure pénale). Par ailleurs, la durée moyenne de la détention provisoire reste élevée (de l'ordre de 4 mois en 2009), légèrement supérieure à celle constatée en 2008 (3,8 mois). Votre rapporteur regrette que la commission de suivi de la détention provisoire semble avoir arrêté ses travaux depuis la nomination de son président, M. Jean-Marie Delarue, comme Contrôleur général des lieux de privation de liberté en 2008, alors qu'elle apportait des éclairages très utiles sur les évolutions de la détention provisoire. A l'heure où se dessine une réforme d'ampleur de notre procédure pénale, ces analyses seraient encore plus nécessaires ;

- la forte prépondérance des courtes peines : parmi les personnes condamnées incarcérées, celles condamnées à une peine de moins d'un an représentent 34,4 % de l'ensemble ; 27,9 % sont condamnées à des peines comprises entre 1 et 3 ans ; 11,1 % à des peines comprises entre 3 et 5 ans et 26,5 % à des peines d'une durée égale ou supérieure à 5 ans 15 ( * ) . La durée moyenne de détention (population moyenne de détenus rapportée aux entrées de détenus sur douze mois) tend cependant à progresser en 2009, s'établissant à 9,4 mois (contre 8,8 mois en 2008).

Une analyse plus fine fait apparaître la réduction de la part des condamnés à une peine de moins de 6 mois (- 0,6 point) comme celle des condamnés à plus de 5 ans (- 1,4 point). Inversement, le nombre de condamnés à une peine comprise entre 1 an et 3 ans d'emprisonnement a progressé de 3,3 % pour représenter 28 % de la population des condamnés (14.174). L'augmentation du nombre de condamnés à une peine comprise entre 3 et 5 ans d'emprisonnement est encore plus forte : + 10 % entre le 1 er janvier 2009 et le 1 er janvier 2010 (5.628 personnes contre 5.103) 16 ( * ) .

L'application des « peines plancher » instaurées par la loi du 10 août 2007 renforçant la lutte contre la récidive n'est sans doute pas étrangère à ces évolutions bien qu'il soit encore délicat d'en mesurer toutes les conséquences. En effet, d'après les élément statistiques comparés entre 2008 et 2009, si le taux d'application des peines plancher a légèrement augmenté , le taux des peines d'emprisonnement ferme prononcées sur cette base s'est réduit .

Une comparaison entre les résultats de l'année 2008 et 2009 des juridictions du premier degré témoigne des tendances et évolutions de l'application des peines plancher. Au cours de l'année 2008 le taux d'application des peines planchers a été de 47,9 %. Le taux de peine plancher est de 48,7 % pour la période du 1er janvier 2009 au 15 juin 2009. En 2008, pour 35,5 % des condamnations, il s'agissait d'une peine d'emprisonnement entièrement ferme. En 2009, le taux d'emprisonnement ferme est de 33,3 %.

L'application des peines planchers dans les cours d'appel pour les majeurs et mineurs entre août 2007 et juin 2009 (soit 22 mois) : 2.421 condamnations en récidive pour lesquelles la peine plancher est applicable ; un taux de peines planchers de 65,1 % correspondant à 1.576 décisions ; emprisonnement ferme dans 48,3 % des condamnations (soit 761 décisions). L'application des peines planchers par les juridictions pour enfants au 15 juin 2009 : juridictions de première instance : 600 mineurs condamnés en récidive pour lesquels la peine plancher est applicable, 259 mineurs ont été condamnés à une peine supérieure ou égale à la peine minimale prévue par la loi. Le taux de peine plancher est de 43,2 %. La peine d'emprisonnement minimal ferme est prononcée dans 21,2 % des condamnations (55 mineurs). Le parquet a fait appel de 33 condamnations ce qui représente un taux d'appel de 9,7 % ; juridictions d'appel : 31 mineurs condamnés en récidive pour lesquels la peine plancher est applicable. Le taux de peine plancher est de 54,8 % (soit 17 peines prononcées). 7 peines d'emprisonnement minimal ferme ont été prononcées, représentant un taux de 41,2 %. Les infractions donnant lieu au prononcé d'une peine plancher : principalement des vols et atteintes aux biens (58,3 % des peines planchers prononcées) ainsi que des violences (22,3 % des peines planchers prononcées) ; s'agissant des violences, le taux d'application des peines plancher est le plus important (66,9 % pour des violences sexuelles, 65,6 % pour les violences sur conjoint ; 62,3 % pour les violences autres que sexuelles et sur conjoint). Les modalités de prononcé des peines planchers : 37,5 % sont des peines entièrement fermes ; 57,4 % sont des peines mixtes assorties d'un sursis avec ou sans mise à l'épreuve partiel ; 0,5 % sont des peines assorties d'un sursis total.

Source : réponse à la question écrite n° 48 588 de M. Eric Raoult, Journal officiel, 13 e législature.

- les violences volontaires (24,6 % des personnes condamnées) prévalent depuis 2007 sur les viols ou autres agressions sexuelles (15,5 %). Suivent les infractions à la législation sur les stupéfiants (14,4 %), les vols qualifiés (10 %), les escroqueries et abus de confiance (7,8 %). Les homicides volontaires représentent 6,8 %.

Une diminution du taux de densité carcérale

Au 1 er octobre 2010, les établissements pénitentiaires disposaient de 56.426 places opérationnelles (53.764 au 1 er octobre 2009). Le taux d'occupation s'élevait ainsi à 108,3 % (contre 114,9 % au 1 er octobre 2009). Parmi les établissements pénitentiaires, 5 présentaient une densité supérieure ou égale à 200 % (11 en 2009) et 17 une densité comprise entre 150 % et 200 % (33 en 2009).

Cette évolution est le résultat combiné de la stabilisation du nombre de personnes écrouées et de l'augmentation des capacités de détention liées à l'ouverture des nouveaux établissements pénitentiaires du programme « 13.200 ».

Comme l'indiquent les statistiques produites par le professeur Pierre-Victor Tournier, le taux de détention en France au 1 er septembre 2007 était de 99,3  pour 100.000 17 ( * ) , plus faible que le taux global de 122 pour 100.000 habitants dans l'ensemble des pays de l'Union européenne.

Par ailleurs, à la même date, la France connaissait un taux de densité carcérale de 120 pour 100 places , supérieur en revanche au taux moyen de densité carcérale à l'échelle européenne de l'ordre de 106 pour 100 places .

En l'absence de données plus récentes sur le taux moyen de densité carcérale en Europe, il n'est pas possible de savoir si la baisse de ce taux en France lui permet un rapprochement de la moyenne européenne.

Cependant, le phénomène de surpopulation affecte encore beaucoup de maisons d'arrêt avec un taux d'occupation souvent supérieur à 130 % 18 ( * ) .

En outre, la capacité opérationnelle correspond au nombre de places d'un établissement et n'équivaut pas au nombre de cellules (par exemple une cellule dont la surface est comprise entre 11 m 2 et 14 m 2 compte pour deux places). Elle sous estime par conséquent le phénomène de densité carcérale.

La surpopulation, il convient de le rappeler de nouveau, constitue le principal facteur de dégradation des conditions de détention. Elle limite considérablement les activités proposées aux détenus et la faculté, en particulier, d'occuper un emploi.

Elle est facteur des violences qui sévissent trop souvent dans le milieu carcéral.

Elle pèse aussi sur les conditions de travail des personnels de l'administration pénitentiaire dont les effectifs ne s'ajustent pas à l'évolution du nombre de personnes écrouées sur la base d'un ratio prédéterminé.


* 14 5.104 condamnés placés sous surveillance électronique (contre 3.984 -+ 28 %) et 679 condamnés en placement à l'extérieur (contre 542 en 2009 -+ 28 %).

* 15 Au sein de cette dernière catégorie, la composition est la suivante : de 5 ans à moins de 10 ans : 2,7 % ; de 10 ans à moins de 20 ans : 71,1 % ; de 20 ans à moins de 30 ans : 19,9 % ; perpétuité : 6,3 %.

* 16 Voir annexe 2.

* 17 95,4 si on exclut les personnes condamnées sous écrou mais non détenues en raison d'un aménagement de peine.

* 18 Centres de détention et maisons centrales bénéficient en pratique d'un numerus clausus justifié par le fait qu'il ne serait pas admissible de maintenir des détenus pour de longues durées dans des conditions de surpopulation et de promiscuité.

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