D. QUELS CRITÈRES POUR L'HÉBERGEMENT DU FUTUR DÉFENSEUR DES DROITS ?

Comme indiqué précédemment, votre rapporteur s'étonne de l'absence d'anticipation de la mise en oeuvre d'une réforme pourtant présentée comme fondamentale pour le renforcement de la démocratie : aucune mission de préfiguration n'a ainsi été constituée par les services du Premier ministre.

En conséquence, aucune réflexion n'a été engagée en particulier pour examiner la question - pourtant essentielle - du bâtiment qui hébergera le futur Défenseur des droits.

Votre rapporteur considère que les locaux devront respecter les trois critères suivants : être financièrement accessibles, fonctionnels et évolutifs.

1. Des locaux financièrement accessibles

Le premier critère des locaux du futur Défenseur des droits est d'ordre financier.

On rappellera en effet que certaines autorités administratives indépendantes supportent des coûts locatifs peu raisonnables . Le Médiateur de la République a conclu, le 1 er décembre 2002, un bail de neuf ans rue Saint-Florentin, dans le VIII ème arrondissement de Paris, un des quartiers les plus onéreux de la capitale. Le loyer annuel s'est élevé à 2,4 millions d'euros en 2009, soit 22 % du budget annuel de l'institution. De même, le loyer de la HALDE, implantée dans le IX ème arrondissement de Paris, s'élève à 1,3 million d'euros par an.

Votre rapporteur considère en conséquence que les conditions d'hébergement de la future autorité seront soumises à une obligation d'exemplarité budgétaire.

Pour permettre à l'Etat de réaliser de substantielles économies , le Défenseur des droits pourrait, sans dommage pour le bon accomplissement de ses missions, délaisser les beaux quartiers parisiens, voire s'installer en proche banlieue.

Votre rapporteur relève d'ailleurs que lors de son audition par votre commission, le 4 mai 2010, Mme Michèle Alliot-Marie, alors garde des Sceaux, ministre de la justice et des libertés, avait déclaré que si la localisation du futur Défenseur des droits n'avait pas encore été décidée, elle n'était pas opposée à une « une solution hors de Paris, qui serait moins coûteuse ».

Il faut reconnaître qu'une localisation dans des quartiers un peu excentrés de la capitale, voire en proche banlieue, permettrait de concilier les avantages du bassin parisien (ressources humaines, facilité de transports, contacts plus aisés avec les administrations, les sièges des grandes entreprises, les médias, l'étranger...) avec des loyers raisonnables . On peut ainsi citer l'exemple du Contrôleur général des lieux de privation de liberté situé dans le XIX ème arrondissement 12 ( * ) .

En outre, votre rapporteur a été sensible à l'idée émise, lors de son audition, par Mme Dominique Versini, Défenseure des enfants, consistant à installer symboliquement le Défenseur des droits dans une banlieue sensible de la région parisienne, « là où précisément les droits sont, plus qu'ailleurs, méconnus » .

Votre rapporteur suggère même de réfléchir à l'opportunité d'une implantation en province . Plusieurs raisons militeraient en ce sens :

- le coût d'hébergement serait en principe plus faible que celui de Paris et même que celui de sa proche banlieue ;

- le personnel en poste qui accepterait de quitter Paris (il est vrai que des contraintes d'ordre personnel peuvent faire obstacle à un tel déménagement) pourrait, in fine , y trouver avantage et bénéficier d'une qualité de vie meilleure, comme l'a illustré la délocalisation du CNASEA (Centre national pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles), dont le siège et le personnel ont été transférés en 2003 -non sans mal au départ- d'Issy-les-Moulineaux à Limoges ;

- il s'agirait d'un symbole fort en termes d'aménagement du territoire ;

- les quatre AAI susceptibles de rejoindre le Défenseur des droits ne reçoivent pratiquement pas de public à leur siège : elles communiquent à distance avec les requérants par courrier, téléphone, fax, mail... et surtout, pour ce qui concernent le Médiateur de la République, la HALDE et le Défenseur des enfants, par les correspondants locaux ;

- de la même manière, les AAI susceptibles d'intégrer le Défenseur des droits ont peu de réunions avec des services administratifs parisiens, les assemblées parlementaires, les médias... ; en outre, une localisation en province n'interdirait pas, naturellement, au Défenseur des droits de faire des aller-retour dans l'année pour des réunions ponctuelles à Paris...

Toutefois, votre rapporteur est conscient qu'une implantation en province pourrait également présenter quelques difficultés : il en a identifié deux principales :

- d'une part, notre assemblée a souhaité que les collèges comprennent des parlementaires, des représentants des hautes juridictions et des personnalités qualifiées. Si l'Assemblée nationale confirme cette composition, elle pourrait sérieusement compromettre un projet d'installation en province ;

- d'autre part, comme indiqué précédemment, les AAI susceptibles de rejoindre le Défenseur des droits comprennent, à 70 %, du personnel contractuel : or, aucune AAI n'a prévu, dans les contrats de travail, de clauses de mobilité géographique. Donc les contractuels qui refuseraient de s'installer en province devraient être licenciés pour « perte d'emploi » et percevoir des indemnités chômage. En revanche, les 30 % de fonctionnaires (détachés ou mis à disposition) pourraient, quant à eux, regagner leur administration d'origine sans que cela ne présente de difficultés particulières.

En tout état de cause, quelle que soit la localisation future du Défenseur des droits, elle devra privilégier l'occupation domaniale à l'occupation locative. En effet, comme l'a indiqué France Domaine, interrogé par votre rapporteur, la pleine propriété des locaux est plus économique que la location pour une occupation pérenne .

En outre, le Défenseur des droits devra être exemplaire dans l'occupation des surfaces occupées : il se devra de respecter l'objectif de 12 m² par agent qui a été réaffirmé le 30 juin 2010, pour toutes les administrations de l'État, par une décision prise par le Conseil de modernisation des politiques publiques dans le cadre de la démarche « État exemplaire ».


* 12 Initialement logé dans des locaux du Premier ministre, le Contrôleur général des lieux de privation de libertés s'est installé depuis mars 2009 au 16-18 quai de la Loire à Paris (19e) : il s'agit de la première implantation nationale dans cet arrondissement.

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