CHAPITRE II - FAVORISER L'ACCÈS DES PME À LA COMMANDE PUBLIQUE

Ce chapitre est présenté par M. Martial Bourquin.

Votre rapporteur pour avis a choisi cette année d'examiner un aspect particulier de la politique en direction des PME, à savoir l'accès des PME à la commande publique . L'incidence budgétaire et fiscale de cette politique est faible, mais son importance économique est considérable. Selon le recensement des marchés publics effectué dans le cadre de l'Observatoire économique de l'achat public (OEAP) au titre de l'année 2012, qui synthétise diverses sources (DGFIP, DG Trésor, INSEE, DAJ), ainsi que des informations issues de CHORUS (le système d'information financière de l'État), l'achat public s'est établi en 2012 à 78,7 milliards d'euros HT.

C'est le rôle notamment de la direction des affaires juridiques et de la direction générale du ministère de l'Économie de mettre en place de règles destinées à éviter l'exclusion de fait des PME et d'impulser un travail pédagogique en direction des acheteurs publics et des fournisseurs privés pour qu'ils maîtrisent mieux les règles de l'achat public et qu'ils en exploitent plus complètement les nombreuses possibilités.

I. UN TRAVAIL IMPORTANT POUR FACILITER L'ACCÈS DES PME À LA COMMANDE PUBLIQUE EST CONDUIT DEPUIS DIX ANS

A. LES RÈGLES DE PASSATION DES MARCHÉS PUBLICS ÉVOLUENT POUR FAVORISER L'ACCÈS DES PME

L'objectif de faciliter l'accès des PME à la commande publique est politiquement consensuel et l'on observe une forte continuité de l'effort dans l'action des gouvernements successifs depuis le milieu des années 2000.

Cette continuité se manifeste en premier lieu dans le travail pour réformer les procédures de passation des marchés publics et les rendre non pénalisantes pour les PME.

1. Un code des marchés publics devenu « PME-compatible »

La version 2006 du code des marchés publics comporte de nombreuses avancées.

Les marchés publics sont désormais en principe allotis . L'article 10 du code permet ainsi à des PME de se porter candidates pour un ou plusieurs lots, alors qu'elles ne peuvent pas toujours le faire pour l'ensemble du marché.

L'article 28 institue une procédure dite « adaptée » , applicable lorsque leur valeur du marché est inférieure aux seuils de procédure formalisée. Ses modalités sont librement fixées par le pouvoir adjudicateur en fonction de la nature et des caractéristiques du besoin à satisfaire, du nombre ou de la localisation des opérateurs économiques susceptibles d'y répondre ainsi que des circonstances de l'achat. Le pouvoir adjudicateur peut également négocier avec les candidats ayant présenté une offre, négociation qui peut porter sur tous les éléments de l'offre, notamment sur le prix.

La procédure dite des « petits lots » prévue par l'article 27 du code permet par ailleurs de recourir aux procédures adaptées pour l'attribution des lots inférieurs à 80 000 euros HT dans le cas de marchés de fournitures et de services et pour les lots inférieurs à 1 000 000euros HT dans le cas des marchés de travaux.

Enfin, certains marchés publics peuvent également être attribués sans publicité ni mise en concurrence en dessous de certains seuils . Le seuil de dispense a été relevé de 4 000 à 15 000 euros par un décret du 9 novembre 2011.

S'agissant de la sélection des candidatures, l'article 45 du code dispose que les capacités professionnelles, techniques et financières doivent être proportionnées à l'objet du marché , ce qui interdit à l'acheteur public de surdimensionner ses exigences. L'article 52 interdit de rejeter une candidature au seul motif de l'absence de référence à de précédents marchés, ce qui permet aux entreprises nouvelles, qui sont souvent des PME, d'accéder aux marchés publics.

Les PME peuvent aussi, en application de l'article 51 du code, utiliser la technique du groupement d'entreprise et ainsi additionner leurs capacités professionnelles, techniques et financières pour accéder groupées à des marchés importants -possibilité qu'elles exploitent cependant rarement.

Enfin, l'obligation de motiver les décisions de rejet des offres (article 80 et 83 du code) permet aux PME de connaitre les raisons pour lesquelles elles n'ont pas obtenu le marché et de pouvoir ensuite y remédier.

2. Un quota pour les marchés de haute technologie

L'article 26 de la loi du 4 août 2008 de modernisation de l'économie autorisait, à titre expérimental pour cinq ans, les pouvoirs adjudicateurs à réserver chaque année aux sociétés innovantes jusqu'à 15 % du montant annuel moyen de leurs marchés de haute technologie, de R&D et d'études technologiques de faible montant ou à leur accorder un traitement préférentiel en cas d'offres équivalentes.

Ce dispositif n'a malheureusement pas donné les résultats escomptés : très peu de cas d'utilisation ont été recensés et, au terme de la période des cinq années, la disposition ne sera pas reconduite, d'autres outils étant censés prendre le relais.

3. De nouvelles règles européennes et leur transposition

L'adaptation des règles de la commande publiques aux contraintes de fonctionnement des PME se poursuit. Le projet de loi de simplification de la vie des entreprises va permettre de l'approfondir notamment en transposant les deux directes relatives aux marchés publics entrées en vigueur le 17 avril 2014 3 ( * ) .

Parmi les avancées contenues dans ces textes, on peut relever :

- l'allègement du dossier de candidature par la substitution d'attestations sur l'honneur à certains justificatifs. Cette disposition permettra de faciliter la démonstration des capacités techniques, professionnelles et financières des candidats ;

- la limitation du chiffre d'affaires exigible au double du montant estimé du marché sauf justification ;

- le recours à l'allotissement , déjà obligatoire en France, qui permettra aux PME françaises de se positionner plus facilement sur les marchés publics de nos partenaires européens ;

- la mise en place d'une procédure de partenariat d'innovation . Le pouvoir adjudicateur pourra recourir à une procédure négociée par phases incluant le développement et l'acquisition d'un produit, d'un service ou de travaux nouveaux et innovants, sans avoir à procéder à une passation de marché distincte pour l'acquisition -dès lors que le marché porte sur une innovation, c'est-à-dire un produit, une solution ou un processus qui n'est pas disponible sur le marché ;

- la reconnaissance explicite de la possibilité de recourir à des critères sociaux et environnementaux en mettant en avant le cycle de vie des produits, ainsi que l'expérience et les qualifications du personnel ;

- l'obligation de rejeter une offre anormalement basse qui ne respecterait pas la législation sociale environnementale ou du travail opposable au soumissionnaire ;

- l'extension du champ de la réservation aux opérateurs économiques employant au moins 30 % de personnes handicapées ou défavorisées, ainsi qu'aux acteurs de l'économie sociale et solidaire lorsque le marché a pour objet des « services sociaux et autres services spécifiques.


* 3 La directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics et abrogeant la directive 2004/18/CE et la directive 2014/25/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 relative à la passation de marchés par des entités opérant dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des services postaux et abrogeant la directive 20 04/17/CE.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page