II. LE SOCLE INTERMINISTÉRIEL DE FORMATION ET D'ACTION SOCIALE FINANCÉ PAR LE PROGRAMME 148 : DES CHOIX DÉTERMINÉS PAR LES CONTRAINTES BUDGÉTAIRES

Le programme 148 Fonction publique est intégré au sein de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines copilotée par le ministre de l'économie et des finances et la ministre de la décentralisation et de la fonction publique.

En dépit de son intitulé générique, il regroupe les crédits consacrés à l'action interministérielle pour la formation des fonctionnaires d'une part, et pour l'action sociale d'autre part. Ce budget complète l'action propre de chaque ministère et ne représentent qu'une infime part du total consacré aux agents publics, disséminé dans les différents budgets ministériels. Ils contribuent, cependant, dans leurs deux volets à accompagner les évolutions de la fonction publique : professionnalisation et diversification du recrutement, professionnalisation de la formation, mobilité voulue entre les corps, restructurations des administrations. Ils sont aussi l'assurance, pour chaque agent, d'un minimum de prestations, celles relevant des ministères présentant une grande diversité d'un secteur à l'autre.

Les deux actions du programme sont dotées dans le projet de loi de finances pour 2015 d'une enveloppe globale de 201 883 924 euros en autorisations d'engagement (AE) - en hausse de 0,51 % par rapport à l'année précédente - et d'un crédit de 204 824 71 euros en crédits de paiement (CP) qui, eux, subissent une très légère érosion de 0,71 %.

Évolution des crédits de paiement du programme « Fonction publique »
(en euros)

Intitulé

LFI 2010

LFI 2011

LFI 2012

LFI 2013

LFI 2014

PLF 2015

Évolution

%

Action n° 1 : Formation des fonctionnaires

82 832 938

82 428 905

79 007 537

78 678 749

81 016 987

79 541 290

- 1,82

Action n° 2 : Action sociale interministérielle

138 491 647

138 672 303

146 832 674

138 379 234

125 273 278

125 283 441

+ 0,01

TOTAL

221 324 585

221 101 208

225 840 211

217 057 983

206 290 265

204 824 731

- 0,71

Source : données du ministère de la décentralisation et de la fonction publique

Le programme est placé sous l'autorité de la direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP) qui a pour mission de concevoir et mettre en oeuvre la politique de la fonction publique « à travers, d'une part, le pilotage de la cohérence statutaire et la conduite du dialogue social avec les organisations syndicales représentatives des fonctionnaires au niveau national et, d'autre part, la modernisation de la gestion des ressources humaines dans la fonction publique » 9 ( * ) .

Les moyens alloués à la direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP) pour piloter la politique de la fonction publique

Ses moyens budgétaires sont éclatés entre plusieurs programmes de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines :

1) Ses dépenses de personnels , auparavant inscrites au programme 221 Stratégie des finances publiques et modernisation de l'État , relèvent désormais du programme 218 Conduite et pilotage des politiques économiques et financières qui regroupe aussi ses moyens de fonctionnement au titre de la mutualisation de la gestion des fonctions support des services centraux ministériels.

Son schéma d'emplois est fixé pour 2015 à 157 ETP, comparable à celui de l'année précédente .

2) Ses moyens d'intervention sont ceux du programme 148.

Lors de son audition par votre commission des lois, le 12 novembre 2014, Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique, a indiqué que le Gouvernement avait choisi, en 2015, « de faire porter les efforts d'économie sur la formation, pour stabiliser les crédits en faveur de l'action sociale pour les agents les plus modestes ».

A. LES PRIORITÉS DE LA FORMATION : PROFESSIONNALISER ET DIVERSIFIER LES RECRUTEMENTS

Les crédits de formation inscrits au programme 148 sont essentiellement destinés à financer les subventions pour charge de service public versées à l'ENA et aux cinq IRA, ainsi que les actions de formation continue des agents.

Il peut être utile de préciser que, parallèlement, les dépenses globales de formation des ministères s'élèvent à 1,59 milliard d'euros par an, hors éducation, ce qui représente 3,9 % de la masse salariale.

1. Le détail des crédits

79 541 290 euros sont inscrits en AE et CP au titre de la formation interministérielle, soit une enveloppe inférieure à celle de 2014 (81 016 987 euros), qui recouvre dix catégories de dotations :

1 - Les dotations allouées à l'ENA (école nationale d'administration) et aux cinq IRA (instituts régionaux d'administration) de Bastia, Lille, Lyon, Metz et Nantes.

Ces six opérateurs assurent la formation initiale des futurs cadres supérieurs de l'État pour la première (90 postes offerts aux trois concours, 43 à l'externe, 38 à l'interne et 9 au 3 ème concours - c'est-à-dire 10 unités de plus que sur la période 2007-2013 -) et de ses cadres intermédiaires (les attachés d'administration) pour les seconds (625 postes aux derniers concours contre 649 pour les précédentes promotions). Soulignons que, répondant à la demande de la ministre, six des dix postes supplémentaires de la prochaine promotion de l'ENA bénéficient au concours interne.

Ces opérateurs interviennent également pour la formation continue des agents.

En 2015, les efforts conduits par l'ENA et l'INET (Institut national des études territoriales), respectivement chargés de former l'encadrement supérieur de l'État et des collectivités locales, pour rapprocher leurs formations seront poursuivis : il s'agit de la mise en commun de certains enseignements, notamment en matière d'administration territoriale, de droit et légistique et de finances publiques pour favoriser la construction d'un socle commun de connaissances professionnelles et d'une culture commune de l'action publique. Ces mutualisations ne se limitent pas à la formation initiale ; les deux écoles coopèrent également dans le domaine de la formation continue.

Les six opérateurs de l'État sont placés sous la tutelle administrative, juridique et financière de la ministre chargée de la fonction publique.

Leurs dotations s'élèvent respectivement à 32 267 018 euros contre 32,5 millions d'euros en 2014 (ENA) et 39 625 564 euros en baisse par rapport à 2014 - 40,2 millions d'euros - (IRA).

Ces montants intègrent l'évolution des schémas d'emplois qui diminuent de 3 ETP pour l'ENA et de 2 ETP pour les IRA.

2 - L'organisation des concours aux cinq IRA (118 370 euros) et les actions de formation interministérielle organisées :

- d'une part, à l'échelon central dans le cadre essentiellement de l'« École de la GRH (gestion des ressources humaines) » (mise en réseau des connaissances organisée en 2007), ainsi que des écoles de service public (50 730 euros) ;

- d'autre part, au niveau déconcentré, avec l'appui des IRA par le réseau des conseillers à la formation des plateformes régionales d'appui interministériel à la GRH (1 083 700 euros) ;

3 - Des actions de communication (guides méthodologiques, fonctionnement du site institutionnel « fonction-publique.gouv.fr ») ;

4 - Des programmes d'études et de recherche, et d'enquêtes auprès des agents et des employeurs (216 540 euros) ;

5 - L'organisation des journées d'études et de séminaires dans le domaine de la GRH et la participation à des colloques et salons (108 273 euros) ;

6 - Les subventions aux organisations syndicales représentatives de fonctionnaires de l'État au niveau national (2 360 000 euros) ;

7 - Les subventions accordées , chaque année, par le ministre chargé de la fonction publique à des associations ou fondations intervenant dans le champ de la GRH (16 618 euros) ;

8 - Le financement des vingt-six instituts et centres de préparation à l'administration générale (115 900 euros) ;

9 - La subvention à l'Institut européen d'administration publique de Maastricht (42 704 euros).

10 - Les allocations pour la diversité dans la fonction publique à hauteur de 3 017 537 euros.

Le nombre d'allocations, à raison de 2 000 euros par dossier, devrait s'élever à 1 500 (200 de moins que dans le précédent budget). D'après les éléments transmis à votre rapporteur, ce choix tient compte de la diminution, chaque année, du nombre de postes offerts aux concours de catégories A et B. La DGAFP a reçu en conséquence peu de demandes de dotations complémentaires.

Votre rapporteur insiste cependant sur la nécessité de maintenir le niveau nécessaire pour satisfaire pleinement les projets des bénéficiaires potentiels. Ce dispositif représente, en effet, 76 % des aides accordées aux élèves des classes préparatoires intégrés (CPI), lesquelles sont un formidable atout de promotion sociale.

2. Les classes préparatoires intégrées : un succès croissant à conforter

Rappelons que ce dispositif est destiné aux étudiants et demandeurs d'emploi de condition modeste pour les aider à préparer les concours externes de la fonction publique en leur apportant un soutien pédagogique renforcé, un appui financier et l'ass istance d'un tuteur.

Il est soumis à condition de ressources, de mérite et de motivation.

Certains des établissements dotés d'une classe préparatoire intégrée (CPI) ont mis en place des facilités d'hébergement et de restauration en propre par le biais d'un conventionnement avec les CROUS (centres régionaux des oeuvres universitaires et scolaires).

28 CPI ont été, à ce jour, mises en place au sein des écoles de service public (école nationale de la magistrature, ENA, IRA, école nationale supérieure de la police nationale, institut national du patrimoine, école des hautes études en santé publique...) La dernière classe a été ouverte, par un arrêté du 29 janvier 2013, par l'école nationale des techniciens de l'équipement pour favoriser la réussite au concours externe de technicien supérieur principal du développement durable.

D'après les renseignements transmis à votre rapporteur par la DGAFP, l'année 2013 a permis, une fois de plus, de constater la consolidation du dispositif, notamment :

- l'augmentation du nombre des dossiers (1 922 recevables contre 1 624 en 2011-2012) ;

- un taux d'évaporation assez faible à la rentrée des CPI (4 % contre 6,7 % en 2011/2012) ;

- une constante « féminisation du dispositif (68 % de femmes admises en CPI contre 72 % en 2011/2012) » ;

- « la confirmation de l'apparition d'une nouvelle catégorie de bénéficiaires, les élèves CPI sous contrat précaire à hauteur environ de 8 % » ;

- « la part des demandeurs d'emploi en légère diminution : 44 % (contre 47 % en 2011/2012 et 38 % en 2010/2011), celle des étudiants progressant en conséquence à 48 % (contre 47 %) , le solde de 8 % correspondant à la part des contrats précaires » ;

- « La possibilité offerte par certaines écoles (ENSP, INP...) aux CPistes de redoubler une année leur permettant d'asseoir un certain niveau de connaissance spécifique à la préparation des concours, et indirectement de se préparer à tout type de concours des trois fonctions publiques ».

- en revanche, les écoles peinent encore plus « à cibler les candidats issus des zones urbaines sensibles/contrats urbains de cohésion sociale (ZAV/CUCS), notamment au regard du niveau de la formation initiale des candidats se présentant à la sélection des CPI » ;

- la prise en charge financière des élèves est « relativement faible au regard à la fois de leur niveau de revenus et de leur origine géographique éloignée le plus souvent du lieu de l'école : 38 % de prise en charge totale (restauration et hébergement) pour 41 % d'élèves CPistes issus d'une région extérieure à celle de l'école (dont 3 % de candidats ultramarins). ».

- le taux de réussite progresse à nouveau (50 % contre 56 % en 2010/2011 et 41 % en 2011/2012).

Ce dernier point est encourageant et témoigne de la réussite de ce projet initié en 2006. Ce dispositif appelle cependant une attention particulière de la part du Parlement pour en permettre le renforcement. Votre rapporteur tient aussi à saluer la détermination des écoles engagées dans une CPI, ainsi que l'engagement des tuteurs au service de la réussite des élèves « CPistes ».

3. La réforme des concours d'entrée à l'ENA

Ce chantier, mené au cours de l'année 2013, s'est achevé par la présentation, en janvier 2014, d'un projet de réforme. Soumis à arbitrage ministériel, il s'est concrétisé par un arrêté du 16 avril 2014 applicable aux concours qui seront ouverts en 2015 « afin de permettre aux candidats (de) se préparer aux épreuves nouvelles ».

D'après les éléments transmis à votre rapporteur par la DGAFP, « le concours révisé vise à assurer un équilibre satisfaisant entre vérification des connaissances, évaluation des compétences et estimation des aptitudes des candidats ».

À ce dernier titre, est mise en place une « épreuve collective d'interaction » destinée à « t ester les qualités relationnelles des candidats ».

À la suite de cette réforme, une réflexion sur les cycles préparatoires et la CPI (CP'ENA) a été engagée pour proposer des voies d'amélioration en 2015.

Par ailleurs, le séquençage et le contenu de la scolarité initiale sont en cours de refonte. Cette réforme devrait être applicable en janvier 2016. Il s'agit, d'une part, de fixer un équilibre entre respect « des objectifs de progression pédagogique et de préparation des élèves à l'exercice de leurs futures fonctions » et, d'autre part, « une organisation de la scolarité qui ne constitue pas un élément dissuasif pour les candidats ayant des contraintes familiales ».


* 9 Cf. présentation stratégique du projet annuel de performance.

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