TROISIÈME PARTIE - LES MESURES RELATIVES AUX DÉPENSES

I. LES MESURES RELATIVES AUX DÉPENSES D'ASSURANCE MALADIE

A. LA PERSISTANCE DE DÉFICITS ÉLEVÉS DE L'ASSURANCE MALADIE EN 2014 ET 2015, EN DÉPIT DES ÉCONOMIES RÉALISÉES

Bien que l'ONDAM ait été respecté chaque année depuis 2010, le déficit du régime général d'assurance maladie demeure particulièrement élevé, 6,5 milliards d'euros en 2014 soit 67 % du déficit total du régime général, et tendrait même à s'accroître en 2015 (7,5 milliards d'euros). Le rythme de progression des charges (+ 2,2 % en 2014 et + 3,4 % en 2015) demeure en effet supérieur à celui des recettes (+ 2,5 % en 2014 et + 2,9 % en 2015).

Évolution du solde annuel de la branche maladie depuis 2011

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données de l'annexe B au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016)

1. Une réduction de 300 millions d'euros du déficit de l'assurance maladie en 2014

En 2014, le résultat de l'ensemble des régimes obligatoires d'assurance maladie et du régime général s'est établi à - 6,5 milliards d'euros , contre - 6,1 milliards d'euros prévus initialement dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014. Ce résultat constitue néanmoins une amélioration de 800 millions d'euros par rapport à la prévision établie dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015. À l'époque, le déficit avait, en effet, été revu significativement à la hausse (- 7,3 milliards d'euros).

Or les recettes affectées à la CNAMTS, en particulier de CSG sur les revenus de remplacement 64 ( * ) , se sont avérées supérieures de 400 millions d'euros à la prévision actualisée en 2015. En outre, les dépenses dans le champ de l'ONDAM se sont avérées inférieures de 300 millions d'euros. Le tableau ci-après illustre les écarts importants entre les prévisions initiales, actualisées et l'exécution de la branche maladie.

In fine , le déficit de l'assurance maladie s'est effectivement réduit de 300 millions d'euros par rapport à l'exécution observée en 2013.

Écarts entre la prévision et l'exécution du régime général
d'assurance maladie

(en milliards d'euros)

2013

2014

2015

2016

Exécution 2013

-6,8

Prévision LFSS 2014

-6,1

-5,4

-4,0

Prévision LFSS 2015

-7,3

-6,9

-5,8

Exécution 2014

-6,5

Prévision LFSS 2016

-7,5

-6,2

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données des lois de financement de la sécurité sociale pour 2014 et 2015 et du projet de loi de financement pour 2016)

L' ONDAM pour 2014 a été sous-exécuté de 300 millions d'euros par rapport à l'objectif voté en loi de financement de la sécurité sociale pour 2015, pour s'établir à 178 milliards d'euros . Les dépenses de soins de ville ont progressé de 3,0 %, notamment sous l'effet de l'arrivée sur le marché de nouveaux traitements onéreux contre l'hépatite C - tandis que les dépenses hospitalières ont augmenté de 1,8 % par rapport à 2013. Selon la direction de la sécurité sociale, les 2,9 milliards d'euros d'économies sur les dépenses de santé relevant de l'ONDAM ont donc été réalisées. Toutefois, la sous-exécution s'explique principalement par des mesures de régulation budgétaire sur l'ONDAM hospitalier : 250 millions d'euros de crédits à destination des établissements de santé ont ainsi été annulés fin 2014 .

L'année 2014 a également été marquée par la croissance des produits de la CNAMTS (+ 2,5 % contre + 1,9 % en 2013) grâce à l'apport de recettes nouvelles , les cotisations sociales étant à l'inverse en léger ralentissement (+ 1,8 % contre + 1,9 % en 2013). Le régime général d'assurance maladie s'est vu affecter 1 milliard d'euros supplémentaires en 2014 issu de la mesure de fiscalisation de la part acquittée par l'employeur au titre des contrats collectifs de complémentaire santé 65 ( * ) . La loi de finances pour 2015 n'a pas renouvelé cette affectation, ce qui a conduit à détériorer à nouveau les comptes de la branche.

2. Un creusement du déficit de 1 milliard d'euros en 2015 malgré des efforts importants en matière de dépense

Selon les prévisions actualisées du présent projet de loi de financement, le solde de la branche maladie se détériorerait en 2015 pour atteindre - 7,5 milliards d'euros . Pour mémoire, en 2012, le Gouvernement prévoyait de ramener le déficit de la branche maladie à 1,1 milliard d'euros en 2015.

Selon le rapport remis à la Commission des comptes de la sécurité sociale en septembre dernier, l'impact de l' intégration financière du RSI sur le solde du régime général d'assurance maladie - qui entraîne une dépense supplémentaire de 1,2 milliard d'euros en 2015 - sera bien neutralisé par l'affectation de recettes supplémentaires à la CNAMTS. La croissance des charges s'accélérerait sensiblement (+ 3,4 % contre + 2,2 % en 2014), principalement en raison de la hausse des dépenses situées en dehors du champ de l'ONDAM (+ 4,1 %).

Les recettes affectées à la CNAMTS progresseraient de 2,9 %, notamment en raison de l'attribution d'une fraction de C3S et du prélèvement de solidarité en compensation de l'adossement financier du RSI. En revanche, les recettes fiscales affectées à la branche diminueraient de 3,5 % alors même qu'elles avaient progressé de 11,5 % en 2014.

Évolution des recettes et des dépenses du régime général d'assurance maladie

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données de l'annexe B aux projets de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 et 2016)

L' ONDAM pour 2015 serait respecté. Celui-ci serait inférieur de 450 millions d'euros à l'objectif voté dans la loi de financement pour 2015, pour s'établir à 181,9 milliards d'euros (soit une progression de + 2,0 % contre + 2,5 % en 2014). Ce résultat s'expliquerait par une légère sous-exécution des dépenses de soins de ville, notamment en raison d'un rendement plus élevé que prévu des remises sur les médicaments et par la mise en oeuvre de mesures supplémentaires d'économies à hauteur de 425 millions d'euros décidé en avril 2015 (cf. infra ). Celles-ci consistent essentiellement en des annulations de crédits dont 250 millions d'euros sur l'ONDAM hospitalier, environ 80 millions d'euros dans le secteur médico-social, 50 millions d'euros sur le Fonds d'intervention régionale (FIR) et 40 millions d'euros sur les dotations relatives aux « autres prises en charge ».

Votre rapporteur pour avis souligne le manque de visibilité et les sacrifices qu'entraîne, pour les acteurs de terrain et en particulier les établissements hospitaliers, une telle régulation de l'ONDAM par des annulations en fin de gestion. Comme l'a souligné, à juste titre, le Comité d'alerte dans son avis du 6 octobre 2015, « si l'annulation de crédits hospitaliers peut effectivement permettre le respect de l'ONDAM, elle peut conduire parallèlement, si elle ne s'accompagne pas de mesures structurelles de maîtrise de la dépense, à un accroissement du déficit des établissements, tout particulièrement si elle concerne le financement de projets déjà mis en oeuvre » 66 ( * ) .

Réalisations prévisionnelles dans le champ de l'ONDAM en 2015

(en milliards d'euros)

Constat 2014

Base 2015 réactualisée

Objectifs 2015 rectifiés

Prévision 2015

Taux d'évolution

Écart à l'objectif 2015 rectifié

Soins de ville

80,9

81,2

83,0

82,9

2,1%

-0,1

Établissements de santé

74,8

75,0

76,8

76,5

2,0%

-0,3

Établissements et services médico-sociaux

17,5

17,5

17,9

17,8

1,7%

-0,1

Fonds d'intervention régional (FIR)

3,0

3,0

3,1

3,0

0,5%

0,0

Autres prises en charge

1,7

1,6

1,6

1,6

3,2%

0,0

ONDAM total

178,0

178,3

182,3

181,9

2,0%

-0,4

Source : annexe 7 au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016

En l'absence de mesures nouvelles, le déficit de la branche maladie se creuserait de 2,4 milliards d'euros en 2016 , compte tenu de la croissance tendancielle des dépenses. Le présent projet de loi de financement prévoit un effort total des régimes d'assurance maladie de 3,7 milliards d'euros en recettes et en dépenses pour 2016. Le déficit s'établirait par conséquent à 6,2 milliards d'euros en 2016, en baisse de 1,3 milliard d'euros par rapport à 2015.


* 64 Selon le rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale de juin 2015, l'écart de 200 millions d'euros en matière de CSG sur les revenus de remplacement s'explique notamment par la mauvaise prise en compte de l'impact de la mensualisation des pensions Agirc-Arrco.

* 65 Article 4 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014.

* 66 Avis du Comité d'alerte n° 2015-3 du 6 octobre 2015 sur le respect de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie.

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