EXAMEN DES ARTICLES RATTACHÉS

Article 57 quinquies [nouveau] (art. L. 2573-54-1 et L. 6500 du code général des collectivités territoriales) - Fixation du montant de la dotation globale d'autonomie de la Polynésie française pour 2016

Objet : Cet article, inséré par l'Assemblée nationale, renvoie à la loi de finances pour déterminer le montant de la dotation territoriale pour l'investissement au profit des communes (DTIC) de la Polynésie française pour l'année en cours. Il fixe à 80 ,5 millions d'euros le montant de la dotation globale d'autonomie (DGA) de la Polynésie française pour 2016.

I. Le dispositif proposé

Adopté par l'Assemblée nationale sur proposition du Gouvernement, le présent article se compose de deux parties.

Le porte sur la dotation territoriale pour l'investissement au profit des communes de la Polynésie française (DTIC) , prévue par l'article L 2573-54-1 du code général des collectivités territoriales. Les modalités de sa fixation indexée sur les critères définis à l'article L. 2334-32 du même code pour la dotation des territoires ruraux (DTER), étant devenue obsolète, il est proposé de prévoir que le montant de la DTIC pour l'année en cours est fixé par la loi de finances.

Le propose de fixer à 80 547 668 € pour 2016 le montant de la dotation globale d'autonomie (DGA) versée à la Polynésie française.

II. La position votre rapporteur

Votre rapporteur relève que le montant proposé pour la DGA est en diminution par rapport aux années précédentes. Il s'établissait ainsi à 84,5 millions d'euros en 2014 et à 90,6 millions d'euros en 2011.

Il vous propose de donner un avis favorable à l'adoption de cet article.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

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Réunie le mercredi 18 novembre 2015, sous la présidence de M. Alain Milon, président, la commission procède à l'examen du rapport pour avis de M. Didier Robert sur le projet de loi de finances pour 2016 (mission « Outre-mer »).

M. Didier Robert , rapporteur pour avis . - Comme l'année passée, la mission « Outre-mer » peut être considérée comme relativement préservée. A 2,06 milliards, les crédits de paiement de la mission devraient connaître une quasi-stabilité. Gardons-nous pour autant de tout triomphalisme ; la situation des outre-mer reste critique sur l'ensemble des sujets sociaux : des taux de chômage, qui représentent plus du double de celui de l'hexagone, dépassant très largement les 50 % pour les jeunes dans la plupart des départements d'outre-mer (DOM) ; l'habitat insalubre, dont la permanence est intolérable et que les actions entreprises sont très loin de résorber ; la santé - les débats récents lors de l'examen du projet de loi sur la santé ont révélé les écarts qui continuent de se creuser avec l'hexagone. En réalité, nous savons tous que ces crédits, quoique préservés, ne suffiront pas à couvrir l'immensité des besoins.

Si je comprends la nécessité pour l'ensemble des secteurs de l'État de prendre leur part de l'effort de redressement des comptes publics, la maquette budgétaire globale ne prend absolument pas en compte la réalité des situations économiques et sociales des outre-mer. Les autorisations d'engagement de la mission sont en baisse légère de 13,2 millions d'euros : l'investissement de l'État sur ces territoires diminue.

Un nouveau coup de rabot aux exonérations de cotisations sociales pour les entreprises de Guadeloupe, de Martinique, de Guyane, de La Réunion, de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy a été décidé à l'article 9 du projet de loi de financement de la sécurité sociale. En conséquence, l'action n° 1 du programme 138 sur le soutien aux entreprises, de compensation de ces exonérations par le budget de l'État aux organismes de sécurité sociale, représente 1,1 milliard d'euros, soit la moitié des dépenses de la mission. Je connais les critiques adressées aux dispositifs de défiscalisation dans ce contexte de redressement budgétaire. Les niches sociales ultramarines doivent être examinées au regard des conditions particulières de la compétitivité de ces territoires. Ce ne sont pas des cadeaux aux entreprises ultramarines, mais des dispositifs absolument indispensables à la survie des économies des outre-mer, dont la suppression ou la réduction progressive ne pourra qu'entraîner des résultats économiques encore plus catastrophiques et, par voie de conséquence, la nécessité de mesures de compensation sociale toujours plus importantes.

Depuis sa mise en place en 1994, le dispositif d'exonérations de charges patronales a déjà connu des coups de rabot successifs dans le cadre de la loi de finances pour 2009, de la Lodeom et de la loi de finances pour 2014. La réforme en cours d'examen entraînera une baisse de 75 millions d'euros des crédits. Ces ajustements vident progressivement le mécanisme de sa logique.

Pourquoi faire porter cette réforme par le PLFSS, quand elle figurait en 2013 dans le projet de loi de finances ? Ce déplacement pose la question du suivi parlementaire d'un dispositif aussi important pour les outre-mer, dans la mesure où deux commissions différentes ont été appelées à se prononcer.

Enfin, le recentrage sur les bas salaires me fait craindre une trappe à bas salaires, quand tout devrait être fait pour favoriser l'emploi qualifié dans les outre-mer, et notamment l'embauche de jeunes ultramarins diplômés.

L'avenir des différents mécanismes de défiscalisation dans les outre-mer semble en suspens. Si l'article 43 du projet de loi de finances proroge jusqu'au 31 décembre 2017 des dispositifs d'aide fiscale à l'investissement, qui concernent notamment le logement social, la question de leur devenir au-delà reste entière.

Le service militaire adapté (SMA), qui a inspiré l'expérimentation du service militaire volontaire (SMV), bénéficiera pour 2016 de 202 millions d'euros, en hausse de 3 % par rapport à l'an passé. Ces crédits permettront d'accueillir le nombre modeste de 5 800 stagiaires, en deçà des prévisions initiales du plan SMA 6 000. Selon les informations recueillies lors des auditions, le décalage de cet objectif à 2017 est une conséquence des contraintes budgétaires nouvelles définies par le triennal 2015-2017.

Nous pouvons tirer un premier bilan de la réforme de la continuité territoriale mise en oeuvre cette année par voie réglementaire, et sur laquelle le Sénat avait exprimé ses fortes inquiétudes, par un amendement d'appel rétablissant les crédits associés. Cette politique de compensation de l'éloignement des outre-mer par des aides au transport constitue la traduction du principe d'unité de la République. Elle est principalement portée par les crédits du fonds de continuité territoriale, qui recouvre plusieurs dispositifs : l'aide à la continuité territoriale, le passeport mobilité études et le passeport mobilité formation professionnelle. Ces aides sont gérées par l'agence de l'outre-mer pour la mobilité (Ladom). Ces crédits, en légère augmentation pour 2016, devraient s'établir à 43 millions d'euros ; ils restent pourtant, à périmètre constant, 9 millions en-deçà du niveau de 2014, soit une perte définitive de près de 20 % des crédits.

Cette baisse brutale s'est fort logiquement traduite dans le niveau de recours des populations aux aides à la mobilité du ressort de l'État, qui a connu un véritable effondrement. Selon Ladom, un peu plus de 12 000 bons de continuité territoriale avaient été réalisés au mois d'août 2015, contre près de 73 000 à la même date en 2014, soit une baisse de 84 % du nombre de bons utilisés comme des crédits associés, et un sérieux coup porté à l'universalité du dispositif par la réforme de 2015 - elle consistait à réviser à la baisse le montant des aides et à n'autoriser leur bénéfice qu'une fois tous les trois ans.

Cette baisse globale s'est faite sans pour autant améliorer l'accès des plus démunis à cette aide, contrairement à ce qu'annonçait le Gouvernement l'an passé. En effet, le montant des aides simples accordées a diminué sans que celui des aides majorées augmente, ce qui n'améliore pas la situation des restes à charge.

En réalité, l'État se désengage et fait supporter une part importante du dispositif aux collectivités territoriales. La plupart des collectivités ultramarines ont dû mettre en place des aides complémentaires à celles apportées par l'État. En 2014, près de la moitié des aides étaient déjà prises en charge dans ce cadre.

Le budget de la continuité territoriale proposé pour l'année 2016 offre cependant au moins un motif de satisfaction avec la mise en place d'une aide à la continuité funéraire, pour un montant provisionné à hauteur d'1 million d'euros. Nous devrons nous montrer particulièrement attentifs à cette question pour garantir la justice, l'égalité, et surtout la dignité de tous les Français.

J'appelle votre attention sur les mesures prises face à la situation sanitaire, dont le caractère urgent a été souligné par le rapport de la Cour des comptes de juin 2014 La santé dans les outre-mer, une responsabilité de la République. Il était relevé que les territoires ultramarins cumulent les difficultés, avec des risques spécifiques importants dans un contexte socio-économique dégradé : présence d'agents infectieux spécifiques (épidémies de chikungunya ou de zika), de pathologies rares ou à la prévalence faible dans l'hexagone (leptospirose, résurgence de la tuberculose et des hépatites), de maladies chroniques (diabète et hypertension artérielle, Sida), et de risques environnementaux particuliers (chlordécone aux Antilles). Le taux de mortalité infantile constitue un indicateur particulièrement frappant : de 3,3 pour mille dans l'hexagone en 2012, il atteignait 8,5 à La Réunion, 9,9 en Guadeloupe et jusqu'à 16,1 à Mayotte. Si La Réunion et les Antilles sont dans une dynamique de convergence avec l'hexagone, la Guyane et Mayotte font face à des retards importants. Les problèmes rencontrés dans l'hexagone quant à l'organisation du système de santé se manifestent de manière aiguë sur ces territoires, en particulier les problèmes d'accès aux soins, aggravés par l'insularité.

La Direction générale des outre-mer (Dégéom) m'a indiqué qu'un travail interministériel était engagé pour définir une stratégie de santé spécifique aux outre-mer. Leurs conclusions devraient être présentées dans les prochaines semaines et faire l'objet d'un plan santé pour les outre-mer au début de l'année prochaine. Les crédits associés au financement d'actions sanitaires ne relèvent cependant pas de la présente mission, qui prévoit seulement 2 millions d'euros au titre général des actions sanitaires et sociales. Aussi, notre commission devra se montrer particulièrement attentive au suivi de ces travaux.

Comme l'année passée, mes réserves sont donc nombreuses. Ce budget n'a aucune autre ambition que celle de continuer à garantir un niveau minimal de ressources aux outre-mer ; en aucun cas il ne propose une véritable politique encourageant l'investissement et l'emploi dans ces territoires.

Cependant, compte tenu d'une situation exceptionnelle qui aura nécessairement des traductions budgétaires, je vous propose de donner un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Outre-mer », ainsi qu'à celle de l'article 57 quinquies rattaché - sous réserve toutefois de porter l'an prochain une attention particulière aux différents points que je vous ai signalés.

Mme Nicole Bricq . - Le rapporteur émet de nombreuses réserves mais propose un avis favorable. Il reprend le débat sur l'article 9 du PLFSS en dénonçant l'existence de deux budgets. Il est normal que l'État compense ici les exonérations. Il faudrait, sinon, fusionner les deux budgets. Le rapporteur général avait rappelé que le recentrage sur les entreprises à bas salaires tenait compte du rapport de l'Inspection générale des affaires sociales et de l'Inspection générale des finances, très critique sur les niches sociales en outre-mer, et souligné que le Gouvernement n'avait pas appliqué ses recommandations, admettant que l'outre-mer devait bénéficier d'exonérations en raison d'une situation particulière. Cela est écrit clairement dans le rapport du rapporteur général, qui est d'une grande honnêteté intellectuelle.

Mme Catherine Procaccia . - La commission des affaires sociales s'est rendue à La Réunion en 2006. J'y avais découvert le SMA, un outil fantastique. La demande est-elle supérieure au nombre de places de stagiaires ? La limitation du nombre est-elle due à des raisons financières ? Qu'est-ce que les aides au transport et à la continuité funéraire, et qui concernent-elles ?

J'interrogerai en décembre le ministre de la recherche sur le chlordécone aux Antilles. Le surcroît de cancers de la prostate ne constitue pas un problème purement sanitaire.

La proposition de recentrer les aides sur l'embauche des ultramarins diplômés me paraît de bon sens.

Mme Laurence Cohen . - Les problèmes dénoncés dans la métropole sont amplifiés dans les départements et régions d'outre-mer. La proposition d'un travail plus approfondi de la commission des affaires sociales sur cette zone a été approuvée par M. le président. La lecture du rapport suscite beaucoup d'interrogations. La situation, très dégradée, requiert une intervention exceptionnelle. Nous nous abstiendrons car les moyens ne sont pas à la hauteur de la situation réelle ni des ambitions affichées.

Mme Karine Claireaux . - Je salue l'effort du Gouvernement qui préserve les crédits de la mission « Outre-mer », même s'ils ne correspondent pas aux besoins. Proposer un vote favorable, malgré des réserves, est une bonne chose. OEuvrons tous à une meilleure prise en compte des problèmes ultramarins, de santé mais aussi à un développement économique endogène, qui diminuerait le recours aux aides sociales.

M. Didier Robert , rapporteur pour avis . - L'objectif du SMA, qui est un très bon outil, reste modeste. Tout le monde serait favorable à davantage, mais les contraintes budgétaires sont là. Les aides aux transports sont de trois types : libres, pour les étudiants, pour la formation professionnelle. Il s'agit d'un accompagnement financier par l'Etat et les collectivités des ultramarins allant en métropole. L'inverse n'existe pas, sinon pour le rapatriement funéraire, dont le budget s'élève à 1 million d'euros.

Si j'ai proposé d'accorder un avis favorable à cette mission, c'est parce que je suis conscient de l'effort du Gouvernement. Il faut néanmoins revoir un logiciel de pensée qui consiste à acheter la paix sociale outre-mer. À La Réunion, le taux de chômage est de 28 %. Il atteint 60 % des jeunes de moins de 25 ans qualifiés. Ils n'ont quasiment aucune perspective. Je plaide pour une démarche d'accompagnement des entreprises et je regrette que le Gouvernement reprenne d'une main ce qu'il donne de l'autre. Il accorde le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (Cice) mais rogne sur les exonérations : 75 millions d'euros sont supprimés pour les outre-mer. Le coût budgétaire du Cice pour l'État est de 4 à 5 millions d'euros. Voyez le différentiel.

Mme Nicole Bricq . - Il n'y a pas que le Cice.

M. Didier Robert , rapporteur pour avis . - Tant que nous serons dans une posture de rééquilibrage, de nouveaux problèmes pourront surgir. Un nouveau modèle est nécessaire car ce sont les entreprises qui créent les emplois. La garantie-jeunes, c'est-à-dire 480 euros pour ne rien faire, est inadmissible. J'ai proposé que les collectivités l'abondent si le jeune est inséré en entreprise. J'attends depuis deux ans la réponse du Premier ministre. En 1986, la défiscalisation a déclenché le décollage économique des outre-mer. La situation actuelle est critique.

M. Alain Milon , président . - La commission effectuera une mission sur la situation sanitaire en outre-mer en 2016. Elle se rendra en avril à La Réunion et à Mayotte.

La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Outre-mer ».

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