TRANSMISSION DES SAVOIRS ET DÉMOCRATISATION DE LA CU LTURE

SECONDE PARTIE - LE PROGRAMME 224 « TRANSMISSION DES SAVOIRS ET DÉMOCRATISATION DE LA CULTURE »

Le programme 224 « transmission des savoirs et démocratisation de la culture » regroupe d'une part les crédits de l'éducation artistique et culturelle (EAC), de l'enseignement supérieur de la culture (ESC), d'autre part ceux des fonctions de soutien du ministère de la culture et de la communication.

Le projet annuel de performances pour 2016 précise trois priorités du ministère de la culture et de la communication :

- améliorer l'attractivité de l'enseignement supérieur de la culture, son insertion dans le paysage de l'enseignement supérieur français et international et assurer l'insertion professionnelle des diplômés : le ministère s'attachera en particulier à la mise en oeuvre de la loi du 22 juillet 2013 relative à l'enseignement supérieur et la recherche (loi « Fioraso »), en aidant les écoles de l'ESC à s'insérer dans les regroupements d'universités et établissements d'enseignement supérieur ainsi qu'à améliorer leur gouvernance ; le ministère entend également « poursuivre l'harmonisation du service public d'ESC au bénéfice des étudiants » (bourses, mobilité, contrats doctoraux...) et à « aligner les statuts des enseignants des écoles territoriales d'arts plastiques sur ceux des enseignements des écoles nationales et rapprocher les conditions d'exercice des enseignants chargés d'activités de recherche dans le secteur de l'architecture de celles des enseignants-chercheurs ».

- favoriser l'accès de chacun à la culture, sur l'ensemble du territoire français ainsi qu'à l'international, notamment grâce au développement de l'EAC : le ministère entend ici articuler le plan EAC avec la loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école, qui intègre l'EAC dans la formation de tous les élèves ; cela passe par la qualification des actions d'EAC sur l'ensemble du territoire, mobilisation des acteurs, politiques partenariales, formation des professionnels, ceci en lien avec le ministère de l'éducation nationale (feuille de route conjointe présentée en Conseil des ministres le 11 février 2015). Le ministère de la culture et de la communication met également l'accent sur le développement culturel dans les territoires « déficitaires » : suite au comité interministériel à l'égalité et à la citoyenneté du 6 mars 2015, les DRAC ont reçu mission de renforcer leurs actions sur ces territoires, en particulier via les contrats locaux d'éducation artistique (CLEA).

Autre action prioritaire, le développement des politiques interministérielles adaptées aux publics spécifiques : l'effort portera particulièrement sur l'accessibilité du cinéma et de l'audiovisuel, sur le volet « culture et handicaps », sur la prise en compte du secteur médicosocial dans la politique Culture-Santé, sur la convention avec le ministère de l'agriculture et sur le protocole Culture-Justice. Le ministère, encore, met l'accent cette année sur la numérisation des données culturelles, suite aux travaux menés dans le cadre de la modernisation de l'action publique (MAP) 6 ( * ) . Enfin, au titre de sa politique internationale, le ministère met l'accent sur l'adaptation des politiques culturelles à l'heure du numérique - notamment la défense du droit d'auteur - et la promotion des industries culturelles et créatives françaises.

- optimiser la gestion des fonctions de soutien du ministère : l'action du ministère articule les grands objectifs que sont la maîtrise des dépenses publiques, la modernisation de la fonction publique, la qualité de service, la modernisation de l'action publique, la réforme territoriale de l'État et la stratégie nationale de transition écologique pour le développement durable.

I. UNE HAUSSE DES CRÉDITS AU SERVICE DE LA DÉMOCRATISATION ET DE L'ACCESSIBILITÉ CULTURELLE

Cette année, les crédits du programme 224 progressent de 38,3 millions d'euros en autorisations d'engagement, à 1 139,19 millions d'euros (+3,4 %) et de 21,4 millions d'euros en crédits de paiement, à 1 129,24 millions (+2 %).

Hors action 7 « fonctions de soutien du ministère », qui représente les deux-tiers du programme 224 et qui progresse de 1,2 % en autorisations d'engagement, les crédits visant la transmission des savoirs et la démocratisation culturelle gagnent 29,3 millions d'euros, soit +7,7 %. Votre rapporteur pour avis salue ce progrès, d'autant qu'il suit deux années de hausse consécutive : en trois ans, les crédits ciblés sur la transmission des savoirs et la démocratisation culturelle gagnent 25 %, c'est important.

1. L'action 1 : « Soutien aux établissements d'enseignement supérieur et insertion professionnelle »

Les crédits de l'action 1 gagnent 25 millions d'euros en autorisations d'engagement, à 278,9 millions d'euros (+9,8 %) et 2,97 millions d'euros en crédits de paiement, à 267,75 millions d'euros (+1,1 %).

Les subventions aux écoles sont maintenues : 146 millions d'euros sont constitués de subventions pour charges de service public à la centaine d'établissements publics d'enseignement supérieur culturel qui accueillent quelque 37 000 étudiants.

Subventions aux établissements publics d'enseignement supérieur culture en 2015 et 2016

(En millions d'euros)

PLF 2015

Crédits de paiement

PLF 2016

Crédits de paiement

Écoles nationales supérieures d'architecture

50,5

51

Institut national du patrimoine

6,3

6,1

École du Louvre

2,1

2

Sous-total architecture et patrimoine

58,9

59,1

École nationale supérieure des Beaux-Arts

7,7

7,9

École nationale supérieure des arts décoratifs

11,6

11,6

École nationale supérieure de création industrielle

4

4

Écoles d'art en région

11,5

11,8

Académie de France à Rome

5,2

5,2

Sous-total arts plastiques

40

40,5

Conservatoire national supérieur d'art dramatique

3,7

3,7

Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris

25,4

25,5

Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Lyon

13,7

13,8

Centre national des arts du cirque

3,4

3,4

Sous-total spectacle vivant

46,2

46,4

Total

145,1

146

Source : Projet annuel de performances de la mission Culture pour 2015 et 2016

Les crédits aux écoles nationales d'architecture progressent légèrement, à 48,5 millions d'euros (1,01 %), dont 5 millions sont réservés à la titularisation des enseignants et 1,2 million pour accompagner la réforme du statut d'enseignant chercheur (voir plus bas).

Un effort est réalisé pour améliorer la vie étudiante : Votre rapporteur pour avis salue le double effort d'investissement dans les établissements d'enseignement artistique et d'action sociale en direction des étudiants.

Les crédits d'investissement de l'action 1 progressent de 40 % en autorisation d'engagement, à 24,31 millions d'euros, et de 22,5 % en crédits de paiement, à 35,45 millions d'euros. Ces chiffres, cependant, sont très sensibles à des opérations importantes : ainsi les dépenses d'investissement pour les écoles d'architecture sont presque intégralement réservées au déménagement de l'école d'architecture de Marseille sur un nouveau site (ZAC Saint-Charles).

Les écoles d'art bénéficient quant à elles de 5,45 millions d'euros d'autorisations d'engagement et de 10,5 millions d'euros de crédits de paiement en 2016. Sont ainsi réservés 5,1 millions d'euros de crédits de paiement pour les travaux à l'École nationale supérieure de la photographie (ENSP) d'Arles, 2,5 millions d'euros d'autorisations d'engagement pour le projet ARTEM (Art, Technologie, Management) et 1,4 million d'euros de crédits de paiement pour des travaux à l'École nationale supérieure des beaux-arts de Paris-Malaquais.

Les écoles du spectacle vivant disposent de 2 millions d'euros de crédits de paiement en investissement, dont la moitié ira à l'aménagement d'un bâtiment à Charleville-Mézières pour l'Institut international de la marionnette.

Les crédits aux bourses et aides individuelles aux étudiants, ensuite, progressent de 2,5 millions d'euros, à 38,45 millions d'euros (+7 %) et le Gouvernement annonce leur ouverture aux étudiants en classes préparatoires publiques d'art : c'est une mesure utile, demandée de longue date par les étudiants.

Enfin, 1,7 million d'euros sont destinés au financement des contributions consécutives à la titularisation d'agents contractuels dans le cadre de la mise en oeuvre de la loi du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique.

Le Gouvernement poursuit l'intégration des établissements supérieurs d'art au cycle LMD (licence-master-doctorat) : une dotation de 0,8 million d'euros est reconduite pour financer la poursuite de l'intégration au sein des communautés d'universités et d'établissements ; 1,2 million d'euros seront mobilisés à cette fin, dont 0,7 million pour les contrats doctoraux, 0,4 million pour les congés études et recherche et 0,1 million dans le cadre de la réforme de l'admission en première année. La présentation stratégique du programme précise également que 15 emplois d'enseignants-chercheurs seront créés à la rentrée 2016 dans les écoles d'architecture.

1 million d'euros sont prévus pour développer la recherche dans les écoles d'art ; dans le domaine du spectacle vivant, 80 000 euros de subventions pour charges publiques seront destinés à la mise en place d'un diplôme national supérieur professionnel de hip-hop au Conservatoire national de Lyon.

2. L'action 2 : « Soutien à la démocratisation et à l'éducation artistique et culturelle »

Les crédits de l'action 2 gagnent 4,62 millions d'euros en autorisations d'engagement, à 95,97 millions d'euros (+5 % ) et 8,82 millions d'euros en crédits de paiement, à 98,07 millions d'euros (+9,8 %) .

L'État reprend son soutien aux conservatoires d'art et de musique : 7,92 millions d'euros sont inscrits en crédits d'intervention pour les conservatoires à rayonnement régional et départemental, alors qu'ils avaient été supprimés l'an passé. Ces crédits sont délégués en gestion aux DRAC, avec mission de mettre en avant le renouveau des esthétiques, le développement de la création et de l'innovation, ainsi que l'ouverture à un public jeune et divers. De plus, 1,5 million d'euros sont prévus pour généraliser le dispositif d'éducation musicale et orchestrale à vocation sociale (Démos), porté notamment par la Philharmonie de Paris

Le plan d'Éducation artistique (EAC) est renforcé : les dépenses d'intervention pour l'action 2 progressent de 6,7 millions d'euros en crédits de paiement en 2016 (+7,9 %), sous l'effet principal des 4,5 millions d'euros supplémentaires mis à disposition du plan EAC (+45 %).

Les mesures nouvelles visent en particulier à renforcer l'éducation aux médias et à l'information, ainsi qu'au développement d'actions spécifiques pour le numérique, aussi bien pendant que hors temps scolaire.

Parallèlement au plan EAC, les principales mesures dans le domaine de l'éducation artistique et culturelle sont les dispositifs partenariaux État-régions en temps scolaire (9 millions d'euros) et les projets fédérateurs hors temps scolaire (11 millions d'euros). Les actions en faveur des publics spécifiques (en milieu hospitalier, dans les domaines du handicap ou de la justice) représentent également plus de 10 millions de crédits.

L'action est renforcée en direction des publics prioritaires : à la suite du comité interministériel à l'égalité et à la citoyenneté du 6 mars 2015, la présentation stratégique du programme 224 met en exergue l'objectif de concentrer l'action culturelle vers des publics considérés comme éloignés de la culture, en particulier les jeunes habitant dans la géographie prioritaire de la politique de la ville et dans les territoires péri-urbains ou ruraux.

Les actions de politiques territoriales progressent de 0,48 million d'euros, à 15,68 millions d'euros. Ces crédits financent des conventions avec les collectivités territoriales, des conventions régionales interministérielles et un soutien aux organismes départementaux et régionaux pour le développement des arts vivants.

La part des enfants et adolescents ayant bénéficié d'une action d'éducation culturelle et artistique dans une année est passée de 29 % à 37 % entre 2013 et 2015, et ce projet de loi de finances fixe l'objectif de 42 % pour l'an prochain (indicateur 2.1 du programme 224).

Le « fléchage » de crédits vers des publics prioritaires

Lors du comité interministériel à l'égalité et à la citoyenneté du 6 mars 2015, le ministère de la culture et de la communication a présenté des axes d'intervention prioritaire en direction des publics les plus éloignés de la culture, en mettant l'accent sur les jeunes résidant dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville et dans les territoires péri-urbains ou ruraux.

Conformément à la convention triennale d'objectifs pour les quartiers populaires, signée le 5 mars 2014 par la ministre de la Culture et de la Communication et le ministre délégué chargé de la Ville, plus de 30 % des moyens nouveaux alloués au plan EAC ont été attribués à des projets au bénéfice des habitants des quartiers de la politique de la ville. De plus, le contenu du volet « culture » des contrats de ville a fait l'objet, le 21 mai 2015, d'une instruction conjointe des ministres en charge de la culture et de la Ville.

En ce qui concerne le milieu rural, pour affiner la notion de « zones rurales isolées », le ministère de la Culture et de la Communication a identifié des types de territoires prioritaires, au sein de la « nouvelle typologie des campagnes françaises » réalisée par la Délégation interministérielle à l'aménagement du territoire et à l'attractivité régionale (DATAR) en 2012.

En 2015, en plus des mesures nouvelles EAC, 4 millions d'euros supplémentaires délégués aux DRAC pour abonder la politique d'EAC et les territoires prioritaires. L'EAC a bénéficié de 42 % de ces fonds, la politique de la ville de 32 % et le monde rural de 14 %. De plus, deux appels à projets nationaux ont été dotés d'1 million d'euros chacun, l'un pour « L'action culturelle au service de la maîtrise du français », le second sur le thème « Médias de proximité ».

3. L'action 6 : « Action culturelle internationale »

L'action 6, qui représente seulement 0,5 % du programme 224, voit ses crédits diminuer de 160 000 euros en 2016, à 5,92 millions d'euros (-2,6 %).

La baisse porte sur la promotion de la création et des industries culturelles françaises à l'étranger ; cependant, comme annoncé lors des Assises de la Jeune création, le bureau export du programme 334 « livre et industrie culturelle » sera mobilisé pour soutenir la filière française de la musique enregistrée.

Enfin, les crédits pour la diffusion des cultures étrangères en France et l'accueil des professionnels de la culture et des artistes étrangers en France ne changent pas de niveau, à 3,8 millions d'euros.

4. L'action 7 : « Fonctions de soutien du ministère »

Les crédits de l'action 7 gagnent 9 millions d'euros en autorisations d'engagement, à 758,69 millions d'euros (+1,2 %) et 9,8 millions d'euros en crédits de paiement, à 757,48 millions d'euros (+1,3 %).

Cette action regroupe l'ensemble des crédits alloués aux fonctions de soutien (ressources humaines, logistique, système d'information, etc.) de l'administration centrale et des services déconcentrés. Elle comprend également la masse salariale en titre 2 du ministère, afin d'assurer une meilleure gestion des emplois et de leur évolution.

Hors titre 2, les crédits de l'action 7 progressent de 3,1 millions d'euros en autorisations d'engagement (+3,6 %) et de 3,9 millions d'euros en crédits de paiement (+4,6 %). Selon les informations communiquées à votre rapporteur pour avis, ces augmentations s'expliquent par le plan de développement de l'apprentissage dans la fonction publique, et par la montée en charges de l'opérateur du patrimoine et des projets immobiliers de la culture (OPPIC).

Les crédits du titre 2 gagnent 5,34 millions d'euros, à 667,9 millions d'euros (+0,9 %), pour un plafond d'emplois relevé de 83 équivalents temps plein travaillé (ETPT), à 11 041 ETPT.

Les subventions aux opérateurs sont particulièrement maîtrisées : si les crédits de paiement progressent de 3,9 millions d'euros (+2,4 %), cette hausse est absorbée par la Cité nationale de l'histoire de l'immigration et aquarium de la porte Dorée, à Paris (+2,14 millions d'euros) et par l'Opérateur du patrimoine et des projets immobiliers de la Culture (+890 000 euros). Pour la plupart des autres opérateurs, le tableau ci-après montre que les subventions sont identiques, en baisse ou en augmentation moindre que l'inflation :

Subventions aux opérateurs

(en milliers d'euros)

Opérateur(s) financé(s)

AE-CP PLF 2015

AE-CP PLF 2016

AFR - Académie de France à Rome

5 219

5 219

Centre national des arts du cirque

3 367

3 368

CNSAD - Conservatoire national supérieur d'art dramatique

3 716

3 730

CNSMD Lyon - Conservatoire national sup. de musique et de danse de Lyon

13 688

13 818

CNSMD Paris - Conservatoire national sup. de musique et de danse de Paris

25 417

25 475

École du Louvre

2 125

1 192

Écoles d'architecture - Écoles nationales supérieures d'architecture

50 523

51 009

Écoles d'art en Région

11 451

11 784

ENSAD - École nationale supérieure des arts décoratifs

11 586

11 586

ENSBA - École nationale supérieure des beaux-arts

7 749

7 939

ENSCI - École nationale supérieure de création industrielle

3 953

3 953

ENSMIS - École nationale supérieure des métiers de l'image et du son

0

0

EPPD - Établissement public du palais de la porte Dorée (Cité nationale de l'histoire de l'immigration et aquarium)

4 462

6 606

INP - Institut national du patrimoine

6 294

6 119

Institut Français (programme 185 - Diplomatie culturelle et d'avenir)

1 360

1 360

OPPIC - Opérateur du patrimoine et des projets immobiliers de la Culture

9 490

10 380

Total

160 400

164 338

Source : Commission de la culture du Sénat, d'après les projets annuels de performances pour 2015 et 2016


* 6 Évaluation de la politique de numérisation des données culturelles. Ministère de la culture et de la communication. Avril 2015.

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