INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le projet de loi de finances de 2016 ne dément pas l'effort budgétaire consacré, chaque année, depuis 2012 aux outre-mer. Certes, l'évolution des crédits de la mission Outre-mer ne peut résumer l'effort de l'État en faveur de nos compatriotes ultramarins, la plupart des crédits intéressant les outre-mer relevant des autres missions budgétaires en fonction des politiques publiques mises en oeuvre. En effet, comme l'indique le document de politique transversale consacré à l'outre-mer annexé au projet de loi de finances pour 2016, l'effort financier de l'État en faveur des outre-mer est porté par 85 programmes relevant de 26 missions, auxquels s'ajoutent le budget annexe Contrôle et exploitation aériens .

Cette année, votre rapporteur a souhaité, à l'occasion de la discussion budgétaire, porter son attention sur la politique menée outre-mer en matière de sécurité et, plus particulièrement, sur l'action des forces de l'ordre auxquelles les circonstances particulières à la suite des attentats commis à Paris et à Saint-Denis le 13 novembre dernier appellent, une nouvelle fois, à rendre hommage. Compte tenu de ces évènements dramatiques et des menaces existantes, l'état d'urgence est d'ailleurs en vigueur depuis une semaine dans les départements d'outre-mer, à Saint-Barthélemy et Saint-Martin ; le Parlement en a décidé, à la quasi-unanimité, sa prorogation jusqu'au plus tard le 26 février prochain.

Ayant engagé ses travaux avant le déroulement de ces attentats, votre rapporteur a pu constater que la prévention des phénomènes de radicalisation, qui n'épargnent pas les collectivités ultramarines, sont un sujet de préoccupation des services de l'État. À cet égard, l'expérience démontre que, loin des a priori , la radicalisation n'est pas forcément en lien avec la composante religieuse du territoire. Les comportements de radicalisation religieuse, notamment issus de l'islamisme radical, ne sont pas majoritairement constatés à Mayotte, un territoire où pourtant la population est majoritairement de confession musulmane. Ce constat doit mener à une analyse plus fine de ce mouvement que l'approche qui lui est généralement consacrée.

Au-delà de ce contexte, l'action quotidienne des services de sécurité outre-mer a suscité, depuis plusieurs décennies maintenant, des adaptations pour la prise en compte des spécificités ultramarines que votre rapporteur a souhaité illustrer. Ce rapport est également l'occasion de souligner le décalage qui peut naître dans la population entre le niveau constaté de faits de criminalité et de délinquance et le sentiment d'insécurité qui s'y exprime.

I. UN BUDGET FAVORABLE EN FAVEUR DES OUTRE-MER

Dans son précédent avis budgétaire, votre rapporteur s'était félicité de la qualité globale des réponses à son questionnaire budgétaire, et avait loué l'effort de la direction générale des outre-mer à lui adresser dans les délais impartis lesdites réponses. Ce constat ne peut malheureusement pas être salué dans le cadre du présent avis : deux tiers seulement des réponses ont été envoyées avant le 10 octobre 2015 et la qualité des réponses laisse dubitatif quant à l'attention portée par les administrations d'État aux interrogations des parlementaires.

A. UN EFFORT BUDGÉTAIRE GLOBALEMENT MAINTENU POUR LES OUTRE-MER

1. Des crédits en légère baisse au sein de la mission Outre-mer

La mission Outre-mer regroupe l'ensemble des dotations budgétaires allouées par l'État aux territoires ultramarins et gérées par le ministère des outre-mer. Ses crédits se répartissent entre deux programmes ( cf . schéma infra ) :

- le programme 138 « Emploi outre-mer », regroupant au sein de trois actions les crédits destinés aux aides aux entreprises propres aux outre-mer ainsi que ceux relatifs aux divers dispositifs spécifiques aux outre-mer d'aide à la formation professionnelle ;

- le programme 123 « Conditions de vie outre-mer », qui décline, au sein de huit actions, les crédits destinés au financement des dispositifs propres aux outre-mer (aides au logement, continuité territoriale, coopération régionale, dispositifs sanitaires, culturels et sociaux, accès au financement bancaire) ainsi que les crédits affectés au soutien à l'investissement des collectivités territoriales.

Le tableau suivant récapitule l'ensemble des crédits de la mission :

Numéro et intitulé du programme
et de l'action

Autorisations d'engagement
(en milliards d'euros)

Crédits de paiement
(en milliards d'euros)

Ouvertes
en LFI
pour 2015

Demandées
en 2016

FDC et ADP attendus en 2016

Ouvertes
en LFI
pour 2015

Demandées en 2016

FDC et ADP attendus en 2016

138

Emploi outre-mer

1,392

1,3613

0,014

1,379

1,361

0,014

01

Soutien aux entreprises

1,136

1,111

1,137

1,111

02

Aides à l'insertion et à la qualification professionnelle

0,253

0,247

0,014

0,239

0,248

0,014

03

Pilotage des politiques des outre-mer

0,003

0,003

0,003

0,003

123

Conditions de vie outre-mer

0,701

0,719

0,00015

0,684

0,702

0,00015

01

Logement

0,248

0,248

0,244

0,235

02

Aménagement du territoire

0,143

0,144

0,00015

0,171

0,177

0,00015

03

Continuité territoriale

0,041

0,042

0,041

0,043

04

Sanitaire, social, culture, jeunesse et sports

0,009

0,018

0,009

0,018

06

Collectivités territoriales

0,192

0,199

0,183

0,189

07

Insertion économique et coopération régionales

0,001

0,001

0,001

0,001

08

Fonds exceptionnel d'investissement

0,039

0,040

0,026

0,028

09

Appui à l'excès aux financements bancaires

0,028

0,027

0,010

0,012

Source : commission des lois du Sénat
à partir de l'annexe au projet de loi de finances pour 2016 « Outre-mer »

Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2016, les crédits de la mission Outre-mer s'élèvent à 2,08 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE), soit une baisse de 0,6 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2015, et à 2,6 milliards d'euros en crédits de paiement (CP), soit une stabilisation par rapport à 2015.

Deux facteurs expliquent la légère baisse des autorisations d'engagement : d'une part, la diminution des crédits alloués à la compensation des exonérations de cotisations sociales patronales (action n° 01) à hauteur de 29 millions d'euros et, d'autre part, la baisse des crédits d'investissement du service militaire adapté de 9 millions d'euros.

Les crédits de paiement se stabilisent grâce aux transferts de la dotation globale d'équipement des collèges de la Nouvelle-Calédonie (12,2 millions d'euros à l'action n° 06 du programme 123) et des crédits des marchés de formation professionnelle pour les publics spécifiques ultramarins (6 millions d'euros dans l'action n° 02 du programme 138).

Toutefois, malgré un léger repli, les crédits dévolus aux outre-mer reflètent la pérennité de l'effort budgétaire en faveur des outre-mer, dans le contexte de redressement des comptes publics.

2. Une hausse des crédits en faveur des outre-mer au sein du budget

Les crédits de la mission Outre-mer ne représentent en réalité qu'une part très limitée de l'effort total de l'État en faveur des outre-mer.

Cet effort financier s'élève à 14,5 milliards d'euros en AE et 14,6 milliards d'euros en CP dans le projet de loi de finances pour 2016, montant en hausse de 2,6 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2015. On notera qu'en 2015, l'effort financier représentait 14,1 milliards d'euros en AE et 14,2 milliards d'euros en CP. Les crédits de la mission Outre-mer représentent 14,4 % de l'effort total, soit une part modeste de cet effort total.

Si l'on y ajoute les dépenses fiscales qui sont évaluées à 3,9 milliards d'euros en 2016, l'effort total de l'État devrait s'élever à 18,4 milliards d'euros en AE et 18,6 milliards d'euros en CP en 2016.

Ainsi, l'effort financier total de l'État ne relève que partiellement du ministère des outre-mer. Par conséquent, plus de 80 % des crédits participant au développement des territoires ultramarins ne relèvent pas de son autorité, ce qui ne lui permet pas d'avoir une vision d'ensemble des crédits. Pour répondre à cette situation, il conviendrait que les différents ministères associent plus étroitement le ministère des outre-mer à l'élaboration et à la mise en oeuvre des politiques publiques.

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