EXAMEN DES ARTICLES RATTACHÉS

Article 53 (art. L. 141-19 du code des pensions d'invalidité et des victimes de guerre) - Supplément de pension pour les conjoints ou partenaires survivants âgés de moins de 40 ans et ayant au moins un enfant à charge

Objet : Cet article institue un supplément à la pension de réversion des conjoints survivants des pensionnés âgés de moins de 40 ans et ayant au moins un enfant à charge.

I - Le dispositif proposé

Les conjoints survivants d'un militaire décédé bénéficient d'une pension de réversion dans trois cas de figure, détaillés par l'article L. 141-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre (CPMIVG) 108 ( * ) :

- lorsque leur conjoint était titulaire d'une pension militaire d'invalidité (PMI) correspondant à une invalidité d'au moins 60 % , soit 288 points PMI (4 043,52 euros par an en 2016 109 ( * ) ) ;

- lorsque son décès est le résultat de blessures reçues au cours d'événements de guerre ou d'un accident de service ;

- lorsque son décès est la conséquence de maladies contractées à l'occasion du service .

Cette pension de réversion est forfaitaire , et non proportionnelle au montant de la pension perçue par le conjoint décédé. Selon l'article L. 141-16 du code, elle s'élève à 500 points PMI (7 020 euros par an) lorsque cette pension correspondait à une invalidité égale ou supérieure à 85 % ou que le militaire est mort au combat ou à l'occasion du service, et à 333 points (4 675,32 euros par an) si elle était d'un niveau inférieur. Une majoration uniforme de 15 points (210,6 euros) leur est appliquée (art. L. 141-22).

Par ailleurs, plusieurs majorations ou suppléments de la pension de réversion ont été mis en place, sur des critères d'âge , de durée minimale de mariage et de soins donnés de manière constante, ou encore de niveau de la pension du conjoint décédé . Une majoration de pension est également prévue pour chaque enfant à charge 110 ( * ) : 120 points (1 684,8 euros) pour chacun des deux premiers enfants et 160 (2 246,4 euros) à partir du troisième.

Le présent article 53 vise à compléter ces différents dispositifs en instituant un supplément de pension pour les jeunes conjoints survivants , c'est-à-dire âgés de moins de 40 ans , ayant au moins un enfant à charge. Il élargit en leur faveur le champ du supplément de pension actuellement versé aux conjoints de survivants de plus de 40 ans ou qui, plus jeunes, sont infirmes ou en incapacité permanente de travail, et qui disposent de revenus les soumettant à l'impôt sur le revenu. Ce supplément porte leur pension au taux normal du soldat, soit 500 points (7 020 euros par an).

Il convient toutefois de rappeler qu'en application de l'article L. 141-25, le montant de la pension de réversion dont bénéficie le conjoint survivant du titulaire d'une PMI correspondant à une invalidité d'au moins 60 % ne peut excéder celui de la pension dont son conjoint était titulaire au moment de son décès, hors majoration uniforme de 15 points.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale n'a pas modifié cet article.

III - La position de votre commission

Selon les estimations du Gouvernement, cette disposition pourrait concerner 105 personnes , pour une dépense prévisionnelle de 130 000 euros en 2017. Il s'agit donc d'une mesure symbolique , qui vise à marquer l'attention de la Nation envers les conjoints survivants des soldats qui aujourd'hui perdent la vie en Opex et nous rappelle que les conjoints survivants ne doivent pas être réduits aux veuves des anciens combattants des conflits du 20 ème siècle.

On peut toutefois regretter qu'elle ait une portée très limitée . Le cadre juridique actuel de la réversion des PMI offrant à la très grande majorité des conjoints survivants de soldats décédés une pension au taux normal de 500 points , sans fixer de condition d'âge ou d'obligation d'avoir un enfant à charge. En effet, le conjoint survivant d'un militaire décédé en opération, ce qui semble être l'une des hypothèses visées par cet article, bénéficie d'ores et déjà d'une telle pension en application de l'article L. 141-16. Il en va de même si le pensionné était indemnisé pour une invalidité d'au moins 85 % .

Ce supplément de pension ne sera donc versé qu'aux conjoints survivants des titulaires d'une PMI comprise entre 60 %, seuil de déclenchement de la réversion, et ce plafond . Il s'agit donc d'une invalidité sérieuse , mais qui ne menace pas directement la survie de celui qui en est la victime. On peut donc penser que très peu de décès interviendraient dans les années suivant l'événement à l'origine de l'invalidité et le versement de la pension l'indemnisant, et donc que le nombre de conjoints survivants de moins de 40 ans serait très restreint .

De plus, les décès causés par les suites des blessures reçues au cours d'événements de guerre ou lors d'accidents de service, ainsi que ceux résultant de maladies contractées ou aggravées à l'occasion du service, ouvrent droit à une pension de réversion au taux normal . Dès lors, si l'initiative du Gouvernement en la matière ne peut, dans sa justification, être critiquée, ses modalités de mise en oeuvre garantissent qu'elle sera presque totalement dépourvue d'effets .

Votre commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article sans modification.

Article 54 (art. 6 de la loi n° 2005-158 du 23 février 2005 portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés et art. 133 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016) - Revalorisation de l'allocation de reconnaissance et de l'allocation viagère des conjoints survivants d'anciens membres des formations supplétives

Objet : Cet article revalorise de 100 euros le montant annuel de l'allocation de reconnaissance versée aux anciens supplétifs et de l'allocation viagère qui bénéficie à leurs conjoints survivants.

I - Le dispositif proposé

Instituée par la loi du 30 décembre 1999 111 ( * ) puis modifiée par les lois du 30 décembre 2002 112 ( * ) et du 23 février 2005 113 ( * ) , l'allocation de reconnaissance constitue la principale dépense de l'État en faveur des harkis, pour un montant de 15,07 millions d'euros en 2017. Depuis la loi de 2005, elle prend deux formes :

- soit un versement annuel d'un montant de 3 423 euros ;

- soit un versement annuel plus faible, d'un montant de 2 327 euros , mais qui a été accompagné du versement initial d'un capital de 20 000 euros .

L'allocation de reconnaissance est indexée sur l'inflation , et donc revalorisée annuellement, au 1 er octobre 114 ( * ) . Elle compte 5 700 bénéficiaires .

L'article 54 du présent projet de loi de finances propose de l'augmenter de 100 euros par an, c'est-à-dire de la porter dans le premier cas à 3 515 euros ( + 2,9 % ) et dans le second à 2 422 euros ( + 4,1 % ) à compter du 1 er janvier 2017.

Il prévoit la même revalorisation pour l'allocation viagère instituée par la loi de finances pour 2016 115 ( * ) en faveur des conjoints survivants d'anciens supplétifs qui n'ont pas pu percevoir l'allocation de reconnaissance en raison de sa forclusion des demandes de celle-ci au 18 décembre 2014 en application de la loi du 18 décembre 2013 116 ( * ) . Cette dernière, qui ne bénéficiait qu'à 39 personnes à la fin du premier semestre 2016, est du même montant que l'allocation de reconnaissance, soit 3 423 euros par an . Elle serait donc portée à 3 523 euros (+ 2,9 %).

Si le Gouvernement annonce une revalorisation de 100 euros par an de chacune de ces allocations, il convient de préciser que cette augmentation ne sera en réalité que de 92 euros pour l'allocation de reconnaissance pleine, que perçoivent environ 500 personnes, et l'allocation viagère, et 95 euros pour l'allocation de reconnaissance partielle, qui complète un capital initial et qui bénéficie à environ 5 000 personnes . En effet, alors que le Gouvernement a bâti cette mesure à partir du montant de ces allocations en vigueur au moment de l'élaboration du projet de loi de finances (3 415 euros et 2 322 euros), un arrêté du 11 octobre 2016 (cf. supra ) les a revalorisées de 0,2 % , à 3 423 euros et 2 327 euros , pour tenir compte de l'inflation.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale n'a pas modifié cet article.

III - La position de votre commission

La réparation du préjudice subi par les anciens supplétifs de l'armée française a été trop tardive et reste insuffisante . D'importants progrès ont été réalisés ces dernières années, avec notamment le renouvellement
de la reconnaissance par le Président de la République, le 25 septembre dernier, de la responsabilité des gouvernements français dans l'abandon des harkis, leur massacre et les conditions indignes d'accueil que ceux qui avaient réussi à rejoindre la France ont connu.

La mesure prévue à cet article démontre toutefois le refus du Gouvernement de donner une nouvelle impulsion à sa politique en faveur des harkis et de traiter directement les causes des difficultés économiques et sociales qu'ils rencontrent encore aujourd'hui. D'un coût estimé à 0,57 million d'euros par an, elle représente une augmentation de l'allocation de 8,3 euros par mois , qui n'est pas de nature à faire sortir de la pauvreté les trop nombreux harkis s'y trouvent, ainsi que leurs enfants et petits-enfants.

Il conviendrait au contraire de renouveler les efforts visant à favoriser l'insertion professionnelle de ces derniers, à travers une évaluation précise des besoins de ces populations en matière de qualifications et la mobilisation effective des dispositifs qui leur sont dédiés, comme les emplois réservés.

Votre commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article sans modification.

Article 55 (art. L. 50 du code des pensions civiles et militaires de retraite) - Amélioration de la pension de réversion des ayants cause du militaire tué dans l'exercice de ses fonctions sur le territoire national

Objet : Cet article étend aux conjoints survivants des militaires tués dans l'exercice de leurs fonctions sur le territoire national la majoration de la pension de réversion dont bénéficient aujourd'hui les conjoints survivants des membres des forces de l'ordre ou des services de secours tués en service.

I - Le dispositif proposé

La règle générale en matière de pension de réversion des conjoints survivants des fonctionnaires civils, posée à l'article L. 38 du code des pensions civiles et militaires de retraite (CPCMR), fixe le montant de celle-ci à 50 % de la pension obtenue par le fonctionnaire ou qu'il aurait pu obtenir au jour de son décès , sans que l'imputabilité de celui-ci au service n'ait à être recherchée. Toutefois, l'article L. 50 du même code prévoit un régime plus favorable pour les conjoints survivants de certains fonctionnaires , exerçant principalement des fonctions de maintien de l'ordre, tués dans l'exercice de leurs fonctions .

Ainsi, selon cet article, la pension de réversion ne peut être inférieure à la pension dont aurait bénéficié le fonctionnaire décédé dans les cas suivants :

- lorsqu'un fonctionnaire des douanes de la branche de la surveillance est tué au cours d'une opération douanière ;

- lorsqu'un fonctionnaire de la police nationale est tué au cours d'une opération de police ou décède en service et est cité à l'ordre de la Nation ;

- lorsqu'un militaire de la gendarmerie nationale est tué au cours d'une opération de police ou décède en service et est cité à l'ordre de la Nation ou à l'ordre de la gendarmerie ;

- lorsqu'un fonctionnaire appartenant au personnel de l'administration pénitentiaire décède à la suite d'un acte de violence dans le cadre de l'exercice de ses fonctions ;

- lorsqu'un sapeur-pompier de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris ou du bataillon des marins-pompiers de Marseille ou un militaire des formations militaires de la sécurité civile est tué dans l'exercice de ses fonctions et est cité à l'ordre de la Nation.

Les seuls militaires pris en compte ici sont donc les gendarmes ainsi que les sapeurs-pompiers de Paris, les marins-pompiers de Marseille et les membres des formations militaires de la sécurité civile.

Le présent article 55 propose d'adjoindre à cette liste les militaires tués dans l'exercice de leurs fonctions sur le territoire national ou qui décèdent en service et sont cités à l'ordre de la Nation ou de l'armée. Il étend également le bénéfice de ces dispositions aux conjoints survivants des sapeurs-pompiers de Paris, marins-pompiers de Marseille ou membres des formations militaires de la sécurité civile tués dans l'exercice de leurs fonctions et cité à l'ordre de l'armée . Il s'appliquera aux ayants droit des militaires décédés après son entrée en vigueur.

Il convient par ailleurs de rappeler qu'une règle spécifique est applicable aux conjoints survivants des militaires tués dans un attentat commis sur le territoire national ou au cours d'une opération militaire à l'étranger : la pension de réversion est alors égale à la solde que percevait le militaire au jour de son décès.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale n'a pas modifié cet article.

III - La position de votre commission

Le déploiement de l'armée française sur le territoire, dans le cadre de l'opération Sentinelle , engagée après les attentats de janvier 2015 à Paris puis renforcée à la suite des attaques du 13 novembre suivant, contraint le Gouvernement et le Parlement à envisager la possibilité de voir des soldats tués dans l'exercice de leurs fonctions en France et non plus en Opex. Alors qu'à l'heure actuelle près de 10 000 militaires sont mobilisés pour assurer la protection des populations, des cibles potentielles et des zones touristiques, il appartient au législateur d'anticiper les conséquences de cette participation directe des forces armées à des missions de sécurité publique qui pour certaines d'entre elles s'apparentent à celles de la police ou de la gendarmerie.

Votre rapporteur pour avis émet le souhait que cette disposition n'ait jamais à trouver d'application . Toutefois, au vu de l'état de la menace qui pèse sur la France, on ne peut exclure qu'elle ait à être invoquée à l'avenir. Son incidence financière est nulle , le surcoût moyen annuel étant évalué par le Gouvernement à 9 000 euros par conjoint survivant, mais elle garantit l'équité entre tous les militaires et fonctionnaires chargés d'assurer la sécurité de nos concitoyens sur le territoire national.

Votre commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article sans modification.


* 108 Issu de l'ordonnance n° 2015-1781 du 28 décembre 2015 et qui doit entrer en vigueur le 1 er janvier 2017.

* 109 La valeur du point étant de 14,04 euros.

* 110 Par l'article L. 141-23 du CPMIVG.

* 111 Loi n° 99-1173 du 30 décembre 1999 de finances rectificative pour 1999, art. 47.

* 112 Loi n° 2002-1576 du 30 décembre 2002 de finances rectificative pour 2002, art. 67.

* 113 Loi n° 2005-158 du 23 février 2005 portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés, art. 6.

* 114 La dernière fois par l'arrêté du 11 octobre 2016 fixant le montant de l'allocation de reconnaissance après indexation sur l'évolution annuelle des prix à la consommation des ménages (hors tabac) ; NOR : DEFM1628111A.

* 115 Loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 précitée, art. 133.

* 116 Loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 précitée, art. 52.

Page mise à jour le

Partager cette page