IV. INSTITUER DES MÉCANISMES D'INFORMATION EFFECTIFS
AU PROFIT DU PARLEMENT

A. UNE RÉALITÉ DES OPÉRATIONS SUR LE PORTEFEUILLE QUI PEUT ÊTRE TRÈS ÉLOIGNÉE DE LA PRÉSENTATION DU COMPTE

Comme les années précédentes, le CAS « Participations financières de l'État » fait l'objet d'une présentation purement conventionnelle des recettes et des dépenses, qui ne correspondent pas à la réalité des opérations qui seront menées en 2019.

Certes, le montant des recettes et des dépenses inscrites pour l'année prochaine est doublé par rapport à 2018, afin de prendre en considération la cession annoncée par le Gouvernement des participations détenues par l'État dans Aéroports de Paris et dans la Française des jeux. Néanmoins, ainsi que l'a indiqué l'APE à votre rapporteur, le doublement des montants correspond à une « prévision notionnelle » qui ne saurait en aucun cas préjuger du choix et des montants des opérations telles qu'elles pourraient être décidées et mises en oeuvre en 2019.

De fait, comme les années précédentes, un fort décalage ne peut donc être exclu entre les prévisions affichées par le CAS et la réalité de l'exécution du compte. Votre rapporteur rappelle à cet égard qu'entre 2011 et 2016, l'exécution du CAS a été fortement moindre que la prévision affichée en loi de finances initiale pour l'année concernée, avec des cessions de 300 millions à 2,3 milliards d'euros selon les années, au regard d'une prévision établie à 5 milliards d'euros...

Or, en 2019, ce risque de décalage est d'autant plus important que, eu égard au calendrier parlementaire du projet de loi Pacte et à l'évolution incertaine du marché dans les mois à venir, il n'est pas acquis avec certitude que les opérations de cessions d'Aéroports de Paris ou de la Française des jeux seront effectuées dans leur totalité au cours de l'exercice 2019.

B. UNE STRATÉGIE ACTIONNARIALE DÉFINIE UNILATÉRALEMENT
PAR L'ÉXÉCUTIF

En 2014, l'État a entrepris de définir les objectifs de son action en qualité d'actionnaire. Cette volonté ne peut qu'être approuvée, tant auparavant la stratégie de l'État actionnaire semblait se résumer à une gestion au jour le jour.

Il a dès lors entrepris de définir la politique de gestion de son portefeuille autour de quatre axes :

- assurer un niveau de contrôle suffisant dans des entreprises à capitaux publics stratégiques intervenant dans des secteurs particulièrement sensibles en matière de souveraineté, c'est-à-dire notamment les activités nucléaires et les activités liées à la défense nationale ;

- assurer l'existence d'opérateurs « résilients » pour pourvoir aux besoins fondamentaux du pays ;

- intervenir ponctuellement en sauvetage lorsque la disparition d'une entreprise présenterait un risque systémique avéré pour l'économie nationale ou européenne ;

- accompagner le développement et la consolidation d'entreprises nationales, en particulier dans des secteurs et des filières stratégiquement déterminantes pour la croissance économique nationale.

Néanmoins, comme l'a indiqué M. Martin Vial lors de son audition, le Gouvernement a souhaité recentrer en 2018 son portefeuille autour de trois axes prioritaires :

- les entreprises stratégiques qui contribuent à la souveraineté de la France (défense et nucléaire) ;

- les entreprises participant à des missions de service public ou d'intérêt général national ou local , pour lesquelles l'État ne détient pas de leviers non actionnariaux suffisants pour préserver les intérêts publics ;

- les interventions dans les entreprises lorsqu'il y a risque systémique.

Si votre rapporteur partage cette vision stratégique, il souligne que cette « doctrine », comme la précédente, a été arrêtée par le seul pouvoir exécutif , et qu'en tout état de cause, la mise en oeuvre effective de cette stratégie - c'est-à-dire notamment les décisions de faire évoluer en conséquence le périmètre d'intervention de l'État actionnaire par la cession de telles ou telles catégories de participation - sont prises unilatéralement par le Gouvernement, sans que la représentation nationale puisse discuter au préalable de leur bienfondé.

Sans doute faut-il réserver les hypothèses - qui restent limitées - où des textes législatifs imposent une détention complète ou une détention minimum d'actifs à laquelle le Gouvernement souhaiterait déroger. C'est du reste sur ce type de dispositifs que le Parlement est amené à se prononcer dans le cadre de l'examen du projet de loi Pacte. Cependant, même dans ces situations, les modalités de cession - cession sur le marché financier ou de gré à gré ; placement auprès d'institutionnels ou de particuliers, etc... - restent définies unilatéralement par l'État.

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