Avis n° 150 (2018-2019) de M. Jean-Marie MORISSET , fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 22 novembre 2018

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N° 150

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2018-2019

Enregistré à la Présidence du Sénat le 22 novembre 2018

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des affaires sociales (1) sur le projet de loi de finances , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE , pour 2019 ,

TOME II

COHÉSION DES TERRITOIRES -
HÉBERGEMENT, PARCOURS VERS LE LOGEMENT ET INSERTION

DES PERSONNES VULNÉRABLES

Par M. Jean-Marie MORISSET,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Alain Milon , président ; M. Jean-Marie Vanlerenberghe , rapporteur général ; MM. René-Paul Savary, Gérard Dériot, Mme Colette Giudicelli, M. Yves Daudigny, Mmes Michelle Meunier, Élisabeth Doineau, MM. Michel Amiel, Guillaume Arnell, Mme Laurence Cohen, M. Daniel Chasseing , vice-présidents ; M. Michel Forissier, Mmes Pascale Gruny, Corinne Imbert, Corinne Féret, M. Olivier Henno , secrétaires ; Mme Cathy Apourceau-Poly, M. Stéphane Artano, Mmes Martine Berthet, Christine Bonfanti-Dossat, MM. Bernard Bonne, Jean-Noël Cardoux, Mmes Annie Delmont-Koropoulis, Catherine Deroche, Chantal Deseyne, Nassimah Dindar, Catherine Fournier, Frédérique Gerbaud, M. Bruno Gilles, Mmes Nadine Grelet-Certenais, Jocelyne Guidez, Véronique Guillotin, Victoire Jasmin, M. Bernard Jomier, Mme Florence Lassarade, M. Martin Lévrier, Mmes Marie-Noëlle Lienemann, Monique Lubin, Viviane Malet, Brigitte Micouleau, MM. Jean-Marie Morisset, Philippe Mouiller, Mmes Frédérique Puissat, Laurence Rossignol, Patricia Schillinger, MM. Jean Sol, Dominique Théophile, Mme Claudine Thomas, M. Jean-Louis Tourenne, Mme Sabine Van Heghe .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : 1255 , 1285 , 1288 , 1302 à 1307 , 1357 et T.A. 189

Sénat : 146 et 147 à 153 (2018-2019)

LES OBSERVATIONS DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES


LES OBSERVATIONS DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

Réunie le mercredi 21 novembre 2018 , sous la présidence de M. Alain Milon , président, la commission a examiné le rapport pour avis de M. Jean-Marie Morisset , sur les crédits du programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » de la mission « Cohésion des territoires » du projet de loi de finances pour 2019 .

Les crédits du programme sont principalement destinés à financer des structures d'hébergement d'urgence et des dispositifs de logement adapté. En raison de la progression des situations d'exclusion et de l'augmentation des flux migratoires, ces dispositifs connaissent une sollicitation croissante depuis plusieurs années.

Par conséquent, les moyens alloués au programme n'ont cessé d'augmenter, passant de 1,3 milliard d'euros en LFI pour 2014 à 1,9 milliard d'euros en LFI pour 2018, sans toutefois parvenir à être à la hauteur des besoins. Le programme souffre donc d'une sous-budgétisation chronique pour laquelle des efforts importants ont été engagés depuis l'an dernier sans qu'ils soient suffisants.

Les crédits demandés pour 2019 s'élèvent à 1,86 milliard d'euros en autorisations d'engagement et 1,88 milliard d'euros en crédits de paiement. S'ils sont supérieurs à ceux consommés en 2017 et progressent, à périmètre constant, par rapport à ceux ouverts en LFI pour 2018, ils demeurent inférieurs à la prévision d'exécution pour 2018.

Le budget du programme s'inscrit dans la mise en oeuvre des plans « logement d'abord » et de lutte contre la pauvreté, pour lesquels des moyens supplémentaires sont alloués en faveur de l'hébergement et du logement adapté. Alors que les orientations vont dans le bon sens, les moyens prévus semblent cependant limités pour atteindre les objectifs fixés. En outre, l'accompagnement social n'est pas suffisamment renforcé pour accroitre la fluidité du parcours vers le logement et permettre une meilleure rotation des personnes accueillies dans les structures d'urgence, face à une demande d'hébergement toujours soutenue.

Si votre rapporteur salue les efforts permettant de tendre vers un budget plus sincère, il regrette que ceux-ci demeurent encore insuffisants, au risque de limiter la mise en oeuvre des mesures en faveur de l'hébergement et de l'accès au logement dont il partage les orientations.

Suivant l'avis de son rapporteur, la commission a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Cohésion des territoires » du projet de loi de finances pour 2019.

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Au sein de la mission « Cohésion du territoire », le programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » est destiné à assurer l'hébergement des personnes en situation de détresse et l'accompagnement des personnes précaires vers des solutions de logement pérenne. Les crédits du programme financent dès lors principalement des structures d'accueil pour l'hébergement d'urgence ainsi que des dispositifs de logement adapté.

Compte tenu de la progression de la pauvreté et de l'exclusion ainsi que de la pression migratoire, les crédits du programme n'ont cessé d'augmenter ces dernières années, dans un contexte pourtant marqué par la maîtrise des dépenses publiques. Par conséquent, les crédits ouverts en LFI pour 2019 sont supérieurs de 562 millions d'euros à ceux ouverts il y a cinq ans en LFI pour 2014, soit une augmentation de 42 %.

Malgré cette progression significative des moyens alloués au programme, celui-ci souffre d'une sous-budgétisation chronique depuis plusieurs années, qui a rendu le recours aux décrets d'avance ou à l'ouverture de crédits supplémentaires en LFR systématique. Un effort de « sincérisation » budgétaire a été engagé depuis l'an dernier, en lien avec les services déconcentrés de l'État, pour prévoir des moyens adaptés aux besoins de financement. Toutefois, l'exécution du programme en 2018 devrait être supérieure de 8 % à l'enveloppe de crédits ouverte en LFI, au bénéfice de reports généraux et de crédits supplémentaires prévus en LFR pour 2018. Cet écart se réduit cependant par rapport aux années précédentes.

Pour 2019, les crédits demandés s'élèvent à 1,86 milliard d'euros en autorisations d'engagement et 1,88 milliard d'euros en crédits de paiement. Ils sont supérieurs à ceux consommés en 2017 et progressent, à périmètre constant, par rapport à ceux ouverts en LFI pour 2018. Ils demeurent toutefois inférieurs à la prévision d'exécution pour 2018. Si votre rapporteur salue l'effort progressif de « sincérisation » budgétaire effectué sur le programme, l'exercice 2019 pourrait encore être marqué par une sous-budgétisation.

Le budget du programme pour 2019 s'inscrit dans le cadre du déploiement du plan « logement d'abord » et de la stratégie de lutte contre la pauvreté annoncée en septembre dernier par le Président de la République. Des moyens supplémentaires sont dès lors alloués au développement des différentes formes de logement adapté, à l'hébergement d'urgence et à la veille sociale. Face aux ambitions affichées, ces moyens risquent toutefois d'être limités pour atteindre les objectifs fixés.

En outre, si votre rapporteur partage les orientations des plans « logement d'abord » et « pauvreté », il regrette que les moyens alloués à l'accompagnement social des personnes, nécessaire à la réussite de ces plans, ne soient pas suffisants. À cet égard, le plan d'économie imposé aux centres d'hébergement et de réinsertion sociale risque de fragiliser leur mission d'accompagnement au détriment de l'insertion vers le logement. En outre, le renforcement de l'accompagnement social s'avère nécessaire pour fluidifier le parcours vers le logement et accroitre la rotation dans les dispositifs d'hébergement d'urgence qui ont parfois perdu leur vocation d'accueil temporaire. C'est une condition nécessaire pour répondre à des besoins d'hébergement toujours plus soutenus et faciliter l'accès des personnes vulnérables à un logement pérenne.

*

* *

Au total, votre rapporteur salue l'effort réalisé pour une budgétisation plus sincère du programme en 2018 et 2019, dans un contexte budgétaire contraint, même s'il ne devrait pas encore être suffisant. Il partage les orientations engagées en faveur de l'hébergement et de l'accès au logement et sera attentif à la mise en oeuvre des plans annoncés et des moyens qui y seront consacrés.

Par conséquent, et suivant l'avis de son rapporteur, la commission a émis un favorable à l'adoption des crédits de la mission « cohésion des territoires ».

EXPOSÉ GÉNÉRAL

I. MARQUÉ PAR UNE SOUS-BUDGÉTISATION CHRONIQUE, LE PROGRAMME VOIT SES CRÉDITS AUGMENTER EN 2019 AFIN DE MIEUX S'ADAPTER AUX BESOINS D'HÉBERGEMENT

A. UN EFFORT DE SINCÉRISATION DU PROGRAMME 177 EN 2018 QUI DEMEURE INSUFFISANT COMPTE TENU DE LA NATURE DES DISPOSITIFS QU'IL FINANCE

1. Une obligation d'hébergement d'urgence et un accompagnement vers le logement qui résultent d'un ensemble de difficultés sociales

Le programme 177 finance principalement des dispositifs d'hébergement d'urgence et de réinsertion sociale ainsi que des dispositifs de logement adapté pour les personnes ne pouvant pas accéder à un logement ordinaire.

La finalité des politiques publiques financées par ce programme, inscrite dans le projet annuel de performance annexé au PLF, consiste à « permettre l'accès au logement tout en garantissant une réponse aux situations d'urgence qui soit la plus adaptée aux besoins, dans un contexte où la demande de mise à l'abri exprimée demeure très élevée, ainsi que d'une situation migratoire toujours tendue. »

L'objectif des dispositifs financés par le programme est donc d'apporter une solution d'hébergement pour les personnes ayant des difficultés à se loger en raison de leurs ressources ou de leurs conditions d'existence et de mettre à l'abri toute personne en situation de détresse . Afin d'accomplir cette mission généraliste, le programme 177 finance un total de 136 889 places d'accueil fin 2017 qui se répartissent de la façon suivante :

- centres d'hébergement d'urgence (45 940) ;

- hôtels (45 139) ;

- centres d'hébergement et de réinsertion sociale (44 691) ;

- résidences hôtelières à vocation sociale (1 119).

La mission de mise à l'abri de toute personne en détresse découle de l'obligation légale d'hébergement inconditionnel , posée par l'article L. 345-2-2 du code de l'action sociale et des familles.

Cet article dispose que « toute personne sans abri en situation de détresse médicale, psychique ou sociale a accès, à tout moment, à un dispositif d'hébergement d'urgence. / Cet hébergement d'urgence doit lui permettre, dans des conditions d'accueil conformes à la dignité de la personne humaine, de bénéficier de prestations assurant le gîte, le couvert et l'hygiène, une première évaluation médicale, psychique et sociale, réalisée au sein de la structure d'hébergement ou, par convention, par des professionnels ou des organismes extérieurs et d'être orientée vers tout professionnel ou toute structure susceptibles de lui apporter l'aide justifiée par son état, notamment un centre d'hébergement et de réinsertion sociale, un hébergement de stabilisation, une pension de famille, un logement-foyer, un établissement pour personnes âgées dépendantes, un lit halte soins santé ou un service hospitalier. »

Les publics concernés par ces structures et ces dispositifs sont ainsi marqués par des difficultés nombreuses et variées : économiques et sociales, médicales et psychologiques ou encore juridiques. Les structures d'hébergement et de logement adapté sont donc bien souvent le réceptacle de l'ensemble des défaillances des autres politiques d'accompagnement social.

En raison de la progression du taux de pauvreté et des flux migratoires ces dernières années, les crédits ouverts pour ce programme n'ont cessé d'augmenter sans parvenir toutefois à une budgétisation sincère à la hauteur des besoins.

2. Une progression significative des crédits du programme, en sous-budgétisation chronique

La forte sollicitation des dispositifs financés par le programme a conduit à sa sous-budgétisation chronique depuis plusieurs années . Cette situation s'observe alors même que les crédits ouverts ont été significativement augmentés depuis cinq ans, ce qui est à souligner dans un contexte de maîtrise des dépenses publiques. Il faut reconnaitre que la nature des dispositifs financés rend la prévisibilité budgétaire difficile . La demande d'hébergement peut varier selon la rudesse de l'hiver ou en fonction de l'arrivée de personnes migrantes sur le territoire.

Néanmoins, la résorption de cette sous-budgétisation n'a pas pu être engagée, dès lors que les crédits ouverts pour l'année N étaient inférieurs à ceux consommés pour l'année N-1. Le recours aux décrets d'avance ou l'ouverture de crédits supplémentaires en loi de finances rectificative est ainsi devenu systématique.

Crédits du programme ouverts en LFI et exécutés (2014-2018)

(en millions d'euros)

Source : Commission des affaires sociales sur la base des annexes budgétaires

3. Un exercice 2018 plus proche des besoins de financement

Un effort de « sincérisation » du programme a été engagé depuis 2017. Ainsi, la LFI pour 2018 a ouvert des crédits à hauteur de 1 954 millions d'euros alors que l'exécution 2017 s'est élevée à 1 963 millions d'euros.

Crédits de paiement du programme 177 pour 2017 et 2018

Exercice 2017

LFI 2017

1 741 679 467

?

+ 12,7 %

Crédits ouverts

2 059 261 679

Crédits consommés

1 963 039 655

?

Exercice 2018

LFI 2018

1 953 693 863

?

+ 8 %

Reports de crédits

96 200 000

PLFR 2018

60 238 007

Prévision d'exécution

2 110 131 870

?

Source : Commission des affaires sociales d'après les réponses aux questionnaires budgétaires

En outre, un rebasage des BOP régionaux dit « BOP base zéro » a été conduit pendant l'année 2018 , dans le cadre d'un dialogue de gestion entre les services de l'administration centrale de l'État et les services déconcentrés. Chaque région a été amenée à évaluer la base pérenne de ses dépenses, afin de construire un budget pour 2019 plus sincère et mieux adapté aux besoins de financement des territoires.

À cet égard, la région Ile-de-France se distingue des autres régions, en raison des besoins d'hébergement largement supérieurs à la moyenne nationale. Le budget opérationnel de programme (BOP) régional de l'Ile-de-France représente ainsi 45,6 % des crédits alloués à l'ensemble des BOP régionaux de France, pour un montant exécuté en 2017 de 896 millions d'euros et une prévision d'exécution en 2018 estimé à 942 millions d'euros 1 ( * ) . Par rapport aux crédits ouverts pour 2018, les services de la direction régionale et interdépartementale de l'hébergement et du logement (Drihl) ont estimé leur besoin de financement à 22 millions d'euros pour clôturer l'année, soit plus du tiers des crédits supplémentaires prévus en loi de finances rectificative pour 2018.

Les crédits ouverts en LFI pour 2018, qui se sont élevés à 1 954 millions d'euros, ne seront toutefois pas suffisants pour clôturer l'année , malgré un report de crédits de 2017 sur 2018 à hauteur de 96,2 millions d'euros. Par conséquent, le projet de loi de finances rectificative pour 2018, déposé à l'Assemblée nationale le 7 novembre dernier, prévoit l'ouverture de 60,2 millions d'euros de crédits supplémentaires pour le programme. Si ces crédits sont intégralement consommés, l'exécution 2018 s'élèvera à 2 110 millions d'euros pour le programme, soit un montant supérieur de 8 % par rapport à celui prévu en LFI . Cette progression est cependant inférieure à celle de l'exercice 2017 qui s'est caractérisé par un écart entre crédits ouverts en LFI et crédits consommés de 12,7 %.

B. LES CRÉDITS DEMANDÉS POUR 2019 AUGMENTENT DE 2,2 % À PÉRIMÈTRE CONSTANT

Les crédits du programme 177 demandés pour l'année 2019 s'élèvent à 1,86 milliard d'euros en AE et 1,88 milliard d'euros en CP .

Crédits demandés par action pour 2019

AE

CP

11 - Prévention de l'exclusion

49 361 191

49 361 191

12 - Hébergement et logement adapté

1 801 569 457

1 819 669 457

14 - Conduite et animation des politiques de l'hébergement et de l'inclusion sociale

9 132 657

9 132 657

Total programme 177

1 860 063 305

1 878 163 305

Source : Projet annuel de performance « cohésion des territoires » pour 2019

Le programme est marqué par une mesure de transfert au 1 er janvier 2019 : 118,7 millions d'euros sont transférés au profit des programmes 104 et 303.

Hors mesure de transfert, les crédits augmentent de 1,3 % en AE et 2,2 % en CP. À périmètre constant, les crédits demandés sont donc supérieurs à ceux consommés en 2017.

S'ils diminuent à périmètre courant de 4,8 % en AE et de 3,9 % en CP par rapport à la LFI pour 2018, il faut considérer qu'en application de la mesure de transfert, les crédits du programme n'auront plus à financer les centres d'hébergement d'urgence pour migrants, qui ont représenté un coût de 150 millions d'euros pour le programme 177 en 2018 et 152,7 millions d'euros en 2017.

Les crédits prévus pour 2019 demeurent toutefois inférieurs à la prévision d'exécution 2018 qui s'élèverait à 2,11 milliards d'euros (AE=CP) si tous les crédits ouverts sont effectivement consommés.

Crédits du programme demandés en 2018 et 2019

(en millions d'euros)

AE

CP

LFI 2018

1 954

1 954

PLF 2019 (constant)

1 979

1 997

Évolution 2018/2019 à périmètre constant

1,3%

2,2%

PLF 2019 (après transferts)

1 860

1 878

Évolution 2018/2019 à périmètre courant

- 4,8%

- 3,9%

Source : Commission des affaires sociales d'après le PAP « cohésion des territoires » pour 2019

1. Les crédits de l'action 11 relatifs à la prévention de l'exclusion sont en légère diminution

Les crédits de l'action 11 financent des prestations d'aide sociale en faveur des personnes sans domicile fixe âgées ou en situation de handicap. Certains dispositifs soutenant l'accès aux droits, l'aide à l'insertion et la prévention de l'exclusion, en particulier des gens du voyage, sont également financés par cette action.

Action 11 - Prévention de l'exclusion (AE=CP)

(en millions d'euros)

LFI 2018

PLF 2019

Évolution

Allocations et prestations d'aide sociale versées aux personnes âgées et handicapées

32,9

32

-2,74%

Actions de prévention et d'accès aux droits

17,5

17,4

-0,57%

Total action 11

50,4

49,4

-1,98%

Source : Projet annuel de performance « cohésion des territoires » pour 2019

a) Allocations et prestations d'aide sociale

La majorité des crédits de l'action 11 est destinée au financement par l'État de prestations d'aide sociale, par dérogation à la compétence du département en la matière. Cette compétence résiduelle de l'État permet d'attribuer des aides sociales aux personnes sans domicile fixe pour lesquelles le département ne peut leur verser d'aides car elles n'ont pas de domicile fixe identifiable ou parce qu'elles n'ont pas pu choisir librement leur lieu de résidence.

• Les allocations et prestations d'aides sociales versées aux personnes âgées sont constituées de la prise en charge des frais de séjour en établissement d'hébergement pour personnes âgées sans domicile fixe, de prestations d'aide-ménagère, de frais de repas, de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) et de l'allocation simple d'aide à domicile pour les personnes âgées sans droit à une pension de retraite 2 ( * ) . Fin 2017, l'État prenait en charge les frais d'hébergement de 1 340 bénéficiaires et versait l'allocation simple d'aide à domicile à 334 personnes, ces deux chiffres étant en diminution par rapport à 2016.

• Les allocations et prestations versées aux personnes handicapées sont constituées de la prise en charge des frais d'hébergement en établissement pour personnes handicapées sans domicile fixe, d'allocation compensatrice pour tierce personne et d'une allocation différentielle aux personnes handicapées résiduelle. Les frais d'hébergement étaient pris en charge pour 409 personnes fin 2017 et l'allocation différentielle, en extinction progressive, était versée à 48 bénéficiaires.

Les crédits demandés en 2019 pour financer ces allocations et prestations d'aide sociale s'élèvent à 32 millions d'euros , soit une baisse de 2,74 % par rapport à ceux demandés pour 2018. Cette baisse s'explique par la diminution du nombre de bénéficiaires de l'ensemble des prestations concernées.

b) Actions de prévention et d'accès aux droits

Cette unité budgétaire est principalement dédiée au financement du fonctionnement des aires d'accueil des gens du voyage , en lien avec la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf). Le fonctionnement de ces aires est financé grâce à l'aide au logement temporaire (ALT2) , versée à leurs gestionnaires. Depuis 2015, le montant de l'ALT2 attribué aux gestionnaires tient compte de l'occupation effective des aires d'accueil. Par conséquent, l'ALT2 est composée d'une part fixe et d'une part modulable variant en fonction de l'occupation effective de l'aire. Pour un taux d'occupation à 100 %, le montant de l'ALT2 est de 132,45 euros par place et par mois.

Par ailleurs, l'investissement pour aménager ces aires d'accueil fait l'objet d'un financement par des crédits du programme 135 « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat ».

Pour 2019, le montant des crédits dédiés au financement de l'ALT2 s'élève à 15,2 millions d'euros , en légère diminution par rapport à 2018 (15,1 millions d'euros).

En outre, une enveloppe de 2,2 millions d'euros au sein de l'action 11 est dédiée au soutien à des associations agissant dans le secteur social à destination des gens du voyage . Le montant de cette enveloppe est identique à celui prévu pour 2018.

Les crédits demandés pour financer cette unité budgétaire de l'action 11 s'élèvent donc à 17,5 millions pour 2019 , en légère diminution par rapport à 2018 (- 0,57 %).

2. Les crédits de l'action 12, qui financent l'hébergement et le logement adapté, augmentent à périmètre constant

Action 12 - Hébergement et logement adapté

(en millions d'euros)

LFI 2018

PLF 2019

Évolution 2018-2019

AE=CP

AE

CP

AE

CP

Veille sociale

126,5

134,3

6,2 %

Hébergement d'urgence

826,6

846,7

864,8

2,4 %

4,6 %

CHRS

627,2

613,8

- 2,1 %

Logement adapté

313,9

325,4

3,7 %

Total action 12 (format constant)

1 894,2

1 920,2

1 938,3

1,4 %

2,3 %

Mesures de transferts*

0,0

- 118,7

- 118,7

-

Total action 12 (format courant)

1 894,2

1 801,5

1 819,6

- 4,9 %

- 3,9 %

Source : Projet annuel de performance « cohésion des territoires » pour 2019

* Transfert du programme 177 vers les programmes 104 et 303 au 1 er janvier 2019.

a) La veille sociale

Les crédits destinés à la veille sociale sont consacrés au financement des services d'accueil et d'orientation , aux maraudes et à l'accueil de jour permettant d'apporter une aide matérielle aux personnes sans abri.

Les services intégrés d'accueil et d'orientation (SIAO) assurent la gestion des plateformes téléphoniques « 115 » qui centralisent l'ensemble des demandes d'hébergement et de logement formulées par les personnes sans domicile.

La loi dite « Alur » du 24 mars 2014 3 ( * ) a modifié les missions et l'organisation des SIAO en prévoyant la mise en place d' un SIAO unique par département afin de faciliter la centralisation de la demande et de l'offre d'hébergement et de logement adapté. Poursuivant cet objectif, elle a également renforcé les missions des SIAO en :

- consacrant l'obligation pour les opérateurs d'hébergement de mettre l'ensemble du parc vacant à disposition des opérateurs SIAO afin qu'ils centralisent les places d'hébergement disponibles ;

- obligeant les acteurs du logement adapté à informer le SIAO des logements vacants et examiner les propositions d'orientation du SIAO.

D'après les réponses aux questionnaires budgétaires transmises à votre rapporteur, tous les départements ont à ce jour initié le processus d'unification de leurs SIAO et seuls quelques-uns ne sont pas encore unifiés. C'est le cas à Paris où coexistent encore un SIAO « Urgence », géré par le Samu social de Paris, et un SIAO « Insertion », géré par le Groupement de coopération sociale et médico-sociale (GCSMS). Ces deux SIAO devraient fusionner l'an prochain pour être gérés par un opérateur unique, le Samu social de Paris.

En complément de cette centralisation départementale, un système informatique national « SI-SIAO » a été initié dès 2010 pour recenser au niveau territorial les places mises à disposition par les structures d'hébergement et l'ensemble des demandes d'hébergement d'urgence et d'insertion. Il permet aussi d'orienter les demandeurs vers les structures les mieux adaptées à leur situation grâce à une évaluation sociale partagée par les différents acteurs. On dénombre aujourd'hui 101 départements qui utilisent le SI-SIAO pour son volet insertion et 95 départements pour le volet « plateforme 115 ». L'objectif fixé par le Gouvernement est de généraliser l'utilisation de ce système d'information pour la fin de l'année 2018.

Les crédits destinés à cette sous-action augmentent de 6,2 % et s'élèvent à 134,3 millions d'euros pour 2019 . Selon le projet annuel de performance relatif au programme, cette augmentation sera dédiée à une meilleure prise en charge de publics spécifiques, notamment les femmes avec enfants et à développer les maraudes professionnalisées.

b) L'hébergement d'urgence

L'unité budgétaire consacrée à l'hébergement d'urgence est la plus importante du programme en volume : elle représentait 42 % de l'ensemble des crédits consommés du programme en 2017 .

Ces crédits financent principalement les centres d'hébergement d'urgence (CHU) et les nuitées hôtelières destinées à offrir une solution d'hébergement aux personnes sans abri, en réponse à l'obligation inconditionnelle d'hébergement posée par la loi.

La conjonction d'un certain nombre de difficultés économiques et sociales, ainsi que la pression migratoire ces dernières années, ont engendré un accroissement significatif des demandes d'hébergement d'urgence, en particulier pendant la période hivernale. Face à cette demande , le nombre de places disponibles en hébergement d'urgence n'a cessé de croître ces dernières années passant de 32 541 places en 2010 à 91 079 en 2017, soit une progression de 180 %.

Nombre de places en centres d'hébergement d'urgence et en hôtels (2010-2017)

Année

CHU

Hôtels

2010

18 593

13 948

2011

19 766

16 235

2012

22 091

20 727

2013

28 692

25 496

2014

30 537

32 300

2015

31 846

37 962

2016

36 293

42 646

2017

45 940

45 139

Évolution 2010-2017

+ 147 %

+ 223,6 %

Source : Projet annuel de performance 2019 sur la mission « cohésion des territoires »

En conséquence, les crédits destinés à financer ces places ont connu une augmentation considérable , progressant de 325 % sur les dix dernières années.

Évolution des dépenses d'hébergement d'urgence hors CHRS
(en millions d'euros, en crédits de paiement consommés)

Source : Commission des affaires sociales d'après les réponses aux questionnaires budgétaires du rapporteur

? La gestion de la période hivernale

Chaque période hivernale se caractérise par une mise à disposition de places supplémentaires et temporaires d'hébergement des personnes sans-abri, grâce à la mobilisation des services de l'État, en lien avec les collectivités territoriales et les associations. Cette augmentation de la capacité d'accueil se compose de l'ouverture de places supplémentaires et temporaires en centres d'hébergement et à l'hôtel ainsi que de l'ouverture de places exceptionnelles dans des bâtiments mis à disposition (salles communales, gymnases, etc.) lors des périodes dites de « grand froid ».

La campagne hivernale 2017-2018 s'est caractérisée par la mobilisation de 144 000 places sur le territoire , soit une hausse de 10,7 % par rapport aux 130 500 places ouvertes à l'hiver 2016-2017. Cette augmentation de la capacité d'accueil a permis de réduire de 8 points le taux de demandes d'hébergement non pourvues formulées auprès des SIAO. Ce sont toutefois 422 000 demandes qui n'ont pas pu être satisfaites lors de l'hiver dernier.

Afin de limiter la gestion dite « au thermomètre » des capacités d'accueil en hébergement d'urgence, un effort d'évaluation, d'orientation et d'accompagnement social a été progressivement accompli pour, d'une part, réorienter un certain nombre de personnes vers d'autres solutions d'hébergement, ce qui permet de fermer certaines places ouvertes pendant l'hiver. D'autre part, la pérennisation d'un certain nombre de places hivernales permet de maintenir une solution d'hébergement pour d'autres personnes. Sur la base de ces évaluations, les pérennisations de places ont augmenté de manière significative ces dernières années afin de répondre aux besoins d'hébergement, pour atteindre 5 000 places pérennisées en 2018 .

Nombre de places d'hébergement pérennisées en fin de période hivernale

2015

2016

2017

2018

1 570

2 300

4 200

5 000

Source : Réponses aux questionnaires budgétaires du rapporteur

? L'hébergement hôtelier

Le recours aux nuits d'hôtels a connu une forte augmentation ces dernières années, constituant ainsi le moyen de répondre à la hausse des demandes d'hébergement d'urgence, en particulier en hiver, faute de places suffisantes en centres d'hébergement.

Un plan de réduction des nuitées hôtelières a été lancé par le Gouvernement en février 2015 pour se déployer sur trois ans. L'objectif du plan était de limiter l'augmentation de ces nuitées en diminuant l'hébergement hôtelier de 10 000 places par rapport à sa progression tendancielle. L'objectif a été quasiment atteint puisque la délégation interministérielle à l'hébergement et à l'accès au logement (Dihal) a estimé en juin 2018 que 9 800 nuitées d'hôtels avaient été évitées ces trois dernières années , au profit de la création de places en centres d'hébergement et dans le logement adapté.

Face à une demande toujours croissante d'hébergement d'urgence, ce plan de réduction n'a donc permis que de limiter la progression du recours à l'hôtel. Alors que la demande augmente, l'augmentation des dispositifs de substitution ne fait qu'accroitre la capacité d'accueil globale en hébergement d'urgence. Elle permet ainsi de trouver une solution d'hébergement à un plus grand nombre de personnes mais ne réduit pas le recours à l'hôtel.

Ainsi que l'ont indiqué plusieurs organisations auditionnées par votre rapporteur, certains territoires voient dorénavant leur capacité hôtelière saturée, en particulier en région parisienne. Derrière la limitation de la progression des nuitées d'hôtels se cache ainsi l'impossibilité d'augmenter le nombre de places à l'hôtel, laissant dès lors un nombre important de personnes sans solution d'hébergement. Comme l'ont rapporté plusieurs personnes auditionnées, il n'est pas rare de voir des familles sans-abri se rendre dans des services d'urgence des hôpitaux en région parisienne pour y passer la nuit, faute de solution d'hébergement.

? La prise en charge de l'hébergement des personnes migrantes

Si la prise en charge des personnes migrantes relève en principe de la mission « immigration, asile et intégration » du ministère de l'intérieur, le programme 177 a du financer une partie des dispositifs d'hébergement de ces publics en raison de l'obligation d'accueil inconditionnel et de l'augmentation des flux migratoires.

La hausse de la demande d'hébergement, associée à l'obligation d'accueil inconditionnel, se traduit par le fait que le programme 177 peut financer la prise en charge de personnes effectuant une demande d'asile à leur arrivée sur le territoire, pendant l'instruction de leur dossier faute de place dans une structure dédiée et à l'issue de l'instruction du dossier pour les personnes déboutées ou les réfugiés sans autre solution d'hébergement.

Afin de clarifier les missions et le financement des dispositifs, des mesures de transferts interviennent progressivement pour que l'accueil des personnes migrantes relève du ministère de l'intérieur. Ainsi, le financement des centres d'accueil et d'orientation (CAO) dédiés à aux personnes migrantes a été transféré du programme 177 au programme 303 « immigration et asile » au 1 er janvier 2018.

En 2017 , la prise en charge des personnes migrantes évacuées de campements à Paris s'est traduite par la création de 10 000 places d'accueil en centres d'hébergement d'urgence pour migrants (CHUM) et à l'hôtel , financées par le programme 177.

En 2018 , les crédits du programme ont financé l'ouverture de trois accueils de jour pour migrants afin de remplacer le centre de premier accueil crée par l'État et la ville de Paris en novembre 2016.

D'après les réponses communiquées à votre rapporteur, ces dispositifs d'hébergement dédiés aux migrants, ainsi que l'accompagnement et le transport de certains d'entre eux vers des centres d'accueil et d'orientation (CAO) dans les différentes régions ont représenté un coût de 152,7 millions d'euros en 2017 et 150 millions d'euros en 2018 pour le programme 177 .

Le PLF pour 2019 prévoit de transférer le financement des CHUM, l'accompagnement et le transport des migrants du programme 177 de la mission « cohésion des territoires » au profit de la mission « immigration, asile et intégration » . Cette mesure correspond à un transfert de crédits s'élevant à 118,7 millions d'euros répartis entre le programme 104 « intégration et accès à la nationalité française » pour 19,1 millions d'euros et le programme 303 « immigration et asile » pour 99,6 millions d'euros.

Les services de la direction générale de la cohésion sociale ont indiqué à votre rapporteur que ce transfert 118,7 millions d'euros permettra de financer les CHUM en 2019 grâce à des mesures de restructuration qui permettront de réaliser des économies. Compte tenu du coût qu'a représenté la gestion de ces centres en 2017 et 2018, votre rapporteur émet des réserves quant à la capacité d'une telle réduction de ces dépenses destinées à la prise en charge des migrants. Ce transfert pourrait alors se caractériser par une sous-budgétisation des programmes 104 et 303 s'agissant du financement de ces dispositifs.

En outre, malgré cet effort de clarification budgétaire entre les dispositifs d'hébergement à vocation généraliste et ceux dédiés aux migrants, le programme 177 continuera de financer des dispositifs d'accompagnement dédiés aux migrants en 2019 , notamment au travers de « l'hébergement citoyen » destiné aux bénéficiaires d'une protection internationale 4 ( * ) et de la plateforme nationale pour le logement des réfugiés 5 ( * ) .

Soulignons en outre que compte tenu de l'obligation d'hébergement inconditionnel et des difficultés de contrôle des personnes dites « à droits incomplets », l'objectif d'une prise en charge différenciée des personnes entre dispositifs généralistes et dispositifs dédiés aux migrants apparait difficile à atteindre.

? Les crédits dédiés à l'hébergement d'urgence pour 2019

Les crédits destinés au financement de l'hébergement d'urgence pour 2019 s'élèvent à 846,7 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 864,8 millions d'euros en crédits de paiement (CP).

L'écart entre AE et CP pour 2019, pour un montant de 18,1 millions d'euros, correspond au financement de la troisième tranche du marché public engagé en 2017 visant à créer 5 000 places d'hébergement d'urgence avec accompagnement social.

Hors mesure de transfert à destination des programmes 104 et 303, les crédits dédiés à l'hébergement d'urgence augmenteraient de 2,4 % en AE et 4,6 % en CP entre 2018 et 2019.

En tenant compte du transfert opéré vers les programmes 104 et 303, pour un montant de 118,7 millions d'euros, les crédits de cette unité s'élèvent à 728 millions d'euros en AE et 746,1 millions d'euros en CP pour 2019 , soit une diminution de crédits de 11,9 % en AE et 9,7 % en CP par rapport à 2018. Il convient de rappeler qu'au bénéfice de cette mesure de transfert, cette unité budgétaire ne financera plus les CHUM ainsi que l'accompagnement et le transport de migrants vers les CAO qui ont représenté un coût de 150 millions d'euros en 2018.

c) Les centres d'hébergement et de réinsertion sociale

Les crédits destinés aux centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS), qui représentent 613,8 millions d'euros en 2019 , diminuent de 2,1 % par rapport à la LFI pour 2018 .

Les CHRS sont des établissements qui accueillent temporairement des personnes en situation de détresse ou d'exclusion sociale en leur offrant un accompagnement destiné à leur réinsertion. Pour retrouver leur autonomie, les personnes accueillies en CHRS bénéficient d'un accompagnement psychologique et social, de formations, d'aide à l'accès à un logement pérenne. La durée de séjour en CHRS est de neuf mois en moyenne et l'accueil dans ces structures peut constituer une étape utile dans le parcours d'insertion de la personne sans domicile, entre l'hébergement d'urgence et l'accès à un logement.

Le nombre de places en CHRS a augmenté ces cinq dernières années pour s'élever à 44 691 en 2017 , réparties dans 784 centres. Cette augmentation s'explique par la mise sous statut de CHRS d'un certain nombre de places qui étaient financées sous la forme de subventions, afin d'assurer une meilleure régulation de l'offre et une gestion plus optimale des coûts.

Nombre de places en centres d'hébergement
et de réinsertion sociale (2010-2017)

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Évolution
2010-2017

39 525

39 346

39 142

39 145

40 690

42 176

43 370

44 691

+ 13 %

Source : Commission des affaires sociales et réponses aux questionnaires budgétaires du rapporteur

Une démarche de convergence tarifaire des CHRS a été engagée en 2018 avec la mise en place de tarifs plafonds par nature de prestation. Ce plan de convergence tarifaire est le résultat d'une étude nationale des coûts (ENC) mise en oeuvre depuis 2014 et qui a fait ressortir d'importantes disparités de coûts selon les territoires et les structures d'accueil, en particulier entre hébergement diffus et regroupé. Cette convergence s'accompagne d'un plan d'économies de 57 millions d'euros sur quatre ans pour les CHRS.

Ces mesures expliquent ainsi la diminution des crédits alloués aux CHRS pour 2019. Ainsi que l'ont indiqué un certain nombre d'associations auditionnées par votre rapporteur, ce plan d'économies, associé à la convergence tarifaire, oblige les gestionnaires à réduire leurs prestations en matière d'alimentation, de sécurité et d'équipements. Surtout, l'accompagnement social des personnes accueillies risque d'être réduit voire sacrifié , avec des suppressions de postes de travailleurs sociaux pour se conformer aux exigences tarifaires.

d) Le logement adapté

Les différentes formes de logement adapté permettent d'offrir des solutions de logement aux personnes dont la situation économique et sociale ne leur permet pas d'accéder au logement ordinaire. L'ensemble de ces dispositifs représente 231 000 places au 31 décembre 2017, en hausse de 1,7 % par rapport à 2016.

Les différents dispositifs de logement adapté sont les suivants.

? Les maisons-relais et les pensions de famille sont des structures d'accueil de petite taille dans lesquelles se trouve un hôte rémunéré à hauteur de 16 euros par jour et par place. Les personnes accueillies, sans limitation de durée, bénéficient d'un accompagnement social et, le cas échéant, d'un suivi médico-social adapté en partenariat avec des équipes de soins.

Nombre de places en pensions de famille (2015-2017)

2015

2016

2017

Évolution
2015-2017

14 843

15 446

16 521

+ 11,3 %

Source : Réponses aux questionnaires budgétaires du rapporteur

? L'intermédiation locative constitue une aide versée à des associations ou organismes de logement social afin qu'ils louent des logements du parc privé pour les sous-louer à un tarif social à des ménages défavorisés en capacité d'occuper un logement.

Nombre de places en intermédiation locative (2014-2017)

2014

2015

2016

2017

Évolution
2014-2017

21 643

25 575

28 656

34 358

+ 58,7 %

Source : Réponses aux questionnaires budgétaires du rapporteur

? L'aide à la gestion locative sociale (AGLS) est une aide versée par l'État aux résidences sociales afin de soutenir les dépenses d'accueil et d'accompagnement des personnes réalisées dans le cadre d'un projet d'insertion sociale mis en oeuvre par ces structures. Ces résidences sociales offrent une solution de logement temporaire aux personnes ou aux ménages à faible revenus et ayant des difficultés d'accès au logement. Ces résidences peuvent être des foyers de jeunes travailleurs ou des foyers de jeunes migrants transformés en résidences sociales ou des résidences sociales créés directement sous ce statut.

? L'aide au logement temporaire « ALT1 » est une aide destinée à couvrir les frais des organismes logeant temporairement des personnes sans domicile. Cette aide se substitue aux allocations logement qui ne peuvent être attribuées en raison du public accueilli et du caractère temporaire de l'accueil ou de la disponibilité du logement.

Crédits dédiés aux différents dispositifs de logement adapté

(en millions d'euros)

Maisons relais et pensions de famille

Intermédiation locative

AGLS et résidences sociales

ALT1

Autres actions

Total logement adapté

LFI 2018

108,5

93,6

26

71,5

14,3

313,9

PLF 2019

113,3

97,2

26

73,5

15,3

325,4

Évolution

+ 4,4 %

+ 3,8 %

0 %

+ 2,8 %

+ 7 %

+ 3,7 %

Source : Projet annuel de performance 2019 sur la mission « cohésion des territoires »

Le plan « pour le logement d'abord et la lutte contre le sans-abrisme » prévoit la création, en cinq ans, de 10 000 places en maisons - relais ou pensions de famille et de 40 000 places en intermédiation locative. Ce sont ainsi 1 325 places en pensions de familles et 6 236 places en intermédiation locative qui devraient être créées au terme de l'année 2018. Afin de poursuivre les objectifs fixés, les crédits dédiés à ces dispositifs augmentent respectivement de 4,4 % et 3,8 % pour 2019.

Les crédits alloués au logement adapté augmentent de 3,7 % en 2019 par rapport à la LFI pour 2018, s'élevant à 325,4 millions d'euros .

3. Les crédits de l'action 14 consacrés à la conduite et à l'animation des politiques restent relativement stables

Les crédits de l'action 14 sont principalement destinés à soutenir financièrement les associations qui participent à la mise en oeuvre des politiques d'hébergement et de logement financées par le programme 177.

Action 14 - Conduite et animation des politiques
de l'hébergement et de l'inclusion sociale (AE=CP)

(en millions d'euros)

LFI 2018

PLF 2019

Évolution

Action 14

9,06

9,13

0,82 %

Source : Projet annuel de performance « cohésion des territoires » pour 2019

Les dépenses d'intervention de l'action 14 sont composées de trois volets.

Le premier volet est destiné à financer des actions d'ingénierie , à hauteur de 3 millions d'euros pour 2019 . Ces crédits permettent notamment de déployer des systèmes d'information, notamment celui dédié aux services intégrés d'accueil et d'orientation (SI-SIAO).

Le deuxième volet vise à soutenir des associations têtes de réseaux avec une enveloppe de 5,5 millions d'euros pour 2019 . Une quarantaine d'associations intervenant dans la lutte contre les exclusions sont ainsi subventionnées, dont une majorité dans le cadre de conventions pluriannuelles d'objectifs.

Le troisième volet est destiné à soutenir financièrement les fédérations locales des centres sociaux , à hauteur de 0,4 million d'euros pour 2019 afin d'améliorer leur développement et leur qualité.

Enfin, une enveloppe de 0,3 million d'euros est dédiée à des dépenses de fonctionnement autres que celles de personnel. Ainsi, les crédits demandés pour l'action 14 s'élèvent à 9,13 millions d'euros en 2019 , soit un montant relativement stable par rapport à 2018 (+ 0,82 %).

II. ALORS QUE LES PLANS « LOGEMENT D'ABORD » ET PAUVRETÉ AFFICHENT L'AMBITION DE RENFORCER L'ACCÈS AU LOGEMENT, L'ACCOMPAGNEMENT SOCIAL N'APPARAIT PAS SUFFISANT POUR Y PARVENIR

A. LES AMBITIONS DES PLANS « LOGEMENT D'ABORD ET « PAUVRETÉ » RISQUENT DE SE HEURTER À UN BUDGET QUI DEMEURE LIMITÉ

1. Le plan « logement d'abord » entend renforcer le logement adapté et faciliter l'accès au logement

Le « plan quinquennal 2018-2022 pour le logement d'abord et la lutte contre le sans-abrisme », mis en place par le Gouvernement, a pour ambition de « réorienter rapidement les personnes sans domicile vers le logement grâce à un accompagnement adapté et modulable ».

Il se décline en cinq priorités :

- produire et mobiliser plus de logements abordables et adaptés aux besoins des personnes sans-abri et mal logées ;

- promouvoir et accélérer l'accès au logement et faciliter la mobilité résidentielle des personnes défavorisées ;

- mieux accompagner les personnes sans domicile et favoriser le maintien dans le logement ;

- prévenir les ruptures dans les parcours résidentiels et recentrer l'hébergement d'urgence sur ses missions de réponse immédiate et inconditionnelle ;

- mobiliser les acteurs et les territoires pour mettre en oeuvre le principe du logement d'abord.

Les mesures du plan reposent sur l'approche « housing first », traduite par « un chez soi d'abord », qui vise à proposer en priorité aux personnes sans-abri des logements pérennes plutôt que des dispositifs d'hébergement temporaires. Cette approche de la prise en charge des sans-abri a d'abord été mise en oeuvre aux États-Unis, en particulier à New York dans les années 1990, et s'est révélée fructueuse puisqu'il est évalué que 85 % à 90 % des personnes se maintiennent dans les lieux. En outre, le coût de ce programme est moins élevé que les solutions d'hébergement 6 ( * ) .

À titre d'illustration, les dispositifs de logement adapté sont moins coûteux que les structures d'hébergement d'urgence. À raison d'une dotation de 16 euros par jour, une place en pension de famille représente un coût annuel d'environ 5 840 euros. Le coût d'une place à l'hôtel représentait 7 266 euros par an en 2017 7 ( * ) . En centre d'hébergement (CHRS et non-CHRS), le coût complet annuel d'une place représentait, en 2017, 16 889 euros pour des services regroupés et 12 211 euros pour des services diffus 8 ( * ) .

Cette approche de la lutte contre le sans-abrisme nécessite toutefois un important accompagnement social de la personne.

Parmi, les mesures de ce plan figure la création de 40 000 places supplémentaires en intermédiation locative , en mobilisant le parc privé et l'ouverture de 10 000 nouvelles places en pensions de famille sur cinq ans. La mise en oeuvre de ces mesures s'est traduite en 2018 par l'ouverture de 6 236 places en intermédiation locative et 1 325 places en pensions de famille. La montée en charge de ces dispositifs se poursuivra en 2019 grâce à l'augmentation des crédits dédiés au logement adapté.

Alors que les places en pensions de famille et en intermédiation locative s'élevaient respectivement à 16 000 et 34 000 fin 2017, l'ambition affichée par le plan est forte et suppose de doubler le nombre de places en cinq ans . Par conséquent, l'augmentation des crédits pour 8,4 millions d'euros en 2019 apparait assez faible face à l'objectif fixé.

2. La stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté entend également renforcer l'hébergement et l'accompagnement des sans-abri.

La « stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté » contient un ensemble de mesures annoncées par le Président de la République en septembre 2018, qui seront déployées sur quatre ans (2018-2021) grâce à un budget de 8,5 milliards d'euros. Ces mesures répondent à cinq engagements :

- l'égalité des chances dès les premiers pas pour rompre la reproduction de la pauvreté (1,2 milliard d'euros) ;

- garantir au quotidien les droits fondamentaux des enfants (271 millions d'euros) ;

- un parcours de formation garanti pour tous les jeunes (439 millions d'euros) ;

- vers des droits sociaux plus accessibles, plus équitables et plus incitatifs à l'activité (7,9 milliards d'euros) ;

- investir pour l'accompagnement de tous vers l'emploi (1 milliard d'euros).

Parmi les mesures du plan figure une enveloppe de 125 millions d'euros dédiée au développement et à l'adaptation de l'offre d'hébergement et d'accompagnement vers le logement des familles , au développement des maraudes et en faveur de la protection de l'enfance pour lutter contre la situation des enfants à la rue et la mendicité.

Pour 2019, les services du ministère des solidarités et de la santé ont indiqué à votre rapporteur qu'une enveloppe de 20 millions d'euros serait transférée par amendement au profit du programme 177 pour financer des mesures destinées aux familles avec enfants. Selon les indications fournies par le ministre chargé de la ville et du logement, M. Julien Denormandie, auditionné par la commission des affaires économiques du Sénat le 13 novembre 2018, une partie de cette enveloppe serait dédiée au soutien des maraudes (pour 5 millions d'euros), à l'accompagnement des personnes hébergées à l'hôtel (pour 5 millions d'euros) et aux CHRS .

Si votre rapporteur partage les orientations prises par cette stratégie de lutte contre la pauvreté et l'ambition qu'elle porte, il tient d'une part à souligner que l'enveloppe annoncée pour 2019 reste modeste face aux objectifs fixés et aux défis posés par le problème de l'hébergement.

D'autre part, votre rapporteur constate la difficulté d'évaluer le déploiement des mesures annoncées figurant dans ces différents plans. Leur multiplication risque de brouiller les messages pour les acteurs de terrain. En outre, le suivi des moyens alloués chaque année à la mise en oeuvre de ces mesures n'est pas suffisamment développé et nuit à la bonne appréciation des crédits budgétaires.

3. La réussite de l'accompagnement des personnes sans domicile dépendra en aval de la situation du marché du logement

La rigidité du marché du logement affecte la capacité d'accompagner les personnes en difficulté sociale et sans domicile vers des logements adaptés ou ordinaires.

En effet, la progression de l'intermédiation locative dépend du prix des loyers dans le parc privé et de la mobilisation de ce parc en faveur de ces dispositifs sociaux. Il convient aussi de lutter contre l'augmentation de la vacance des logements en zone urbaine pour mettre davantage le parc immobilier à disposition. Selon l'Insee, le nombre de logements vacants a augmenté de 3,4 % par an depuis 2010 et le taux de vacance est plus marqué dans les villes-centres qu'en périphérie, s'élevant à 9,5 % dans les villes-centres des grands pôles urbains 9 ( * ) . Si cette ambition de mobiliser le parc privé est affichée dans le plan « logement d'abord », les moyens pour y parvenir ne sont, à ce stade, pas au rendez-vous.

Concernant les pensions de famille , leur développement nécessite aussi d'adapter les moyens à l'évolution du marché de l'immobilier. Or, la dotation de 16 euros par place et par jour attribuée pour cette forme de logement n'a pas été revalorisée depuis 2008.

Par conséquent, les structures d'hébergement d'urgence et les hôtels perdent progressivement leur vocation d'accueil temporaire et hébergent certaines personnes pendant plusieurs mois voire plusieurs années. La fluidité du parcours vers le logement suppose donc d'agir sur l'ensemble des étapes du parcours, des dispositifs d'urgence jusqu'à l'accessibilité à un logement pérenne. Pour fluidifier ce parcours, l'accompagnement social des personnes est une condition nécessaire.

B. UN NÉCESSAIRE ACCOMPAGNEMENT SOCIAL POUR SORTIR DE L'URGENCE

1. Les CHRS risquent d'être fragilisés par les mesures d'économies

Le plan d'économies et de convergence tarifaire mis en oeuvre pour les CHRS impose d'importantes réductions de coût pour ces structures . Comme l'ont indiqué plusieurs associations auditionnées par votre rapporteur, ces économies vont entraver la qualité d'accueil des CHRS . Elles risquent également de créer une sélection des publics accueillis qui doivent s'acquitter d'une participation financière pour y être hébergées. Par ailleurs, ces réductions des coûts s'effectueraient au prix de l'accompagnement social qui fait l'intérêt de ces structures. En effet, dans le parcours vers le logement, l'accueil en CHRS constitue un moyen d'accompagnement qui permet à presque la moitié des personnes accueillies d'accéder à un logement autonome.

Part des personnes sortant de CHRS qui accèdent à un logement

Réalisation
2016

Réalisation 2017

Prévision 2018

Prévision 2019

Cible 2020

Part accédant à un logement adapté

14 %

12 %

14 %

16 %

18 %

Part accédant à un logement autonome

31 %

43 %

45 %

47 %

48 %

Source : Projet annuel de performance « cohésion des territoires » pour 2019

Les préoccupations des gestionnaires de CHU et de CHRS :
l'exemple du département des Deux-Sèvres

Votre rapporteur a rencontré plusieurs organismes gestionnaires de CHU et de CHRS, associations et centres communaux d'action sociale, exerçant dans le département des Deux-Sèvres.

Concernant la prise en charge des personnes migrantes , les acteurs auditionnés par votre rapporteur ont indiqué que les SIAO étaient dorénavant incités à ne pas orienter ces personnes vers les structures d'accueil généralistes, au profit des structures dédiées. Il en résulte que de nombreuses personnes restent sans solution d'hébergement, faute de places. C'est le cas des demandeurs d'asile, qui ne peuvent effectuer qu'un seul séjour en CAO, et des migrants en situation irrégulière. Cette situation conduit au développement de squats aux conditions insalubres où prospèrent de nombreux trafics.

Concernant les CHRS , la durée d'hébergement , souvent entre six et neuf mois, apparait trop courte pour assurer un accompagnement satisfaisant de la personne. En effet, les personnes accueillies souffrent de difficultés toujours plus nombreuses (pathologies diverses et multiples, désocialisation, etc.) qui nécessitent de longues périodes d'apprentissage et d'accompagnement renforcé, ce que n'offre pas le logement adapté. Au contraire, le plan d'économies engagé pour la convergence tarifaire fragilise ces structures et se fait sans distinction des publics accueillis ou des coûts de l'immobilier. Les gestionnaires de CHRS regrettent que, dans ce cadre, le principe d'un dialogue de gestion ne soit plus possible avec l'État.

Le développement de l'intermédiation locative ne propose pas le même accompagnement que les CHRS qui offrent aux personnes en difficulté un sas de réinsertion nécessaire pour l'accès au logement. Or, la réduction des coûts imposés aux CHRS risque de créer une concurrence entre les publics accueillis dans ces structures ainsi que dans le logement adapté. En outre, l'intermédiation locative n'offre pas de garanties suffisantes à l'organisme locataire concernant les loyers impayés ou les éventuelles dégradations, constituant un frein à son développement.

Dans ce contexte, les associations auditionnées ont fait part de leurs inquiétudes pour répondre aux demandes toujours croissantes d'hébergement. D'une part, elles se sentent menacées par les politiques de réduction des coûts alors qu'elles tentent de répondre aux demandes d'ouverture de nouveaux services. D'autre part, elles se trouvent en concurrence avec de grandes organisations à dimension nationale dans le cadre d'appels à projets pour lesquels elles ne peuvent pas proposer des tarifs aussi favorables. Pour autant, les petites associations offrent généralement un accompagnement des personnes plus important. Les organisations auditionnées ont indiqué qu'elles employaient un éducateur pour quinze personnes hébergées en CAO ou CHRS quand de grandes organisations ne proposaient souvent qu'un éducateur pour quarante-cinq personnes.

Reconnaissant les difficultés que rencontrent les CHRS dans le cadre de cette convergence tarifaire, le Gouvernement a décidé qu'ils bénéficieraient d'un soutien supplémentaire dans le cadre de l'enveloppe de 20 millions d'euros qui sera transférée au programme 177 pour 2019. Votre rapporteur n'a pas pu connaitre à ce stade le montant précis qui serait alloué aux CHRS qui ne dépasserait pas, en tout état de cause, 10 millions d'euros pour 2019.

Si l'objectif du « logement d'abord » vise à trouver une solution de logement pérenne aux sans-abri sans passer par des structures temporaires comme les CHRS, il ne peut être atteint à court terme en affaiblissant ces structures. Cette stratégie passe par une réorganisation du parcours vers le logement qui suppose un accompagnement renforcé des populations sans domicile.

2. La sortie des dispositifs d'urgence suppose de renforcer l'accompagnement social

Le renforcement de l'approche « d'aller vers » les populations en détresse et se trouvant dans le rue est nécessaire pour lutter contre le sans-abrisme. C'est l'ambition affichée par la stratégie « pauvreté » que partage votre rapporteur. C'est dans ce cadre que les maraudes professionnelles seront renforcées en 2019. Le plan pauvreté prévoit également de transformer le travail social pour développer ces pratiques. Si cette orientation est partagée par votre rapporteur, les moyens et les mesures ne sont pour l'instant pas suffisamment engagés. Il convient par cette pratique « d'aller vers » de renforcer le lien entre les dispositifs d'accueil et d'accompagnement et les populations en détresse. En effet, certaines d'entre elles, découragées, ne sollicitent plus les structures d'hébergement qui répondent souvent défavorablement aux demandes, faute de places disponibles. Le taux de réponse positive des SIAO aux demandes d'hébergement s'élève à 49 % en 2018 et à 4 % seulement pour les demandes de logement adapté 10 ( * ) . L'accompagnement vers des formes de logement pérenne (adapté ou ordinaire) doit donc être considérablement renforcé.

En outre, la sortie de l'hôtel vers des solutions de logement pérenne ne peut s'effectuer sans l'accompagnement des populations hébergées. L'hébergement hôtelier a en partie perdu sa vocation d'hébergement temporaire et d'urgence, des familles y résidant depuis plusieurs mois voire plusieurs années. Or ces structures ne sont pas adaptées pour la réussite d'un parcours de réinsertion sociale. La stratégie « un chez soi d'abord » peut s'avérer pertinente pour la sortie de l'hôtel, en particulier pour les personnes hébergées à l'hôtel et qui travaillent. Elles doivent recevoir un accompagnement adapté pour trouver une solution de logement pérenne. Une meilleur rotation des populations à l'hôtel est en outre nécessaire pour que cette solution retrouve sa vocation de réponse à l'urgence et puisse accueillir davantage de personnes en détresse qui sont aujourd'hui sans solution d'hébergement. Votre rapporteur sera à cet égard attentif aux mesures d'accompagnement pour la sortie de l'hôtel annoncées par le Gouvernement.

Enfin, votre rapporteur tient à rappeler la nécessité d'une meilleure coordination des acteurs sur le territoire pour accompagner les personnes . C'est l'ambition affichée par le plan « logement d'abord » qui prévoit notamment de nouer des partenariats avec les départements pour créer des référents de parcours assurant un meilleur suivi de la personne. La possibilité de constituer des SIAO interdépartementaux, évoquée dans le plan, permettrait également de renforcer ce suivi, en particulier en zone urbaine. En région parisienne, il est fréquent que la sollicitation d'un SIAO débouche sur l'hébergement de la personne dans un département voisin, ce qui complique son accompagnement compte tenu de l'organisation territoriale actuelle. Ces moyens de coordination et d'adaptation aux besoins des territoires doivent donc être engagés.

À cet égard, plusieurs associations auditionnées par votre rapporteur l'ont alerté sur l'enjeu de la domiciliation pour les personnes sans domicile. La domiciliation permet aux personnes sans domicile fixe de disposer d'une adresse afin de recevoir du courrier, bénéficier de certains droits et prétendre à certaines prestations. Cette compétence relève en principe des communes, au travers des centres communaux d'action sociale, qui la délèguent parfois à des associations. Or ce service public est fragilisé dans de nombreuses communes, faute de moyens . La domiciliation est portant un moyen utile d'effectuer un accompagnement de la personne sous la forme d'un accueil de jour et elle permet d'assurer un suivi grâce à de l'aide aux démarches administratives. Attentif à ce sujet, votre rapporteur tient à alerter sur la nécessité d'accroitre les moyens dévolus à ce service public, en renforçant les partenariats entre les services de l'État, les collectivités territoriales et les associations. Ce sont par ces formes d'accompagnement, grâce au renforcement du travail social, que pourront être atteints les objectifs fixés dans les plans de lutte contre la pauvreté et d'accès à des solutions de logement pérenne.

EXAMEN EN COMMISSION

______________

Réunie le mercredi 21 novembre 2018, sous la présidence de M. Alain Milon, président, la commission procède à l'examen du rapport pour avis de M. Jean-Marie Morisset sur le programme « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » de la mission « Cohésion des territoires » du projet de loi de finances pour 2019.

M. Jean-Marie Morisset , rapporteur pour avis sur le programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » de la mission « Cohésion des territoires » . - Le programme 177 finance principalement des structures d'hébergement d'urgence et des dispositifs de logement adapté, afin de répondre aux demandes d'hébergement des personnes en détresse et d'accompagner les plus précaires vers l'accès au logement. En raison de la progression de la pauvreté et de l'exclusion ainsi que des flux migratoires, les demandes d'hébergement ont considérablement augmenté ces dernières années, sollicitant fortement les structures financées par le programme 177 : le nombre de places en hébergement d'urgence a ainsi progressé de 180 % entre 2010 et 2017.

Pour répondre à cette demande, les moyens alloués au programme ont augmenté significativement. Les crédits ouverts en loi de finances initiale pour 2019 sont supérieurs de 562 millions à ceux ouvert pour 2014, soit une augmentation de 42 %, ce qui est important dans un contexte de maîtrise des dépenses publiques.

Malgré cette progression significative des moyens, le programme souffre d'une sous-budgétisation chronique depuis plusieurs années : en 2014, il a fallu rajouter 153 millions, 225 millions en 2015, 238 millions en 2016, 221 millions en 2017.

Un effort de « sincérisation » budgétaire a été engagé depuis l'an dernier, en lien avec les services déconcentrés de l'État, pour prévoir des moyens adaptés aux besoins de financement. Toutefois, l'exécution du programme en 2018 devrait dépasser les 2 milliards et être supérieure de 8 % à l'enveloppe de crédits ouverte en loi de finances initiale, au bénéfice de reports généraux et de crédits supplémentaires prévus en loi de finances rectificative. Soulignons cependant que cet écart entre crédits votés et crédits exécutés se réduit par rapport aux années précédentes.

Pour 2019, les crédits demandés s'élèvent à 1,86 milliard d'euros en autorisations d'engagement et 1,88 milliard d'euros en crédits de paiement. Ils sont supérieurs à ceux consommés en 2017 et progressent, à périmètre constant, par rapport à ceux ouverts en 2018. Ils demeurent toutefois inférieurs à la prévision d'exécution pour 2018. Si le programme tend donc vers une budgétisation plus sincère, les efforts semblent insuffisants et l'exercice 2019 pourrait encore être marqué par une sous-budgétisation.

Le budget du programme pour 2019 s'inscrit dans le cadre du plan « logement d'abord » et de la stratégie de lutte contre la pauvreté annoncée en septembre dernier par le Président de la République. Des moyens supplémentaires sont dès lors alloués au développement des différentes formes de logement adapté, à l'hébergement d'urgence et à la veille sociale. Face aux ambitions affichées, ces moyens risquent toutefois d'être limités pour atteindre les objectifs fixés.

Les mesures du plan « logement d'abord » reposent sur l'approche d'un « chez soi d'abord », qui a été notamment mise en oeuvre avec succès aux États-Unis. Elle vise à proposer en priorité aux personnes sans-abri des logements pérennes plutôt que des solutions d'hébergement temporaires. Le plan prévoit d'ouvrir 40 000 places supplémentaires en intermédiation locative, et 10 000 nouvelles places en pensions de famille, ce qui suppose de doubler le nombre de places en cinq ans. Cette orientation va dans le bons sens mais l'augmentation des crédits de 8,4 millions prévue 2019 apparait assez faible face à l'objectif fixé.

La stratégie de lutte contre la pauvreté comprend une enveloppe de 125 millions dédiée à l'hébergement et l'accompagnement vers le logement des familles, au développement des maraudes et de la protection de l'enfance. Pour 2019, les services du ministère des solidarités et de la santé m'ont indiqué que dans ce cadre, une enveloppe de 20 millions serait transférée par amendement au profit du programme 177 pour financer des mesures destinées aux familles avec enfants. Une partie de cette enveloppe serait également dédiée au soutien des maraudes, pour cinq millions d'euros, à l'accompagnement des personnes hébergées à l'hôtel, pour cinq millions d'euros, et aux centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS). Là encore, les moyens alloués sont modestes face aux ambitions affichées.

Par conséquent, je partage les orientations contenues dans ces plans mais je suis quelque peu réservé quant à la capacité d'atteindre, dans les délais, les objectifs fixés, en raison des moyens budgétaires prévus.

Dans ce contexte, je souhaiterais vous faire part de trois points de vigilance. Le premier concerne la situation des personnes migrantes. Le programme 177 finance des structures d'hébergement généralistes, le financement des dispositifs dédiés aux migrants revenant en principe au ministère de l'intérieur. Avec l'accroissement des flux migratoires, le programme 177 a cependant du financer des structures d'hébergement pour migrants. Pour clarifier cette situation, le programme a connu différentes mesures de transfert : le financement des centres d'accueil et d'orientation (CAO) a été transféré du programme 177 au programme 303 « immigration et asile » au 1 er janvier 2018. Le PLF pour 2019 prévoit de transférer le financement des centres d'hébergement d'urgence pour migrants (CHUM), l'accompagnement et le transport des migrants à la mission « immigration, asile et intégration ». Cette mesure correspond à un transfert de crédits s'élevant à 118,7 millions alors que ces dispositifs ont représenté un coût de 150 millions en 2018. Je doute de la capacité d'une telle réduction de ces dépenses destinées à la prise en charge des migrants.

Par ailleurs, compte tenu de l'obligation d'hébergement inconditionnel et des difficultés de contrôle des personnes migrantes, l'objectif d'une prise en charge différenciée des personnes entre dispositifs généralistes et dispositifs dédiés aux migrants apparait difficile à atteindre.

Le second point de vigilance concerne le recours aux nuitées d'hôtels. L'hébergement à l'hôtel a connu une forte augmentation ces dernières années, passant de 14 000 places en 2010 à 45 000 en 2017. L'hôtel constitue ainsi le moyen de répondre à la hausse des demandes d'hébergement d'urgence, en particulier l'hiver, faute de places suffisantes en centres d'hébergement. Un plan de réduction des nuitées hôtelières sur trois ans a été lancé par le Gouvernement en février 2015, dont l'objectif était de limiter l'augmentation de ces nuitées de 10 000 places par rapport à sa progression tendancielle. L'objectif a été quasiment atteint grâce à la création de places en centres d'hébergement et dans le logement adapté. Face à une demande toujours croissante d'hébergement d'urgence, ce plan de réduction n'a cependant permis que de limiter la progression du recours à l'hôtel. Alors que la demande progresse, l'augmentation des dispositifs de substitution ne fait qu'accroître la capacité d'accueil globale en hébergement d'urgence mais ne réduit pas le recours à l'hôtel. Deux tendances sont préoccupantes. D'une part, certaines personnes sont hébergées à l'hôtel pendant plusieurs mois voire plusieurs années : cette solution perd donc son caractère temporaire alors qu'elle n'est pas adaptée à un accompagnement vers le logement. D'autre part, certains territoires voient dorénavant leur capacité hôtelière saturée, en particulier en région parisienne. Derrière la limitation de la progression des nuitées d'hôtels se cache ainsi l'impossibilité d'augmenter le nombre de places à l'hôtel, laissant dès lors un nombre important de personnes sans solution d'hébergement. Comme l'ont rapporté plusieurs personnes auditionnées, il n'est pas rare de voir des familles sans-abri se rendre dans les services d'urgence des hôpitaux parisiens pour y passer la nuit, faute de solution d'hébergement.

Enfin le dernier point d'attention concerne les CHRS et, plus largement, l'accompagnement social. Le plan d'économies de 57 millions sur quatre ans pour la convergence tarifaire des CHRS impose d'importantes réductions de coût pour ces structures. Comme l'ont indiqué plusieurs associations, ces économies vont entraver la qualité d'accueil des CHRS et risquent de créer une sélection des publics accueillis, qui doivent s'acquitter d'une participation financière pour y être hébergées. Surtout, ces réductions des coûts s'effectueraient au prix de l'accompagnement social qui fait l'intérêt de ces structures. Je rappelle que près de la moitié des personnes accueillies en CHRS accèdent à un logement autonome à leur sortie. Le Gouvernement a reconnu les difficultés que rencontrent les CHRS et a décidé qu'ils bénéficieraient d'un soutien supplémentaire dans le cadre de l'enveloppe de 20 millions qui sera transférée au programme 177 pour 2019.

Si l'objectif du « logement d'abord » vise à trouver une solution de logement pérenne aux sans-abri sans passer systématiquement par des structures temporaires comme les CHRS, il ne peut être atteint à court terme en affaiblissant ces structures.

La réussite de l'insertion vers le logement passe par un accompagnement social renforcé et coordonné. Les ambitions des plans « logement d'abord » et « pauvreté » vont dans le bon sens à cet égard : renforcement des maraudes pour aller vers les sans-abri, mesures d'accompagnement pour la sortie de l'hébergement à l'hôtel, création de référents de parcours pour assurer un meilleur suivi de la personne. Ce sont autant de mesures intéressantes pour lesquelles les financements ne sont pas bien identifiés voire pas encore prévus. Comme je l'ai indiqué aux services du ministère des solidarités et de la santé, notre commission devra être attentive au bon déploiement de ces mesures.

La commission des finances, qui a examiné hier les rapports de nos collègues Philippe Dallier et Bernard Delcros, rapporteurs spéciaux pour la mission « cohésion des territoires », a émis un avis défavorable sur l'adoption des crédits de la mission. Cet avis est motivé par les réformes des aides au logement et de la réduction de loyer de solidarité qui concernent les programmes 109 et 135. Au titre de l'hébergement et du parcours vers le logement, notre collègue Philippe Dallier, rapporteur du programme 177, rejoint mes observations.

Je salue la budgétisation plus sincère du programme en 2018 et 2019, dans un contexte budgétaire contraint, même s'il n'est pas encore suffisant. Même si j'émets des doutes sur les moyens prévus à ce stade pour atteindre les objectifs fixés, je partage les orientations engagées en faveur de l'hébergement et de l'accès au logement. Je vous propose donc que notre commission émette un avis favorable à l'adoption des crédits du programme 177 de la mission.

M. Michel Amiel . - La triste actualité à Marseille nous rappelle l'urgence de ces questions. L'habitat insalubre débouche sur l'hébergement d'urgence pour des populations en extrême précarité : il s'agit le plus souvent de familles monoparentales, c'est-à-dire, pour parler juste, de femmes seules avec enfant.

Les gens qui subissent ces problèmes ont du mal à savoir qui fait quoi. Les nuitées d'hôtel apportent des solutions insatisfaisantes. Alors, certes, les CHRS sont une bonne réponse mais, en parallèle, l'insertion sociale est nécessaire. Au-delà de l'hébergement d'urgence se cache une véritable misère sociale.

Mme Patricia Schillinger . - Le sujet est effectivement d'actualité. La plus grande association est très parisienne. Comment se répartissent au niveau régional toutes les associations qui traitent de ce sujet ?

Mme Marie-Noëlle Lienemann . - Derrière le concept de personne vulnérable, il y a en réalité un champ plus vaste, comprenant les sans domicile fixe (SDF), les personnes expulsées pour telle ou telle raison, celles qui habitent dans un habitat insalubre, et qui ne sont pas dans une urgence absolue. Mais le Gouvernement ne luttera pas contre l'habitat insalubre s'il n'a pas de stratégie sur le logement. Elle ne se limite pas aux aides fiscales aux petits propriétaires, il faut pouvoir reloger les gens. Or il n'y a plus de place disponible, y compris en hébergement d'urgence, et les personnes passent rapidement dans une grande précarité.

Ce sujet est insuffisamment traité ; il faut faire un saut qualitatif dans l'hébergement d'urgence. Le plan pauvreté prévoirait des places nouvelles, mais en réalité, on « familialise » des places individuelles - ce qui est cependant une bonne chose, car il n'y avait pas suffisamment de places pour les familles dans les CHRS. Mais les centres ne disposent pas de suffisamment de place pour répondre à l'afflux de personnes en première urgence.

Par ailleurs, ce flux est continu. Selon le Président de la République, le logement HLM peut faire des efforts, mais 75% des personnes sortant de CHRS vont dans des HLM ! Il faut produire massivement des HLM. Bien sûr, le secteur privé peut donner des réponses conjoncturelles. Cela dépend des départements et de leurs traditions locatives populaires, mais globalement, l'intégralité de la chaîne est embouteillée. Voter contre l'adoption de ces crédits constituerait une alerte. Certes, le sujet est complexe, mais il faut créer un choc dans l'offre d'habitat d'urgence.

Le logement HLM a mis en place l'opération « Logement HLM accompagné », en lien avec des associations d'insertion, pour que les personnes ne soient pas déstabilisées par leur nouvel environnement et qu'elles s'y intègrent bien.

Des appels à projets ont été lancés depuis cinq ans sur l'innovation ou autre expérimentation, mais les besoins sont énormes. Nous avons besoin d'un financement pérenne pour accompagner un nombre déterminé de personnes. L'organisation de l'État est notoirement insuffisante. Il devrait contrôler si chaque département atteint ses objectifs, or sa présence territoriale sur le logement est réduite. Je crains une accumulation de difficultés et une forte croissance des mal-logés.

Mme Cathy Apourceau-Poly . - Mme Lienemann a dit l'essentiel. Les crédits sont insuffisants et ne sont pas à la hauteur des besoins. La misère sociale est de plus en plus importante. L'État se désengage de l'aide à la pierre. Il y a une symbolique forte. Ce fonds n'atteint pas les 500 millions d'euros nécessaires ; seuls 375 millions sont financés par le secteur HLM. Les expulsions locatives ont atteint un record en 2017, avec 15 547 ménages expulsés, contre 15 222 en 2016. Le nombre de nuits en hôtel explose, ce n'est pas étonnant ! Sans parler de la ponction de cinq euros sur les aides personnalisées au logement (APL) l'année dernière...

Mme Élisabeth Doineau . - Je salue le travail d'analyse du rapporteur, et insisterai sur deux points de vigilance. Nous assistons à l'afflux de mineurs non accompagnés. Lorsque l'évaluation estime qu'ils sont majeurs, ils sont renvoyés vers le 115, service saturé. En Mayenne, nous essayons de les héberger un peu plus longtemps, mais cette solution n'est pas pérenne et ne permet pas de les accompagner. L'État devrait être particulièrement vigilant. Il faut héberger les jeunes migrants : on ne peut faire de politique migratoire et les laisser à la rue. Les départements voient leurs dispositifs d'hébergement saturés, et sont incapables, humainement et financièrement, de les accompagner dans la durée.

Les moyens donnés à certains organismes comme l'Union Nationale pour l'Habitat des Jeunes (Unhaj) pour l'information et l'orientation des jeunes sont insuffisants, alors qu'il faudrait une politique de prévention pour aider le jeune à devenir autonome. De nombreuses associations sont en difficulté car les financements des collectivités territoriales se réduisent.

M. Alain Milon , président . - J'avais évoqué le sujet de l'hébergement d'urgence avec Jacques Mézard. Près de 2 milliards sont consacrés à ce programme, mais ils ne sont pas toujours utilisés à bon escient. Je vous proposerai de constituer une mission d'information ou de contrôle, dont le rapporteur serait M. Morisset, sur ce sujet.

M. Jean-Marie Morisset , rapporteur pour avis . - Je vous remercie de cette proposition.

Les dispositifs d'hébergement sont saturés depuis cinq ans. Lorsqu'arrive un événement comme à Marseille, avec des femmes et des enfants dans une situation compliquée, on traite l'urgence.

Monsieur Amiel, les programmes 109 et 135 sont davantage concernés par l'habitat insalubre mais il y a des conséquences sur le programme 177. On frappe à la porte du premier rencontré pour trouver des solutions.

Madame Schillinger, vous avez raison d'alerter sur la place particulière des grands structures parisiennes qui font de la stratégie et disposent de plus de places. Une commande publique comme l'année dernière avec 70 hôtels Formule 1 est bien différente du travail des départements avec les associations locales. Les grandes structures nationales raflent les appels d'offre, mais les services de l'État se tournent vers les petites associations dès qu'ils rencontrent un problème... Elles assurent un accompagnement par un ratio d'un éducateur pour 15 personnes, alors que le ratio pour les grandes structures est d'un pour 45. Les associations locales ne comprennent pas. Examiner plus en détail les frais de fonctionnement et de gestion de ces grandes structures, dans le cadre de la mission proposée, est une bonne idée.

Oui, madame Lienemann, le nombre de places en CHRS est insuffisant. Toutes les associations ont montré leur mécontentement en mars dernier, constatant que la dotation allait baisser de 57 millions sur quatre ans, dont 20 millions dès 2018. Je n'ai pas non plus apprécié d'apprendre cela en février, au lieu de pouvoir en débattre lors de l'examen de la loi de finances. En 2018, il n'y a pas eu de décret d'avance mais une loi de finances rectificative. L'ouverture systématique de crédits supplémentaires en cours d'année n'est pas souhaitable. Le Gouvernement voudrait que les personnes passent directement de l'hôtel à un logement pérenne, mais entretemps il faut un accompagnement social, notamment par les CHRS. Nous avons rejeté les crédits de cette mission de 2014 à 2016. En 2017, nous avions souligné l'effort de sincérité budgétaire. Cette année, il y a le plan logement d'abord et le plan pauvreté. L'année prochaine, nous ferons le point avec le Gouvernement sur l'application de ces mesures et pourrons l'alerter sur l'avancement des 10 000 places dans les maisons relais ou les 40 000 places d'intermédiation locative...

Madame Apourceau-Poly, si l'on veut intégrer les personnes, il faut un logement social à la fin. Réaliser 40 000 prêts locatifs aidés d'intégration (PLAI) prendra au moins deux ou trois ans pour les agréments, et les bailleurs sociaux bouclent difficilement leurs plans de financement en raison de multiples restrictions comme la réduction des APL et des dotations.

Madame Doineau, les départements demandent des solutions pour les mineurs non accompagnés. Sont-ils mineurs ou majeurs ? Le 115 nous a alertés que, dès lors qu'ils sont majeurs, ils ne sont plus prioritaires, à la différence des familles avec enfants. De même, un jeune en situation irrégulière ne devient plus prioritaire au bout d'un an à un an et demi d'hébergement. Il y a deux publics : un public traditionnel, et les étrangers, avec parfois des conflits.

Nous avons entendu le message de l'Unhaj : de nombreuses associations ont perdu les financements des collectivités pour l'accompagnement. La sortie du dispositif d'urgence suppose d'aider par un accompagnement social.

La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits du programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » de la mission « Cohésion des territoires ».

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
PAR LE RAPPORTEUR POUR AVIS

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• Samu social de Paris

Christine Laconde , directrice générale

• Fondation Abbé Pierre

Christophe Robert , délégué général

• Fédération des acteurs de la solidarité

Alexis Goursolas , responsable du service stratégie et analyse des politiques publiques

Victor d'Autume , chargé de mission

• Union nationale interfédérale des oeuvres et organismes privés sanitaires et sociaux (Uniopss)

Jérôme Voiturier , directeur général

Jeanne Dietrich , conseillère technique emploi/logement

• Croix-Rouge française

Malik Berkani , délégué national Lutte contre les exclusions

Sami Chayata , adjoint au délégué national

• Direction générale de la cohésion sociale (DGCS)

Cécile Tagliana , cheffe de service des politiques sociales et médico-sociales

Marie Nonorgue , cheffe du bureau budgets et performance

Delphine Aubert , adjointe au chef du bureau urgence sociale et hébergement

• Union nationale pour l'habitat des jeunes (Unhaj)

Nadine Dussert , directrice générale

Mélanie Bourgeois , déléguée à l'habitat

• Direction régionale et interdépartementale de l'hébergement et du logement (Drihl)

Isabelle Rougier , directrice

Marie-Françoise Lavieville , directrice adjointe

Clémentine Pesret , directrice adjointe

Christine Gauthier , responsable de la mission communication

LISTE DES DÉPLACEMENTS
DU RAPPORTEUR POUR AVIS

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Lundi 12 novembre 2018

• Direction départementale de la cohésion sociale et de la protection des populations du département des Deux-Sèvres

Wilfrid Pelissier , directeur départemental

Véronique Ducoulombier , cheffe de la mission inclusion sociale et solidarité

Lundi 19 novembre 2018

Rencontres d'organismes gestionnaires de centres d'hébergement
dans le département des Deux-Sèvres

• Centre communal d'action sociale de Bressuire

Joëlle Werderer , directrice

• Centre communal d'action sociale de Thouars

Catherine Joly , directrice

• Association « L'Escale La Colline »

Sébastien Volokove , directeur départemental

• Association « Un Toit en Gâtine »

Valérie Leloup , directrice

CONTRIBUTION ÉCRITE

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• Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale de la région Nouvelle Aquitaine

Patrick Bahegne , directeur régional

Béatrice Mottet , directrice adjointe


* 1 D'après les réponses aux questionnaires budgétaires de votre rapporteur.

* 2 Le montant de l'allocation simple d'aide à domicile est égal, à taux plein, à celui de l'allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA).

* 3 Loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové.

* 4 Financé par le programme 177 à hauteur de 1 million d'euros en 2017 et 0,7 million d'euros en 2018 et également en 2019.

* 5 Cette plateforme, gérée par un groupement d'intérêt public, est financée par le programme à hauteur de 0,41 million d'euros en 2017 et 0,28 million d'euros en 2018 et également en 2019.

* 6 Fondation Abbé Pierre, L'état du mal logement en France 2017.

* 7 Réponses aux questionnaires budgétaires, sur la base de l'enquête AHI 2017.

* 8 Réponses aux questionnaires budgétaires, sur la base de l'enquête nationale des coûts 2017.

* 9 Insee Première, n° 1700, juin 2018.

* 10 Projet annuel de performance pour 2019 de la mission « cohésion des territoires ».

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