INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Votre commission des lois s'est saisie pour avis des crédits affectés au programme « Développement des entreprises et régulations » , au sein de la mission « Économie », au titre de ses compétences en matière de droit des entreprises, de simplification de leur environnement juridique, de protection économique et de sécurité des consommateurs, de régulation des marchés et de mise en oeuvre du droit de la concurrence.

Relativement composite , avec un périmètre mouvant , le programme « Développement des entreprises et régulations » ne présente pas la même unité ni la même stabilité que la plupart des programmes budgétaires examinés pour avis par votre commission des lois.

Ce programme regroupe l'ensemble des crédits consacrés au soutien aux entreprises, auxquels il convient d'ajouter d'importantes dépenses fiscales, ainsi que les crédits destinés aux missions de protection des consommateurs et de régulation concurrentielle des marchés. Il relève du ministre de l'économie et des finances. Sa mise en oeuvre incombe, pour une très large part, à la direction générale des entreprises (DGE) et à la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), en administration centrale comme dans les services déconcentrés, ainsi qu'à l' Autorité de la concurrence .

Le programme devrait connaître en 2019 une diminution très forte de ses autorisations d'engagement et de ses crédits de paiement, dont l'ampleur a été diminuée par nos collègues députés en première lecture. Ainsi, alors que le projet de loi de finances prévoyait initialement une diminution de 13,16 % des autorisations d'engagement et de 7,80 % des crédits de paiement, celle-ci a été ramenée respectivement à 10,90 % et 6,35 % , avec un périmètre quasiment inchangé par rapport à 2018. Une telle évolution reste très lourde et affecte les effectifs comme les moyens d'action de la DGE et, dans une moindre mesure, de la DGCCRF. L'Autorité de la concurrence est, quant à elle, préservée.

Ainsi, le programme « Développement des entreprises et régulations » demeure fortement mis à contribution par l'effort budgétaire , et même bien davantage en 2019 que les années précédentes.

Votre rapporteur a examiné la situation des administrations concernées par le programme. Ainsi, la poursuite de la baisse des emplois au sein de la DGCCRF impose de revoir à terme le champ de ses missions et l'organisation des services déconcentrés en charge de la protection des consommateurs . Compte tenu des choix opérés par le Gouvernement en matière de réforme de l'organisation territoriale de l'État, la réorganisation attendue de ces services ne pourra se faire qu'au niveau départemental, alors qu'une régionalisation aurait été plus pertinente. S'agissant de l'Autorité de la concurrence, votre rapporteur a notamment étudié son activité consultative concernant certaines professions réglementées du droit , dans le prolongement des années précédentes.

En outre, votre rapporteur a poursuivi cette année encore son étude sur le thème des politiques d'accompagnement des entreprises dans les territoires et de la coordination des différents acteurs intervenant dans ces politiques .

Dans ce contexte budgétaire très contraint, l'année 2019 devrait voir une restructuration des services déconcentrés de la DGE , avec la suppression programmée de 70 % de leurs emplois. Une telle évolution tire les conséquences du manque de moyens de l'État et de la montée en puissance des régions dans le domaine du développement économique local. Votre rapporteur, qui appelait de ses voeux une telle réforme au nom de la rationalisation des acteurs chargés du soutien aux entreprises, ne peut que l'approuver.

L'année 2019 devrait également voir la concrétisation du partenariat « Team France Export » entre Business France et les chambres de commerce et d'industrie, associant également les régions. Chacun de ces deux réseaux est lui-même soumis à une baisse importante de ses crédits, incitant nécessairement à trouver des mutualisations.

L' articulation entre régions et chambres de commerce et d'industrie s'améliore, dans le cadre de la mise en oeuvre des nouveaux schémas régionaux de développement économique, d'innovation et d'internationalisation.

Ainsi, certes sous l'effet de la contrainte budgétaire, l'année 2019 verra globalement un renforcement de la coordination et de la mutualisation entre les différents acteurs du développement économique et une rationalisation du fait de la réforme des services déconcentrés . Certaines de ces perspectives, déjà perceptibles l'année dernière, avaient été présentées par votre rapporteur.

Dès lors, au vu de ces évolutions positives, sur la proposition de son rapporteur, votre commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits du programme « Développement des entreprises et régulations » inscrits au projet de loi de finances pour 2019.

I. LE PROGRAMME N° 134 « DÉVELOPPEMENT DES ENTREPRISES ET RÉGULATIONS » DANS LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2019

Avec les programmes n° 220 « Statistiques et études économiques » 2 ( * ) , n° 305 « Stratégie économique et fiscale » 3 ( * ) et n° 343 « Plan "France très haut débit" » 4 ( * ) , le programme n° 134 dénommé « Développement des entreprises et régulations » 5 ( * ) depuis 2018 est l'un des quatre programmes pérennes de la mission budgétaire « Économie » .

A. L'ÉVOLUTION DU PÉRIMÈTRE DU PROGRAMME « DÉVELOPPEMENT DES ENTREPRISES ET RÉGULATIONS » EN 2019

Après d' importantes modifications intervenues en 2017 , le périmètre du programme est resté relativement stable en 2018 et devrait le rester en 2019 . En revanche, il devrait connaître une importante refonte de son architecture en 2019 , avec la réduction du nombre de ses actions budgétaires , résultant du regroupement de plusieurs d'entre elles.

1. Une importante simplification de l'architecture du programme, avec la réduction de treize à huit du nombre des actions

L'architecture du programme fait l'objet d'une importante refonte dans le projet de loi de finances pour 2019 , après une stabilité dans le projet de loi de finances pour 2018, faisant suite à la sortie en 2017 de l'action n° 14 « Contrôle des marchés de l'énergie » 6 ( * ) et à la création en 2016 de l'action n° 22 « Économie sociale et solidaire » 7 ( * ) . Contrairement à d'autres, ce programme se caractérise, dans la durée, par une relative instabilité de son architecture et du périmètre des diverses politiques publiques qui en relèvent .

Le nombre des actions du programme est réduit de treize à huit , par le regroupement de plusieurs d'entre elles, en vue d'améliorer leur lisibilité selon les éléments fournis à votre rapporteur, et l'intitulé d'une action est modifié.

Les crédits affectés au programme n° 134 se répartissent dorénavant en huit actions dans le projet de loi de finances pour 2019 :

- fonctionnement de l'Agence nationale des fréquences et de l'Agence du numérique, soutien d'actions en faveur du développement numérique et des télécommunications et compensation du coût des missions de service public de La Poste (action n° 4 « Développement des postes, des télécommunications et du numérique ») 8 ( * ) ;

- fonctionnement de Business France, chargé de favoriser l'accueil des investissements internationaux et de soutenir le développement international des entreprises françaises, financement d'événements en lien avec ces missions, rémunération de Bpifrance Assurance Export 9 ( * ) , chargé de gérer les garanties à l'export pour le compte de l'État, et, à partir de 2019, soutien de Bpifrance Financement, chargé des interventions financières en faveur des petites et moyennes entreprises et des entreprises de taille intermédiaire et innovantes (action n° 7 « Développement international des entreprises et attractivité du territoire », absorbant l'action n° 20 « Financement des entreprises ») ;

- fonctionnement du conseil général de l'économie, de l'industrie, de l'énergie et des technologies (action n° 8 « Expertise, conseil et inspection ») ;

- fonctionnement de deux autorités administratives indépendantes : Autorité de régulation des communications électroniques et des postes et Autorité de la concurrence (actions n os 13 et 15 « Régulation des communications électroniques et des postes » et « Mise en oeuvre du droit de la concurrence ») ;

- crédits résiduels en faveur de l'économie sociale et solidaire (action n° 22 « Économie sociale et solidaire ») ;

- au sein d'une nouvelle action unique, fonctionnement de la direction générale des entreprises (DGE), chargée de la mise en oeuvre des dispositifs réglementaires et fiscaux destinés à améliorer l'environnement des entreprises et du soutien au développement et à la compétitivité des entreprises industrielles, soutien aux pôles de compétitivité et à l'Association française de normalisation (AFNOR), interventions financières en faveur des commerçants et artisans, notamment avec le fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce (FISAC), ainsi que des entreprises industrielles (incluant la « compensation carbone » bénéficiant aux entreprises électro-intensives 10 ( * ) ), contrôle métrologique et certains crédits de la politique en faveur du tourisme (action n° 23 « Industrie et services », regroupant les actions n os 2 « Commerce, artisanat et services », 3 « Actions en faveur des entreprises industrielles » et 21 « Développement du tourisme ») ;

- au sein d'une nouvelle action unique, fonctionnement de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), chargée du contrôle des règles de concurrence et de la protection et de la sécurité des consommateurs, et soutien aux organismes et associations oeuvrant dans le domaine de la consommation, en particulier l'Institut national de la consommation et le mouvement consumériste (action n° 24 « Régulation concurrentielle des marchés, protection économique et sécurité du consommateur », regroupant les actions n os 16 « Régulation concurrentielle des marchés », 17 « Protection économique du consommateur » et 18 « Sécurité du consommateur »).

Ainsi, la nouvelle action n° 23 « Industrie et services », fusionnant les actions n os 2, 3 et 21, regroupe la plupart des crédits de la direction générale des entreprises (DGE), qui est également responsable de l'action n° 4, tandis que la nouvelle action n° 24, fusionnant les actions n os 16, 17 et 18, regroupe désormais tous les crédits de la DGCCRF.

S'agissant de la DGCCRF, une telle rationalisation est bienvenue selon votre rapporteur, dès lors que les mêmes missions peuvent être menées, le plus souvent, par les mêmes agents ou les mêmes services en matière de protection du consommateur.

Par ailleurs, votre rapporteur estime que l'action n° 22, qui ne regroupe que des crédits résiduels en faveur de l'économie sociale et solidaire, pour un montant inférieur à 20 000 euros de crédits de paiement prévus en 2019, devrait être transférée vers un programme du ministère de la transition écologique et solidaire, aujourd'hui compétent pour ce secteur économique. L'essentiel de ces crédits lui a déjà été transféré en 2018, pour près de 5 millions d'euros.

Votre commission des lois, au titre du suivi de ses compétences dans les domaines du droit des affaires et du droit de la consommation, s'intéresse prioritairement aux trois actions suivantes, concernant les activités de la DGE, de la DGCCRF et de l'Autorité de la concurrence :

- action n° 15 « Mise en oeuvre du droit de la concurrence » ;

- action n° 23 « Industrie et services » ;

- action n° 24 « Régulation concurrentielle des marchés, protection économique et sécurité du consommateur ».

Par ailleurs, quatre opérateurs de l'État sont associés à ce programme, dont l'Institut national de la propriété industrielle (INPI) 11 ( * ) , qui intéresse votre commission plus particulièrement, compte tenu de ses missions de protection des droits de propriété industrielle, ainsi que Business France 12 ( * ) , en raison de sa collaboration avec les régions et les chambres de commerce et d'industrie en matière de soutien à l'internationalisation des entreprises.

2. Des changements très limités dans le périmètre du programme

Après des changements notables de périmètre en 2016 puis 2017, pour des montants importants, le programme n° 134 ne devrait pas connaître de changements significatifs de périmètre en 2019, comme en 2018.

Les principales modifications du périmètre sont les suivantes :

- transfert de crédits en provenance du programme « Coordination du travail gouvernemental » destinés au financement du contrôle par l'ARCEP des activités de l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (ANSSI), dans le cadre du renforcement de la politique de cybersécurité ;

- transfert de crédits à destination du programme « Coordination du travail gouvernemental » au titre de la contribution du ministère de l'économie et des finances au financement de la création de la délégation interministérielle aux jeux paralympiques de 2024 ;

- transfert de crédits à destination du programme « Moyens mutualisés des administrations déconcentrées » correspondant au financement de l'accès des directions départementales interministérielles (DDI) - au sein desquelles se trouvent des agents relevant du programme n° 134 - au réseau interministériel de l'État (RIE), qui est le réseau unifié de communications électroniques auquel sont raccordées l'ensemble des administrations de l'État.

Représentant des flux entrants ou sortants inférieurs à 600 000 euros de façon cumulée, ces changements de périmètre sont très minimes au regard du volume des crédits du programme , de l'ordre de 900 millions d'euros.

3. Des dépenses fiscales très importantes associées au programme

Outre les crédits budgétaires affectés au programme, y sont associées des dépenses fiscales particulièrement importantes. Après plusieurs années de progression dynamique, un tassement du montant estimé de ces dépenses est attendu en 2019. Ainsi, après 12,8 milliards d'euros en 2014, 19,2 milliards en 2015, 20,7 milliards en 2016, 24,7 milliards en 2017 et 28,5 milliards en 2018, le montant attendu en 2019 est estimé à 28,1 milliards d'euros . Il correspond à de nombreux avantages fiscaux, exonérations, réductions ou bien crédits de divers impôts et taxes d'État.

S'il sera supprimé pour les salaires versés à partir de 2019 et remplacé par une baisse des cotisations sociales patronales, le crédit d'impôt en faveur de la compétitivité et de l'emploi (CICE) devrait encore représenter près de 70 % du montant total estimé des dépenses fiscales associées au programme en 2019, avec un montant estimé à 19,6 milliards d'euros.

Une part importante des dépenses fiscales résulte aussi de l'application du taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée dans divers secteurs 13 ( * ) , pour un total en croissance constante année après année, estimé à 3,9 milliards d'euros en 2019, après 3,7 milliards en 2018, 3,6 en 2017 et 3,2 en 2016.

Peuvent également être mentionnés le tarif réduit de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) au profit des entreprises électro-intensives, pour plus d'un milliard d'euros, l'exonération partielle de droits de succession sur les transmissions d'entreprises ainsi que le dispositif exceptionnel du suramortissement, qui a pris fin le 14 avril 2017, mais produira des effets fiscaux jusqu'en 2022, et qui permet de déduire du résultat imposable des entreprises 40 % du prix de revient de certains biens.

La réforme de l'impôt de solidarité sur la fortune opérée en 2018 a conduit à la suppression de certaines dépenses fiscales, à commencer par la réduction d'impôt au titre des investissements réalisés au capital des petites et moyennes entreprises, estimée à 660 millions d'euros en 2017.

L'ensemble des dépenses fiscales associées au programme concerne au total 74 dispositifs, transversaux ou sectoriels , visant à soutenir les entreprises, avec des montants financiers extrêmement variables d'un dispositif à l'autre.


* 2 Crédits de l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE).

* 3 Crédits de la direction générale du Trésor, en large partie, des autorités de régulation financière et de la direction de la législation fiscale, ainsi que rémunération des missions d'intérêt général de la Banque de France (traitement du surendettement...).

* 4 Crédits destinés à contribuer au financement des réseaux déployés par les collectivités territoriales en vue de la couverture intégrale du territoire en très haut débit.

* 5 Le programme était auparavant intitulé « Développement des entreprises et du tourisme ».

* 6 Crédits attribués à la Commission de régulation de l'énergie (CRE), transférés vers le programme n° 217 « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables ».

* 7 Cette action ne regroupe aujourd'hui qu'une partie extrêmement faible des crédits destinés à soutenir ce secteur économique, dont la responsabilité ne relève plus du ministère de l'économie et des finances, mais du ministère de la transition écologique et solidaire, auquel la délégation à l'économie sociale et solidaire a été transférée en 2017, avec la création d'un poste de haut-commissaire à l'économie sociale et solidaire et à l'innovation sociale auprès du ministre de la transition écologique et solidaire. Ceci illustre l'instabilité du rattachement ministériel de la politique en faveur de l'économie sociale et solidaire.

* 8 Cette action s'intitulait jusqu'à présent « Développement des télécommunications, des postes et de la société de l'information ».

* 9 Bpifrance Assurance Export est un opérateur qui a été spécialement créé pour gérer les activités de garantie publique au commerce extérieur, dispositif jusque-là géré par Coface.

* 10 Elle devrait représenter plus de 100 millions d'euros en 2019, soit plus du tiers des crédits de l'action.

* 11 Les ressources de l'INPI proviennent uniquement de ses propres produits, essentiellement les redevances perçues sur les titres de propriété industrielle. Il ne perçoit aucune subvention.

* 12 Si l'essentiel de ses subventions provient du programme n° 134 « Développement des entreprises et régulations », Business France perçoit également des subventions en provenance du programme n° 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » de la mission « Cohésion des territoires » et du programme n° 149 « Compétitivité et durabilité de l'agriculture, de l'agroalimentaire, de la forêt, de la pêche et de l'aquaculture » de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales ». Ces subventions représentent environ la moitié de ses ressources.

* 13 Restauration, hôtellerie et campings.

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