N° 144

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2019-2020

Enregistré à la Présidence du Sénat le 21 novembre 2019

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable (1) sur le projet de loi de finances , adopté par l'Assemblée nationale, pour 2020 ,

TOME IV

COHÉSION DES TERRITOIRES

Par M. Louis-Jean de NICOLA•,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Hervé Maurey, président ; M. Claude Bérit-Débat, Mme Pascale Bories, MM. Patrick Chaize, Ronan Dantec, Alain Fouché, Guillaume Gontard, Didier Mandelli, Frédéric Marchand, Mme Nelly Tocqueville, M. Michel Vaspart, vice - présidents ; Mmes Nicole Bonnefoy, Marta de Cidrac, MM. Jean-François Longeot, Cyril Pellevat, secrétaires ; Mme Éliane Assassi, MM. Jérôme Bignon, Joël Bigot, Jean-Marc Boyer, Mme Françoise Cartron, MM. Guillaume Chevrollier, Jean-Pierre Corbisez, Michel Dagbert, Michel Dennemont, Mme Martine Filleul, MM. Hervé Gillé, Jordi Ginesta, Éric Gold, Mme Christine Herzog, MM. Jean-Michel Houllegatte, Benoît Huré, Olivier Jacquin, Mme Christine Lanfranchi Dorgal, MM. Olivier Léonhardt, Jean-Claude Luche, Pascal Martin, Pierre Médevielle, Louis-Jean de Nicolaÿ, Jean?Jacques Panunzi, Philippe Pemezec, Mme Évelyne Perrot, M. Rémy Pointereau, Mme Angèle Préville, MM. Jean-Paul Prince, Christophe Priou, Mmes Françoise Ramond, Esther Sittler, Nadia Sollogoub, Michèle Vullien.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : 2272 , 2291 , 2292 , 2298 , 2301 à 2306 , 2365 , 2368 et T.A. 348

Sénat : 139 et 140 à 146 (2019-2020)

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION

La commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, réunie le mercredi 27 novembre 2019, sous la présidence de M. Hervé Maurey, président, a examiné le rapport pour avis de M. Louis-Jean de Nicolaÿ sur les crédits relatifs à la cohésion des territoires du projet de loi de finances pour 2020 (programmes 112 « impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » et 162 « interventions territoriales de l'État » de la mission « cohésion des territoires » ainsi que le compte d'affectation spéciale « financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale » ).

Le budget pour 2020 est marqué par la mise en place de l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), à la suite de la promulgation de la loi n° 2019-753 du 22 juillet 2019 portant création de cette agence et de la publication du décret statutaire n° 2019-1190 du 18 novembre 2019, par la création de nouvelles actions territorialisées , ainsi que par la montée en puissance des moyens consacrés aux services publics de proximité, avec la labellisation de 460 structures « France Services » annoncée par le Premier ministre à l'issue du 4 e Comité interministériel de la transformation publique. Toutefois, plusieurs points de vigilance demeurent : il en va ainsi des crédits consacrés à la prime d'aménagement du territoire (PAT), qui connaissent une érosion significative depuis plusieurs années, et à l'avenir des zones de revitalisation rurale (ZRR). Compte tenu de ces éléments et suivant son rapporteur, la commission a donc émis un avis d'abstention de vote sur ces crédits pour 2020.

I. LES CRÉDITS DÉDIÉS À LA COHÉSION DES TERRITOIRES : LA CRÉATION DE L'ANCT, L'ÉROSION DE LA PRIME D'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE ET LE DÉVELOPPEMENT DES MAISONS « FRANCE SERVICES »

Les crédits consacrés à la politique transversale d'aménagement du territoire recouvrent 29 programmes , pour un montant total d'environ 8,5 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et crédits de paiement (CP).

Pour 2020, le montant total des fonds consacrés à la cohésion des territoires qui font l'objet du présent avis atteignent 252,5 millions d'euros en AE , contre 238 millions d'euros en 2019, et 281,7 millions d'euros en CP , contre 269 millions d'euros en 2019.

Ces crédits sont répartis entre d'une part, le programme 112 « impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » , qui comporte 209 millions d'euros d'AE, en hausse de 4,9 % par rapport à 2019, et 245 millions d'euros de CP, soit + 1,8 % par rapport à 2019 et, d'autre part, le programme 162 « interventions territoriales de l'État » , dont les crédits s'établissent à 43,5 millions d'euros en AE (+ 22,4 % par rapport à 2019) et 36,7 millions d'euros en CP (+ 43 %).

La différence constatée entre les PLF pour 2019 et 2020 résulte principalement de la création de deux nouvelles actions sur le programme 162 et de la mise en place d'un nouvel opérateur, l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) , sur le programme 112

En outre, la maquette du programme 112 est recentrée autour du Fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT) , outil transversal de financement de différents dispositifs (nouveaux pactes de développement territorial, contrats de convergence et de transformation, fonctionnement des maisons « France Services », restructuration des sites de défense, revitalisation des centres-bourgs, soutien aux associations), dont les volets territoriaux et numériques des contrats de plan État-région (CPER) pour les générations 2007-2014 et 2015-2020. La nette différence entre les CP et les AE témoigne d'une dynamique globale de décroissance même si la baisse d'environ 1,4 milliard d'euros qui atteint la mission « cohésion des territoires » à périmètre constant n'affecte pas ce programme et porte essentiellement sur l'aide à l'accès au logement du programme 109.

Toutefois, le programme 112 fait l'objet de plusieurs transferts sortants : transfert des contrats de ruralité sur le programme 119 de la mission « relations avec les collectivités territoriales » acté en 2018 et pour lesquels le programme 112 ne contient plus que des restes à payer (26,6 millions d'euros en CP pour 2020), transfert de la gouvernance des pôles de compétitivité (2 millions d'euros en AE et CP) vers le programme 134 de la mission « économie » ou encore transfert à destination du programme 162 pour la création d'une nouvelle action dédiée à la Guyane (0,7 million d'euros en AE et 0,3 million d'euros en CP).

Au-delà d'une augmentation des crédits affectés à l'accessibilité des services publics , plusieurs dispositifs non contractuels voient leurs crédits baisser soit du fait d' arbitrages budgétaires (réduction de 4 millions d'euros en AE portant sur la prime d'aménagement du territoire, réduction de 1 million d'euros portant sur la subvention versée à Business France) soit du fait de l'arrivée à terme de certains programmes (revitalisation des centres-bourgs, restructuration des zones de défense). Par ailleurs, le coût des 24 dépenses fiscales rattachées au programme devrait s'élever à 511 millions d'euros , dont une grande partie est imputable aux exonérations en faveur de la Corse et, dans une moindre mesure, aux exonérations en faveur de la création d'entreprises dans les zones de revitalisation rurale (ZRR).

En complément, le compte d'affectation spéciale (CAS) « financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale » est stable à 355 millions d'euros (AE et CP) après la baisse enregistrée entre 2017 et 2018.

Pour le budget 2020, le rapporteur constate une stabilisation du budget dédié à l'aménagement du territoire , de même que la priorité donnée au développement des services publics de proximité à travers l'initiative « France Services ». Il regrette toutefois le faible montant accordé à la prime d'aménagement du territoire (PAT) , qui confirme la stratégie d'érosion progressive mise en oeuvre depuis plusieurs années sur cet outil d'attractivité.

A. LA MISE EN PLACE DE L'AGENCE NATIONALE DE LA COHÉSION DES TERRITOIRES (ANCT)

Le budget pour 2020 tire les conséquences de la loi n° 2019-753 du 22 juillet 2019 portant création d'une Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT). Ce nouvel opérateur de la politique d'aménagement du territoire, qui comptera 331 équivalents temps plein travaillé (ETPT), est placé sous la tutelle des ministres chargés de l'aménagement du territoire, des collectivités territoriales et de la politique de la ville. À ce titre, la direction générale des collectivités locales (DGCL) accueillera 30 ETPT supplémentaires pour l'exercice de la tutelle. Une réorganisation interne est en cours et devrait aboutir à la création d'une nouvelle sous-direction.

La subvention pour charges de service public versée à l'ANCT par le programme 112 représente 49,7 millions d'euros pour 2020 (action n° 13). Elle résulte de l'agglomération des moyens des entités fusionnées dont environ 29 millions d'euros au titre de l'intégration du commissariat général à l'égalité des territoires (CGET), près de 2 millions d'euros au titre de l'intégration de l'Agence du numérique (Anum) et près de 6 millions d'euros correspondant à la contribution pour charges de service public de l'Établissement public national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux (Epareca). Par ailleurs, plusieurs transferts et regroupements de crédits sont à relever, en provenance du programme 147 « politique de la ville » (2,4 millions d'euros), du programme 156 « gestion fiscale et financière de l'État et du secteur public local » (0,15 million d'euros) pour la création d'une agence comptable dédiée et du programme 218 « conduite et pilotage des politiques économiques et financières » (0,157 million d'euros). Enfin, la subvention versée à l'ANCT comprend une nouvelle ligne de 10 millions d'euros consacrée au financement des dépenses de soutien à la conception technique et financière des projets des collectivités territoriales. Si le rapporteur se réjouit de l'ouverture de cette ligne budgétaire, il rappelle qu'elle est globalement compensée par les transferts sortants précités et l'arrivée à terme de certaines actions . Au total, les CP du programme augmentent de 5 millions d'euros pour 2020.

Les moyens d'intervention de l'ANCT devront nécessairement être complétés . À cet égard, les conventions que l'opérateur devra conclure avec des établissements publics de l'État intervenant sur des périmètres connexes et complémentaires (agence nationale de l'habitat, agence nationale pour la rénovation urbaine, agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement) seront déterminantes pour l'efficacité de l'agence. L'article R. 1233-4 du code général des collectivités territoriales, tirant les conséquences de l'article L. 1233-3 du même code relatif aux conventions pluriannuelles conclues par l'ANCT avec les opérateurs précités, apporte des précisions limitées sur le contenu de ces conventions. Le rapporteur rappelle la nécessité de conclure ces conventions au plus vite . La mise en place des comités locaux de cohésion territoriale mentionnés à l'article L. 1232-2 du même code est également essentielle pour permettre la bonne information des élus sur les projets accompagnés par l'agence et la cohérence de ses interventions.

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