N° 444

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2019-2020

Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 mai 2020

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi , adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à diverses dispositions liées à la crise sanitaire , à d' autres mesures urgentes ainsi qu'au retrait du Royaume - Uni de l' Union européenne ,

Par M. Albéric de MONTGOLFIER,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Vincent Éblé , président ; M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Emmanuel Capus, Yvon Collin, Bernard Delcros, Philippe Dominati, Charles Guené, Jean-François Husson, Mme Christine Lavarde, MM. Georges Patient, Claude Raynal , vice-présidents ; M. Thierry Carcenac, Mme Nathalie Goulet, MM. Alain Joyandet, Marc Laménie , secrétaires ; MM. Philippe Adnot, Julien Bargeton, Jérôme Bascher, Arnaud Bazin, Jean Bizet, Yannick Botrel, Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Philippe Dallier, Vincent Delahaye, Mme Frédérique Espagnac, MM. Rémi Féraud, Jean-Marc Gabouty, Jacques Genest, Alain Houpert, Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Bernard Lalande, Nuihau Laurey, Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Sébastien Meurant, Claude Nougein, Didier Rambaud, Jean-François Rapin, Jean-Claude Requier, Pascal Savoldelli, Mmes Sophie Taillé-Polian, Sylvie Vermeillet, M. Jean Pierre Vogel .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) :

2907 , 2915 et T.A. 420

Sénat :

440 (2019-2020)

L'ESSENTIEL

Réunie le 19 mai 2020, sous la présidence de M. Vincent Éblé , président, la commission des finances a examiné le rapport pour avis de M. Albéric de Montgolfier sur le projet de loi n° 440 , adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d'autres mesures urgentes, ainsi qu'au retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne .

Comportant initialement 4 articles, le projet de loi en compte désormais 31 . Plusieurs des articles insérés lors de l'examen à l'Assemblée nationale visent à « mettre en dur » dans le projet de loi des mesures que le Gouvernement envisageait initialement de prendre par voie d'ordonnances, en demandant des habilitations aux articles 1 er et 2.

La commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale a donné délégation au fond à la commission des finances pour examiner l'article 3. Cet article habilite le Gouvernement à prendre par ordonnances , dans un délai de 12 mois, les mesures relevant du domaine de la loi destinées à prescrire le dépôt sur le compte du Trésor des disponibilités des personnes morales soumises aux règles de la comptabilité publique et des organismes publics ou privés chargés d'une mission de service public .

Lors de ses travaux, la commission des finances a proposé à la commission des lois de supprimer l'article 3 , marquant ainsi son opposition à la méthode retenue par le Gouvernement, par l'introduction d'une habilitation au champ d'application particulièrement large et pouvant inclure un nombre conséquent d'organismes aux structures très variées.

Il ne s'agit donc pas d'une opposition de principe à la centralisation des trésoreries publiques, un processus qui présente des avantages indéniables en matière de gestion des deniers publics, en particulier en diminuant le volume des emprunts émis par l'État pour couvrir son besoin de financement, lequel est encore plus fort depuis le début de la crise liée à l'épidémie de covid-19.

Pour autant, le champ de l'habilitation est particulièrement large et le Gouvernement n'est pas en mesure de citer un organisme qui pourrait se voir contraint à centraliser sa trésorerie dans un délai proche. Le Parlement ne peut donc pleinement apprécier les avantages et les inconvénients de l'extension de cette obligation à d'autres entités. En conséquence, il n'est pas possible non plus de savoir dans quelle mesure une ordonnance devra effectivement être prise , puisque la centralisation de la trésorerie ne nécessite pas obligatoirement de recourir à une disposition législative.

Dès lors et dans la mesure où le Gouvernement ne semble pas encore avoir commencé les concertations indispensables avec les organismes concernés, il apparaît prématuré d'intégrer ce dispositif dans le présent projet de loi .

Au-delà de l'article 3, le projet de loi compte quelques dispositions qui , sans appeler d'opposition de principe, de propositions de modifications ou encore de remarques spécifiques de la part de votre commission des finances, sont susceptibles d'entrer dans son champ de compétences .

Ainsi en est-il en particulier de l'article 2 ter , adopté par l'Assemblée nationale en première lecture, qui vise à préciser l'interprétation de l'article 232 de la loi du 28 décembre 2018 de finances pour 2019, afin d' harmoniser le traitement des demandes d'indemnisation des victimes des essais nucléaires français . Cet article, qui se substitue à une habilitation initialement prévue à l'article 2, reprend une disposition adoptée par le Sénat en mars 2020, sur amendement du Gouvernement, lors de l'examen en première lecture du projet de loi d'accélération et de simplification de l'action publique, tirant les conséquences de deux décisions (n° 429574 et 432578) rendues le 27 janvier 2020 par le Conseil d'État. Celui-ci a, en effet, jugé que, en l'absence de dispositions transitoires prévues à l'article 232 de la loi de finances pour 2019, certaines de ses dispositions n'étaient applicables qu'aux demandes déposées après la date d'entrée en vigueur de ladite loi, soit à partir du 31 décembre 2018, ce qui n'était pas l'intention du Législateur. L'article 2 ter corrige ainsi cet écueil en permettant explicitement une application rétroactive des dispositions prévues par la loi de finances pour 2019 et relatives aux critères de présomption de causalité entre essais nucléaires et maladies développées par les demandeurs, permettant ainsi leur application à l'ensemble des demandes d'indemnisation, quelle que soit la date du dépôt de ces demandes.

L'article 4 du présent projet de loi prévoit une habilitation du Gouvernement à légiférer par voie d'ordonnances, pour une durée maximale de quinze mois (trente mois dans la version initiale du projet de loi), pour prendre les mesures législatives requises dans l'éventualité où aucun accord ne serait conclu entre l'Union européenne et le Royaume-Uni sur les termes de leurs relations futures, avant la fin de la période de transition.

Dans le périmètre de l'habilitation sollicitée, plusieurs dispositions portent plus spécifiquement sur des questions économiques et financières, afin :

- de sécuriser les conditions d'exécution des contrats d'assurance conclus par des ressortissants français auprès d'entités britanniques présentes en France avant qu'elles perdent leur agrément pour opérer au sein du marché unique, en assurant la continuité des pouvoirs de supervision de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), ce qui permettra de garantir que les organismes d'assurance britanniques respectent leurs obligations contractuelles ( 3° du I de l'article 4) ;

- d' introduire des règles adaptées pour la gestion de placements collectifs et pour les plans d'épargne en actions dont l'actif ou l'emploi respecte des ratios ou des règles d'investissement dans des entités européennes, caractéristique que perdraient automatiquement les entités britanniques. Dès lors, il serait nécessaire, pour ne pas bouleverser l'équilibre des conditions d'investissement, de maintenir l'éligibilité de ces entités pendant une période complémentaire ( 4° du I de l'article 4) ;

Pour mémoire, l'accord de retrait prévoit une période de transition jusqu'au 31 décembre 2020, pendant laquelle le droit de l'Union européenne est applicable au Royaume-Uni et sur son territoire. Les négociations sur les termes de la relation future se sont engagées à la fin du premier trimestre 2020 et se poursuivent dans le cadre du comité mixte, composé de représentants de l'Union européenne et du Royaume-Uni. À ce stade, il existe effectivement un risque qu'aucun accord ne soit trouvé d'ici la fin de la période de transition, tandis qu'une décision de prolongation de cette dernière devrait être adoptée par le comité mixte avant le 1 er juillet.

L'article 4 reprend ainsi le modèle de la loi du 19 janvier 2019 habilitant le Gouvernement à prendre par ordonnances les mesures de préparation au retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne afin d'anticiper une éventuelle sortie non négociée.

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