N° 142

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2020-2021

Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 novembre 2020

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable (1) sur le projet de loi de finances , adopté par l'Assemblée nationale, pour 2021 ,

TOME IV

DÉVELOPPEMENT DURABLE : TRANSITION ÉNERGÉTIQUE, CLIMAT ET RECHERCHE

Par MM. François CALVET et Frédéric MARCHAND,

Sénateurs

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-François Longeot, président ; M. Didier Mandelli, Mmes Nicole Bonnefoy, Marta de Cidrac, MM. Joël Bigot, Rémy Pointereau, Frédéric Marchand, Guillaume Chevrollier, Mme Marie-Claude Varaillas, MM. Jean-Pierre Corbisez, Pierre Médevielle, Ronan Dantec, vice-présidents ; M. Cyril Pellevat, Mme Angèle Préville, MM. Pascal Martin, Bruno Belin, secrétaires ; MM. Jean-Claude Anglars, Jean Bacci, Mme Nadine Bellurot, MM. Étienne Blanc, François Calvet, Michel Dagbert, Mme Patricia Demas, MM. Stéphane Demilly, Michel Dennemont, Gilbert-Luc Devinaz, Mme Nassimah Dindar, MM. Gilbert Favreau, Jacques Fernique, Mme Martine Filleul, MM. Hervé Gillé, Éric Gold, Daniel Gueret, Mmes Nadège Havet, Christine Herzog, MM. Jean-Michel Houllegatte, Olivier Jacquin, Gérard Lahellec, Mme Laurence Muller-Bronn, MM. Louis-Jean de Nicolaÿ, Philippe Pemezec, Mmes Évelyne Perrot, Marie-Laure Phinera-Horth, Kristina Pluchet, MM. Jean-Paul Prince, Bruno Rojouan, Mme Denise Saint-Pé, MM. Philippe Tabarot, Pierre-Jean Verzelen.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : 3360 , 3398 , 3399 , 3400 , 3403 , 3404 , 3459 , 3465 , 3488 et T.A. 500

Sénat : 137 et 138 à 144 (2020-2021)

CHAPITRE IER
LES CRÉDITS CONSACRÉS À LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE ET AU CLIMAT

La commission a émis plusieurs réserves :

- malgré des objectifs ambitieux, la France est toujours en retard sur sa trajectoire de développement des énergies renouvelables . Dans ce contexte, la mise en oeuvre d'un dispositif de révision de certains contrats photovoltaïques est particulièrement malvenue, d'autant plus qu'elle conduirait à une remise en cause de la parole de l'État ;

- la mise en oeuvre du plan hydrogène , dont l'ambition doit être saluée, suppose de relever plusieurs défis d'ordres technique et économique ;

- il est essentiel que l'État, confronté à une multiplication des contentieux européens et nationaux, prenne rapidement de nouvelles mesures pour permettre de réduire la pollution de l'air dans les agglomérations qui connaissent des dépassements chroniques des normes de qualité de l'air.

Malgré ces réserves, la commission a, sur proposition de son rapporteur, émis un avis favorable à l'adoption des crédits relatifs à la transition énergétique et au climat, sous réserve de l'adoption de ses amendements.

La commission a adopté 3 amendements du rapporteur visant à :

- Supprimer le dispositif consistant à réviser certains contrats photovoltaïques , qui serait de nature à discréditer la parole de l'État sur son soutien au développement des énergies renouvelables (amendement n° II-553 ) ;

- Sécuriser les ressources des associations agréées de surveillance de la qualité de l'air (AASQA) , en augmentant le plafond des contributions que les entreprises peuvent leurs verser en déduction des montants de taxe générale sur les activités polluantes dont elles sont redevables (amendement n° I-449 ) ;

- Accroître les effectifs du Haut Conseil pour le Climat (HCC) afin de lui permettre de jouer pleinement son rôle d'expertise auprès du Gouvernement et du Parlement (amendement n° II-554 ).

I. LE DÉVELOPPEMENT DES ÉNERGIES RENOUVELABLES : DES OBJECTIFS QUI PEINENT ENCORE À SE CONCRÉTISER

A. LE DÉVELOPPEMENT DES ÉNERGIES RENOUVELABLES : DES OBJECTIFS AMBITIEUX, DES RÉSULTATS INSUFFISANTS

Malgré des objectifs ambitieux, la France reste en retard en matière de développement des énergies renouvelables . Alors que la directive 2009/28/CE 1 ( * ) fixait pour la France un objectif de 23 % d'énergie produite à partir de sources renouvelables dans la consommation finale brute d'énergie à horizon 2020 , la trajectoire réalisée n'est, pour l'heure, pas à la hauteur de l'objectif : cette part atteint en 2019 , seulement 17,2 %, comme l'illustre le schéma ci-dessous :

Source : Les chiffres clés de l'énergie, édition 2020

D'après la Direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) : « il est en effet probable que la France soit, fin 2020, en dessous de l'objectif fixé par la directive, avec une part d'énergies renouvelables dans la consommation finale brute inférieure à 20 % ».

Au sein de l'Union européenne, la France est un des pays les plus en retard dans l'atteinte de ses objectifs pour 2020 (voir graphique ci-dessous).

Source : Eurostat.

Alors que la cible fixée pour 2020 semble difficilement tenable, la France poursuit désormais un nouvel objectif visant à porter à 33 % la part des énergies renouvelables dans la consommation énergétique finale en 2030 .

La programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), adoptée par décret 2 ( * ) en avril 2020, décline ces objectifs en priorités d'action de la politique énergétique pour les dix prochaines années.

Objectifs de la programmation pluriannuelle de l'énergie
en matière d'énergies renouvelables

- doubler la capacité installée des énergies renouvelables électriques en 2028 par rapport à 2017 avec une capacité installée de 101 à 113 GW en 2028 et 36 % de renouvelable dans la production d'électricité en 2028 (fourchette haute). Les capacités installées seront augmentées de 50 % d'ici 2023 ;

- augmenter de 40 à 60 % la production de chaleur renouvelable par rapport à 2016, avec une production entre 218 et 247 TWh en 2028, soit entre 34 % et 38 % de la consommation totale de chaleur ;

- porter le volume de biogaz injecté à 14 à 22 TWh en 2028, contre 0,4 TWh en 2017. Le biogaz (injecté ou utilisé directement) représentera une part de 6 à 8 % de la consommation de gaz en 2028 ;

- porter la part de biocarburants dans les carburants liquides à 348 TWh en 2028 en stabilisant les biocarburants de première génération à 7 % d'incorporation et en multipliant par 12 la part des biocarburants avancés pour l'essence et par 9 pour le diesel par rapport à 2017 ;

- atteindre une quantité de chaleur et de froid renouvelables et de récupération livrés par les réseaux entre 32,4 et 38,7 TWh en 2028, soit une hausse de 50 % à 100 % du rythme de développement actuel de la chaleur et du froid renouvelables et de récupération livrés par réseaux.

Source : DGEC

L'enjeu est notamment d'accroître la part des énergies renouvelables dans des secteurs particulièrement émetteurs en France : elles ne représentent aujourd'hui que 9 % de l'énergie utilisée dans les transports et 21,8 % de la consommation de chaleur.

Les objectifs fixés par la PPE semblent particulièrement ambitieux en ce qui concerne le développement de parcs éoliens en mer (flottant ou posé), alors même que les premiers parcs (de Saint-Nazaire et de Fécamp) devraient être mis en service à horizon 2022-2023, soit environ 10 ans après les premiers appels d'offres. La PPE prévoit ainsi l'attribution d'un gigawatt par an entre 2024 et 2028.

Interrogée sur ce sujet par le rapporteur sur la question de la planification des futures zones d'installation des parcs , la ministre de la mer a indiqué que : « Les zones à définir doivent être valables jusqu'en 2050. C'est ma responsabilité d'identifier avec l'ensemble des usagers les zones où l'on pourra développer ces énergies renouvelables ».

Dans la réponse au questionnaire adressé par la commission, la direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) a affirmé « [ préparer] activement le lancement d'un nouvel appel d'offre en Normandie » , pour lequel le débat public s'est achevé en août. Par ailleurs, « la DGEC prépare les débats publics préalables aux futurs appels d'offre prévus par la PPE. Le débat public en Bretagne a démarré en juillet pour un parc de 250 MW d'éolien flottant, et sa future extension de 500 MW. Il devrait se terminer en décembre. La commission nationale du débat public a décidé de la tenue d'un débat pour la Méditerranée pour deux parcs de 250 MW et leurs futures extensions de 500 MW. Il devrait débuter début 2021 ».


* 1 Directive 2009/28/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 relative à la promotion de l'utilisation de l'énergie produite à partir de sources renouvelables et modifiant puis abrogeant les directives 2001/77/CE et 2003/30/CE.

* 2 Décret n° 2020-456 du 21 avril 2020 relatif à la programmation pluriannuelle de l'énergie.

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