B. UNE IRRESPONSABILITÉ PRONONCÉE PAR LA JUSTICE

1. Un recours important à l'expertise

L'expertise peut être légalement obligatoire ou seulement possible selon les cas, à différentes étapes présentencielles : garde à vue, instruction ou jugement . Cette demande d'expertise peut émaner des magistrats mais aussi des parties ou du ministère public.

L'expertise post-sentencielle est sollicitée par la juridiction chargée du suivi et de l'application des peines et peut également être obligatoire, notamment dans le cas d'aménagement de peine d'une personne condamnée à un suivi socio-judiciaire.

La mission des experts psychiatres et psychologues, auxiliaires de la justice pénale, consiste, en matière présentencielle, à éclairer le magistrat sur le discernement du commettant au moment de l'acte et, en matière post-sentencielle, à évaluer la dangerosité du détenu arrivé au terme de l'exécution de sa peine ou sollicitant un aménagement de cette dernière.

Le nombre d'expertises réalisées chaque année, sans distinguer l'étape à laquelle celles-ci sont menées, augmente de manière continue.

La demande croissante d'expertise a cependant été concomitante d'une baisse sensible du nombre d'experts inscrits sur les listes des cours d'appel, ce qui nourrit des inquiétudes sur la capacité, sur les plans qualitatif et quantitatif, des experts à mener à bien les missions qui leur seront demandées

2. Une irresponsabilité prononcée dans un nombre limité de cas chaque année

Si les magistrats peuvent recourir à l'expertise pour éclairer des faits, ils ne sont pas tenus par les conclusions des experts 1 ( * ) . Suivant le principe de l'article 427 du code de procédure pénale, c'est bien le juge qui décide.

D'un point de vue statistique, les cas de déclarations d'un classement au motif d'une irresponsabilité pénale représentent une part marginale des affaires jugées. En valeur absolue, ce chiffre n'est pour autant pas négligeable, avec, en 2018, 13 495 classements .

C. LA DIFFICILE PRISE EN COMPTE DES VICTIMES DANS LES CAS D'IRRESPONSABILITÉ

Les travaux du rapporteur, tant dans la mission d'information menée en 2020 que lors des auditions de préparation de l'examen de ces propositions de loi, ont mis en évidence l'incompréhension et la souffrance que peuvent générer pour les victimes et leurs proches la déclaration d'irresponsabilité pénale .

En effet, lorsqu'une personne accusée est reconnue irresponsable pénalement, les poursuites cessent et aucun procès n'est tenu. L'aspect potentiellement « réparateur » que peut porter un procès n'est donc pas possible dans ce cas pour les victimes ou leurs proches.

La réforme de 2008 2 ( * ) a ouvert une nouvelle possibilité dans le cas de la déclaration d'irresponsabilité pénale. La loi a ainsi permis que, dans certains cas, la chambre de l'instruction statue au cours d'une audience publique et contradictoire sur l'applicabilité de l'article 122-1 . En outre, cette réforme permet à la justice de préciser qu'il existe des charges suffisantes d'avoir commis les faits à l'encontre de la personne déclarée irresponsable : il s'agit d'une reconnaissance matérielle des faits commis, en l'absence de condamnation pénale possible . Enfin, des mesures de sûreté peuvent être décidées.


* 1 Jurisprudence constante de la chambre criminelle de la Cour de cassation (11 mars 1958, n° 78-92.860).

* 2 Loi n° 2008-174 du 25 février 2008 relative à la rétention de sûreté et à la déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental.

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