II. LA POSITION DE LA COMMISSION : UN OBJECTIF LÉGITIME, DES MODIFICATIONS PERMETTANT DE SÉCURISER LE DISPOSITIF ET SA MISE EN oeUVRE
A. UN OBJECTIF LÉGITIME ET COMPATIBLE AVEC LE PRINCIPE DE SOLIDARITÉ NATIONALE
La commission a approuvé l'objet de ce texte, qui vise à aménager un délai de carence pour le bénéfice de certaines prestations sociales qui n'ont pas un caractère contributif6(*).
En effet, quand bien même la branche famille de la Sécurité sociale est financée en partie par des cotisations sociales, les prestations qui sont l'objet de la proposition de loi sont non-contributives, c'est-à-dire que leur versement n'est pas la contrepartie - ni dans son principe ni dans son montant - des cotisations effectivement versées, et relèvent ainsi d'une logique de solidarité nationale.
Elle a estimé légitime qu'un certain délai soit imposé aux étrangers qui n'exercent pas d'activité professionnelle, et ainsi ne contribuent pas au système de protection sociale, pour bénéficier pleinement de la solidarité nationale.
B. DES AMÉNAGEMENTS POUR PRENDRE EN COMPTE LE RISQUE CONSTITUTIONNEL ET CONVENTIONNEL ET PERMETTRE LA MISE EN oeUVRE EFFECTIVE
a) un champ d'application à préciser pour tenir compte du risque constitutionnel et conventionnel
S'agissant des droits et prestations en cause, le rapporteur a relevé que l'inclusion du Dalo, qui n'a pas le caractère d'une prestation sociale, soulevait de délicates questions de conformité à la Constitution. En effet, ce droit, qui peut être rattaché à l'objectif de valeur constitutionnelle tiré de la possibilité pour toute personne de disposer d'un logement décent (Conseil constitutionnel., n° 94-359 DC du 19 janvier 1995), constitue également une voie de recours, amiable et juridictionnelle, dont la privation pourrait être regardée comme de nature à porter une atteinte excessive aux exigences constitutionnelles en cause. Par conséquent, la commission a adopté un amendement modifiant l'article 1er afin de retirer le Dalo du champ d'application de la proposition de loi.
S'agissant des personnes concernées, la commission a approuvé le principe d'une exemption fondée sur l'exercice d'une activité professionnelle. Elle a néanmoins relevé que le critère de l'affiliation au titre d'une activité professionnelle, outre qu'il est difficile à mettre en oeuvre, doit se concilier avec les textes européens qui consacrent l'égalité de traitement, en matière de prestations sociales, des ressortissants d'États tiers à l'Union européenne qui bénéficient d'un titre de séjour les autorisant à travailler, en ne ménageant qu'un nombre limité d'exceptions7(*).
Sur la proposition de son rapporteur, la commission a adopté un amendement substituant au critère de l'« affiliation au titre d'une activité professionnelle » celui de la détention d'un titre de séjour autorisant à travailler, critère qui est déjà celui prévu pour le RSA et l'ASPA (cf. supra).
Elle a également adopté un amendement visant à exclure de l'application de la condition de deux ans les ressortissants étrangers bénéficiaires de la protection temporaire.
b) un report de l'entrée en vigueur qui s'impose pour une mise en oeuvre effective
Les organismes gestionnaires, les représentants des conseils départementaux et des administrations entendus ont souligné que la mise en oeuvre de cette nouvelle condition exigerait des modifications des procédures et surtout des systèmes d'information correspondants.
Une application immédiate, à la date de la promulgation de la loi, paraissant inenvisageable, la commission a adopté un amendement reportant son entrée en vigueur à une date fixée par décret et au plus tard le 1er juillet 2026.
* 6 Une prestation est contributive si elle est versée en contrepartie de cotisations.
* 7 Article 12 de la directive 2011/98/UE du 13 décembre 2011, dite « permis unique ».