II. UNE PRÉVISION DE RECETTES SURESTIMÉE DE 4,2 MILLIARDS D'EUROS

A. UN RALENTISSEMENT DE LA HAUSSE DES RECETTES EN RAISON DE LA BAISSE DE L'INFLATION

1. Malgré des recettes en hausse...

Les recettes de la sécurité sociale reposent essentiellement sur les cotisations sociales, représentant 48,5 % des recettes en 2024, pour un montant de 304 milliards d'euros, sur la Contribution sociale généralisée (CSG), soit 20,4 % des recettes et 128 milliards d'euros, et sur les taxes et impôts, pour15,5 % des recettes et 98 milliards d'euros.

Ventilation des recettes de la sécurité sociale

(milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après la commission des comptes de la Sécurité sociale

En 2024, les produits nets des régimes de base et du FSV ont augmenté de 4,6 %, contre 4,8 % en 2023. Cette hausse représente 27,85 milliards d'euros, dont 13,2 milliards d'euros liés à la progression des recettes de cotisations sociales, 7,5 milliards d'euros à la hausse des recettes de la CSG et 2,5 milliards d'euros aux impôts et taxes. Elle a ralenti en 2024 par rapport à 2023. Hors mesures nouvelles, elle serait même de 3,8 %, contre 4,3 % en 2023. En effet, l'inflation a significativement ralenti entre 2023 et 2024, diminuant de fait les recettes de cotisations sociales, de CSG et d'impositions assises sur les revenus et la consommation.

Décomposition de la hausse des recettes entre 2023 et 2024

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après la commission des comptes de la Sécurité sociale

Par ailleurs, l'article L. 131-7 du code de la sécurité sociale prévoit que l'État attribue des recettes fiscales ou des crédits à la sécurité sociale afin de compenser toute mesure de réduction, d'exonération ou d'abattement d'assiette et cotisations ou de contributions, ainsi que toute mesure de transferts de charge.

En 2024, ces compensations atteignent 71,7 milliards d'euros, soit une baisse de 1 % par rapport à 2023, dont 64,9 milliards d'euros sont compensés via une affectation de recettes pour solde de tout compte et 6,8 milliards d'euros par des crédits inscrits dans des missions pérennes du budget de l'État.

2. ... elles sont moins importantes qu'espéré, suscitant un doute quant à la fiabilité des prévisions gouvernementales

Les recettes pour 2024 sont inférieures de 0,6 %, représentant 4,2 milliards d'euros, par rapport à la prévision de la LFSS pour 2024. Selon la Cour des comptes, la prévision de croissance de 1,4 % en LFSS pour 2024 a été trop optimiste et était très peu réaliste. Le Haut conseil des finances publiques16(*) l'avait d'ailleurs estimée très élevée.

Le gouvernement avait ainsi prévu une progression de la masse salariale du secteur privé soumise à cotisations à 3,3 % (pour une réalisation à 3,7 %).

En particulier, l'anticipation des recettes fiscales a été particulièrement peu fiable, puisqu'elles ont été surestimées de 2,9 milliards d'euros. La TVA a rapporté 2,2 milliards d'euros de moins que prévu, notamment parce que la croissance en 2024 a été tirée davantage par les importations et par la consommation de l'État que par la demande intérieure.

Les recettes des taxes sur les tabacs ont été inférieures de 0,5 milliard d'euros par rapport à 2023, pour un montant total de 13,1 milliards d'euros. Une telle diminution pourrait être liée à un effet de la hausse des prix sur la consommation.

Cet errement dans les prévisions de recettes est particulièrement dommageable et jette un véritable doute quant à la sincérité des prévisions macroéconomiques contenues dans les lois de financement de la sécurité sociale. Un tel constat a été effectué également par la commission des finances du Sénat17(*) concernant les recettes de l'État pour 2023 et pour 2024. Le rapporteur spécial salue tout de même la rectification apportée en PLFSS pour 2025 à la prévision de recettes et de solde de la sécurité sociale pour 2024.

3. Un ralentissement de la hausse des recettes encore plus marquée en 2025

Les recettes de la sécurité sociale augmenteraient en 2025 de 2,6 %, soit 2 points de moins qu'en 2024. Les cotisations sociales en particulier seraient en hausse de 3,6 % seulement, contre 4,3 % l'année d'avant. De même, les impôts et taxes augmenteraient de 1,8 % seulement, contre 2,6 % en 2024. Les recettes de CSG s'établiraient à 50,7 milliards d'euros, en hausse de 1,8 % par rapport à 2024.

Par ailleurs, la Cour des comptes relève que la prévision d'inflation, à 1,4 %, demeure un peu optimiste, tout comme la prévision de masse salariale des branches marchandes non agricoles, soit la majeure partie des recettes de sécurité sociale.

Les recettes réalisées auront globalement été supérieures à l'inflation jusqu'à présent : elles ont augmenté de 15,6 % entre 2021 et 2024, alors que l'inflation aura été de 14,5 %.

Évolution des recettes de la sécurité sociale entre 2021 et 2025

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après la Commission des comptes de la sécurité sociale


* 16 Avis n° HCFP-2023-8 relatif aux projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour l'année 2024, septembre 2023.

* 17  Rapport d'information fait au nom de la commission des finances par la mission d'information sur la dégradation des finances publiques depuis 2023, son suivi par l'administration et le Gouvernement et les modalités d'information du Parlement sur la situation économique, budgétaire et financière de la France, par M. Jean-François HUSSON, le 12 juin 2024.

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