EXAMEN EN COMMISSION
MERCREDI 19 NOVEMBRE 2025
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M. Laurent Lafon, président. - Nous examinons à présent les crédits relatifs à la jeunesse et à la vie associative.
M. Yan Chantrel, rapporteur pour avis sur les crédits relatifs à la jeunesse et à la vie associative. - Le programme 163 ne dispose plus que de 600,6 millions d'euros dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2026, soit une baisse conséquente de 221,5 millions d'euros par rapport à l'année précédente. C'est plus d'un quart des crédits votés en 2025 qui a disparu, alors que les besoins ne cessent de croître.
Cette baisse ne s'explique que partiellement par la suppression du service national universel, puisque seuls 65,9 millions d'euros y ont été consacrés en 2025. Si je me réjouis de la mise à l'arrêt de ce dispositif contesté, je regrette que ces crédits n'aient pas été, au moins en partie, reventilés entre les autres actions du programme pour 2026. Au contraire, le Gouvernement a fait le choix assumé de resserrer encore l'étau budgétaire autour des politiques publiques destinées à la jeunesse.
Le budget consacré au développement du service civique accuse ainsi une baisse de près de 20 %. Une telle contraction impose de ramener la cible annuelle à 110 000 volontaires en 2026, soit 25 000 jeunes de moins qu'en 2025 - une année déjà marquée par une révision à la baisse de l'objectif initial de 150 000 volontaires - et 40 000 de moins qu'en 2023 et 2024.
Cet affaiblissement du dispositif est d'autant plus regrettable qu'il risque de frapper d'abord les publics les plus éloignés. Le service civique demeure en effet plébiscité : l'Agence du service civique (ASC) enregistre trois fois plus de candidatures que de missions disponibles. Réduire encore le nombre de missions reviendrait à accroître mécaniquement la sélectivité au détriment des jeunes les moins diplômés. Les premiers chiffres le confirment déjà : en 2025, la part des volontaires titulaires d'un diplôme du supérieur atteint 34 %, contre 31 % en 2024.
Au-delà des jeunes eux-mêmes, la baisse des crédits fait peser une double menace : d'une part, un affaiblissement profond du tissu associatif, qui dépend largement de l'engagement des volontaires - à titre d'exemple, l'association Unis-Cité a déjà engagé un plan de sauvegarde de l'emploi d'une ampleur inédite en 2025 - ; d'autre part, une dégradation tangible du service rendu aux usagers dans plusieurs services publics. Les annulations de crédits de 2025 ont ainsi privé le ministère de l'Éducation nationale de plus de la moitié de ses volontaires.
Je regrette ce coup d'arrêt infligé à un dispositif d'engagement, de citoyenneté et de mixité sociale reconnu, qui a largement fait ses preuves.
Le soutien au mentorat diminue également : la dotation prévue pour 2026 s'élève à 24,5 millions d'euros, soit 4,5 millions d'euros de moins qu'en 2025. Pourtant, le plan « 1 jeune, 1 mentor » est en plein développement. Le nombre de jeunes accompagnés est passé de 72 000 en 2021 à 112 000 en 2022, puis à plus de 135 000 pour les années 2023 et 2024. En 2025, le plan a poursuivi sa montée en puissance avec l'ouverture d'un nouvel appel à projets permettant à 67 nouvelles associations de rejoindre la dynamique.
Ce coup de rabot brutal va indéniablement fragiliser le développement du dispositif. Cet affaiblissement est d'autant plus regrettable que le mentorat s'adresse très majoritairement à un public en situation de fragilité, issu de milieux moins favorisés ou, confronté à des difficultés d'insertion. Ainsi, le nombre de jeunes issus de lycées professionnels a progressé de 47 % par rapport à 2023, tandis que le nombre de jeunes accompagnés par l'aide sociale à l'enfance a augmenté de 39 % sur la même période. Les premiers résultats sont donc très prometteurs.
Un rapport de l'Institut national de la jeunesse et de l'éducation populaire (Injep), publié en juin dernier, souligne l'impact positif du mentorat ressenti par les jeunes les plus fragiles, l'effet particulièrement fort chez les collégiens et lycéens issus de milieux modestes, et le rôle structurant que peuvent jouer les mentors dans les moments clés du parcours des jeunes.
La diminution inattendue des crédits consacrés au plan dans le PLF 2026 interroge. Cette coupe budgétaire apparaît d'autant plus malvenue que près d'un jeune actif de 15 à 24 ans sur cinq est au chômage et risque le décrochage. Dans ce contexte, le mentorat, qui cible spécifiquement les publics les plus fragiles, a plus que jamais un rôle à jouer. Il doit être soutenu et doit poursuivre sa montée en puissance.
J'aimerais également évoquer avec vous la situation des colonies de vacances. La mise en place des « colos apprenantes » à partir de l'été 2020 avait significativement contribué à atténuer la baisse historique d'activité des accueils collectifs de mineurs avec hébergement. En effet, plus de 400 000 mineurs sont partis en « colos apprenantes » depuis leur création. Or ce dispositif, qui avait pourtant été pérennisé l'année dernière, est brutalement supprimé au sein du PLF 2026. Cette suppression est d'autant plus paradoxale que le secteur n'a toujours pas retrouvé son niveau d'avant-crise. De fait, 1,34 million de mineurs sont partis en colonie de vacances en 2023-2024, soit quasiment 100 000 de moins qu'avant la pandémie, en 2018-2019.
Alors que 57 % des familles qui ne partent pas en vacances évoquent le coût comme principal frein au départ, la suppression sèche de ce dispositif risque de fragiliser encore davantage le secteur à très court terme.
Certes, le « Pass colo » est, lui, préservé. Toutefois, le dispositif est encore méconnu et ne concerne que les familles ayant un enfant de 11 ans et dont le quotient familial est compris entre 0 et 1 500 euros. Il doit permettre à 32 000 enfants de partir en 2026, un nombre bien en deçà des 88 000 mineurs ayant bénéficié des « colos apprenantes » l'année dernière.
En 2024, 38 % des 5-19 ans ne sont pas partis en vacances, soit environ 4,8 millions d'enfants. Il est plus que jamais urgent de mettre en oeuvre un plan d'action sur le temps long pour sensibiliser davantage les familles et les enfants à l'intérêt des colonies de vacances et redynamiser durablement le secteur.
Je terminerai en évoquant la situation du monde associatif. Le secteur est au bord de la rupture : 30 % des associations employeuses déclarent avoir moins de trois mois de trésorerie, dont 5 % ont moins d'un mois d'exploitation en réserve. Si l'on considère ces chiffres, ce sont près de 90 000 emplois associatifs qui sont directement menacés à court terme, faute de trésorerie.
Les associations font également face à une érosion continue du financement public, qui constitue pourtant leur principale source de revenus. Près d'une association employeuse sur deux déclare avoir vu ses financements publics diminuer en 2025. Pour une association sur cinq, cette baisse a même été supérieure à 20 %.
Plus inquiétant encore, près de 40 % des structures associatives déclarent également devoir réduire leur masse salariale en 2025. Plusieurs associations d'importance, comme le Secours catholique, ont annoncé pour la première fois en 2025 la mise en oeuvre de plans sociaux. Cette situation n'est pas tenable.
Pour la première fois, le 11 octobre dernier, les associations, à l'appel du Mouvement associatif, ont manifesté sur l'ensemble du territoire pour alerter sur la situation du secteur. Or, force est de constater que le PLF 2026 n'apporte aucune solution en la matière. Les crédits sont certes préservés dans ce programme, mais cette stagnation budgétaire s'inscrit dans un contexte de hausse continue de la demande sociale et des charges qui pèsent sur le secteur.
À ce titre, je m'interroge sur la stagnation des crédits en faveur du développement de Guid'Asso. Le réseau fait l'unanimité auprès des acteurs de terrain, mais il faut lui donner les moyens de poursuivre sa montée en charge en 2026.
L'appel à l'aide des associations employeuses n'a pas non plus été entendu, puisque les financements de postes supplémentaires du Fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire (Fonjep) instaurés dans le cadre du plan de relance se sont achevés en 2026. Le nombre de postes soutenus par le dispositif en 2025 devrait donc s'établir aux alentours de 7 000, retrouvant le niveau d'avant la crise sanitaire, mais bien en deçà des besoins actuels du secteur. Par ailleurs, le montant de la subvention Fonjep n'a pas évolué depuis 2011 et s'établit toujours à 7 164 euros annuels par poste, ce qui représente entre 10 % et 15 % du coût global d'un poste salarié. Dans un rapport publié en 2016, la Cour des comptes estimait déjà que le faible montant du poste ne permettait pas d'avoir un véritable effet de levier pour d'autres cofinancements. Il est plus que jamais temps de revaloriser cette subvention annuelle, comme cela a été fait pour les postes relevant du ministère de l'Europe et des affaires étrangères en 2023, afin d'aider les associations employeuses à surmonter la crise du secteur.
Enfin, je ne peux que déplorer également la stagnation des montants octroyés au Fonds pour le développement de la vie associative (FDVA), malgré la hausse du nombre des demandes. En 2025, près de 33 965 associations ont effectué une demande de subvention au titre du FDVA 2 ; parmi elles, seulement 22 063 ont été financées. Ainsi, plus d'une association demandeuse sur trois n'a pas été soutenue.
Le montant moyen des subventions octroyées est également en baisse : il s'est élevé à 2 409 euros en 2020 et 2 340 euros en 2024, contre 2 000 euros en 2025. Augmenter les montants accordés au FDVA, par exemple par la revalorisation de la quote-part des sommes acquises à l'État affectée au dispositif, constituerait un acte fort pour soutenir les associations, notamment les plus fragiles d'entre elles, et répondre à l'appel lancé par le monde associatif le 11 octobre dernier.
Pour toutes ces raisons, je propose de donner un avis défavorable aux crédits du programme 163 pour 2026.
Mme Béatrice Gosselin. - Le budget du programme 163 consacré à la jeunesse et à la vie associative s'inscrit dans un contexte de forte tension budgétaire. Cependant, nous regrettons sincèrement le manque de redéploiement interne. En effet, bien que certains dispositifs aient été abandonnés ou fortement réduits, à l'instar du Service national universel (SNU), aucune réallocation significative n'a été opérée pour renforcer les actions qui fonctionnent réellement auprès de notre jeunesse.
Ainsi, l'ASC voit sa dotation diminuer de 115 millions d'euros : cela représente 40 000 missions de moins pour l'année 2026. Or, le service civique permet aux établissements publics et aux associations qui y ont recours de bénéficier de l'aide précieuse des volontaires, essentielle dans les territoires ruraux. Cet aspect est souvent oublié.
Je regrette aussi la baisse des crédits consacrés au mentorat. Le dispositif fait ses preuves auprès des jeunes en difficulté, et obtient de très bons résultats en matière de mixité sociale. Or, là encore, les budgets diminuent de 4,5 millions d'euros. Pourtant, le mentorat accompagne des jeunes qui sont souvent dans une situation sociale ou scolaire fragile ; son efficacité est reconnue. En réduire les moyens, c'est affaiblir un outil ciblé, qui agit précisément là où les institutions classiques atteignent leurs limites.
Je souhaite également attirer l'attention sur les « colos apprenantes », dont le budget s'élevait à 36,8 millions d'euros en 2025. L'année dernière, 88 000 jeunes ont pu en bénéficier, dont 37 % de primo-partants. Ces enfants qui ne partaient pas en vacances ont eu pour la première fois l'opportunité de le faire, mais ne le pourront désormais plus, car ce dispositif est abandonné. Cela représente un nombre d'enfants considérable qui, autrement, n'aurait pas quitté leur environnement familier sans les « colos apprenantes ». Or, on fait une croix dessus. Je trouve cela dommage.
Enfin, le monde associatif, qui assure une grande partie de l'éducation populaire et participe activement à la cohésion sociale, demeure fragilisé. Les associations doivent simultanément absorber la hausse des coûts, l'augmentation de la TVA sur certains biens et services et, pour certaines, la réintroduction de la taxe d'apprentissage.
Par ailleurs, les dotations des collectivités sont également en baisse. Les petites associations ne vont pas tenir le choc. Si elles n'ont ni les moyens ni l'ingénierie nécessaires, nous allons devoir faire face à la disparition de nombre d'entre elles. De nombreux emplois vont aussi disparaître. Pourtant, la vie associative est indispensable pour renforcer la cohésion sociale et faire vivre nos territoires.
Il est donc essentiel, à l'avenir, de cibler les priorités et consolider les dispositifs qui ont fait leurs preuves et qui fonctionnent, comme le service civique, le mentorat, les « colos apprenantes » et l'éducation populaire. Par conséquent, nous regrettons sérieusement que les 65 millions d'euros de crédits issus de la suppression du SNU ne soient pas redistribués en faveur de ces différents dispositifs.
Le groupe Les Républicains ne votera pas ce budget en l'état.
Mme Colombe Brossel. - Je partage en tous points ce qui vient d'être dit. Lorsqu'il y a des convergences de vues sur l'inefficacité des dispositifs supprimés, et sur des choix budgétaires qui consistent à rayer d'un trait de plume des lignes entières, sans aucune considération pour celles et ceux qui en bénéficient, c'est généralement le moment de s'interroger sur l'utilité des politiques publiques et sur les moyens d'atteindre les objectifs fixés.
En effet, nous pouvions faire autrement. Il eût été possible de s'interroger sur l'efficacité du SNU avant de devoir le faire uniquement pour des raisons budgétaires. Là aussi, les travaux des parlementaires et les travaux d'évaluation ne manquaient pas. Je regrette à titre personnel que l'évaluation des politiques publiques dans notre pays soit finalement réduite à une simple évaluation budgétaire. Je ne vais pas pour autant pleurer la fin du SNU. Nous avons souvent dit combien il nous semblait possible de mener d'autres politiques plus intéressantes en faveur de la jeunesse et de l'engagement. De là, toutefois, à rayer ce dispositif d'un trait de plume sans se poser la question de la manière dont ces fonds auraient pu être réalloués sur d'autres dispositifs bien plus utiles...
Il est vraiment fascinant de voir que les trois dispositifs les plus pénalisés par les choix budgétaires qui nous sont proposés, à savoir les « colos apprenantes » - qui, de toute façon, disparaissent, la ligne budgétaire étant supprimée -, le service civique et le mentorat, sont des dispositifs d'accompagnement d'enfants, d'adolescents et de jeunes adultes présents en zone urbaine, en quartier prioritaire de la politique de la ville, en territoire rural et en zone périurbaine. Le développement du mentorat dans les Outre-mer, par exemple, est aussi un choix fort de l'administration. Le collectif Mentorat et les associations s'en étaient saisis rapidement.
Or, je n'arrive pas à comprendre la logique qui peut pousser à affaiblir des dispositifs dont l'efficacité est reconnue sur l'ensemble du territoire. Il n'est pas si simple, en matière d'engagement des jeunes, de parvenir à cette mécanique fine qui permet de mailler tout le territoire et de permettre à tous les jeunes de s'engager, quels que soient leur lieu d'habitation, leur origine sociale, leur parcours de vie ou leur parcours d'études. Quel regret ! Pour étayer ce regret et essayer d'avancer dans le dialogue avec Mme la ministre et avec Bercy, nous voterons évidemment comme le suggère notre rapporteur.
M. Claude Kern. - La chute de 26 % des crédits du programme « Jeunesse et vie associative » traduit un manque d'ambition et est particulièrement préoccupante. Il est difficile de ne pas questionner les choix qui ont conduit à cibler ces secteurs déjà fragilisés.
Les associations continuent de survivre dans un système à bout de souffle qui réclame urgemment une refonte profonde. Il faut sortir de la logique d'appel à projets pour enfin instaurer des subventions pluriannuelles stables et prévisibles. Quant aux jeunes, ils paient le prix fort de décisions qui semblent déconnectées de la réalité. Les coupes massives dans le service civique, la disparition des colonies de vacances apprenantes et d'autres dispositifs sont autant de signaux qui dessinent un désengagement préoccupant, alors que la santé mentale des jeunes, pourtant grande cause nationale 2025, continue de se dégrader dangereusement.
Plusieurs questions demeurent. Qu'en est-il des crédits consacrés au feu SNU ? Qu'en est-il de la proposition de relever de 40 % à 60 % la quote-part versée au FDVA sur les sommes acquises à l'État au titre des comptes bancaires inactifs et des contrats d'assurance-vie en déshérence, mesure utile à la fois à la formation des bénévoles et à l'ensemble des territoires ? Qu'en est-il de l'augmentation de la dotation socle du FDVA ? Qu'en est-il du Fonjep, qui n'a pas été revalorisé depuis près de vingt ans ?
En l'état actuel et dans l'attente d'un soutien renforcé au service civique, le groupe Union centriste suivra l'avis du rapporteur, à savoir un avis défavorable.
M. Ahmed Laouedj. - Faire un budget, c'est faire des choix. Pour cette mission « Jeunesse et vie associative », le Gouvernement fait le choix de l'austérité, au détriment de celles et ceux qui font encore tenir debout notre cohésion sociale. La chute de 26 % du programme 163 est particulièrement alarmante : suppression du SNU, réduction de plus de 100 millions d'euros pour le service civique, extinction des « colos apprenantes ».
Dans nos territoires, où les associations portent à bout de bras la solidarité, l'éducation populaire et l'accompagnement des jeunes, ces coupes auront un effet dévastateur. Beaucoup de structures dépendent déjà de financements annuels fragiles, subissent l'inflation sur leur loyer et sur l'énergie, et voient leurs capacités d'action se restreindre. La baisse du nombre de missions de service civique de 150 000 - chiffre stabilisé depuis 2016 - à 110 000 en 2026 va encore réduire les opportunités d'engagement pour une jeunesse qui en manque cruellement. Dans mon département, cet engagement constitue souvent un premier tremplin vers l'emploi ou la formation.
Cette mission « Jeunesse et vie associative » révèle un choix politique que nous ne pouvons cautionner : celui d'un désengagement massif de l'État, là où les besoins sont les plus criants. La baisse drastique des crédits de paiement traduit une réalité simple : les acteurs de terrain auront moins de moyens, alors que la jeunesse est fragilisée et que les associations sont à bout de souffle. En Seine-Saint-Denis, territoire jeune, populaire et pourtant riche d'initiatives et d'énergie, cette contraction budgétaire aura des conséquences directes : des projets annulés, des portes qui se ferment, des opportunités manquées pour celles et ceux qui devraient être au coeur de nos priorités.
Pour toutes ces raisons et faute d'un rééquilibrage sérieux, je ne peux que souligner l'écart grandissant entre l'ambition affichée et les moyens réellement consacrés à la jeunesse et à la vie associative. Notre responsabilité collective est de bâtir un budget qui accompagne, qui protège et qui émancipe. L'avenir d'un pays se mesure d'abord à ce qu'il investit dans sa jeunesse. Je continuerai donc à défendre avec constance des politiques publiques à la hauteur de ces impératifs républicains. Le groupe RDSE suivra l'avis du rapporteur et émettra un avis défavorable.
Mme Mathilde Ollivier. - Couper dans le budget des associations, c'est couper dans le dernier filet de solidarité qui porte les personnes les plus pauvres de notre pays. En 2025, 15,4 % de la population française vit sous le seuil de pauvreté - chiffre le plus haut jamais enregistré depuis le début du décompte en 1996. Nous nous retrouvons donc dans une situation alarmante pour les associations, avec, d'une part, une baisse des crédits et, d'autre part, une hausse très forte des besoins qui aurait nécessité des investissements et des engagements supplémentaires pour soutenir le tissu associatif.
Je souhaite revenir sur deux points qui ont été évoqués.
Le premier a été pointé par le rapporteur : il s'agit de l'augmentation de la part des jeunes diplômés de l'enseignement supérieur parmi les participants au service civique. C'est un constat également fait par les associations sur le terrain, qui indiquent que le niveau d'engagement, à la fois par les dons et dans le bénévolat, est assez inégalitaire, avec une surreprésentation des catégories socioprofessionnelles supérieures. L'élargissement du service civique permet aussi d'ancrer l'engagement associatif de manière large dans la société, en favorisant la diversité des profils qui s'engagent. Par conséquent, le réduire, c'est encore augmenter ces inégalités.
S'agissant des « colos apprenantes », l'extinction de ce dispositif est un très mauvais signal. Le faire disparaître, c'est faire disparaître un outil d'émancipation important pour la jeunesse de notre pays. Cette extinction est donc quelque peu incompréhensible. Pour de nombreux jeunes, ces colonies représentent l'un des seuls moments d'ouverture et d'émancipation sur le monde. Toutefois, le nombre de départs connait une baisse importante dans notre pays ces dernières années. C'est pourtant un outil de cohésion sociale et de rencontre de jeunes de différents horizons. Il est donc très problématique de constater la disparition de ce dispositif, et nous serons sans doute nombreux à apporter des amendements pour le rétablir.
Nous suivons l'avis défavorable du rapporteur.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. - Les crédits du programme 163 souffrent d'une baisse drastique, en partie imputable à la suppression du SNU, mais pas seulement.
Les actions consacrées au développement de la vie associative et celles en faveur de la jeunesse et de l'éducation populaire connaissent également une baisse de crédits importante, de l'ordre de 13 % et de 23 % respectivement. Au sein de l'action 1, l'enveloppe allouée au compte d'engagement citoyen reste stable à 2,8 millions d'euros, mais sans prise en compte de l'inflation. Nous y voyons un signal négatif. La baisse de ces crédits en euros constants pourra donc avoir pour conséquence de réduire la couverture des droits à formation mobilisés par les bénéficiaires du compte d'engagement citoyen. Le budget du FDVA reste quant à lui stable à hauteur de 33 millions d'euros.
Concernant l'action 2, les crédits consacrés au Fonjep restent stables en euros constants. La baisse des crédits de cette action est imputable à l'extinction du dispositif des « colos apprenantes » et à la baisse de la dotation versée au mentorat. Ces deux baisses sont pour nous un signal très inquiétant ; cela a été dit et nous partageons ces constats. Près de 1,2 million d'enfants et d'adolescents partent en colonie de vacances, un chiffre en déclin à cause de l'augmentation des coûts des séjours et de la diminution des soutiens publics. Nous sommes inquiets de l'extinction de ce dispositif, alors qu'il permettait à de nombreux enfants de bénéficier d'un séjour de vacances.
L'Observatoire des vacances et des loisirs des enfants et des jeunes signalait que 38 % des enfants ne partent pas en vacances chaque année. Ce chiffre varie selon les milieux sociaux : 73 % des enfants de familles à hauts revenus peuvent partir en vacances chaque année ; en revanche, dans les foyers à bas revenus, seuls 56 % des enfants partent. Nous avons donc déposé un amendement pour reconduire ce dispositif. Nous serons vigilants quant à la suite des débats qui auront lieu dans l'hémicycle.
Concernant les crédits alloués au développement du service civique, ils sont également en baisse de 19 % pour l'année 2026. Le service civique est un dispositif qui a fait ses preuves. Cette politique favorise l'insertion des jeunes à travers leur engagement. Cette baisse de crédits aura donc un impact fortement négatif sur le nombre de contrats qui seront signés et sur le monde associatif de manière générale, puisque le service civique constitue un soutien très clair à l'activité associative.
Nous soutiendrons l'avis défavorable du rapporteur et ne voterons pas ces crédits.
M. Yan Chantrel, rapporteur pour avis. - Je constate que le diagnostic est partagé. Nous mettons en place des dispositifs qui ont besoin de temps pour être connus. C'est le cas des « colos apprenantes », qui se sont fortement développées depuis leur mise en place en 2020. Or, alors qu'elles sont désormais connues et font leurs preuves, nous les supprimons. Nous comprenons qu'il s'agit de choix purement budgétaires, mais il est regrettable qu'un dispositif qui fonctionne et qui a une utilité sociale au quotidien sur nos territoires soit supprimé de manière si brutale.
La commission émet un avis défavorable à l'adoption des crédits relatifs à la jeunesse et à la vie associative de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » du projet de loi de finances pour 2026.