CHAPITRE III - LES PRINCIPAUX SECTEURS DE L'INDUSTRIE FRANÇAISE

Pour compléter la description des crédits du ministère, un survol des principaux secteurs de l'industrie française en 1994 et au premier semestre de 1995 est ici proposé.

Ce survol porte sur l'industrie automobile, la sidérurgie, la métallurgie, la mécanique et la machine outil, la chimie et la pharmacie, le textile-habillement, l'industrie électrique et électronique, le bois et le meuble.

I. L'INDUSTRIE AUTOMOBILE

A. DES RÉSULTATS ENCOURAGEANTS

L'industrie automobile représente 1,1 million d'emplois dans notre pays.

Rappelons que le marché automobile français avait progressé de 14,6 % en 1994, frôlant la barre des 2 millions de voitures achetées. Dans le même temps, le marché européen n'avait progressé que de 5,9 %.

Sur les six premiers mois de l'année 1995, les immatriculations de voitures particulières en France ont progressé de 7,8 % par rapport à la même période de 1994.

Le terme du bénéfice de la prime de 5.000 francs « à la casse » des voitures de plus de dix ans assortie d'un rachat neuf, instituée par le Gouvernement BALLADUR l'an passé, a été atteint au 30 juin. Si elle a réveillé le marché automobile français, la « prime à la casse », accompagnée des promotions des constructeurs, n'en a pas moins créé une reprise artificielle.

On observera, par équité, que, si la prime a coûté quelque 3,3 milliards de francs à l'État, des rentrées de taxe à valeur ajoutée ont été induites à hauteur de 3,4 milliards de francs par les achats neufs (441.000 achats) en 1994 et 214.400 en 1995).

Fallait-il, pour autant, considérer comme légitime l'appel des constructeurs français à de nouvelles mesures gouvernementales ? Le recul de 9 % en août et de 15 % en septembre des ventes d'automobiles, a incité le Gouvernement à rétablir, par le décret n° 95-119 du 19 octobre 1995, une aide (prime de qualité de 5.000 à 7.000 francs selon la cylindrée), qui sera complétée par des incitations fiscales.

Une réflexion sur le coût du crédit, par l'intermédiaire de la DIAC et de CREDIPAR, est, par ailleurs, en cours. Des suggestions ont été faites : location avec option d'achat ; ventes d'occasion hors de l'Union européenne ; suppression de taxes ou aménagement de l'amortissement sur les véhicules de sociétés, etc.

Le passage à 20,6 % du taux de la taxe à la valeur ajoutée, à compter du 10 août 1995, ne devrait pas favoriser la consommation intérieure.

En tout état de cause, la croissance sur les marchés occidentaux restant de l'ordre de 2% l'an, il faudra attendre 1997 pour retrouver les niveaux de ventes atteints en 1989. Pour les experts, les aides ne font qu'anticiper la reprise sans modifier profondément les tendances économiques.

1. Renault : redressement en 1994

Au premier semestre de 1995, Renault représentait 31 % des immatriculations de voitures particulières neuves en France et sa production était en progrès de 11,6 % par rapport à la même période de 1994.

La « Clio » est toujours en tête des ventes avec 9,4 % du marché français. En revanche, la « remplaçante » de la R19 ne sera lancée qu'au début de 1996 et non à l'automne 1995.

Quant au marché européen, Renault en tenait 10,7 % en juin 1995, soit le cinquième rang européen.

Renault, qui avait réalisé un chiffre d'affaires de 29,9 milliards de dollars en 1993 (10e rang mondial) a atteint 3,69 milliards de francs de bénéfice en 1994 pour un chiffre d'affaires de 178,53 milliards de francs. La dette a été ramenée à zéro grâce aux capitaux disponibles depuis la rupture avec Volvo. Au premier semestre de 1995. Le bénéfice net a atteint 1,75 milliards de francs.

Renault a, toutefois, élaboré un plan social assorti de 1.735 suppressions de postes en 1995. En revanche, la politique d'embauche de jeunes sera poursuivie. Renault compte 138.000 salariés.

Le décret de « privatisation » de Renault a été publié le 18 juillet 1995, soit un an après l'ouverture du capital qui avait rapporté 8 milliards de francs à l'État. L'État qui détient encore 50,1 % de Renault pourrait tirer quelque 17 milliards de francs d'une privatisation. Mais il pouvait conserver une participation minoritaire. Le fléchissement du titre Renault en bourse au début de l'automne a retardé la privatisation.

- Renault véhicules industriels (RVI)

RVI a obtenu, en 1994, un bénéfice avant impôt fort modeste (23 millions de francs), signe, toutefois, que le rachat de Mack Trucks était absorbé par l'entreprise. Ayant produit 222.000 unités, RVI a vu croître de 18 % son chiffre d'affaires qui a atteint 29,6 milliards de francs.

La gamme de camions sera renouvelée entièrement d'ici à 1997, moyennant un effort d'investissement et de recherche de 2,6 milliards cette année (1,7 milliard en 1993). Des synergies dans les achats et les composants entre la branche européenne et Mack donneront leur plein effet en 1997-1998. Des coopérations avec des partenaires sont en discussion pour les boîtes de vitesses, les petits ou gros moteurs, aux deux extrémités de la gamme. Des développements communs ont déjà lieu avec Volvo dans les ponts.

Au premier semestre de 1995, le chiffre d'affaires a atteint 17,5 milliards de francs pour un résulta d'exploitation de 521 millions de francs.

2. PSA

PSA qui avait réalisé un chiffre d'affaires de 25,6 milliards de dollars (11e rang mondial), a dégagé, en 1994, un bénéfice de 3,1 milliards de francs et a ramené son endettement à moins de 10 millions de francs pour un chiffre d'affaires de 166,2 milliards de francs. Les effectifs atteignaient 139.800 salariés.

Au premier semestre de 1995, PSA représentait 31,2% des immatriculations neuves en France et sa production était en progrès de 2,7 % par rapport à la même période de 1994. Quant au marché européen, PSA en tenait 12,5 % en juin 1995, soit le troisième rang européen.

Durant le premier semestre, le constructeur automobile a consolidé son redressement financier. Son chiffre d'affaires est en augmentation de 3,1 %, à 86,43 milliards de francs. Sa marge opérationnelle s'est accrue de 13,5 % à 2,78 milliards de francs.


• Peugeot

Peugeot représentait 19,2% des immatriculations neuves en France au premier semestre de 1995.


Citroën

Citroën représentait 14,7 % des immatriculations neuves en France au premier semestre de 1995.


Chausson

Filiale commune de Peugeot et de Renault, le constructeur d'autocars Chausson, notamment implanté à Creil et à Gennevilliers, a vu s'accumuler les difficultés en 1995. Le passif de l'entreprise est estimé à 870 millions de francs. Mais ni PSA ni Renault ne souhaitent reprendre cette activité.

Un protocole conclu avec l'État, en avril 1995, a tenté de résoudre le sort des 1.050 salariés dont 230 ne sont assurés de rien. Le ministre de l'Industrie a nommé un délégué à la réindustrialisation du site de Creil en juin 1995.

L'usine de Creil fermera le 31 mars 1996. Une offre de reprise en location-gérance a été faite par Renault.

Le coût du règlement devrait représenter 240 millions de francs à PSA à 331 millions de francs à Renault. Quant au trésor il abandonnerait 58 millions de francs de créances sur Chausson.

3. L'équipement automobile : la baisse des prix semble enrayée

Pris entre leurs clients et leurs fournisseurs, les équipementiers automobiles se trouvent dans une conjoncture difficile, notamment pour les délais de paiement et, les prix des matières premières. Les gains de productivité restent la seule issue pour permettre à ces entreprises de sauver leurs marges.

La Fédération professionnelle (FIEV) a créé, en juin 1994, un GIE baptisé Icare (Institut pour la compétitivité automobile et la recherche de l'excellence) qui met à la disposition de la centaine de chefs d'entreprise associés au groupement des outils simples d'évaluation et d'amélioration de la productivité.

La baisse systématique des prix dans ce secteur semble cependant enrayée. Pour 1995, une progression de 5 % du chiffre d'affaires de ce secteur est attendue par rapport avec 85,3 milliards de francs réalisés en 1994.

ï À noter l'investissement de la société mécanique automobile du Nord (SMAN), filiale de PSA, qui va produire à Valenciennes une boîte de vitesse automatique commune à PSA et à Renault.

ï EBF (Bertrand Faure) ou Montupet sont encore trop endettés. Leur ratio sur capitaux qualifiée d'OPA-blé, EBF n'a pas un actionnariat stable.

ï Valéo a réalisé un chiffre d'affaires de 23 milliards de francs en 1994, supérieur aux prévisions. Pour 1995, l'objectif est de dépasser les 25 milliards de francs. L'entreprise n'est pratiquement plus endettée.

ï Michelin : retour aux bénéfices

Le producteur de pneumatiques a annoncé, en avril 1995, qu'il avait réalisé un bénéfice net (part du groupe) de 1,28 milliard de francs en 1994 contre des pertes de 3,6 milliards de francs en 1993.

Le chiffre d'affaires de Michelin a atteint 67,2 milliards de francs en 1994 contre 63,3 milliards en 1993 - 28 % de ce chiffre a été réalisé en France.

Le plan d'économies 1993-1995 de l'entreprise a pesé en faveur de ce bon résultat. L'endettement net est retombé à 22,4 milliards de francs contre 27,8 milliards en 1993.

Pour 1995, Michelin est confronté à la hausse du caoutchouc naturel dont les cours progressent de l'ordre de 55 % en année pleine. La hausse annoncée des prix des pneus devait atteindre 5 % pour les pneus de remplacement.

Les effectifs mondiaux sont stabilisés à 118.000, dont 30.000 personnes en France. 980 personnes devaient être embauchées en 1995, mais 1.460 suppressions d'emplois seront opérées.

Les investissements devaient atteindre 3,5 milliards de francs, notamment pour des projets en Chine. Michelin poursuit l'installation de son nouveau procédé de fabrication « C3M » dans ses unités de Saint-Priest et de Gravanches.

Une augmentation du capital de 600 millions de francs en numéraire et une émission de 6 milliards d'obligations convertibles d'ici à l'an 2000 sont à l'étude.

Au premier semestre de 1995, le bénéfice a atteint 1,43 milliards de francs.

B. DES PROBLÈMES COMPLEXES À RÉSOUDRE

1. Les négociations Europe/Japon sur le marché automobile

L'accord Europe/Japon de 1991 sur l'automobile a fait l'objet de négociations en 1995.

L'élargissement à Quinze de l'Union européenne, le fait que le Japon a, pour certains, exporté 2,2 millions de voitures de trop vers l'Europe et la durée de la période de transition étaient en cause.

Paradoxalement, les exportations japonaises vers l'Europe ont reculé de 16,5 % de 1993 à 1994 et les Japonais n'ont pas atteint, en 1994, leur quota de 99.300 véhicules à cause du haut niveau du yen. Mais il faut y ajouter les 384.000 véhicules japonais assemblés en Europe.

Le Japon pourra exporter 1,105 million de voitures vers l'Union européenne en 1995.

En juin 1995, le Japon a accepté d'adhérer à un accord d'homologation mutuelle des normes automobiles, ce qui devrait améliorer l'accès des marques européennes au marché japonais.

Il faut souhaiter que le marché japonais soit plus accueillant aux véhicules étrangers : 6.800 voitures françaises seulement ont été exportées au Japon en 199.

Il faut également souhaiter que l'accord conclu avec le Japon soit étendu à la Corée du Sud.

2. La distribution automobile

Au terme de deux années de discussions, le règlement 123.85 sur la distribution exclusive des marques par leur réseau, instauré il y a dix ans, et qui venait à expiration le 30 juin 1995, a été modifié.

Le règlement 123.95 modifie le système. Le principe même de sélectivité (une seule marque par concessionnaire) est remis en question, au prix d'une séparation de fait des locaux et de la gestion. Par ailleurs, les concessionnaires pourront se fournir en pièces de rechange ailleurs que chez le constructeur. Enfin, les concessionnaires pourront faire de la publicité hors de leur zone.

Le nouveau règlement sera valable pour sept ans et prend effet le 1er octobre 1995.

3. Le problème des ventes et importations parallèles

Les importations « parallèles » de voitures de marque française ou non ont triplé en trois ans et atteignent 7 % du marché français. Dans certaines zones frontalières, elles atteignent parfois 20 % du marché.

Jouant sur l'ouverture des frontières et les disparités monétaires au sein de l'Union européenne, ces pratiques rendent d'autant plus souhaitable l'adoption d'une monnaie unique en Europe.

De fait, les voitures de marque française sont 20 % à 30 % plus chères en France qu'en Espagne ou en Italie, en raison de la politique de prix imposée par les constructeurs à leurs réseaux de concessionnaires.

4. Le cas particuliers de la réparation des véhicules accidentés

La loi n° 93-1444 du 31 décembre 1993 a tenté (article 17) de mettre un frein au trafic des cartes grises des véhicules accrédités.

Par un arrêté du 24 juin 1994, paru au Journal officiel, du 2 juillet 1994, avaient été précisées les conditions dans lesquelles une nouvelle carte grise peut être délivrée après réparation du véhicule. Par ailleurs, les formulaires employés par les assureurs rappellent de manière précise les dispositions de la loi et notamment le fait que les assurés peuvent choisir de conserver leur véhicule et de le faire réparer. Le ministère de l'Intérieur, par circulaire du 3 octobre 1994. a précisé aux services préfectoraux les conditions de la mise en oeuvre de la procédure supprimant les inconvénients du retrait de la carte grise. Dans ce cas, les services préfectoraux délivrent aux professionnels une attestation donnant les spécifications techniques du véhicule et indiquent que la carte grise ne peut être restituée. Ce document permet aux véhicules endommagés démunis de carte grise d'être exportés. Il faut préciser que les mêmes dispositions sont appliquées dans le cadre de la procédure prévue pour les véhicules gravement accidentés sans que les difficultés spécifiques aient été soulevées.

Mais le Conseil d'État, saisi, a déclaré illégal l'arrêté au printemps 1995.

Votre Commission des Affaires économiques et du Plan sensible aux difficultés de la profession du négoce de pièces détachées et de véhicules réparés et attentive à la prévention des trafics de carte grise émet le voeu qu'une réglementation adaptée puisse être mise en place dans les délais appropriés. Elle accueille avec satisfaction l'insertion, à cette fin, d'un article additionnel au projet de loi relatif aux transports.

5. La réglementation antipollution pour 1996

Dès 1996, l'Union européenne a décidé de ramener le taux d'émissions légales à 2,2 g/km pour le C02 et à 0,5 g/km pour la somme du HC et du Nox.

Cette exigence, qui fait suite à la généralisation du pot catalytique à compter de 1996, impose aux motoristes de concevoir des systèmes nouveaux permettant de maintenir la richesse des mélanges au niveau voulu sans surchauffe ni fatigue prématurée.

Grâce au progrès de l'injection, le moteur à deux temps pourrait se révéler un recours efficace. L'Institut français du pétrole a ainsi mis au point un moteur à injection assistée par air comprimé dont la consommation est comparable à celle d'un diesel aux normes 1996.

Le diesel, quant à lui, est devenu la motorisation la plus dynamique sur le marché automobile français, grâce au gain moyen de 20 % en carburant qu'il permet.

En 1995, les ventes de modèles diesel pourraient dépasser le million de véhicules en France. Elles représentaient 47,5 % des ventes neuves en 1994.

Mais l'avenir du diesel passe par une diminution des émissions polluantes et l'étude d'un catalyseur adapté progresse.

La modération, en 1994-1995, de la fiscalité sur le gazole, si elle a eu le mérite de satisfaire une revendication de la profession du transport routier et si elle a soutenu -indirectement- les constructeurs français bien implantés sur le « créneau » des moteurs diesel, doit conduire à s'interroger sur l'évolution des taxes en ce domaine à terme. Peut-on, en effet, continuer à favoriser le diesel ? Peut-on le faire si le diesel reste aussi polluant ?


La voiture électrique peut constituer un élément de réponse à la pollution.

L'État a décidé d'accorder une aide de 5.000 francs à chaque acheteur d'un véhicule électrique, à compter du 1er juillet 1995 et jusqu'à la fin 1996, ceci afin d'encourager un marché encore très embryonnaire et de garantir une « équivalence de prix » entre une voiture thermique et une voiture électrique.

Électricité de France devrait également apporter une aide complémentaire de 10.000 francs par véhicule au constructeur ou à l'importateur s'étant engagé à respecter ce principe d'équivalence des prix. Ces mesures, d'un coût évalué à 30-40 millions de francs pour le budget de l'État, devraient permettre d'atteindre 7.000 véhicules immatriculés en dix-huit mois, et 100.000 véhicules en l'an 2000. Elles comprennent également un engagement de l'État et des collectivités locales dans un programme d'électrification de leurs véhicules en zone urbaine pour parvenir à 10 % de véhicules électriques en l'an 2000. Par ailleurs, EDF, acteur actif du lancement de la voiture électrique en France, va vendre un équipement pour les particuliers ne pouvant pas recharger leur véhicule par eux-mêmes. Ce matériel devrait coûter 2.000 francs hors taxes. Mais le rôle de la société nationale sera probablement plus décisif avec la mise en place de bornes de rechargement.

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