III. MÉTALLURGIE-MÉCANIQUE-MACHINE OUTIL

A. LA MÉTALLURGIE

En 1995, la métallurgie a poursuivi une progression comparable à celle qu'elle avait connue en 1994.


• Pechiney

En 1994, le géant de l'aluminium et de l'emballage a enregistré 3,5 milliards de francs et doublé son résultat courant, à 600 millions de francs. La division aluminium a vu son chiffre d'affaires progresser sensiblement, à 18 milliards en 1994 de francs. Mais surtout, sa marge opérationnelle est redevenue positive, à 484 millions de francs. L'emballage, traditionnellement perçu comme un stabilisateur des résultats du groupe, a été fortement pénalisé par des pertes supérieures à 100 millions de dollars de la boîte-boisson aux États-Unis.

L'endettement du groupe reste néanmoins un point noir, s'élevant à 25,8 milliards de francs, pour des fonds propres de 16 milliards.

Le groupe va opérer, à partir de 1995, des cessions d'actifs. Quatre domaines sont visés : les composants et systèmes (3,1 milliards de francs de chiffre d'affaires en 1994), avec le désengagement partiel de Carbone Lorraine et la vente de Sintertech, qui vont contribuer au désendettement à hauteur de 1,2 milliard. En Amérique du Nord, l'emballage alimentaire métallique (3,3 milliards de francs de chiffre d'affaires en 1994) et l'emballage boisson en verre (3,6 milliards) seront également mis sur le marché. Dernier sur la liste : l'Américain Howmet qui fabrique des éléments de turbomoteurs (4,7 milliards de francs de chiffre d'affaires) et dont la restructuration est en voie d'achèvement. Au total, ces cessions, qui devront être terminées d'ici à deux ans, vont amputer le périmètre actuel de Pechiney d'environ 20 % en réduisant son résultat opérationnel d'un peu plus de 1 milliard. À l'issue de ces opérations, Pechiney International (emballage) affichera 6 milliards de francs pour 9 milliards de fonds propres, un niveau jugé « convenable ». En revanche, une augmentation de capital « significative », vraisemblablement de l'ordre de 5 milliards de francs, sera lancée pour restaurer le bilan du groupe Pechiney, dont le ratio dette nette/capitaux propres s'élevait à 1,65 à la fin de 1994.

En se recentrant sur la production d'aluminium primaire et l'emballage, Pechiney parcourt le chemin inverse de celui qu'il avait suivi au début des années 1990, lorsqu'un long cycle de ralentissement économique avait déprimé la consommation mondial et progressivement affaibli les cours de l'aluminium. L'aluminium primaire, identifié comme la principale source de financement interne, se verra consacrer les seuls investissements « obligatoires », nécessaires au maintien de l'outil. Le même régime sera appliqué aux laminés classiques de Pechiney Rhénalu -l'usine de Neuf-Brisach a été profondément modernisée- à la boîte-boisson aux États-Unis et en Europe.

Les investissements qualifiés « d'optionnels » iront aux laminés techniques (en gros, l'usine d'Issoire), aux développements futurs dans l'automobile et, surtout, à l'emballage, domaine que Pechiney entend maintenant voir se développer. Mais c'est surtout sur l'emballage plastique, en croissance et encore peu concentré, que Pechiney compte. Ces nouvelles orientations amènent à s'interroger sur l'avenir de Pechiney Emballage alimentaire (PEA), qui réalise environ 30 % d'un chiffre d'affaires de plus de 4 milliards de francs dans l'emballage souple. Généraliste, son recentrage sur les spécialités prendra du temps.

Au premier semestre de 1995, le groupe a réalisé un chiffre d'affaires de 36,1 milliards (+28,4 %) dégageant un bénéfice de 658 millions de francs, ce qui contribue à faciliter une privatisation éventuelle, en fonction de l'état des marchés financiers. Une telle privatisation pourrait rapporter 5 à 6 milliards de francs à l'État.

B. LES CONSTRUCTIONS FERROVIAIRES : DÉCRUE ANNONCÉE JUSQU'EN 1998

Avec 15,4 milliards de francs en 1994, le chiffre d'affaires de la construction ferroviaire s'est stabilisé dans notre pays par rapport à 1993. Or, si 38 % de ce chiffre ont été réalisés à l'exportation, 44 % l'ont été avec la SNCF.

La baisse des commandes de matériel ferroviaire, en France notamment, inquiète les industriels du secteur, qui estiment la situation « préoccupante » pour les deux années à venir avec un risque d'aggravation pour la période 1997-1998.

En outre, la baisse du dollar et les dévaluations compétitives de certaines monnaies favorisent certains de nos concurrents sur un segment très compétitif après nos échecs pour les métros de Shangaï, Canton et Bangkok.


GEC-Alsthom

Le groupe franco-britannique a réalisé un chiffre d'affaires de 5,2 milliards de francs en 1993 et un résultat net positif de 2 milliards de francs. 40 % de ce chiffre est réalisé avec les métros.

L'entreprise a présenté, en février 1995, la nouvelle génération de métro sur pneus (le MP 89) qui équipera la ligne n° 1 de la RATP (La Défense-Vincennes) et 11 ainsi que le futur Meteor. Ce contrat représente 3,6 milliards de francs.

L'entreprise devrait livrer à la SNCF une trentaine de rame du TGV « à impériale » qui doit entrer en service à l'été de 1996.

GEC-Alsthom a été sélectionné, en décembre 1994, comme candidat prioritaire pour le renouvellement du parc de matériel roulant de la « Northern line » qui traverse Londres du nord au sud. Le contrat est estimé à 4,2 milliards de francs.

GEC-Alsthom est chef de file du consortium chargé de réaliser le TGV Séoul-Pusan en Corée du Sud. Les premières livraisons devraient intervenir à la fin de 1996. La ligne devrait être opérationnelle de bout en bout en 2001. Le contrat atteint 12 milliards de francs, mais le transfert de technologie y atteint 50 %.

Outre l'équipement du métro de Santiago du Chili (550 millions de francs), GEC Alsthom nourrit des projets de métro à Caracas, au Caire (ligne 2 pour 2 milliards de francs en consortium), à Istanbul et dans trois villes de Chine, mais aussi des projets de TGV entre Pékin et Shangaï et Taïwan.

Il faut souhaiter que la collaboration, en cours d'examen depuis janvier 1992, entre GEC-Alsthom et l'allemand Siemens sur un train à grande vitesse, puisse aboutir dans de bonnes conditions, alors que la branche « transports » de GEC-Alsthom a annoncé 984 suppressions d'emplois sur trois ans.


• Matra

Après avoir essuyé un revers face au Canadien Bombardier sur le marché de 3,7 milliards de francs de Kuala Lumpur, Matra souffre de présenter un matériel (le VAL) qui paraît trop sophistiqué pour les pays en développement qui préfèrent soit les tramways moins coûteux, soit les métros moins fragiles, et une gamme limitée.

Ainsi, Matra n'avait plus remporté un seul projet de VAL « clés en mains » depuis 1988 et le contrat de Taïpeh est bloqué à la suite d'une difficulté politico-financière.

On pouvait craindre que Matra-transports, qui a affiché 500 millions de francs de déficit en 1994, ne survive pas sauf à trouver un partenaire stratégique, alors que Matra Hachette souhaiterait réduire de moitié sa part de capital dans l'entreprise.

Le groupe a cependant remporté le contrat -évalué à 2,4 milliards de francs- du Val de Lille-Roubaix-Tourcoing, en septembre 1995.

C. LA CONSTRUCTION NAVALE

Pour l'industrie de la construction navale, prise dans son ensemble, les perspectives paraissent relativement bonnes, le transport maritime devant bénéficier d'une partie de la croissance du commerce mondial.

Ainsi les armateurs français ont-ils commandé quelque 25 navires au cours de l'année écoulée.

Pourtant, l'industrie de la construction navale est handicapée par la surcapacité et une apparente incapacité des gouvernements à accepter les réalités économiques des forces du marché ; de fait, les systèmes d'aides demeurent vivaces et la proposition E 480 du règlement du Conseil sur les aides à la construction navale est contestée.

La concurrence à l'avenir, pour la plupart des chantiers, sera sévère, les recettes de la construction navale ayant tendance à être plus finement reparties et la plupart des constructeurs n'ayant plus la possibilité de compter sur des marchés captifs comme il en existait précédemment.

Le dernier accord de l'OCDE sur l'arrêt des subsides gouvernementaux exige de mettre fin aux aides directes en 1996, mais son efficacité reste encore à prouver. Le maintien d'une période dérogatoire en 1996-1998 permettra la transition nécessaire mais, pour, que cet accord soit acceptable, trois conditions devront être réunies :

- veiller à la compétitivité des entreprises françaises en restant attentif à la protection des avancées technologiques de nos entreprises lors des négociations de transferts de technologies ;

- s'assurer que les conditions de crédits garantis par l'État ou les banques sont équivalents par rapport à l'étranger ;

- élargir l'accès aux commandes du secteur militaire voire reconvertir progressivement les arsenaux en les adossant, lorsque c'est possible, à de grands groupes industriels.

Votre commission, tout en comprenant les motivations d'une telle réduction, s'interroge sur l'économie opérée par l'Assemblée nationale sur le chapitre 64.93.


• Les chantiers de l'Atlantique

Avec plusieurs paquebots de croisière, des méthaniers et un car ferry en commande, le plan de charge de l'entreprise, filiale du groupe CGE-Alsthom est correct en 1995.

Le plan social signé en septembre 1994 est jugé satisfaisant, mais les 4.200 salariés actuels sont voués à n'être à terme que 3.000, l'entreprise recourant de façon accrue à la sous-traitance.

Des propositions de rapprochement entre les Chantiers de l'Atlantique et la Direction des Constructions navales (arsenal de Lorient) ont été récemment émises.


Leroux et Lotz

Seul chantier français sur ce segment, Leroux et Lotz a parié, en 1995, sur les navires à grande vitesse (70 km/heure).

Les modèles « Corsaire 6000 » desservent Jersey avec quelques difficultés et « Corsaire 11000 » seront exploités sur la Corse.

Le groupe Leroux et Lotz qui a repris successivement les chantiers de Dieppe et Saint-Malo (ex filiales du groupe Manche SA) puis le chantier de Lorient (ex CAP) en 1990, a stabilisé ses effectifs à Dieppe et Saint-Malo.


La Ciotat : les voiliers font renaître le chantier

En avril 1995, le Conseil régional, le Conseil général et la municipalité de la Ciotat ont constitué une société d'économie mixte, la SEMIDEP, chargée conformément au protocole d'accord signé en août 1994 entre les parties, l'État et le syndicat CGT, de l'aménagement du site des anciens chantiers de la Normed dans le but d'y accueillir de nouvelles entreprises de la filière maritime.

Sept ans après le dernier lancement de bateau, un voilier de course « maxi » a été mis à l'eau en juillet 1995 sur le site des anciens chantiers par la société Mistral-composite, avec le concours du conseil général et du conseil régional et de la Caisse des Dépôts. À terme, seize bateaux pourraient être lancés, à raison d'une unité toutes les trois semaines, nécessitant l'embauche de 80 personnes d'ici à la fin de 1995.

Dans l'attente de la réalisation d'autres projets industriels, et parallèlement à la société d'économie mixte, une société d'insertion, la CIM, a été mise en place pour les anciens salariés du chantier, appelés à être les premiers bénéficiaires des créations d'emplois à venir.


La filière vendéenne de la plaisance souffre des désordres monétaires

Souvent résumée à la présence sur son sol des deux acteurs mondiaux, Jeanneau et Bénéteau, la filière plaisance de la Vendée comprend, en fait, 83 entreprises : chantiers navals, équipementiers, revendeurs, réparateurs, loueurs et bureaux d'études. Avec 1,8 milliard de francs de chiffre d'affaires et 2.430 emplois, la Vendée représente ainsi un tiers de la filière française.

Mais le marché reste difficile pour ces entreprises, notamment en raison des dévaluations compétitives de nos partenaires européens. Jeanneau a ainsi été contraint de déposer son bilan. Un plan de reprise ou de cession va être étudié.


Les Ateliers et Chantiers du Havre

Les Ateliers et Chantiers du Havre sont particulièrement connus pour leurs récentes réalisations dans le domaine des paquebots de croisière à voiles entièrement automatisés et pilotés par ordinateur (séries Wind Star et Club Med). Les Ateliers et Chantiers du Havre construisent également des car-ferries, des rouliers à passagers de longueur jusqu'à 215 m, des câbliers, des navires de recherche océanographique et tous types de navires sophistiqués jusqu'à 215 m de longueur.

Le nouveau « Marion Dufresne », lancé par les Ateliers et Chantiers du Havre en juin 1994, a pris son service en mai 1995 vers les Terres australes et antarctiques françaises.

Par ailleurs, leur département « Recherche et développement » a récemment mis au point un nouveau concept de navire rapide.

Votre commission juge raisonnable la prorogation jusqu'au 1er octobre 1996 du régime européen de subventions dès lors que les principaux pays constructeurs navals concurrents de l'Europe n'ont pas encore ratifié l'accord conclu dans le cadre de l'OCDE en décembre 1994.

D. LA MÉCANIQUE

Après quatre années difficiles, le secteur de la mécanique (12 % de l'industrie française) a redémarré.

Les chiffres de 1994 ont été encourageants. Le chiffre d'affaires de cette branche a progressé de 8 % pour atteindre 301 milliards de francs, alors qu'il avait reculé de 8 % en 1993. Mais cette reprise a été due essentiellement à l'essor des exportations, qui ont augmenté de 12 % à 150 milliards de francs, souligne la présidente.

La demande en provenance des pays de l'Union européenne a été particulièrement dynamique (+14%). Les États-Unis sont devenus le deuxième marché des exportations françaises, derrière l'Allemagne. En dix ans, l'Asie-Océanie et l'Amérique du Sud ont fortement accru leurs poids dans nos exportations, en passant respectivement de 7,3 % à 17,8 % et de 4,9 % à 7,2 % du total. Et la balance commerciale des échanges est bénéficiaire de 15 milliards de francs.

La reconstitution des stocks a accentué la reprise, surtout pour les composants et les biens intermédiaires. Quant à la sous-traitance, elle a bénéficié de la reprise de la construction automobile. La demande intérieure reste toutefois modeste (+ 0,6 %). La mécanique souffre surtout d'investissements insuffisants.

Les effectifs employés ont atteint 485.000 personnes (- 1,4 %).

Le chiffre d'affaires de la branche mécanique a cru de 7 % au premier semestre de 1995. Un progrès de 13 % des exportations a été observé sur le seul premier trimestre, mais les commandes risquent de se tasser.

En 1995, le secteur de la machine-outil devrait connaître une nouvelle progression d'activité : les données du premier trimestre, tant en termes de prises de commandes que de facturations, sont, selon le ministère, « particulièrement encourageantes ». Toutefois, la concurrence des pays favorisés par des dévaluations monétaires se fait durement sentir, aussi bien à l'export que sur le marché intérieur, imposant aux entreprises françaises de nouveaux efforts de compression des prix, qui pèsent sur l'emploi et sur les marges.

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