ANNEXE LA REFORME DU CONSEIL SUPÉRIEUR DE LA MAGISTRATURE

En juin 1995, le Conseil supérieur de la magistrature a publié son premier rapport annuel depuis la révision constitutionnelle du 27 juillet 1993 qui avait conforté son rôle auprès du Président de la République afin de conforter l'indépendance de l'autorité judiciaire.

La lecture de certains passages de ce rapport a fait naître quelques préoccupations chez un certain nombre des membres de la commission des Lois.

1. L'économie de la réforme constitutionnelle

Placé sous la présidence du Président de la République et la vice-présidence de droit du ministre de la Justice, le Conseil supérieur de la magistrature comprend de deux formations distinctes : l'une composée de trois personnalités désignées respectivement par le Président de la République, le Président de l'Assemblée nationale et celui du Sénat, un conseiller d'État et six magistrats, -cinq du siège et un du parquet-, élus par leurs pairs, l'autre des mêmes personnalités et du même conseiller d'État, de cinq magistrats du parquet et d'un magistrat du siège également élus par leurs pairs.

La formation du siège propose au Président de la République la nomination des magistrats du siège de la Cour de cassation, des premiers présidents de cours d'appel et des présidents de TGI, les autres magistrats du siège étant nommés sur son avis conforme.

La formation du parquet donne son avis sur la nomination des magistrats du ministère public, à l'exception des emplois de procureur général auxquels il est pourvu en conseil des ministres.

La formation du parquet exerce en outre les attributions disciplinaires de la commission consultative du parquet supprimée par la révision constitutionnelle. La formation du siège exerce la discipline des magistrats du siège.

Enfin, aux termes de l'article 20 de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994, chaque formation du Conseil supérieur de la magistrature peut charger un ou plusieurs de ses membres de missions d'information auprès des cours, des juridictions et de l'ENM.

A la date de publication du rapport, toutes les propositions du Conseil supérieur de la magistrature et tous ses avis avaient été suivis. Depuis lors, la nomination d'un procureur de la République a été faite contre l'avis négatif du Conseil.

2. Les enseignements du rapport 1995

a) Une réunion plénière inattendue

Le rapport fait apparaître que le fonctionnement du Conseil supérieur de la magistrature est assez éloigné des intentions du constituant. C'est ainsi qu'a été instituée, sans aucune base légale, une « réunion plénière des deux formations » qui élit son président en son sein.

Cette réunion plénière, précise le rapport, « assure la cohérence des procédures et l'harmonisation permanente de la pratique et des orientations du Conseil. Elle décide et organise les missions d'information, lesquelles sont effectuées par des délégations mixtes de membres du siège et du parquet, elle procède au compte-rendu et élabore les avis et recommandations ».

b) Des revendications en contradiction avec des décisions exprès du constituant

Le rapport estime qu'il serait opportun d'engager « une réflexion sur les conditions dans lesquelles le concept de l'unité de la magistrature pourrait être appliqué dans ses ultimes conséquences », alors que le constituant a clairement souhaité affirmer l'unicité de la magistrature tout en conservant fermement l'organisation hiérarchisée du parquet à la tête duquel se trouve placé le garde des sceaux.

Le Conseil supérieur de la magistrature « déplore » par ailleurs de ne pas pouvoir « donner son avis sur le choix des collaborateurs immédiats que sont pour lui son secrétaire administratif et son (ou ses) secrétaire administratif adjoint ». Cette situation « paradoxale » résulte, on le sait, de la volonté très tranchée du constituant de faire du secrétaire administratif la courroie de transmission entre le Président de la République et le Conseil supérieur de la magistrature.

Le rapport considère par ailleurs que le fait que les procureurs généraux soient nommés sans l'intervention du Conseil supérieur de la magistrature constitue un obstacle regrettable « sur la voie de l'unification complète du corps judiciaire » ... que le constituant n'a pas souhaité.

Le rapport propose en outre que le budget du Conseil supérieur de la magistrature soit individualisé et voté en tant que budget autonome.

Enfin, il suggère que les présidents des Assemblées puissent saisir le Conseil supérieur de la magistrature en cas d'atteinte à l'indépendance de la magistrature, ce qui n'est pas parfaitement en cohérence avec une organisation constitutionnelle qui confie au Président de la République, auprès duquel est placé le CSM, le rôle de garant de l'indépendance de l'autorité judiciaire.

Lors de son audition par la commission des Lois le 14 novembre, le Garde des Sceaux, répondant à une question de votre rapporteur, a indiqué qu'il souhaitait une stricte application de la révision constitutionnelle.

Lors de l'examen en commission des crédits du budget du ministère de la justice le 15 novembre, plusieurs commissaires se sont déclarés préoccupés par certaines des conclusions du rapport du CSM et M. Michel Dreyfus-Schmidt a souhaité l'audition des représentants de ce dernier.

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