B. LA MODERNISATION DE LA COMPTABILITÉ

Votre rapporteur pour avis reste particulièrement attentif au processus de modernisation de la comptabilité de la sécurité sociale, convaincu que cette dernière ne saurait être efficacement pilotée sans comptes homogènes et transparents.

1. Les avantages d'une comptabilité en droits constatés

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 est encore présenté en comptabilité de caisse, alors que la comptabilité en droits constatés est appliquée par le régime général depuis 1996 et par la plupart des autres régimes depuis 1997. La prolongation de cette période transitoire de passage d'un système à l'autre contraint les organismes de sécurité sociale à tenir une double comptabilité.

Comme le rappelle la Cour des comptes dans son rapport au Parlement sur la sécurité sociale : " La méthode des droits constatés présente de nombreux avantages pour la sincérité et la transparence des comptes :

- elle donne au résultat de l'exercice sa pleine signification en le rendant indépendant d'événements perturbant l'encaissement des cotisations ou le règlement des prestations : il s'agit d'une garantie précieuse dans la perspective d'une régulation fine des dépenses, notamment d'assurance-maladie ;

- elle offre l'occasion d'harmoniser les méthodes comptables de l'ensemble des régimes puisqu'un même événement est traité comptablement de la même manière pour tous les régimes : il s'agit d'une étape préalable essentielle sur la voie d'une agrégation des comptes de la sécurité sociale ;

- elle donne un cadre de référence comparable à celui des régimes complémentaires et des mutuelles ;

- elle favorise enfin la transparence financière entre les différents acteurs de la sécurité sociale en faisant apparaître les créances et les dettes respectives de chacun : elle devrait ainsi inciter les régimes à suivre de
manière plus attentive le recouvrement de leurs créances et à respecter les échéances de règlement entre partenaires ".

2. Des transitions nécessaires

Toutefois, le passage d'un système à l'autre appelle des précautions de méthode.

En effet, comme le souligne la Cour des comptes, " la première année du passage d'une méthode à l'autre génère un résultat exceptionnel dans la mesure notamment où les cotisations restant à recouvrer sur exercices antérieurs à celui de la réforme qui n'ont jamais pu être comptabilisées sont des produits exceptionnels, compensés d'ailleurs en grande partie par une provision pour créances douteuses en raison de l'irrécouvrabilité probable de la majeure partie d'entre elles.

Le changement de réglementation comptable procure donc une amélioration du résultat dont l'ampleur est néanmoins difficilement prévisible. C'est la raison pour laquelle le résultat exceptionnel dû au changement de méthode comptable est isolé et distinct du résultat courant de l'exercice de mise en oeuvre de la réforme
".

Ainsi, la présentation en droits constatés du résultat courant du régime général en 1997 fait apparaître un déficit comptable de 24,2 milliards de francs, inférieur de 15 milliards de francs au déficit de 39,2 milliards de francs enregistré en encaissements-décaissements.

Deux dispositions du projet de loi de financement tirent certaines conséquences de la différence de présentation comptable entre les régimes de sécurité sociale et les lois de financement de la sécurité sociale.

L'article 11 prévoit que les déficits pris en compte pour la répartition entre les régimes du produit de la contribution sociale de solidarité des sociétés, ainsi que de la CSG et du droit de consommation sur les alcools affectés à la branche maladie, sont établis en encaissements-décaissements au titre de l'exercice 1998. L'Assemblée nationale a étendu cette dérogation à l'exercice 1999, considérant que la loi de financement de la sécurité sociale ne serait établie en droits constatés qu'à compter de l'an 2000.

L'article 35 du projet de loi de financement modifie rétroactivement l'article 10 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale, de manière à ce que la reprise de la dette de 87 milliards de francs du régime général par la CADES s'effectue en fonction des déficits en trésorerie des différentes branches au 31 décembre 1997, et non pas de leurs déficits en droits constatés.

3. La prolongation de la réforme

Le passage à une comptabilité en droits constatés ne doit être conçu que comme une première étape. En effet, cette réforme fait ressortir le manque d'homogénéité des comptes sociaux et la difficulté de leur consolidation.

Le rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 1998 rappelle les raisons pour lesquelles il est indispensable de procéder à la refonte des dispositifs comptables des régimes de sécurité sociale :

" Les plans comptables des organismes de sécurité sociale sont multiples et ne sont pas homogènes. Lorsqu'ils sont homogènes, les pratiques comptables suivies ne le sont pas et aucune autorité n'est clairement en charge de leur harmonisation. Une telle situation ne facilite donc pas la lecture des comptes .

" La comptabilité doit rendre compte de l'exécution des lois de financement de la sécurité sociale, tant en ce qui concerne les prévisions de recettes que les objectifs en matière de dépenses qui sont des objectifs de branche. La consolidation au niveau de la branche ne peut être envisagée sans une normalisation des règles et des pratiques comptables .

" Les délais d'établissement des comptes des différents régimes sont encore, malgré quelques progrès par rapport à l'an passé, très longs. S'agissant du régime général, les comptes des caisses nationales ont été arrêtés par les conseils d'administration concernés entre les mois de juin et septembre .

" Il résulte de cette situation que l'objectif même d'une comptabilité, à savoir la fourniture d'une information fiable, pertinente, rapide et opposable sur la situation financière des organismes de sécurité sociale, tant pour les décideurs internes que pour les autorités politiques et pour les organes de contrôle, ne peut être considéré comme atteint de manière satisfaisante ."

Dans cette perspective, une mission interministérielle, commune au ministère de l'emploi et de la solidarité et au ministère de l'économie et des finances, est en voie d'être mise en place, avec trois objectifs essentiels :

Définir un plan comptable des régimes de sécurité sociale, s'inspirant du plan comptable général mais adapté aux spécificités propres de la sécurité sociale.

Contribuer à l'établissement puis au suivi de l'exécution des lois de financement de la sécurité sociale, en neutralisant les transferts financiers de manière à permettre l'agrégation par branche des différents régimes, et en traitant de manière cohérente les relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale.

Proposer les conditions d'une accélération sensible des délais de production des comptes, de manière à disposer d'une information infra-annuelle sur les résultats comptables.

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