III. UNE NOUVELLE CONTRIBUTION DU MINISTÈRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES À L'EFFORT DE MAÎTRISE DES DÉPENSES PUBLIQUES

Le projet de budget des Affaires étrangères pour 1999 est en baisse de - 0,7 % par rapport à la somme des deux dotations (affaires étrangères + coopération) de 1998.

Cette réduction tient au fait que le gouvernement actuel ne considère pas les affaires étrangères comme une priorité du moment, ce qui semble regrettable, et à la très forte baisse des crédits affectés à la coopération au développement en 1999, alors même que les pays auxquels s'adressent traditionnellement ces crédits subissent une crise particulièrement sévère.

A. VUE D'ENSEMBLE DE LA DOTATION

1. Un budget unique, traduisant la fusion Affaires étrangères-coopération

Le projet de budget pour 1999 constituera la première traduction budgétaire de la réforme de la coopération décidée par le gouvernement le 4 février 1998. Bien que le présent rapport pour avis ait limité son objet à la dotation des affaires étrangères stricto sensu , hors coopération, il importe de rappeler en premier lieu les implications budgétaires de la fusion affaires étrangères-coopération, tant sur le plan de la nomenclature budgétaire que sur l'évolution des crédits.

a) Une nomenclature budgétaire rénovée

Le projet de budget des affaires étrangères pour 1999 est présenté de telle manière que dans la plupart des cas, il est possible d'apprécier l'évolution des grands types de crédits à structures budgétaires constantes, et donc d'isoler, dans une certaine mesure, les parts respectives des affaires étrangères et de la coopération.

Les différentes catégories de dépenses retracées par le document "bleu" relatif au projet de loi de finances pour 1999 assurent donc la fusion des structures budgétaires des deux dotations.

- Le titre III du budget rénové est néanmoins très largement comparable à celui de l'ancien budget des Affaires étrangères, dont il reprend la quasi totalité des chapitres.

. Les chapitres relatifs aux rémunérations reprennent la nomenclature des affaires étrangères, assise sur huit chapitres (administration centrale-indemnités, services à l'étranger-indemnités, rémunération des personnels, autres rémunérations, participation aux charges de pension, cotisations sociales-part de l'Etat, prestations sociales versées par l'Etat, prestations et versements facultatifs), alors que le budget de la coopération comportait sept chapitres.

. En ce qui concerne les frais de réception et de déplacement , c'est également la présentation du Ministère des affaires étrangères qui a été retenue (frais de réceptions et de voyages exceptionnels, réceptions courantes et déplacements ministériels, frais de déplacement (des personnels) ), alors que le budget de la coopération ne comportait qu'un chapitre, "frais de réceptions et déplacements ministériels".

. Les moyens destinés au fonctionnement des services distinguent, comme la dotation des affaires étrangères, les dépenses relatives au "matériel et au fonctionnement courant", ainsi que les dépenses informatiques, alors que la dotation de la coopération ne comportait dans ce domaine qu'un chapitre, "moyens de fonctionnement des services".

. Les subventions de fonctionnement inscrites au projet de budget pour 1999 regroupent en un chapitre unique, comme dans le budget du Quai d'Orsay, les subventions à l'AEFE, à l'OFRA et à l'OUCFA (la dotation de la coopération s'appuyait sur deux chapitres, l'un relatif à l'AEFE, l'autre aux établissements culturels).

. Sous la rubrique " dépenses diverses" figurent désormais les réparations civiles et les frais de justice, ainsi que les indemnités des représentants français au Parlement européen, précédemment inscrites dans cette partie du budget des affaires étrangères, et un chapitre nouveau constitué des dotations des établissements culturels, de coopération et de recherche à l'étranger. Ces dernières figuraient auparavant sur deux chapitres distincts, le chapitre 36-82 du budget de la coopération, et le chapitre 42-10 du budget des Affaires étrangères.

- Le titre IV du projet de budget des affaires étrangères pour 1999 procède également de la logique de fusion précédemment évoquée à propos du titre III.

Ces crédits d'intervention sont répartis entre les trois parties du titre IV des affaires étrangères : interventions politiques et administratives, action internationale, et action sociale-assistance et solidarité.

. Les " interventions politiques et administratives" regroupent désormais les moyens consacrés par le Ministère des affaires étrangères à la promotion de Strasbourg, capitale parlementaire européenne, ainsi que les concours financiers de la "rue Monsieur".

. L'" action internationale " recouvre l'ancien chapitre 42-10 du budget du Quai d'Orsay ("action culturelle et aide au développement") ainsi que l'ancien chapitre "coopération technique" du budget de la coopération. Ces chapitres sont fusionnés et répartis entre les nouveaux chapitres 42-11 (coopération culturelle et scientifique), 42-12 (coopération technique au développement) et 42-14 (subventions aux opérateurs de l'action audiovisuelle). Les chapitres de la "rue Monsieur" consacrés à la coopération privée et décentralisée ainsi qu'au transport de l'aide alimentaire figurent dans l'action internationale du budget rénové. Cette partie reprend les deux chapitres relatifs aux contributions aux organisations internationales (contributions obligatoires et contributions volontaires), et fusionne en un chapitre unique les moyens consacrés à la coopération militaire et de défense par les deux ministères. Les "autres interventions de politique internationale" reprennent, sous un intitulé modifié, les "interventions de politique internationale" qui figuraient au chapitre 42-37 du budget des affaires étrangères.

. La partie " action sociale-assistance et solidarité" du budget rénové est composée de deux chapitres hérités du budget du Quai d'Orsay (frais de rapatriement, et assistance aux Français de l'étranger et aux réfugiés étrangers en France).

. Les dépenses en capital sont réparties d'une part, entre les chapitres du titre V destinés aux "équipements administratifs et divers" (chapitres 52-10 du budget des affaires étrangères et du budget de la coopération), et les chapitres du titre VI consacrés aux subventions d'investissements hors de métropole. Le titre VI du budget rénové regroupe le chapitre 68-80 du budget du Quai d'Orsay, relatif aux subventions d'investissement relevant de l'action culturelle extérieure et de la coopération internationale (alliances françaises, coopération multilatérale dans le domaine de la recherche...), et le chapitre 68-91 du budget de la coopération, relatif au Fonds d'aide et de coopération.

b) Une dotation en baisse

Le budget des affaires étrangères rénové baissera en 1999 de - 0,7 % en francs courants (soit - 146 millions de francs) par rapport à la somme des crédits des affaires étrangères et de la coopération en 1998 : 20,78 millions de francs en 1999, au lieu de 20,92 millions de francs en 1998 (14,43 pour les affaires étrangères et 6,49 pour la coopération).

Cette diminution recouvre une évolution contrastée des deux dotations. En effet, les crédits destinés à l'ex-coopération baisseront de - 7 % (et alors que les moyens du Quai d'Orsay hors coopération augmenteront de + 2,5 % en francs courants). La situation est donc plus favorable pour les affaires étrangères, dont les crédits avaient diminué de - 0,2 % entre 1997 et 1998, que pour la coopération , dont la chute sévère des crédits prévue pour 1999 succède à la baisse, plus modérée mais sensible, de - 3,4 % entre 1997 et 1998.

Les deux tableaux ci-après montrent l'incidence budgétaire de la fusion affaires étrangères-coopération selon que l'on compare le projet de budget pour 1999 à la somme des deux dotations de 1998 (tableau n° 1), ou selon que l'on se réfère au budget de 1998 établi en fonction des normes de 1999, c'est-à-dire à structures budgétaires constantes (tableau n° 2). La baisse du budget rénové (- 0,7 %) recouvre, pour les affaires étrangères et la coopération :

- une augmentation du titre III de quelque 8 % en 1999 par rapport à la somme des deux dotations de 1998, et de 4,8 % à structures budgétaires constantes ;

- une augmentation de l'ensemble des rémunérations (de plus de 5 %) en dépit de la contraction des effectifs ;

- une augmentation des crédits destinés au matériel et au fonctionnement des services (frais de déplacement et de réception, fonctionnement courant) de l'ordre de 2 % par rapport à la somme des deux dotations de 1998, et de 0,9 % à structures budgétaires constantes ;

- une baisse des moyens destinés à l' informatique (- 2,4 % à structures budgétaires constantes) ;

- une baisse du titre IV, liée pour l'essentiel à la contraction des concours financiers. La baisse du titre IV est de près de - 5 % en 1999 par rapport à la somme des deux dotations (affaires étrangères + coopération) de 1998. Elle est de près de - 3 % à structures budgétaires constantes. Ainsi les crédits relatifs aux "interventions politiques et administratives" tiennent-ils compte, à structures budgétaires constantes, du transfert vers la partie "action internationale" de la dotation destinée à la coopération militaire et de défense. C'est pourquoi les crédits concernant les "interventions politiques et administratives" baissent de - 50 % à structures budgétaires constantes, et de - 77 % si l'on se réfère à la somme des dotations de 1998.

- une baisse des dépenses en capital (environ - 10 %), due principalement à la diminution des crédits du Fonds d'aide et de coopération (- 21,9 %).

2) Evolution du budget des affaires étrangères à structures budgétaires constantes (budget de 1998 à partir des structures de 1999)

 

LFI 1998
(Affaires étrangères + coopération)

PLF 1999
(Affaires étrangères + coopération)

Evolution 1999/1998

Rémunérations et charges sociales

4,704

4,952

+ 5,2 %

Matériel et fonctionnement des services

1,469

1,483

0,95 %

Subventions de fonctionnement et dépenses diverses

2,363

2,511

+ 6,2 %

TOTAL TITRE III

8,538

8,949

+ 4,8 %

Interventions politiques et administratives

0,598

0,294

- 50,8 %

Action internationale

9,295

9,292

- 0,04 %

Action sociale

0,131

0,142

+ 8,4 %

TOTAL TITRE IV

10,029

9,732

- 2,97 %

TOTAL TITRES V ET VI

2,352

2,092

- 11 %

TOTAL

20,92

20,77

- 0,7 %

2. Les économies imposées à un budget non prioritaire

Le budget des affaires étrangères, coopération comprise, diminue en 1999 par rapport au précédent exercice. Cette évolution traduit le fait que le ministère des affaires étrangères n'est pas considéré par l'actuel gouvernement comme un budget prioritaire , ce que votre rapporteur déplore vivement. Ainsi la part du budget des affaires étrangères rénové (coopération comprise) dans le budget de l'Etat connaîtra-t-elle une nouvelle baisse en 1999, s'établissant alors à 1,28 % du budget de l'Etat au lieu de 1,31 % en 1998 pour la somme des crédits du Quai d'Orsay et de la rue Monsieur.

La baisse des crédits des affaires étrangères prévue en 1999 résulte d'importantes économies , destinées à faire face à des dépenses incompressibles qui représentent une part importante de la dotation.

. L'accord salarial conclu en février 1998 pour la fonction publique se traduira en 1999 par une augmentation des rémunérations, de 115 millions de francs . Les charges supplémentaires liées à l'effet change , calculé sur la base d'un dollar à 6,07 francs (5,66 francs en 1998), s'élèveront en 1999 à 313 millions de francs, dont 101 millions de francs au titre des seules rémunérations.

.
Par ailleurs, le budget des Affaires étrangères est caractérisé par d' importantes rigidités , qui rendent difficile le recours à des variables d'ajustement dont le montant est au demeurant modeste.

Ainsi la somme des rémunérations et des cotisations sociales représentait-elle en 1998 29,9 % du budget des affaires étrangères stricto sensu. Elle représentera en 1999 23,8 % de la dotation rénovée.

En 1998, le total cumulé des rémunérations (charges sociales comprises) et des contributions obligatoires aux organisations internationales (dont le montant se déduit mécaniquement de la quote-part de la France au budget de ces organisations) s'élevait à 7,48 milliards de francs, soit plus de la moitié (52 %) du budget des affaires étrangères de cet exercice. En 1999, ces crédits s'établiront à 8,1 milliards de francs, soit 39 % du budget rénové.

. Compte tenu de cette contrainte, les économies prévues en 1999 affectent :

- les moyens consacrés à l' ajustement structurel (- 305 millions de francs sur le chapitre 41-43),

- le Fonds d'aide et de coopération (- 55 millions de francs sur le chapitre 68-91/10) et l' Agence française de développement (- 174 millions de francs sur le chapitre 68-91/40).

Ces aspects de la dotation, plus particulièrement destinés aux pays ACP relevant du "champ" d'intervention de l'ancien ministère de la coopération, font l'objet d'un rapport auquel votre rapporteur se permet de renvoyer (voir le rapport pour avis de Mme Paulette Brisepierre sur les crédits du Ministère délégué à la coopération et à la francophonie), tout en doutant de la pertinence du choix de ces dépenses comme "variable d'ajustement" du budget des affaires étrangères . En effet, les besoins croissants des pays ACP et l 'ampleur de la crise africaine ne paraissent pas autoriser, contrairement à la présentation faite par le gouvernement du budget des affaires étrangères, à tirer les conséquences d'une amélioration -encore très théorique- de la situation des pays destinataires de cette aide.

. Sont , en revanche , préservés :

- les moyens affectés à la coopération culturelle et scientifique qui font l'objet du rapport pour avis de M. Guy Penne (chapitre 42-12),

- ainsi que les crédits destinés à la solidarité avec les Français de l'étranger (chapitre 46-94).

. Parallèlement font l'objet d'un certain effort :

- les cotisations volontaires aux organisations internationales (+ 22 % sur le chapitre 42-32),

- les moyens consacrés à l' audiovisuel extérieur (chapitre 42-14) : + 130 millions de francs),

- la coopération militaire et de défense (chapitre 42-29) hors pays ACP (+ 29 millions de francs).

. On remarque, enfin, que la réduction du nombre et du coût des opérations de maintien de la paix se traduira, en 1999, par une économie "mécanique" de 105 millions de francs sur le chapitre des contributions obligatoires (qui pourrait néanmoins, en fonction de l'évolution de la situation internationale, ne pas être reconduite en 2000).

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