III. LES CRÉDITS DE LA DISSUASION NUCLÉAIRE

La révision de la posture nucléaire de la France devait logiquement se traduire par une diminution des ressources consacrées à la dissuasion nucléaire. Cette décrue, largement entamée au début de la décennie, devrait se poursuivre tout au long de la programmation, le part du budget de la défense consacrée aux forces nucléaires devant s'établir, en 2002, à moins de 20 % du titre V, contre 31,4 % en 1990 et 21,9 % en 1996.

Du fait d'un décrochage beaucoup plus rapide que prévu, ce niveau a été atteint dès 1999, les crédits du nucléaire ayant alors atteint un niveau historiquement bas.

A. L'ÉVOLUTION GÉNÉRALE : UN NIVEAU DE CRÉDITS HISTORIQUEMENT BAS

Les dotations consacrées à la dissuasion nucléaire en 2000 s'élèvent à 18,4 milliards de francs d'autorisations de programme (+ 38,1 % par rapport à 1999) et à 15,8 milliards de francs en crédits de paiement (- 4,6 %). S'agissant des autorisations de programme, la forte augmentation succède à deux années de très forte réduction (- 17,9 % en 1998 et - 19,2 % en 1999), la dotation ayant été ramenée à 13,3 milliards de francs l'an passé. La dotation prévue en 2000 restera en tout état de cause inférieure à celle de 1997. En ce qui concerne les crédits de paiement, leur diminution confirme l'érosion continue constatée depuis 1990, l'année 1998 ayant toutefois marqué un net décrochage.

Le tableau ci-dessous illustre la décrue très rapide des crédits du nucléaire au cours des 10 dernières années. Il est exprimé en francs courants, mais si l'on tient compte de l'érosion monétaire, c'est-à-dire si l'on raisonne en francs constants, on constate que dès 1998, les crédits de paiement inscrits dans les lois de finances initiales ont atteint un niveau inférieur de moitié à celui de 1992.

Évolution des dotations consacrées au nucléaire depuis 1988 dans les lois de finances initiales (en millions de francs courants)

 

Autorisations de programme

% du titre V

Crédits de paiement

% du titre V

1988

30 350

28,7

30 546

33,6

1989

33 122

29,6

31 528

32,2

1990

31 320

27,0

32 089

31,4

1991

31 333

27,0

31 066

30,1

1992

26 186

25,5

29 896

29,0

1993

21 824

21,2

26 447

25,7

1994

20 502

22,0

21 677

22,8

1995

19 464

20,5

20 745

21,9

1996

18 479

20,8

19 452

21,9

1997

20 116

22,7

19 149

21,6

1998

16 508

20,4

16 628

20,5

1999

13 336

15,5

16 624

19,3

2000

18 423

21,1

15 855

19,1

Dès 1998, les crédits inscrits en loi de finances initiale ont nettement décroché par rapport à la loi de programmation.

Au cours de l'exercice 1998, le nucléaire a contribué pour plus du quart à " l'encoche " opérée dans les crédits de Défense. Un abattement supérieur à 2 milliards de francs avait été opéré, avec les conséquences suivantes :

- pour la FOST, le décalage d'un an du 3e SNLE-NG, l'étalement de l'adaptation opérationnelle des SNLE de génération actuelle ainsi qu'une réduction des travaux et rechanges, un moratoire d'un an sur le programme d'adaptation des SNLE-NG au missile M 51 et sur le développement du missile lui-même,

- pour la direction des applications nucléaires du CEA, le ralentissement des opérations de démantèlement de l'usine de production d'uranium enrichi de Pierrelatte et de la récupération des matières nucléaires, la réduction des programmes de recherche-amont et des programmes de simulation effectués avec les matériels actuels, ainsi que le décalage d'un certain nombre d'expérimentations (non-nucléaires) liées à la mise au point des charges de renouvellement.

Une réduction de crédits supplémentaire représentant pour les quatre annuités restant à courir de la loi de programmation, une économie globale de 3,4 milliards de francs a été décidée dans le cadre de la revue de programmes. Cet abattement représente près de 5 % de l'enveloppe prévue en programmation pour ces quatre annuités, ce qui ajouté à "l'encoche" pratiquée en 1998 aboutirait à réduire de 5 % par rapport à la loi sur l'ensemble de la période 1997-2002, les crédits consacrés au nucléaire.

L'essentiel des économies a été obtenu par une optimisation des programmes SNLE-NG et M 51 , dont les calendriers ont été aménagés de manière à se rejoindre en 2008, le 4e SNLE-NG étant directement équipé du M 51, soit deux ans avant la date prévue.

L'anticipation de la livraison du M 51 doit permettre plusieurs types d'économies :

- le programme d'adaptation des SNLE-NG au M 51 se limitera à 3 bâtiments et non à 4, puisque le 4e sous-marin recevra directement le M 51,

- le retrait deux ans avant l'échéance normale des missiles M 45 et de la TN 71 permettra également d'importants gains financiers, par exemple en évitant le remplacement pour cause de vieillissement des propulseurs à poudre d'une partie des missiles.

L'économie ainsi réalisée sur la composante océanique de la dissuasion se monterait, d'ici 2015, à 5,5 milliards de francs se décomposant comme suit :

- 2,4 milliards de francs liés à la simplification du développement et de l'industrialisation du M 51,

- 1,2 milliard de francs sur la construction du 4e SNLE-NG, 1,5 milliards de francs étant obtenu grâce à l'abandon du programme d'adaptation au M 51 alors que parallèlement le coût de construction sera majoré de 300 millions de francs,

- 1,9 milliard de francs obtenu par le retrait anticipé de missiles M 45 et de la TN 71.

La " revue de programmes " s'est également traduite par une réduction supplémentaire imposée aux crédits de maintien en condition opérationnelle et surtout une diminution de 20 % des crédits d'études amont consacrées à la dissuasion.

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