CHAPITRE II :

LE CONTEXTE DU BUDGET DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR POUR 2001

A. UN CONTEXTE NOUVEAU : LA BAISSE DU NOMBRE DES ÉTUDIANTS

1. L'évolution récente du nombre des étudiants (1994-1999)

Rappelons que le nombre d'étudiants avait augmenté de 76% entre les entrées 1980-1981 et 1994-1995.

Cette forte progression, qui résultait des effets combinés de la démographie, d'une part, des progrès de la scolarisation dans le second degré général et technologique, d'autre part, ne fut d'ailleurs pas propre à la France, comme le montre le tableau ci-après.

Progression du nombre des étudiants entre les rentrées 1980-1981 et 1994-1995

Portugal

234%

Autriche

71%

Grèce

145%

Belgique

63%

Irlande

121%

Italie

59%

Royaume-Uni

119%

Danemark

48%

Espagne

119%

Suède

45%

Finlande

81%

Allemagne

41%

France

76%

Pays-Bas

38%

Union européenne à 15

75%

Source : Eurostat

Au sein des pays de l'Union européenne, la France se singularise toutefois par la proportion de femmes parmi les étudiants de l'enseignement supérieur.

Ratio femmes/hommes parmi les étudiants de l'enseignement supérieur
en 1994-1995

Portugal

1,31

Union européenne à 15

1,03

France

1,22

Belgique

0,98

Suède

1,22

Grèce

0,98

Finlande

1,12

Irlande

0,97

Espagne

1,11

Autriche

0,92

Italie

1,10

Pays-Bas

0,89

Danemark

1,08

Allemagne

0,77

Royaume-Uni

1,04

Source : Eurostat

Quoi qu'il en soit, la progression du nombre des étudiants s'est ralentie, puis inversée à partir du milieu des années 1990.

Jusqu'en 1993, l'enseignement supérieur s'était en effet développé à un rythme soutenu. Mais la rentrée 1994 a amorcé une phase de décélération (+ 2,1 %, puis + 1,7 % en 1995) et, pour la première fois en 1996, le nombre d'inscrits dans l'enseignement supérieur a diminué (- 0,6 %). Ce recul s'est poursuivi lors des rentrées 1997 (- 1,1 %) et 1998 (- 0,6 %).

Cependant, à la rentrée 1999, la décroissance plus modérée des effectifs de l'université (hors IUT) a été largement compensée par la croissance globale dans l'ensemble des autres formations supérieures, de sorte que le nombre total d'étudiants est à nouveau en hausse par rapport à la rentrée 1998.

Notons que la baisse des effectifs depuis 1996 a été plus marquée dans les établissements publics relevant du budget de l'enseignement supérieur (respectivement - 1,7 %, - 1,3 % et - 0,3 % lors des rentrées 1997, 1998, 1999), tandis que les effectifs de l'ensemble des autres établissements ont augmenté (+ 0,7 %, + 1,2 % et + 1,8 % pour les rentrées 1997, 1998 et 1999).

Le nombre d'inscrits à l'université , de l'ordre de 1,1 million en 1990, est ainsi passé par un maximum proche de 1,4 million à la rentrée 1995. Cette croissance, qui a concerné surtout les 1 er et 2 ème cycles des disciplines générales, résultait à la fois de la préférence manifestée par des bacheliers généraux plus nombreux pour ce type d'études longues, et de l'amélioration sensible du taux d'accès en licence. Cette tendance était nette à la rentrée 1993, tout particulièrement en lettres et sciences humaines. La création des IUFM avait entraîné un afflux d'étudiants dans ces formations. La croissance des effectifs universitaires s'est ensuite réduite en 1994 et 1995.

Une rupture s'est produite en 1996. Le recul des effectifs universitaires, confirmé en 1997 et 1998, a affecté d'abord le 1er cycle puis les 2ème et 3ème cycles. Cependant, le nombre d'étudiants en 3ème cycle, stable en 1998, est en hausse sensible à la rentrée 1999. Il semblerait qu'en 1999-2000 les étudiants aient choisi de façon un peu plus importante que l'année précédente de poursuivre leurs études à l'université au-delà du 2ème cycle. Ceci a contribué à limiter la décroissance des effectifs universitaires.

Globalement, à la rentrée 1999, le nombre d'inscrits à l'université était donc proche de 1,3 million, c'est-à-dire à peu près au niveau observé lors de la rentrée 1993.

La montée en puissance des Instituts universitaires de formation des maîtres , créés en 1991, s'est nettement ralentie à la rentrée 1995 et les effectifs ont légèrement diminué depuis la rentrée 1996.

Les formations technologiques courtes (IUT et STS) ont bénéficié d'un regain d'intérêt de la part des jeunes bacheliers. Les STS ont repris leur essor en 1996 et la forte croissance observée pour les IUT en 1993 s'est également poursuivie.

Le succès manifesté pour les classes préparatoires aux grandes écoles, à la suite de la réforme de 1995, s'est prolongé en 1996 et 1997, mais les effectifs sont à nouveau en diminution en 1998-1999 et 1999-2000.

Le développement spectaculaire des formations d'ingénieurs , notamment universitaires et privées, s'est infléchi en 1994. La croissance s'est ensuite atténuée, mais elle a repris à la rentrée 1998.

Enfin, pour les écoles de commerce, gestion, vente et comptabilité , la désaffection survenue à la rentrée 1993 s'est ralentie ensuite et la reprise a été nette en 1998 et 1999.

Effectifs de l'enseignement supérieur France sans TOM

TYPE D'ETABLISSEMENT

1994-95

1995-96

1996-97

1997-98

1998-99

1999-00

.Universités (hors IUT)

(ingénieurs universitaires compris)

1 353 445

1 382 491

1 360 836

1 331 181

1 309 808

1 302 228

Accroissement en nombre

35 316

29 046

-21 655

-29 655

-21 373

-7 580

Accroissement en %

2,7%

2,1%

-1,6%

-2,2%

-1,6%

-0,6%

IUT

98 620

103 092

108 587

112 857

114 587

117 407

Accroissement en nombre

5 742

4 472

5 495

4 270

1 730

2 820

Accroissement en %

6,2%

4,5%

5,3%

3,9%

1,5%

2,5%

.IUFM (1)

82 966

86 068

85 885

83 134

81 602

81 981

Accroissement en nombre

8 350

3 102

-183

-2 751

-1 532

379

Accroissement en %

11,2%

3,7%

-0,2%

-3,2%

-1,8%

0,5%

.Ecoles d'ingénieurs publiques MEN

42 357

43 836

44 646

46 218

48 542

50 340

Accroissement en nombre

1 468

1 479

810

1 572

2 324

1 798

Accroissement en %

3,6%

3,5%

1,8%

3,5%

5,0%

3,7%

- dont universitaires

23 257

24 186

24 839

25 979

27 520

29 378

- dont indépendantes des universités

19 100

19 650

19 807

20 239

21 022

20 962

.Ecoles normales supérieures

2 970

3 051

3 065

3 215

3 246

3 209

Accroissement en nombre

176

81

14

150

31

-37

Accroissement en %

6,3%

2,7%

0,5%

4,9%

1,0%

-1,1%

Ensemble budget enseignement supérieur (3)

1 557 101

1 594 352

1 578 180

1 550 626

1 530 265

1 525 787

Accroissement en nombre

50 059

37 251

-16 172

-27 554

-20 361

-4 478

Accroissement en %

3,3%

2,4%

-1,0%

-1,7%

-1,3%

-0,3%

.STS

232 675

230 239

235 843

238 907

240 067

242 385

.CPGE (4)

71 553

76 417

78 839

79 439

77 856

77 302

.Ecoles d'ingénieurs publiques autres ministères

12 985

13 115

13 202

13 496

13 928

14 219

.Ecoles d'ingénieurs privées

18 461

18 689

18 993

19 384

20 484

21 192

.Préparations intégrées

2 151

2 209

2 445

2 380

2 639

2 926

.Ecoles de commerce, gestion, vente et comptabilité

54 595

50 668

47 293

46 987

51 329

56 303

.Etablissements universitaires privés

21 867

22 129

22 327

21 893

22 397

22 237

.Ecoles d'architecture

18 620

18 988

18 787

18 564

18 176

17 408

.Ecoles supérieures artistiques et culturelles (2)

30 886

31 308

28 344

30 406

30 336

31 715

.Ecoles paramédicales et sociales (5)

84 047

86 429

86 234

84 036

83 660

83 652

.Autres écoles de spécialités diverses

28 753

24 992

25 265

26 315

28 071

30 462

Ensemble autres établissements

576 593

575 183

577 572

581 807

588 943

599 801

Accroissement en nombre

-6 636

-1 410

2 389

4 235

7 136

10 858

Accroissement en %

-1,1%

-0,2%

0,4%

0,7%

1,2%

1,8%

Ensemble (3)

2 133 694

2 169 535

2 155 752

2 132 433

2 119 208

2 125 588

Accroissement en nombre

43 423

35 841

-13 783

-23 319

-13 225

6 380

Accroissement en %

2,1%

1,7%

-0,6%

-1,1%

-0,6%

0,3%

(1) Hors instituteurs en formation professionnelle spécifique à temps partiel.

(2) Estimation des effectifs en 1995-1996.

(3) Sans double compte des écoles d'ingénieurs dépendantes des universités.

(4) Y compris DECF.

(5) Estimation des effectifs de l'Ile-de-France en 1998-1999. Les résultats de l'année 1999-2000 n'étant pas disponibles, les données définitives de l'année précédente ont été reportées.

Effectifs universitaires par discipline et cycle France sans TOM

1994-95

1995-96

1996-97

1997-98

1998-99

1999-00

Constat

Constat

Constat

Constat

Constat

Constat

Université (hors IUT mais y compris

1 353 445

1 382 492

1 360 856

1 331 182

1 309 808

1 302 228

ingénieurs universitaires)

- dont premier cycle

677 569

686 353

656 052

631 282

616 493

606 320

- dont deuxième cycle

466 519

490 090

496 029

494 423

487 621

484 243

- dont troisième cycle

209 357

206 049

208 755

205 477

205 694

211 665

- dont droit

199 078

197 664

191 940

186 356

183 839

184 586

- dont sciences économiques, AES

157 013

161 709

156 116

153 327

153 171

158 135

- dont lettres, sciences humaines

512 783

529 412

522 887

512 449

502 498

493 797

- dont sciences

315 959

320 346

315 195

302 756

289 712

283 709

- dont STAPS

15 637

20 549

27 698

33 491

38 769

42 877

- dont santé

152 975

152 811

147 000

142 803

141 819

139 124

Source : ministère de l'Education nationale

2. Les perspectives d'évolution du nombre des étudiants (2000-2009)

La direction de la programmation et du développement du ministère de l'Education nationale réalise des projections à dix ans du nombre des étudiants des principales filières de l'enseignement supérieur public.

Les projections détaillées ci-après ont été réalisées avant les résultats définitifs du baccalauréat 2000, qui ont été légèrement meilleurs que prévus. De ce fait, ces projections sous-estiment légèrement le nombre d'étudiants pour l'année 2000-2001.

Par ailleurs, ces projections reposent sur deux hypothèses déterminantes 9 ( * ) :

- d'une part, la propension des bacheliers généraux et technologiques à entreprendre des études dans les principales filières du supérieur continuerait de diminuer légèrement en début de période (- 0,6 point de 1999 à 2004, après - 0,9 point entre 1998 et 1999) puis remonterait en 2005 pour se stabiliser ensuite ;

- d'autre part, les choix d'orientation observés à la rentrée 1999 devraient se maintenir . Au terme de 10 ans (en 2009), le taux global d'accueil des bacheliers généraux et technologiques se situerait à 88,7 % (89 % en 1999). Cette quasi-stabilité résulterait toutefois d'une légère diminution des taux d'accueil des bacheliers généraux en université hors IUT entre 2000 et 2003, au profit des IUT.

Sous ces hypothèses " tendancielles ", le nombre des étudiants pourrait évoluer comme suit :

Projections des effectifs dans les principales filières de l'enseignement supérieur
(France sans TOM)

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

Universités (hors IUT et IUFM)

1.309.808

1.302.228

1.296.800

1.291.500

1.282.100

1.271.900

1.270.200

1.267.900

1.265.000

1.263.500

1.262.600

1.261.400

- dont 1 er cycle

616.493

606.320

601.100

595.100

587.500

580.600

582.600

584.600

583.000

580.700

577.900

575.200

- dont 2 ème cycle

487.621

484.243

483.900

483.900

481.500

478.900

476.600

472.400

472.300

473.900

475.000

475.100

- dont 3 ème cycle

205.694

211.665

211.800

212.500

212.700

212.400

211.000

210.900

209.700

208.900

209.700

211.100

IUT

114.587

117.407

118.000

118.600

118.900

118.300

119.100

120.400

120.300

119.500

118.900

118.200

- dont IUT secondaire

50.679

51.879

51.900

51.800

52.000

51.800

52.300

52.900

52.900

52.500

52.200

51.900

- dont IUT tertiaire

63.908

65.528

66.100

66.800

66.900

66.500

66.800

67.500

67.400

67.000

66.700

66.300

CPGE

71.373

70.855

70.100

69.400

69.800

68.000

68.700

69.200

69.100

68.600

68.100

67.700

STS

246.595

248.877

250.800

251.600

251.200

249.400

250.700

253.000

252.300

250.900

249.800

248.700

- dont STS production

89.904

90.036

90.500

91.100

91.300

90.900

91.600

92.500

92.300

91.800

91.400

91.100

- dont STS services

156.691

158.841

160.300

160.500

159.900

158.500

159.100

160.500

160.000

159.100

158.400

157.600

Ensemble (hors IUFM)

1.742.363

1.739.367

1.735.700

1.731.100

1.721.000

1.707.600

1.708.700

1.710.500

1.706.700

1.702.500

1.699.400

1.696.000

Les filières sélectives, dans leur ensemble, verraient leurs effectifs diminuer de 2 500 étudiants entre 1999 et 2009. Seule la filière IUT progresserait (+ 800), et uniquement dans la spécialité des Services. Le nombre d'étudiants en STS serait stable sur cette même période, alors que les classes préparatoires verraient leurs effectifs diminuer de 3 200 jeunes. Cependant, en STS et en IUT, les effectifs croîtraient les six premières années (2000-2005) pour diminuer ensuite.

Le nombre d'étudiants en université hors IUT diminuerait tout au long de la période et cette filière accueillerait 40 800 étudiants de moins en 2009.

Le recul des effectifs du premier cycle universitaire devrait ainsi se poursuivre jusqu'en 2003 (- 5 100 étudiants par an en moyenne sur 4 ans). Puis ce cycle connaîtrait deux années de croissance, suite à l'augmentation du nombre de bacheliers. En fin de période, le nombre d'étudiants diminuerait de nouveau (- 2 300 étudiants par an en moyenne sur 4 ans).

Ces mouvement d'effectifs se retrouveraient, de manière décalée, dans les deux autres cycles. La prolongation de la tendance à la hausse du taux d'accès en deuxième cycle entraînerait une stabilisation de ses effectifs pour les deux années à venir, puis ils commenceraient à décroître dès 2003 et progresseraient à nouveau en 2007.

En troisième cycle, après la forte croissance observée cette année, une très légère augmentation des effectifs est attendue pour les trois prochaines années, suivie d'une diminution pendant 5 ans. Le nombre d'étudiants inscrit dans ce cycle serait à nouveau plus élevé en 2008.

Au total, les effectifs universitaires pourraient s'établir aux environs de 1 261 400 en 2009. La diminution attendue affecterait principalement les disciplines littéraires et, dans une moindre mesure, les formations scientifiques et juridiques. En revanche, les sciences économiques, l'Administration Economique et Sociale (AES) et les Sciences et Techniques des Activités Physiques et Sportives (STAPS) verront sans doute leurs effectifs totaux augmenter.

3. Une tendance préoccupante : la désaffection des filières scientifiques

Entre la rentrées 1995-1996 et la rentrée 1999-2000, le nombre total d'étudiants dans les disciplines scientifiques à l'université s'est réduit au total de 9,6%, alors que le nombre total des étudiants des universités ne diminuait que de 5,3%.

Cette évolution résulte principalement de l'effondrement des inscriptions en DEUG scientifique (-14% entre les rentrées 1995-1996 et 1999-2000), cette évolution s'étant d'ailleurs accélérée à la rentrée 1999-2000, puisque le nombre d'inscrits en DEUG sciences et technologies a connu une baisse de plus de 6%.

Cette baisse s'explique pour partie par la diminution du nombre de bacheliers.

Mais cette baisse résulte aussi d'une propension croissante des bacheliers scientifiques à s'orienter vers d'autres formations que les DEUG scientifiques, comme les classes préparatoires, les écoles d'ingénieurs, les filières courtes (STS, IUT), les études de médecine, voire le droit, cette propension étant elle-même pour partie imputable aux taux d'échec élevés observés en DEUG scientifique : le taux de passage à la fin de la première année du DEUG de sciences de la nature et de la vie n'est ainsi que de 37% à l'issue de la première année, et celui en DEUG de sciences et technologie n'est que de 39 %.

Pour y remédier, le ministère a engagé des campagnes d'information, à destination notamment des lycéennes.

Par ailleurs, six universités volontaires se sont engagées dans une rénovation complète de leurs DEUG scientifiques, avec la mise en place de " petits groupes ", et le développement de nouvelles pratiques pour l'enseignement des sciences expérimentales.

Le premier bilan de ces expériences est plutôt favorable.

En outre, le ministère envisage la mise en place de nouveaux DEUG pluridisciplinaires, afin de faciliter les réorientations.

A bien des égards, ce phénomène est toutefois le signe avant-coureur d'une évolution inéluctable. En effet, la demande d'enseignement supérieur diminue, alors que l'offre progresse. Dans ces conditions, les étudiants sont de plus en plus en mesure de choisir, ce qui peut se traduire par des mouvements de désaffectation rapides et massifs envers certaines formations, ou certains établissements. Il convient donc d'anticiper au maximum ces évolutions en conduisant résolument une politique d'amélioration de la qualité des enseignements.

* 9 Cf. " Prévisions à deux ans des principales filières de l'enseignement supérieur " , Note d'information DPD, n°34, septembre 2000.

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