CHAPITRE II :

UN BUDGET QUI N'EST PAS MAÎTRISÉ

En apparence, la variation des crédits du BAAC entre 2000 et 2001 semble modérée. Mais, ceci provient de l'utilisation habile de changements de périmètre et cette modération, qui est en toute hypothèse très relative, n'apparaît pas durable.

L'expérience montre qu'il est en effet bien difficile de maîtriser les dépenses du budget annexe. En corollaire, la progression des recettes affectées aux différents comptes retraçant l'intervention publique dans le transport aérien appartient largement à un jeu d'illusion. Votre rapporteur spécial a souhaité s'inscrire dans une démarche positive. Comme parlementaire sa fonction est de contrôler l'usage des crédits du budget annexe. En ce sens, il conduit comme il l'avait annoncé, une mission d'évaluation consacrée au contrôle aérien qu'il entend situer dans son contexte européen.

Il est trop tôt pour divulguer les résultats de cette mission. Mais d'ores et déjà, se dégage un vrai besoin d'évaluation, qui concerne l'ensemble des systèmes de contrôle aérien d'Europe.. Sans souscrire à toutes les suggestions de la commissaire européenne aux transports, votre rapporteur spécial s'inquiète de la teneur des réactions de la France à son initiative relative à la création " du ciel unique européen ". Il en rappelle les principales lignes :

- la création d'une autorité réglementaire communautaire forte (la convention révisée d'Eurocontrol prévoit que l'organisation édicte des réglementations de sécurité de la navigation aérienne) ;

- la mise en place d'une réglementation de l'espace aérien, et d'un mécanisme d'organisation et de gestion de l'espace aérien et du réseau de routes au niveau européen, autant que possible au niveau communautaire ;

- l'instauration d'une séparation fonctionnelle entre les autorités réglementaires et les opérateurs de services de contrôle aérien nationaux.

S'il est bien vrai que les solutions permettant de faire face à la croissance du trafic relèvent largement de la technique et que la séparation entre opérateurs et régulateurs peut poser des problèmes, il n'en reste pas moins que la position de la France ne doit, ne peut être celle d'une forteresse assiégée. Des harmonisations sont nécessaires et il n'est pas sûr qu'elles puissent intervenir dans un organe de simple coordination. La dimension technique est essentielle mais les aspects économiques ne le sont pas moins et l'efficience n'est pas synonyme de pertes d'efficacité.

La France ne doit pas gâcher ses atouts en négligeant d'améliorer ses performances par une quête sans limite d'une maximisation des produits d'un monopole qui n'est pas irrévocable.

Le budget annexe est, avant tout, l'affaire des usagers du transport aérien, compagnies mais aussi clients de celles-ci. Votre rapporteur spécial entend à ce propos rappeler que si son rôle est de faire progresser l'attention portée à l'intérêt général, il lui apparaît parfois bien lourd lorsqu'il observe une certaine apathie chez certains qui, en charge des intérêts commerciaux de leurs usagers, devraient pourtant manifester une grande vigilance quant au financement des infrastructures de transport aérien. Il considère aussi que ce financement devrait être entouré d'une vraie concertation qui mériterait de fonctionner sans failles.

Il faut également consacrer la vocation de prestataire de services de la direction générale de l'aviation civile pour celles de ses missions qui relèvent de cette catégorie. Il faut enfin que cette administration qui, sauf contredit, n'a pas la volonté de sortir de la sphère publique adopte des comportements mieux en rapport avec ceux d'un ensemble auquel elle se dit attachée. Cela conduit à recommander la mise en chantier d'une vraie modernisation de son management.

I. LA POURSUITE DE L'ACCROISSEMENT DES CHARGES DE PERSONNEL

Le BAAC est, pour moitié, un budget de rémunérations. Les charges de personnel s'accroîtraient de près de 3,9 % par rapport à 1999 3 ( * ) après une augmentation moyenne de 5,6 % au cours des deux dernières années (successivement 6 et 5 % entre 1997 et 1998 et 1998 et 1999).

Evolution des charges de personnel depuis 1995

(en millions de francs)

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Evolution 2001/1995

Evolution
2001/2000

3.311,6

3.632,5

3.766

3.990,6

4.198,8

4.361,1

4.559,9

+ 37,6 %

+ 4,6 %

La hausse des charges salariales s'explique largement par la négociation périodique de protocoles sociaux triennaux qui donne lieu à des tensions auxquelles les gouvernements successifs se sont toujours montrés très soucieux d'apporter une réponse non conflictuelle.

En 1998, dernière année de traduction budgétaire du précédent protocole triennal du 3 novembre 1994, les charges de personnel étaient supérieures d'1/5 ème au niveau atteint en 1995, première année d'application du protocole triennal.

A. LE PROTOCOLE DU 3 NOVEMBRE 1997

Un nouveau protocole a été conclu le 3 novembre 1997 qui produira lui-même un accroissement important des charges.

Ce protocole comporte en effet de nombreuses dispositions allant dans ce sens. Il s'agit d'abord des recrutements qui, tels que programmés dans le protocole, représentaient une augmentation de 5 % des effectifs.

Recrutements DGAC associés au protocole du 3 novembre 1997

Corps

1998

1999

2000

Total

ICNA

80

80

110

270

TEEAC

70

70

70

210

IESSA

30

30

30

90

IAC

4

4

4

12

IEEAC

12

12

12

36

ADM.C

1

1

1

3

ATT.

5

5

6

16

ASSIS.

8

9

9

26

ADJ.

15

15

15

45

OUVRIERS

18

21

27

66

INFIRMIERS

-

1

-

1

ASSIS. SOC.

-

1

-

1

Total

243

249

284

776

Questionnée sur l'impact financier du protocole, la DGAC a fourni le tableau suivant.

Charges nouvelles annuelles résultant du nouveau protocole DGAC

(en millions de francs)

Années

1998

1999

2000

Créations d'emplois

13

35

100

mesures catégorielles

107

114

118

TOTAL

120

149

218

Le niveau des charges de personnel devait donc être augmenté de 120 millions de francs en 1998 puis de 149 et 218 millions de francs, en 1999 et 2000 respectivement, par rapport à une situation sans protocole catégoriel.

Un nouveau protocole est en cours de négociation. Votre rapporteur spécial a interrogé le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur la teneur des négociations lors de son audition par la commission des finances du Sénat le mardi 21 novembre 2000. Le ministre n'a pas répondu sur les conséquences budgétaires du nouveau protocole. Votre rapporteur spécial ayant procédé à quelques échanges avec les organisations syndicales peut faire état de leurs revendications qui concernent le niveau des effectifs mais aussi l'amélioration des carrières, des statuts et des régimes indemnitaires ainsi que la réduction du temps de travail et les pensions. Il est très regrettable qu'une indication, même révisable, permettant d'appréhender le poids de ces revendications n'ait pu être transmise au Parlement. Votre rapporteur spécial s'étonne en outre que les financeurs du budget annexe de l'aviation civile ne soient pas représentés dans ces négociations. Cette absence correspond sans doute à la situation statutaire des agents, dont l'Etat est l'employeur. Mais elle repose largement sur une fiction compte tenu du désengagement financier de l'Etat.

Il est tout à fait anormal que les payeurs effectifs soient écartées d'un processus déterminant du point de vue de leurs contributions futures.

La dynamique de dépenses induite par les protocoles est, il faut le souligner, retardée dans ses effets puisque le plein impact budgétaire des recrutements est reporté compte tenu de la formation initiale des contrôleurs aériens. Ainsi, les effets des recrutements prévus par le protocole de 1997 ne se traduisent donc pas encore pleinement dans les données budgétaires mais imposeront de très lourdes charges à l'avenir.

Votre rapporteur spécial ne peut que souscrire à la proposition formulée dans le cadre de la réforme de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959 de renforcer l'information du Parlement en exigeant une projection pluriannuelle des effets budgétaires des mesures nouvelles.

* 3 La masse salariale hors charges sociales augmenterait plus vite : + 4,2 %.

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