D. LA CLOTURE DU COMPTE D'AFFECTATION SPECIALE N° 902-23 " ACTIONS EN FAVEUR DU DEVELOPPEMENT DES DÉPARTEMENTS, DES TERRITOIRES ET DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES D'OUTRE-MER "

1. L'objet du compte d'affectation spéciale n° 902-23

Le compte d'affectation spéciale n° 902-23 finance, à partir de ressources constituées du solde des bénéficies nets de l'IEDOM et de l'IEOM, des versements " à des organismes publics de caractère agricole, immobilier ou social ".

Les dépenses de ce fonds depuis 1996 sont retracées dans le tableau ci-dessous :

Les dépenses CAS n° 902-23 depuis 1996

(en millions de francs)

Secteurs

Agricole

Immobilier

Social

Total

Chapitre 1 (DOM et Saint Pierre et Miquelon)

1996

3,1

25

0

28,1

1997

2,9

2,1

0

5

1998

2,9

24,8

0

27,7

1999

1

18,3

100

119,3

2000 (au 1 er septembre)

0

1

0

1

Total chapitre 1

10

71,2

100

181,1

Chapitre 2 (Nouvelle-Calédonie, TOM et Mayotte)

1996

4

26,1

9,2

39,3

1997

4,2

15

10,8

30

1998

3

14,3

20,7

38

1999

0

0

0,5

0,5

2000 (au1er septembre)

11,8

35,4

28,1

75,3

Total chapitre 2

23

90,8

69,3

183

Total général

33

162

169,3

364

Source : Assemblée nationale

Le secrétariat d'Etat à l'outre-mer a communiqué à votre rapporteur le détail des dépenses du compte en 1999 et en 2000 :

" En juillet 1999, les bénéfices nets de l'IEDOM et de l'IEOM issus de l'exercice comptable 1998, ont alimenté les recettes respectivement à hauteur de 152 MF et de 37 MF.

Les dépenses de 1999 ont été de 119,8 MF , ventilées entre d'une part le chapitre 1 pour un montant de 119,3 MF et d'autre part le chapitre 2 pour un montant de 0,5 MF.

Elles sont détaillées comme suit :

a) chapitre 1 er (DOM)

Les crédits ont été utilisés pour le Plan Vert, par un versement ultime de 1 MF en 1999 au profit de la SOFIDEG (société financière pour le développement de la Guyane), dans le cadre du plan de restructuration de l'agriculture défini par l'instruction interministérielle du 23 septembre 1989.

D'autres crédits ont été utilisés pour le financement d'opérations de réhabilitation pour 18,3 MF.

Des subventions de l'Etat prélevées sur les crédits du compte d'affectation spécial sont venues en complément d'aides issues de la LBU, de ressources d'emprunts et de fonds apportés par les sociétés immobilières des DOM à hauteur de :

- 7 MF au profit de la SIMAR (société immobilière de la Martinique

- 4,1 MF au profit de la SIDR (société immobilière du département de la Réunion)

- 4,2 MF au profit de la SIG (société immobilière de la Guadeloupe)

- 3 MF au profit de la SIMKO (société immobilière de Kourou).

Enfin, un crédit de 100 MF a été affecté à l'abondement du fonds DOM logé dans les écritures de la SOFARIS, géré par l'AFD.

b) Chapitre 2 (TOM, Nouvelle-Calédonie et Mayotte).

La gestion de ce chapitre est délégué aux représentants de l'Etat qui doivent présenter des propositions d'affectation. Les dernières connues portent sur l'exercice 1998.

Il a été versé, dans le domaine immobilier, 0,5 MF au fonds de garantie à l'habitat de Wallis et Futuna (FGH-WF) géré par l'AFD.

Recettes et dépenses en 2000

Les bénéfices de l'IEDOM au titre de l'exercice 1999 s'élèvent à 59 MF versés au CAS.

Ces crédits seront affectés en priorité au financement des opérations de réhabilitation qui ont été engagées mais qui ne sont à ce jour pas achevées.

L'IEOM n'a pour sa part dégagé aucun bénéfice.

Au 1 er septembre 2000, les dépenses s'élèvent à 77 MF réparti ainsi :

- pour le chapitre 1 er : 1 MF en faveur de la SIDRE et un montant de 10 MF en faveur de l'EPAG (établissement public d'aménagement en Guyane) pour une opération en cours.

- pour le chapitre 2 : 12 MF sont versés au CNASEA à Mayotte, 38 MF sont versés pour la construction de logements sociaux et 26 MF ont été versés dans le secteur social (23,5 MF à la SOCREDO, 2 MF au centre d'apprentissage du français à Mayotte et 0,5 MF au fonds de garantie à l'habitat de Wallis et Futuna).

Il est prévu l'abondement de fonds de garantie à Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon . "

Le financement par le compte d'affectation spéciale du fonds DOM

En 1999, le fonds a servi à financer le nouveau " fonds DOM " , logé et géré à la SOFARIS, à hauteur de 100 millions de francs. La Cour des comptes, dans son rapport sur l'exécution des lois de finances pour 1999, a critiqué ce financement qui " n'est pas conforme aux textes constitutifs du compte d'affectation spéciale " et " aurait été plus normalement financé par le budget des charges communes qui comprend une ligne ouverte à cet effet ".

Le secrétariat d'Etat à l'outre-mer a indiqué à votre rapporteur, en réponse à son questionnaire budgétaire, que " le financement par le compte d'affectation spéciale n°902-23 du nouveau fonds DOM semble autorisé par les dispositions contenues dans son texte constitutif. En effet, les recettes du compte d'affectation spéciale sont destinées à financer " des versements à des organismes publics de caractère agricole, immobilier ou social, ou au budget général " selon l'article 61 de la loi de finances pour 1990 (n° 90-935 du 29 décembre 1989). Or le fonds DOM est créé pour favoriser le développement économique et social des DOM, en facilitant l'accès au financement des entreprises domiennes et notamment des TPE. "

2. Une suppression justifiée ?

L'article 21 du projet de loi de finances a pour objet de supprimer le compte d'affectation spéciale n° 902-23.

Votre rapporteur reproduit ci-dessous des extraits du commentaire de l'article 21 du projet de loi de finances figurant dans le tome II du rapport général de votre commission des finances sur le projet de loi de finances pour 2001 :

La suppression d'un instrument utile

" Votre commission des finances avait adopté en juin 1997 un rapport 6 ( * ) présenté par M. Yann Gaillard, alors rapporteur spécial chargé des comptes spéciaux du Trésor, consacré au compte n° 902-23.

Il rappelait la vocation du compte à financer les interventions de l'Etat au bénéfice des organismes publics de caractère agricole, immobilier ou social intervenant dans les DOM, les TOM et les collectivités à statut particulier. Il soulignait sans doute le caractère un peu adventice de ces interventions mais il mettait également l'accent sur son utilité dans le contexte économique, financier et social très difficile de l'outre-mer.

La suppression du compte ne supprimera pas les problèmes dont ses interventions contribuaient à réduire l'ampleur.

Or, si le présent article dispose que les opérations en compte seront reprises au sein du budget général après la clôture du compte, les crédits disponibles étant également reportés, cette disposition ne s'appliquera que pour le budget 2002 et son respect ne peut évidemment être vérifié aujourd'hui.

La considération des opérations budgétaires pour 2001 entretient, quant à elle, tous les doutes. Du fait de la convention passée entre le gouvernement et la Banque de France, le compte se trouvera privé, dès 2001, de la moitié des recettes qu'il aurait perçues au titre du bénéfice de l'IEDOM. Ses crédits ne se retrouvent pas dans la " ligne budgétaire unique " du budget de l'outre-mer. Les " réalités budgétaires " de 2001 n'amènent pas à accorder de crédit aux " virtualités budgétaires " annoncées par le gouvernement pour 2002. "

Les justifications présentées par le gouvernement

" L'exposé des motifs de l'article justifie ses dispositions par l'obligation dans laquelle le gouvernement s'est trouvé d'adapter le statut de l'IEDOM, régi par l'ordonnance n° 59-74 du 7 janvier 1959, aux règles qui s'appliquent au système européen de banques centrales (SEBC) en vigueur depuis l'entrée en troisième phase d'Union économique et monétaire.

Etablissement public d'Etat dépourvu des éléments essentiels de statut d'une banque centrale, l'IEDOM ne pouvait continuer à déterminer et conduire la politique monétaire dans des territoires sous sa juridiction appelés à adopter l'euro.

L'ordonnance n° 2000-347 du 19 avril 2000 prise en application de la loi n° 99-899 du 25 octobre 1999, autorisant le gouvernement à prendre, par ordonnances, les mesures législatives nécessaires à l'actualisation et à l'application du droit applicable outre-mer, en a tiré une première conséquence. Tout en étant maintenu, l'IEDOM devait agir à partir du 1 er juillet 2000 comme simple mandataire de la Banque de France.

Le gouvernement en a tiré une seconde conséquence qui fonde, à ses yeux, la suppression du compte. Par l'article 7 de l'ordonnance précitée il a prévu que les bénéfices nets de l'IEDOM sont versés à la Banque de France. Il estime que cette disposition est l'une des obligations imposées par les statuts du SEBC.

Toutefois, l'ordonnance n° 2000-347 ayant réservé l'application de cet article en la conditionnant à l'abrogation par une loi de finances - abrogation que réaliserait le vote du présent article - de l'article 61 de la loi de finances pour 1990 qui prévoit l'affectation du bénéfice de l'IEDOM au compte n° 902-23, une période transitaire devait être ménagée.

L'IEDOM ayant conservé tout son statut au cours du premier semestre 2000, il a été convenu que la moitié de son bénéfice pour 2000 serait affecté au compte en 2001. Cela explique le maintien de ce compte l'an prochain et c'est pourquoi sa clôture n'interviendrait qu'au 31 décembre 2001.

Le maintien du statut de l'IEDOM jusqu'à mi-2000 a également conduit le gouvernement à conclure une convention avec la Banque de France au terme de laquelle seule la moitié du bénéfice 2000 de l'IEDOM serait acquise à l'Etat, l'autre moitié étant versée à la Banque de France.

Enfin, les recettes du compte d'affectation spéciale provenant en très grande majorité du bénéfice de l'IEDOM (151,9 millions de francs en 1999), les recettes en provenance de l'IEOM 7 ( * ) étant considérés comme marginales (36,8 millions de francs en 1999), le gouvernement, dans son souci de réduction du nombre des comptes d'affectation spéciale, a souhaité supprimer purement et simplement le compte n° 902-23, à la date du 31 décembre 2001. "

Des justifications peu convaincantes

" Si les modifications apportées au régime monétaire des territoires appelés à partager l'euro semblent inéluctables compte tenu des règles du SEBC, l'affectation de la totalité des " revenus monétaires " produits dans les DOM et à Mayotte à la Banque de France ne paraît pas découler d'une obligation de cette nature.

Le rapport 8 ( * ) adopté par votre commission à l'initiative de M. Alain Lambert, alors rapporteur général, a consacré à ce sujet des développements qui n'ont pas été contredits et qu'il faut rappeler : " Si une BCN 9 ( * ) est pleinement indépendante des points de vue institutionnel et fonctionnel mais ne peut, en même temps, se doter, de façon autonome, des moyens économiques lui permettant d'accomplir son mandat, son indépendance globale sera compromise... Toutefois, dans les pays où des tiers, en particulier le gouvernement ou le Parlement, sont en mesure d'influencer, directement ou indirectement, le budget de la BCN ou l'affectation de ses bénéfices, les dispositions statutaires correspondantes doivent contenir une clause de sauvegarde garantissant que cette situation n'empêche pas la BCN d'accomplir de façon convenable les missions relatives au SEBC ".

L'affectation du bénéfice de l'IEDOM à la Banque de France apparaît ainsi comme une mesure allant au-delà des exigences du SEBC. "

* 6 Rapport n° 368 (1997-1998).

* 7 Institut d'émission d'outre-mer.

* 8 Rapport n° 388 du 9 avril 1998. Projet de loi modifiant le statut de la Banque de France en vue de sa participation au système européen de banques centrales.

* 9 Banque centrale nationale.

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