3. Une situation encore récemment confirmée par la Commission européenne

La Commission européenne a récemment présenté ses prévisions d'automne s'agissant de l'évolution des déficits publics pour les années 2000-2002 13( * ) .

Elles confirment bien que la France reste le « mauvais élève » de l'Europe, ainsi que le reconnaît d'ailleurs le rapporteur général du budget à l'Assemblée nationale lorsqu'il relève que « ce résultat ne place pas la France dans la position la plus favorable en terme de déficits, notamment au regard de l'excédent d'ensemble de 0,3 % du PIB pour la zone euro en 2000 ».

Les déficits publics en Europe 14( * )

(en points de PIB)

 
 


2000 prévisions de


2001 prévisions de

Scénarii politiques inchangés

 

1999

Printemps

Automne

Printemps

Automne

2002

Belgique

- 0,7

- 0,5

0,0

- 0,2

0,7

0,8

Danemark

2,8

2,4

2,6

2,5

3,3

3,1

Allemagne

- 1,4

- 1,0

- 1,4

- 1,4

- 1,5

- 1,2

Espagne

- 1,1

- 0,7

- 0,3

- 0,4

0,1

0,2

France

- 1,8

- 1,5

- 1,4

- 1,2

0,0

- 0,5

Italie

- 1,9

- 1,5

- 0,1

- 0,8

- 1,1

- 1,0

Pays-Bas

1,0

1,0

1,8

0,4

0,6

1,6

Portugal

- 2,0

- 1,5

- 1,5

- 1,5

- 1,4

- 1,4

Royaume-Uni

1,3

0,9

4,5

0,7

2,0

2,0

EU-15

- 0,7

- 0,4

1,2

- 0,3

0,2

0,3

EURO-11

- 1,3

- 0,9

0,3

- 0,8

- 0,5

- 0,3

Source : Commission des Communautés européennes

EXAMEN DES ARTICLES

PREMIERE PARTIE

CONDITIONS GENERALES DE L'EQUILIBRE FINANCIER


ARTICLE PREMIER A (nouveau)

Extension aux indemnités de départ à la retraite du régime fiscal des indemnités versées aux salariés ou aux mandataires sociaux à l'occasion de la cessation de leurs fonctions

Commentaire : le présent article, étend le régime de l'article 80 duodecies fixant le régime d'imposition des indemnités de licenciement aux indemnités de départ à la retraite qui excèdent le quart du seuil de l'impôt sur la fortune.

Le présent article, introduit à l'initiative du rapporteur général du budget de l'Assemblée nationale, tend à étendre le champ de l'article 80 duodecies , adopté dans la loi de finances pour 2000 à la suite d'un amendement de notre collègue député François Hollande.

I. RAPPEL DU DISPOSITIF « HOLLANDE - CAHUZAC »

Le nouveau dispositif applicable aux indemnités de licenciement , dont votre commission des finances avait accepté certaines des grandes orientations, tend à :

- valider législativement la pratique actuelle de l'administration qui considère, sur le fondement de la jurisprudence, qu'à concurrence de leur fraction conventionnelle (ou à défaut légale), les indemnités ne doivent pas être soumises à l'impôt sur le revenu, dans la mesure où elles visent à réparer un préjudice autre que la perte de revenus ;

- considérer que, lorsque les indemnités versées excèdent les seuils mentionnés à l'alinéa précédent, elles doivent demeurer exonérées à concurrence, soit de l'équivalent de deux années de revenu brut, soit de la moitié du montant de l'indemnité reçue ; il est ainsi implicitement sous-entendu qu'à concurrence de ces seuils, les indemnités ont la caractère de dommages-intérêts non imposables ;

- prévoir que toutes les indemnités qui excèdent la moitié du seuil de l'impôt de solidarité sur la fortune, soit, en valeur absolue 2,35 millions de francs doivent être fiscalisées, même si leur montant est inférieur aux seuils mentionnés à l'alinéa précédent.

Il convient enfin de noter que l'assujettissement de ces indemnités à l'impôt sur le revenu emporte leur soumission aux cotisations de sécurité sociale, ainsi que le prévoit l'article 2  du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000.

Votre commission avait considéré qu'en dépit de son caractère ad hominem - il s'agissait d'une réglementation établie à la suite des réactions suscitées par la divulgation dans la presse de l'indemnité versée à M. Philippe Jaffré, à la suite de son départ de la société Elf - le dispositif proposé présentait l'avantage appréciable de fixer dans la loi le régime fiscal des indemnités de rupture de contrat qui était jusqu'à présent laissé à l'appréciation de l'administration, sous le contrôle du juge. Il évite ainsi les désagréments liés aux fluctuations de la doctrine et améliore la sécurité juridique des citoyens.

Toutefois, votre commission avait considéré, mais en vain, que la fixation d'un seuil d'imposition en valeur absolue, quel que soit son montant, porte gravement atteinte au principe selon lequel les indemnités qui ont le caractère de dommages-intérêts ne sauraient être soumises à l'impôt sur le revenu. Elle ouvre ainsi une brèche dangereuse susceptible de conduire à la fiscalisation de toutes les indemnités ayant valeur de réparation globale et octroyées à la suite de la réalisation d'un sinistre ou d'un accident. Elle risque en outre de compromettre les restructurations d'entreprises en rendant plus difficile les changements nécessaires à la tête des sociétés concernées.

Pour résumer le régime fiscal actuel, le seuil de déclenchement de l'imposition est, pour les indemnités inférieures à 2,35 millions de francs, le plus élevé des trois montants suivants :

- fraction conventionnelle ou légale des indemnités de licenciement ;

- moitié des indemnités de licenciement versées ;

- deux fois le montant du salaire brut perçu l'année précédente.

Au delà d'un seuil de 2,35 millions de francs, toutes les indemnités seraient taxées, quelle que soit leur nature.

Bien entendu, la fraction imposable des indemnités de licenciement bénéficie du système du quotient prévu par l'article 163-O A du CGI qui permet d'atténuer la progressivité du barème de l'impôt.

II. LE RÉGIME PROPOSÉ DES INDEMNITÉS DE MISE À LA RETRAITE

L'initiative de cette article additionnel revient au rapporteur général de l'Assemblée nationale. Celui-ci a fait valoir qu'il fallait clarifier le régime fiscal des indemnités de mise à la retraite sur le modèle de ce qui avait été fait en cas de rupture de contrat de travail.

Le secrétaire d'Etat au budget a approuvé l'amendement au motif qu'il levait certaines difficultés d'interprétation en ce qui concerne les salariés mis à la retraite auxquels il convient « de garantir un traitement fiscal équitable dans un cadre juridique stabilisé ».

On relèvera que, sans que les raisons en apparaissent clairement, le seuil de fiscalisation est abaissé au quart du seuil de l'impôt sur la fortune soit, 1,175 million de francs. En tout état de cause, votre commission reste défavorable au principe même de ce type de seuil.

Votre commission, qui aurait pu être tentée, comme l'année dernière, d'accepter en partie un dispositif dont elle admet qu'il peut clarifier des régimes parfois confus, a néanmoins décidé de supprimer cet article en raison du caractère arbitraire du seuil retenu pour la fiscalisation systématique de l'indemnité et de son caractère partiellement rétroactif.

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.

ARTICLE PREMIER

Régime fiscal des exploitants d'ouvrages de circulation routière à péages

Commentaire : le présent article a pour objet de mettre en conformité avec la sixième directive du Conseil du 17 mai 1977, le régime de TVA applicable aux exploitants d'ouvrages de circulation routière à péages.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LE REGIME APPLICABLE AUX SOCIETES CONCESSIONNAIRES D'AUTOROUTES


Suivant la doctrine administrative, le péage représente « non la contrepartie d'un service rendu à l'usager mais une redevance d'utilisation d'un équipement public dont la construction, qu'elle soit ou non assurée directement par l'Etat, est soumise aux règles de droit public ».

Il en résulte un régime de TVA dérogatoire, dont les règles ont été définies par les instructions du 10 mai 1972 et du 7 septembre 1973 qui ont fait l'objet d'une validation législative aux articles 266-1-h et 273 ter du code général des impôts.

L'article 266-1-h du code général des impôts définit la base d'imposition à la TVA des sociétés concessionnaires d'autoroutes comme le montant des recettes de péages diminué de la fraction de ceux-ci affectée au financement des travaux de construction, de grosses réparations d'ouvrages concédés et des redevances calculées proportionnellement aux péages et versées à l'Etat.

Ce régime est fondé sur le principe que les sociétés concessionnaires agissent en qualité de simples mandataires de l'Etat pour construire l'autoroute et collecter les péages. Elles construisent l'autoroute pour l'Etat et ne récupèrent donc pas la TVA sur la construction. Par ailleurs, les péages sont perçus pour le compte de l'Etat et ne sont donc pas assujettis à la TVA. Seule la part des recettes servant à couvrir d'autres charges que les charges de construction est assujettie à la TVA.

Ainsi, la TVA n'est pas assise sur le chiffre d'affaires des sociétés (la totalité des recettes de péages) mais sur la rémunération du « mandataire » des concessionnaires, c'est-à-dire sur la part des recettes couvrant les seules charges d'exploitation.

Le deuxième alinéa de l'article 266-1-h du code général des impôts précise que ce régime n'est pas appliqué pendant les années où le montant cumulé des charges de construction et des dépenses d'exploitation des autoroutes dépasse le montant cumulé des recettes de péages, ce qui est le cas actuellement de toutes les sociétés. En effet, l'application de ce régime conduirait à des crédits de TVA pour les sociétés d'autoroutes.

Dans ce cas, le montant de la TVA versée est calculé, au taux de 19,6 % sur une base d'imposition calculée en appliquant aux recettes de péages un coefficient (dit « coefficient k ») correspondant au rapport entre les charges d'exploitation et la somme de ces charges et des dépenses de financement.

• En raison de l'application d'un régime de TVA dérogatoire, l'article 273 ter exclut logiquement du droit à déduction de droit commun la TVA afférente aux travaux de construction et aux grosses réparations.

B. LA CONDAMNATION DE LA FRANCE PAR LA COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

1. Un contentieux ancien


La sixième directive du conseil des communautés européennes du 17 mai 1977 oblige les Etats membres de la CEE à harmoniser leur système de TVA. Sur son fondement, la Commission a demandé à la France de mettre le régime de TVA des sociétés concessionnaires en conformité avec le droit commun.

Dès le 26 avril 1984, la Commission a demandé aux autorités françaises de présenter leurs observations sur le régime d'imposition à la TVA des concessionnaires d'autoroutes en France. Suite à une réponse estimée insatisfaisante, la Commission a, par deux mises en demeure, demandé au gouvernement français de présenter ses observations sur la position des autorités communautaires.

Après une longue période de statu quo , la Commission a saisi, le 30 juillet 1997, la Cour de justice des communautés européennes (CJCE). Celle-ci a rendu son arrêt le 12 septembre 2000.

2. La condamnation de la France le 12 septembre 2000

Par cinq arrêts en date du 12 septembre 2000, la Cour de justice des communautés européennes a précisé le régime d'imposition à la TVA des péages autoroutiers. Au terme d'une procédure en manquement dirigée contre cinq Etats, dont la France 15( * ) , la Cour a jugé que les péages doivent être soumis à la TVA lorsque le service rendu aux usagers n'est pas fourni par un organisme de droit public au sens de l'article 4, paragraphe 5 de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil du 17 mai 1977. Il a été jugé que les Etats s'étant à tort abstenus de soumettre les péages à la TVA avaient également méconnu les dispositions de règlements n°1553/89 et 1552/89 du 29 mai 1989 en ne mettant pas à la disposition de la Commission des communautés européennes les montants de TVA correspondants, au titre des ressources propres.

Les motifs de la Cour peuvent se résumer ainsi :

- la mise à disposition d'infrastructures routières moyennant acquittement d'un péage par l'utilisateur constitue une activité économique au sens des articles 2 et 4 de la 6ème directive. En effet, cette activité peut être considérée comme une prestation de services effectuée par un assujetti dans le cadre de l'exploitation d'un bien en vue d'en retirer des recettes ayant un caractère de permanence (art 4, paragraphes 1 et 2). La Cour relève que l'utilisation de l'infrastructure routière est subordonnée au règlement d'un péage dont le prix est fonction, notamment, de la catégorie de véhicules utilisée et de la distance parcourue. Il existe, dès lors, une relation directe et nécessaire entre le service rendu et la contre-valeur pécuniaire rendue ;

- le fait que l'activité en cause soit exercée en France par un système particulier de concessions à des organismes publics, parapublics ou privés n'est pas suffisant pour écarter l'application de la TVA . Deux conditions doivent être remplies cumulativement pour que la règle de non-assujettissement joue, à savoir l'exercice d'activités par un organisme public et l'exercice d'activités accomplies en tant qu'autorités publiques (arrêt du 25 juillet 1991, Ayuntamiento de Sevilla). Il résulte de la jurisprudence de la Cour que les activités exercées en tant qu'autorités publiques sont celles accomplies par les organismes de droit public dans le cadre du régime juridique qui leur est particulier, à l'exclusion des activités qu'ils exercent dans les mêmes conditions juridiques que les opérateurs économiques privés. Or, la France a recours à des sociétés privées et des sociétés d'économie mixte qui ne figurent pas au nombre des entités régies par le droit public. La Cour estime que, lorsque le service est fourni par un organisme de droit privé, l'assujettissement à la TVA s'applique.

En conséquence, comme le montre l'arrêt de la Cour dont un extrait est reproduit ci-dessous, la France aurait dû soumettre à la TVA les péages d'autoroutes perçus en contrepartie du service rendu aux usagers, lorsque celui-ci n'est pas fourni par un organisme de droit public agissant en tant qu'autorité publique. Les sociétés d'économie mixte concessionnaires d'autoroutes et a fortiori les sociétés privées n'entrent pas dans la catégorie de ces organismes tels que définis par le droit européen.

Extrait de l'arrêt de la Cour de justice des communautés européennes le 12 septembre 2000



« La Cour déclare et arrête :

En ne soumettant pas à la taxe sur la valeur ajoutée les péages d'autoroute perçus en contrepartie du service rendu aux usagers, lorsque celui-ci n'est pas fourni par un organisme de droit public au sens de l'article 4, paragraphe 5, de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires (...), et en ne mettant pas à la disposition de la Commission des Communautés européennes, au titre des ressources propres provenant de la taxe sur la valeur ajoutée, les montants correspondant à la taxe qui aurait dû être prélevée sur lesdits péages, augmentés des intérêts de retard, la République française a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 2 et 4 de ladite directive et des règlements (CEE, Euratom), n°s 1553/89 du Conseil, du 29 mai 1989, concernant le régime uniforme définitif de perception des ressources propres provenant de la taxe sur la valeur ajoutée, et 1552/89 du Conseil, du 29 mai 1989, portant application de la décision 88/376/CEE, Euratom relative au système des ressources propres des Communautés. (...)
».

II. LES DISPOSITIONS DU PRÉSENT ARTICLE

L'arrêt de la CJCE emporte deux conséquences : d'une part, l'obligation de mettre en conformité le régime fiscal applicable aux péages autoroutiers, d'autre part la nécessité de tirer toutes les conséquences de plusieurs années de manquement aux obligations européennes .

Ainsi, les paragraphes I à VI du présent article modifient le régime fiscal applicable aux concessionnaires d'ouvrages de circulation routière et les paragraphes VII et VIII précisent les modalités d'apurement du passé.

A. LE NOUVEAU RÉGIME FISCAL

• Le I. de l'article abroge le h du 1 de l'article 266 et l'article 273 ter du code général des impôts.

Il s'agit des deux articles qui constituent le régime dérogatoire auquel sont soumis les concessionnaires d'autoroutes, régime rendu inapplicable par la décision de la CJCE du 12 septembre 2000.

On peut rappeler que l'article 266-1-h définit la base d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée pour les opérations d'entremise effectuées par les concessionnaires d'ouvrages de circulation routière. La base d'imposition est constituée par la différence entre le montant total des péages et la fraction de ceux-ci affectée au financement des travaux de construction et des grosses réparations des ouvrages concédés et au paiement des redevances proportionnelles versées à l'autorité concédante.

Cependant, tant que le montant cumulé des péages, déduction faite des redevances, est inférieur au montant cumulé des dépenses de financement et des charges d'exploitation, la base d'imposition est la fraction des recettes de péages correspondant au rapport entre les charges d'exploitation et le total des dépenses.

En complément de l'article 266-h-1, l'article 273 ter ôte le droit à déduction aux concessionnaires d'autoroutes. En effet, il dispose que les concessionnaires d'ouvrages de circulation routière ne peuvent déduire la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux travaux de construction et aux grosses réparation des ouvrages concédés sauf application du régime prévu au h du 1 de l'article 266.

Il faut noter que la simple abrogation du régime spécifique aux opérations d'entremise effectuées par les concessionnaires d'ouvrages de circulation routière fait tomber les péages dans le droit commun de la TVA tel qu'il est défini à l'article 256 du code général des impôts , sans qu'il y ait besoin de prendre de dispositions spécifiques.

Les paragraphes II à V du présent article figurent simplement les conséquences de l'assujettissement des péages au droit commun de la TVA.

• Le II. de l'article insère un nouvel alinéa à l'article 257 du code général des impôts relatif aux opérations soumises à la taxe sur la valeur ajoutée.

Les livraisons à soi-même (LASM) d'ouvrages de circulation routière donnant lieu à la perception de péages sont donc soumises à la taxe sur la valeur ajoutée.

Le mécanisme de la livraison à soi-même est déjà utilisé en matière immobilière. Dans ce régime, l'exploitant est réputé être, à un moment donné, le fournisseur et l'acquéreur de l'ouvrage. La taxe qui grève l'achat est exigible, mais, dans le même temps, elle peut être déduite, selon les règles de droit commun. En matière de construction, les dépenses peuvent s'étaler dans le temps et la situation du redevable de la TVA peut varier au cours du temps. Afin d'éviter une gestion fiscale complexe, le mécanisme de la livraison à soi-même permet d'apprécier la situation à la date d'achèvement de l'ouvrage.

• Le III. de l'article ajoute un alinéa à l'article 266 du code général des impôts.

Il s'agit de définir la base d'imposition pour les livraisons à soi-même d'ouvrages de circulation routière. La base d'imposition est le prix de revient total des ouvrages.

• Le IV. de l'article modifie l'article 269 du code général des impôts qui définit le fait générateur et l'exigibilité de la taxe sur la valeur ajoutée.

Le fait générateur de la taxe se produit au moment de la mise en service des ouvrages de circulation routière. La taxe est exigible lors du fait générateur.

• Le V. de l'article complète l'article 270 du code général des impôts, qui traite de la liquidation de la taxe sur la valeur ajoutée.

La liquidation de la taxe sur la valeur ajoutée exigible au titre des livraisons à soi-même d'ouvrages de circulation routières peut être effectuée jusqu'au 31 décembre de la deuxième année qui suit celle au cours de laquelle est intervenue la mise en service des ouvrages concernés, lorsque les éléments constitutifs de leur prix de revient ne sont pas déterminés à la date de leur mise en service.

Par ailleurs, la mise en service doit être déclarée à l'administration dans un délai d'un mois.

Il s'agit de prendre en compte la situation particulière des sociétés concessionnaires d'autoroutes : certains ouvrages routiers sont en effet mis en service alors que certains travaux d'aménagement ne sont pas achevés.

• Le VI. de l'article précise que les dispositions des II, III, IV et V sont applicables aux ouvrages mis en service à compter du 12 septembre 2000.

La date de référence est donc la date de condamnation de la France.

En réalité, la référence à la date du 12 septembre 2000 n'est que partielle. En effet, le régime dérogatoire de TVA n'est abrogé qu'à compter du 1er janvier 2001 en application du I du présent article, alors que le nouveau régime s'appliquerait aux ouvrages mis en service à compter du 12 septembre 2000. Concrètement, les péages ne seront soumis à la TVA que le 1er janvier 2001, alors que le mécanisme de la livraison à soi-même des ouvrages de circulation routière interviendra dès le 12 septembre 2000. Il en résulte un coût pour le budget de l'Etat de 4,3 milliards de francs en l'an 2000.

B. L'APUREMENT DU PASSÉ

• Le VII. de l'article dispose que les exploitants d'ouvrages de circulation routière peuvent formuler des réclamations contentieuses tendant à l'exercice du droit à déduction de la TVA ayant grevé, à titre définitif, les travaux de construction et de grosses réparations qu'ils ont réalisés à compter du 1er janvier 1996 au titre d'ouvrages mis en service avant le 12 septembre 2000.

Le montant restitué est égal à l'excédent de la TVA qui a grevé les travaux sur la TVA afférente aux péages qui n'a pas été acquittée du 1er janvier 1996 au 11 septembre 2000.

En réalité, ces dispositions viseraient à limiter la portée de l'arrêt de la Cour de justice des communautés européennes.

En effet, dans l'état actuel du droit, il existe des dispositions réglementaires plus favorables aux sociétés concessionnaires d'autoroutes.

Au terme de l'article 226 de l'annexe II du code général des impôts, conforme aux dispositions de l'article 20 de la 6ème directive TVA de 1977, les personnes qui deviennent redevables de la taxe sur la valeur ajoutée se voient reconnaître un crédit de TVA, dit « crédit de départ ».

Les crédits de départ afférents aux biens d'investissement en cours d'utilisation sont égaux à une fraction de la TVA ayant grevé leur acquisition. Cette fraction correspond au montant de la taxe ayant grevé les biens, diminué d'un cinquième par année civile ou fraction d'année civile écoulée depuis la date à laquelle la TVA est devenue exigible. Pour les immeubles, la diminution est calculée par vingtièmes, et par dixièmes pour les immeubles livrés, acquis ou apportés avant le 1er janvier 1996.

Ces dispositions seraient plus favorables à l'équilibre financier des sociétés d'autoroutes, en ce qu'elles n'entraîneraient pas une compensation entre la TVA ayant grevé les travaux et la TVA qui aurait dû être acquittée, les sociétés apparaissant comme de nouveaux assujettis.

L'administration fiscale n'est pas d'accord avec le principe de l'application de l'article 226 de l'annexe II du code général des impôts.

En effet, la doctrine administrative comprend la notion de nouveaux assujettis, comme des entreprises nouvellement soumises à la TVA. Lorsqu'une entreprise partiellement assujettie à la TVA devient totalement assujettie, les « crédits de départ » ne s'appliqueraient pas.

On pourra objecter que dans un arrêt en date du 9 novembre 1987, le Conseil d'Etat a accordé le bénéfice des crédits de départ à une entreprise déjà partiellement soumise à la TVA, en estimant « qu'il résulte de ces dispositions, rapprochées des dispositions précitées de l'article 271 du code général des impôts, qu'une entreprise qui a été partiellement assujettie à la TVA et qui devient passible de la TVA pour la totalité de ses activités doit être regardée comme une entreprise nouvellement assujettie au sens de l'article 226 de l'annexe II du code général des impôts. »

Cette jurisprudence a toutefois connu une restriction avec l'arrêt de la CJCE du 11 juillet 1991 (Lennartz), puisque, depuis cet arrêt, ne peuvent bénéficier des crédits de départ les immobilisations en cours d'utilisation, qui, lors de leur acquisition, avaient été affectées exclusivement soit à des besoins privés, soit aux besoin d'activités placées hors du champ de la TVA (instruction 3 CA 94 du 8 septembre 1994). Toutefois, cette restriction ne doit pas s'appliquer ici puisque précisément la CJCE a jugé que les activités en cause devaient entrer dans le champ de la TVA depuis la publication de la 6ème directive de 1977.

Un dernier argument, qu'elle estime fondamental, est avancé par l'administration fiscale : du fait de l'arrêt de la CJCE, les sociétés concessionnaires d'autoroutes sont réputées avoir toujours été assujetties à la TVA sur les péages, et donc il n'y aurait pas de changement de situation fiscale, et les sociétés ne pourraient bénéficier du régime des crédits de départ, mais seulement du régime de compensation entre des droits à déduction et le remboursement de la TVA non perçue sur les péages.

On pourra faire remarquer que le présent article vise précisément à modifier le régime fiscal spécifique prévu aux articles 266 et 273 ter du code général des impôts et donc à modifier la situation fiscale des sociétés concessionnaires, même si ces mesures auraient dû être prises il y a longtemps. Dans les faits, les péages des sociétés concessionnaires d'autoroutes ne seront bien soumis à la TVA qu'à compter du 1er janvier 2001. Les sociétés d'autoroutes se retrouvent bien dans la situation de nouveaux assujettis, même si cette situation résulte d'un manquement de l'Etat.

De plus, si le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie était sûr de son interprétation du droit, le gouvernement aurait pu en rester là et n'accorder aucun droit à déduction pour les sociétés d'autoroutes.

Cependant, craignant sans doute de se voir opposer une jurisprudence défavorable, c'est-à-dire permettant l'application du régime des « crédits de départ », il préfère faire adopter des dispositions législatives spécifiques.

Plus précisément, il apparaît que le droit à déduction des sociétés concessionnaires d'autoroutes serait limité dans le temps et restreint à la différence entre la TVA ayant grevé les ouvrages et la TVA qui aurait dû être acquittée sur les péages sur la période 1er janvier 1996-11 septembre 2000.

Selon le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, la limitation au 1er janvier 1996 s'expliquerait par les dispositions de l'article L. 190-3 du livre des procédures fiscales qui restreint les possibilités de déduction. En effet, l'article L. 190 dispose que les réclamations relatives aux impôts, contributions, droits, taxes et redevances, soultes et pénalités de toute nature, établis ou recouvrés par les agents de l'administration, relèvent de la juridiction contentieuse. Toutefois, lorsque la non-conformité à une règle de droit a été révélée par une décision juridictionnelle, l'action en restitution des sommes versées ou en paiement des droits à déduction non exercés ou l'action en réparation du préjudice subi ne peut porter que sur la période postérieure au 1er janvier de la quatrième année précédant celle où la décision relative à la non-conformité est intervenue.

Il y a lieu de s'interroger sérieusement sur l'application d'une disposition législative française qui réduirait les conséquences d'un arrêt de la Cour de justice des communautés européennes : la décision juridictionnelle mentionnée à l'article 190 pourrait s'entendre comme une seule décision de droit interne.

Ensuite, l'article L. 203 du livre des procédures fiscales est également cité pour expliquer la compensation entre la TVA déductible et la TVA qui aurait dû être acquittée . Il prévoit que lorsqu'un contribuable lui demande la réduction d'une imposition, l'administration est en droit d'effectuer la compensation entre celle-ci et les insuffisances ou omissions de toute nature constatées dans l'assiette ou le calcul de l'imposition au cours de l'instruction de la demande.

Cependant, il y a également lieu de sérieusement mettre en doute l'application de cet article au cas d'espèce. Il ne s'agit pas, en effet, pour les sociétés d'autoroutes, de réduire leur imposition, mais d'obtenir des droits à déduction. De surcroît, on pourra rappeler les propos de l'avocat général sous l'arrêt de la CJCE du 12 septembre 2000, selon lesquels : « une perception a posteriori de la TVA sur les péages routiers est exclue, en pratique comme en droit. (...), les conséquences pratiques (d'une telle mesure) seraient tout à fait inappropriées pour les échanges économiques, dans la mesure où les éventuels débiteurs de taxes qu'il faudrait poursuivre ne sont pas normalement ceux qui doivent payer les taxes à inclure dans le prix ».

De fait, l'administration fiscale reconnaît implicitement qu'il convient « d'adapter » les dispositions des articles 190 et 203 du livre des procédures fiscales pour qu'elles soient applicables à la situation des sociétés concessionnaires d'autoroutes.

• Le VIII. de l'article définit des règles de comptabilisation des investissements.

Ainsi, chaque bien ouvrant droit à déduction est inscrit dans la comptabilité de l'entreprise pour son prix d'achat ou de revient diminué d'une quote-part du montant restitué. La quote-part résulte du rapport entre le prix hors taxe du bien et le prix hors taxe retenu pour le calcul de la restitution. La quote-part est limitée à la valeur nette comptable du bien. L'excédent éventuel est compris dans les produits exceptionnels de l'exercice en cours à la date de restitution.

Enfin, l'amortissement de chaque bien d'investissement est calculé sur la base du prix de revient diminué selon les dispositions précédentes.

Ces dispositions sont complémentaires des dispositions du VII. de l'article.

En effet, selon les critères retenus par le gouvernement, il semblerait que seules deux sociétés concessionnaires d'autoroutes bénéficieraient d'un droit à déduction de TVA. Cependant, même des sociétés ne bénéficiant pas de crédits de TVA du fait du dispositif proposé, pourraient trouver un intérêt à faire un recours contentieux .

En effet, le dispositif prévoit une compensation entre la TVA déductible et la TVA qui aurait dû être collectée sur les péages. La TVA collectée a posteriori constitue au passif une charge très lourde pour l'exercice courant, alors que la TVA déductible vient rectifier la valeur d'actif des immobilisations concernées, et n'a une incidence sur l'exercice que pour les amortissements restant à courir. Du fait de cette différence, la société bénéficierait d'une diminution ponctuelle très importante de son résultat, et donc d'un allégement de l'impôt sur les sociétés.

Les dispositions, très techniques, du VIII. visent à éviter une diminution de l'impôt sur les sociétés versé par les sociétés d'autoroutes.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

A. UN DISPOSITIF QUI N'EST PAS ACCEPTABLE

1. Un dispositif qui risque de créer une inégalité devant les charges publiques

Le dispositif prévu par le gouvernement ne correspond pas à une logique fiscale, mais à une logique purement budgétaire
.

En effet, le gouvernement entend opérer une compensation entre la TVA ayant grevé des travaux réalisés après le 1er janvier 1996, donc pour des ouvrages mis en service après cette date, et la TVA ayant due être perçue sur les péages à compter du 1er janvier 1996. Mais les péages pour lesquels la compensation de TVA est demandée s'appliquent sur des ouvrages souvent mis en service bien avant 1996 et pour lesquels aucun droit à déduction sur les travaux de construction n'a été opéré. De surcroît, il conviendrait de tenir compte de la TVA partielle déjà acquittée par les sociétés pendant la période, ce qui n'est pas explicitement indiqué. D'un strict point de vue de droit fiscal, le dispositif proposé n'est donc pas satisfaisant.

De surcroît, le dispositif proposé paraît entraîner une inégalité des sociétés concessionnaires d'autoroutes devant les charges publiques . Alors que toutes les sociétés devront soumettre leurs péages à la TVA à compter du 1er janvier 2001 et que des droits à déduction naîtront pour les ouvrages mis en service à compter du 12 septembre 2000, les sociétés dont les ouvrages auront été mis en service antérieurement ne bénéficieraient que d'un dispositif qui, de fait, les empêcheraient de bénéficier de droits à déduction. En raison du mécanisme de compensation proposé par le gouvernement, presque toutes les sociétés concessionnaires ayant mis en service des ouvrages avant le 12 septembre 2000 n'auront pas droit à des déductions de TVA, alors que ces mêmes ouvrages feront naître de la TVA.

2. Un dispositif qui a pour objet de limiter le coût budgétaire pour l'Etat

D'une manière générale, le gouvernement craint que, sans l'adoption de mesures législatives spécifiques, qui encourent les plus vives critiques tant du point de vue de leur conformité au droit européen que du point de vue de leur respect de l'égalité des contribuables, les sociétés d'autoroutes obtiennent des compensations plus importantes.

En effet, selon les informations délivrées par les services de la direction du budget, l'application du régime dit des « crédits de départ » coûterait 11,4 milliards de francs pour les seules sociétés d'économie mixte concessionnaires d'autoroutes (SEMCA) 16( * ) , alors que le régime proposé par le présent article se traduirait par un coût global de 5,3 milliards de francs, dont 4,3 milliards de francs imputables sur l'année 2000 au titre de la déduction de la TVA ayant grevé les ouvrages mis en service à compter du 12 septembre 2000 et 1 milliard de francs sur l'année 2001, au titre des réclamations contentieuses.

A priori , l'application d'un régime de compensation entre la TVA déductible et la TVA qui aurait due être perçue sur les péages ne concernerait pour l'essentiel que deux sociétés, la société d'autoroutes Paris-Normandie (SAPN) pour un montant très faible, et la société française du tunnel routier du Fréjus (SFTRF), le tout pour un montant global de près d'un milliard de francs.

3. Un dispositif qui pourrait être contraire au droit européen

Il apparaît surtout que le dispositif proposé par le gouvernement pourrait être contraire au droit européen.


En effet, la CJCE estime qu'un Etat membre condamné dans le cadre d'une procédure de manquement doit prendre toute mesure pour « aboutir à l'élimination effective des manquements et de leurs conséquences passées » (commission c/Allemagne, 12 juillet 1973).

La Cour indique également « qu'un législateur national ne peut adopter, postérieurement à un arrêt de la Cour dont il résulte qu'une législation déterminée est incompatible avec le Traité, de règle procédurale réduisant spécifiquement les possibilités d'agir en répétition des taxes qui ont été indûment perçues en vertu de cette législation » (CJCE Deville, 29 juin 1988).

Ainsi, la modification de la loi postérieurement à l'arrêt de la CJCE, dans le seul objectif de limiter les conséquences de cet arrêt, pourrait être sérieusement considérée comme une violation du droit européen. De ce fait, le gouvernement français pourrait être une nouvelle fois traduit devant la Cour pour expliquer ces dispositions.

B. LA NÉCESSITÉ DE TIRER TOUTES LES CONSÉQUENCES DE L'ARRET DE LA COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES


Par principe, les arrêts rendus par la CJCE ont force obligatoire dès le jour de leur prononcé (article 244 du traité CEE).

La Cour de justice relève expressément que la mise à disposition d'une infrastructure routière moyennant versement d'un péage constitue une prestation de services effectuée à titre onéreux au sens de l'article 2 point 1 de la sixième directive.

Selon les services de la Commission 17( * ) , une telle interprétation s'applique depuis l'entrée en vigueur de la directive et non à la date de l'arrêt. En conséquence, disent-ils, « en application de l'article 20 point 2 de la sixième directive, tel qu'explicité par la Cour dans son arrêt Lennartz en date du 11 juillet 1991, les concessionnaires d'autoroutes étant des assujettis au sens de la sixième directive pourront opérer la régularisation en ce qui concerne leurs biens d'investissement ».

Votre rapporteur général estime qu'il n'est pas opportun de prendre des mesures législatives spécifiques pour limiter les conditions de remboursement des crédits de TVA aux sociétés concessionnaires d'autoroutes.

Il vous proposera donc de supprimer les paragraphes VII. et VIII. du présent article.

Il s'agit d'indiquer clairement que le système proposé par le gouvernement n'est pas satisfaisant
puisqu'il fait correspondre sur la même période les droits à déduction pour des ouvrages mis en service à compter du 1er janvier 1996 et la TVA qui aurait dû être collectée sur cette période, pour des ouvrages qui ont souvent été mis en service bien avant. Il n'y a pas de logique fiscale au dispositif présenté par le gouvernement, mais essentiellement une logique budgétaire.

On peut comprendre l'objectif du gouvernement de préserver les finances publiques.

Mais on peut s'étonner d'une disposition législative ayant pour objet d'une part d'autoriser des recours contentieux, qui de toute manière, sont conformes au droit, et d'autre part, de définir à l'avance les résultats de ces recours. Une solution aurait sans doute pu être de « lisser » les conditions de remboursement, dans le respect des obligations nées du droit européen, plutôt que de nier la réalité de ces droits. Le fait est qu'à trop avoir attendu de se faire condamner, la France se retrouve aujourd'hui au pied du mur, et les conséquences pour le budget de l'Etat apparaissent insupportables pour le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

C. D'AUTRES CONSÉQUENCES RESTENT A PRÉCISER

1. L'application « en-dedans » de la TVA sur les véhicules légers


Par un communiqué de presse commun au ministère de l'économie, des finances et de l'industrie et au ministère de l'équipement, des transports et du logement en date du 12 septembre 2000, le gouvernement français « prend acte de la décision de la Cour de justice des communautés européennes ». Il s'engage notamment à ce que la décision de justice soit neutre pour les usagers :

- pour les véhicules légers, les tarifs restent inchangés ;

- pour les poids lourds, le coût effectif du péage n'augmente pas grâce à la récupération de la TVA.

Ainsi, s'agissant des usagers des péages, le bilan serait le suivant :

- le bilan serait neutre s'agissant de l'automobiliste utilisant une voiture particulière, qui n'est pas assujetti : il acquittera une TVA dite « en dedans » c'est-à-dire que le tarif global restera inchangé ;

- les conducteurs de véhicules professionnels poids lourds seront soumis à une TVA « en dehors », c'est-à-dire qui augmentera le tarif global, mais ils pourront la déduire en qualité d'assujettis ;

- les conducteurs de véhicules légers ayant la qualité d'assujettis bénéficieront d'un avantage, puisqu'ils pourront déduire la TVA à tarif inchangé.

Au total, il apparaît que les usagers ne seraient pas perdants, mais la charge sera reportée sur les sociétés d'autoroutes concernant les dispositifs de TVA « en dedans » c'est-à-dire les dispositions en faveur des véhicules légers.

Or, les péages des sociétés concessionnaires d'autoroutes sont pour l'essentiel issus des véhicules légers. De plus, la situation est très différente selon les réseaux exploités par les sociétés concessionnaires d'autoroutes et certains ouvrages de circulation routière à péages sont particulièrement frappés par cette mesure : la Société Marseille du Tunnel du Prado-Carénage (SMTPC) est, par exemple, dans une situation très particulière, puisque son trafic est exclusivement constitué de véhicules légers.

D'une manière générale, l'application d'une TVA « en-dedans » sur les véhicules légers entraînerait une charge supplémentaire de plusieurs milliards de francs sur les sociétés concessionnaires d'ouvrages à péages.

Le gouvernement n'a donné aucune explication sur les moyens de compenser aux sociétés d'autoroutes l'application de la TVA à leurs frais sur l'ensemble des péages des véhicules particuliers . La direction du budget travaillerait actuellement à cette question, sans qu'aucune décision ne soit encore prise.

Il semble en effet que le passage au régime de TVA de droit commun ne doit pas s'appliquer en fonction de la situation actuelle des sociétés concessionnaires d'autoroutes, mais en fonction de leurs perspectives d'évolution futures.

En effet, le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie indique que l'application du régime de TVA dérogatoire, avec une base d'imposition calculée en appliquant aux recettes de péages un coefficient (dit « coefficient k ») conduirait, à moyen terme, du fait du ralentissement des investissements, vers une TVA proche du droit commun.

Aussi, la perte supportée par les sociétés concessionnaires d'autoroutes du fait de l'application « en-dedans » de la TVA sur les péages autoroutiers pour les véhicules légers serait progressivement effacée « en tendance » si on compare ce nouveau régime avec l'ancien.

De surcroît, l'application d'une TVA « en-dehors » aux poids lourds conduirait à leur faire supporter le surcroît de charges de 19,6 %. Cependant, les sociétés acquittaient déjà une fraction de TVA sur leur chiffres d'affaires, représentant une équivalence de 8 à 9 % de TVA de droit commun. Il résulterait de ces évolutions un gain pour les sociétés d'autoroutes.

Enfin, des cas particuliers de sociétés concessionnaires ayant un déséquilibre de leurs recettes de péages très en faveur des véhicules légers seraient réglés de manière autonome.

D'une manière générale, toutes les modifications des relations entre l'Etat et les sociétés concessionnaires pourraient s'inscrire dans le cadre des négociations des contrats de plan, qui comprennent un certain nombre de dispositions en termes de plans d'investissement et de politique tarifaire.

Votre rapporteur général ne peut accepter les analyses actuellement développées par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

L'application de la TVA « en-dedans » pour les véhicules légers constitue un préjudice financier de plusieurs milliards de francs pour les sociétés d'autoroutes. L'absence de toute mesure de compensation compromettrait leur résultat et, en conséquence, l'octroi de dividendes à l'Etat dans le cadre de la réforme qu'il souhaite entreprendre. Or, dans le cadre de la banalisation du statut des sociétés d'économie mixte concessionnaires d'autoroutes (SEMCA), on sait que ces dividendes sont sensés servir, notamment, au financement des nouvelles sections autoroutières.

Votre rapporteur général interrogera donc le gouvernement sur ce point.

2. De très importantes modifications fiscales qui pourraient se réaliser au détriment du redressement des sociétés concessionnaires d'autoroutes

D'une manière générale, votre rapporteur observe qu'il existe aujourd'hui une contradiction majeure dans le discours du gouvernement
.

D'une part, il affiche sa volonté d'assurer le redressement des sociétés concessionnaires d'autoroutes, en annonçant que leur endettement devrait aller en diminuant à compter de 2002, d'autre part le gouvernement entend en tirer un maximum de ressources.

Il est donc de la plus grand importance que le gouvernement clarifie ses intentions sur le respect de l'équilibre financier des sociétés concessionnaires d'autoroutes . Alors qu'il vient d'obtenir de la Commission européenne un accord pour l'allongement des concessions des SEMCA de 12 à 15 ans, au nom de leur redressement financier, il ne peut, quelques semaines plus tard, prendre des décisions en matière d'application de la TVA, de nature à compromettre leur équilibre financier.

Votre rapporteur note par ailleurs qu'au-delà de la question, essentielle, des modalités d'application de l'arrêt de la CJCE sur les comptes des sociétés concessionnaires d'autoroutes, la réforme qui se fera par voie d'ordonnances, relative à la « banalisation » des sociétés concessionnaires d'autoroutes pourrait, dans un avenir proche, se traduire par des charges supplémentaires très importantes pour certaines de ces sociétés, en raison du retraitement des amortissements passés.

L'objectif du gouvernement est en effet de prendre appui sur la réforme des SEMCA pour obtenir de ces sociétés des résultats d'exploitation bénéficiaires constituant de nouvelles ressources pour l'Etat, en termes d'impôt sur les sociétés et de dividendes et permettre, notamment, mais pas essentiellement, de financer le développement du réseau autoroutier.

Selon les informations recueillies par votre rapporteur, la société Autoroutes du Sud de la France (ASF) pourrait avoir ainsi à acquitter une charge d'impôt sur les sociétés exceptionnelle, d'un montant de près de 5 milliards de francs dès l'année 2001, ce qui la conduirait inexorablement à accroître son emprunt et donc son endettement. Ceci irait évidemment à l'encontre de toute la politique menée en faveur du désendettement des sociétés d'autoroutes.

Il faut continuer de regretter que le Parlement soit écarté des réformes en cours, réformes qui seront pourtant décisives pour l'avenir des sociétés d'autoroutes et le financement du réseau autoroutier français.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 2

Affectation au fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale (FOREC) de la part Etat du droit de consommation sur les tabacs manufacturés perçu en 2000

Commentaire : le présent article vise à affecter au fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale (FOREC) le reliquat du produit du droit de consommation sur les tabacs manufacturés qui continuait d'être affecté au budget de l'Etat en 2000.

I. LES 35 HEURES EN QUÊTE DE FINANCEMENT

A. LE FOREC RESTE TOUJOURS VIRTUEL

1. Les 35 heures auraient dû être financées par le FOREC dès cette année


L'article 5 de la loi n° 99-1140 du 29 décembre 1999 de financement de la sécurité sociale pour 2000 a créé un fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale, dénommé FOREC , dont les dispositions figurent aux articles L. 131-8 et suivants du code de la sécurité sociale.

Le FOREC a pour objet de financer :

- d'une part, les allégements de charges sociales patronales, qui ont été prétendument « réformées » ;

- et, d'autre part, les aides à la réduction du temps de travail.

La création du FOREC résulte donc directement de la décision du gouvernement d'abaisser d'autorité la durée hebdomadaire du travail à 35 heures, tant aux entreprises qu'aux salariés.

2. Une existence jusqu'à présent virtuelle

La réduction du temps de travail est la mesure sans doute la plus emblématique du gouvernement actuel, et a été menée au « pas de charge ». Pourtant, curieusement, le FOREC n'a toujours, pour l'instant, qu'une existence virtuelle.

En effet, les décrets d'application
de l'article 5 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 précitée n'ont toujours pas été publiés , ni le directeur ni les membres du conseil d'administration nommés, ni les conventions financières régissant les relations Etat/FOREC et FOREC/sécurité sociale rédigées.

En raison de l'absence, à la date d'aujourd'hui, de publication de ces décrets, les ressources du FOREC sont versées à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) et centralisées par elle, à titre transitoire, et jusqu'à la création effective du fonds de financement. Ce retard dans la publication des textes d'application du FOREC est pour le moins étonnant s'agissant d'une mesure aussi emblématique pour le gouvernement.

B. COMME PRÉVU, LE FINANCEMENT DU FOREC N'A PAS ÉTÉ ASSURÉ EN 2000

1. Des prévisions gouvernementales inexactes


Les prévisions initiales du gouvernement relatives à l'équilibre du FOREC en 2000 s'établissaient de la façon suivante :



Or, ces prévisions ne se sont pas réalisées , pour au moins deux raisons :

1) Le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 99-423 DC du 13 janvier 2000 portant sur la loi du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail, dite « Aubry II », a annulé la disposition prévoyant la taxation des heures supplémentaires, privant ainsi le FOREC d'une recette de 7 milliards de francs.

2) Le montant des ressources du FOREC ne correspond pas aux prévisions : le produit du droit de consommation sur les tabacs s'est révélé plus élevé que prévu (40,7 milliards de francs au lieu de 39,5 milliards de francs), alors que celui de la TGAP et de la CSB s'est établi à un niveau inférieur (respectivement, 2,8 milliards de francs au lieu de 3,25 milliards de francs, et 3,8 milliards de francs au lieu de 4,25 milliards de francs).

Il est dès lors devenu indispensable, pour le gouvernement, de « boucler » le financement des 35 heures pour 2000 , en assurant l'équilibre du FOREC ex post , faute d'avoir pu le faire ex ante , comme le Sénat l'avait d'ailleurs démontré lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000. Il convient en effet de rappeler que l'équilibre du FOREC est une obligation légale.

2. Comment « boucler » le financement des 35 heures en 2000 ?

En dépit du déséquilibre initial du FOREC, le gouvernement n'a pas jugé bon de déposer un projet de loi de financement de la sécurité sociale rectificative pour 2000.
Il n'a donc pas voulu prêter attention aux recommandations fort opportunes de la commission des affaires sociales du Sénat.

Il a décidé, pour « boucler » le financement des 35  heures en 2000, d'affecter au FOREC des recettes complémentaires, de façon rétroactive. Mais, en raison des multiples flux financiers existant entre l'Etat et la sécurité sociale, la décision d'affecter une recette provenant du budget général doit être prise par la loi de finances.

Tel est l'objet de l'article 17 du projet de loi de finances pour 2001, dont le IV prévoit d'affecter le reliquat du produit du droit de consommation sur les tabacs manufacturés qui restait affecté au budget de l'Etat en 2000 « aux régimes obligatoires de base de sécurité sociale et aux organismes créés pour concourir à leur financement », laissant le soin à l'article 11 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 de déterminer la répartition de ce produit.

L'article 11 du PLFSS pour 2001

L'article 11 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 prévoit :

- d'affecter au FOREC la quasi-totalité, soit 96,8 %, du droit de consommation sur les tabacs manufacturés ; toutefois, cette affectation ne prenant effet qu'au 1 er janvier 2001, il est nécessaire, pour équilibrer le FOREC en 2000, de prévoir dans le présent projet de loi de finances rectificative une disposition qui procède à cette affectation à titre rétroactif : le montant du produit du droit de consommation sur les tabacs manufacturés continuant de bénéficier au budget de l'Etat est évalué à 3,1 milliards de francs ;

- de verser au FOREC, à titre rétroactif, la totalité du produit des droits sur les boissons (droit de consommation sur les produits intermédiaires ; droit de circulation sur les vins, cidres, poirés et hydromels ; droit sur les bières et les boissons non alcoolisées ; ainsi que 55 % du produit du droit de consommation sur les alcools 18( * ) ) actuellement affecté au fonds de solidarité vieillesse (FSV) , pour un montant estimé à 5,4 milliards de francs.

Le présent article concerne spécifiquement le droit de consommation sur les tabacs manufacturés.

Il propose d'affecter au FOREC, à titre rétroactif pour 2000, le reliquat du produit de ce droit de consommation qui continuait de bénéficier, jusqu'à présent, au budget de l'Etat, soit environ 3,1 milliards de francs.

Cette mesure, destinée à sortir de l'impasse de financement dans laquelle se trouve le FOREC cette année, a l'apparence d'une mesure d'urgence consistant à trouver des crédits de diverses origines pourvu qu'ils soient suffisants pour financer une promesse électorale particulièrement coûteuse et dont les effets sur l'emploi sont pour le moins incertains.

Il convient par ailleurs de noter la caractère de « variable d'ajustement » donné par le gouvernement au droit de consommation sur les tabacs depuis trois ans, comme le montre le tableau ci-après :



Ainsi le produit, d'un montant considérable, de ce droit de consommation a-t-il constitué, pour le gouvernement, une source de financement qu'il a utilisée en fonction de ses besoins du moment.

Au total, le financement des 35 heures, qui ne sera finalement « bouclé » qu'après des contorsions législatives et, probablement, des charges importantes de trésorerie pour les régimes de sécurité sociale en raison des retards de versement de l'Etat, devrait donc s'établir de la façon suivante en 2000 :

Équilibre financier du FOREC en 2000

(en milliards de francs)

RECETTES

DEPENSES

Droit de consommation sur les tabacs

44,6

Ristourne dégressive 1,3 SMIC

39,5

Contribution sociale sur les bénéfices des sociétés

3,8

Allégement supplémentaire jusqu'à 1,8 SMIC

5,8

Taxe générale sur les activités polluantes

2,8

Aides à la réduction du temps de travail

21,7

Droits de consommation alcools

11,5

 
 

Contribution de l'Etat

4,3

 
 

Total

67

Total

67

Le coût des 35 heures sera donc plus élevé que prévu, s'établissant à 67 milliards de francs en 2000, au lieu de 64,5 milliards de francs.

Il convient de rappeler que le coût de financement des 35 heures en 2001 s'élèvera à 85 milliards de francs, soit plus que les investissements civils de l'Etat, qui s'établiront l'année prochaine à 78 milliards de francs, selon l'équilibre prévisionnel suivant :



Toutefois, la plus grande incertitude demeure sur le coût de la réduction du temps de travail à terme, c'est-à-dire lorsque l'ensemble des entreprises sera passé aux 35 heures, à partir du 1 er janvier 2002.

Il faudrait donc s'attendre à voir se renouveler, l'année prochaine, le même exercice visant à un « bouclage équilibriste » du FOREC.

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION
Votre commission, ayant déjà présenté à plusieurs reprises son analyse des 35 heures comme de ses modalités de financement, se permet de vous y renvoyer 19( * ) .

Ne pouvant cautionner ni la réduction autoritaire et uniforme du temps de travail, qui montre actuellement ses nombreux effets néfastes sur notre économie, ni la débudgétisation massive opérée pour la financer via un fonds qui reste à l'état virtuel et, de ce fait, inaccessible au contrôle parlementaire, votre commission, qui, dès l'année dernière, avait prévu l'impasse de financement actuelle, vous proposera de supprimer le présent article.

De surcroît, votre commission souhaite évoquer un point juridique important relatif à la constitutionnalité du présent article, qui semble méconnaître le champ respectif des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale.

En effet, l'article LO. 111-3 du code de la sécurité sociale, issu de l'article 1 er de la loi n° 96-646 du 22 juillet 1996, dispose, dans son II, que « [...] seules des lois de financement peuvent modifier les dispositions prises en vertu des 1° à 5° du I ».

Or, le 2° du I de l'article LO. 111-3 précité dispose que, chaque année, la loi de financement de la sécurité sociale « prévoit, par catégorie, les recettes de l'ensemble des régimes obligatoires de base et des organismes créés pour concourir à leur financement », dont le FOREC fait partie.

L'adoption du présent article aurait donc nécessairement un impact sur la catégorie « impôts et taxes » des recettes prévues par la loi de financement de la sécurité sociale.

Ainsi le gouvernement aurait-il dû inscrire les dispositions du présent article, non dans le présent projet de loi de finances rectificative, mais dans un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2000 qu'il a toujours refusé de prendre, en dépit des recommandations que lui a faites à maintes reprises notre commission des affaires sociales.

Ce faisant, il ne respecte pas les dispositions de l'article LO. 111-33 du code de la sécurité sociale qui ont valeur organique.

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.

ARTICLE 3

Consolidation du financement du budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA)

Commentaire : le présent article a pour objet de majorer de 350 millions de francs le prélèvement opéré sur le produit de la contribution sociale de solidarité des entreprises (C3S) au profit du BAPSA pour 2000, de manière à porter ce prélèvement au même montant que celui prévu pour le BAPSA par le projet de loi de finances pour 2001, soit 1,35 milliard de francs.

I. LE PRÉLÈVEMENT SUR LA C3S AU PROFIT DU BAPSA


La contribution au financement du budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA) sous la forme d'un prélèvement sur les recettes de la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés (C3S) était jusqu'à présent conçue comme exceptionnelle et non reconductible mais est en pratique devenue pérenne.

La contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés (C3S)

Ses principales caractéristiques

La C3S a été instituée par la loi du 3 janvier 1970. Elle est versée par les sociétés commerciales aux régimes d'assurance maladie et d'assurance vieillesse des non-salariés afin de compenser les pertes de recettes subies par ces régimes du fait du développement de l'exercice sous forme sociétaire des professions artisanales et commerciales. Elle a fait l'objet d'une réforme en 1995 destinée à augmenter son rendement (loi du 4 août 1995 portant loi de finances rectificative pour 1995) : extension du champ de recouvrement, de l'assiette et augmentation du taux. Son taux est fixé par décret à 0,13 % du chiffre d'affaires des sociétés redevables. Elle n'est pas perçue lorsque le chiffre d'affaires est inférieur à 5 millions de francs.

La répartition de son produit

En application de l'article L. 651-2-1 du code de la sécurité sociale, le produit de la C3S est réparti, au prorata et dans la limite de leurs déficits comptables, entre trois régimes prioritaires : le régime d'assurance maladie des travailleurs non salariés des professions non agricoles (CANAM), le régime d'assurance vieillesse des professions industrielles et commerciales (ORGANIC) et le régime d'assurance vieillesse des artisans (CANCAVA).

Le cas échéant, le solde du produit de la C3S était jusqu'en 1998 réparti entre les autres régimes de non-salariés déficitaires, parmi lesquels le BAPSA. Depuis 1999, ce solde est versé au Fonds de solidarité vieillesse (FSV).

Ces montants de répartition sont fixés par un arrêté conjoint du ministre chargé de la sécurité sociale et du ministre chargé du budget.

A. HISTORIQUE DU FINANCEMENT DU BAPSA PAR LA C3S

En 1992, la contribution sociale de solidarité sur les sociétés, destinée à financer les régimes sociaux des non-salariés non-agricoles, et la cotisation similaire prélevée sur les sociétés agricoles sont fusionnées. Le BAPSA devient dès lors l'un des affectataires de la nouvelle contribution unique.

L'affectation au BAPSA a été opérée en 1992 et 1993 au-delà du produit annuel de la contribution, conduisant à épuiser rapidement les réserves constituées sur le produit de la C3S.

De 1994 à 1996, le BAPSA, bien que demeurant attributaire d'une partie du produit de la contribution, cesse en pratique d'en recevoir une fraction.

La loi n° 96-314 du 12 avril 1996 exclut le BAPSA de la liste des bénéficiaires de la C3S. Il semblait donc acquis que désormais le BAPSA ne pourrait plus être bénéficiaire d'une fraction de la C3S.

Toutefois en 1999 et en 2000, 1 milliard de francs est prélevé forfaitairement sur le produit de la C3S au profit du BAPSA alors même que les projets initiaux de BAPSA pour 1999 et pour 2000 ne prévoient aucun versement au titre de cette contribution. En exécution pourtant il s'avère que les versements pour 1999 et 2000 s'élèvent chacun à 1 milliard de francs avec pour objet le financement de la revalorisation des petites retraites agricoles.

En outre, on peut ici souligner l'arbitraire du partage entre la loi de finances et la loi de financement de la sécurité sociale puisque :

- pour 1999, le financement de la politique de revalorisation des petites retraites agricoles par le biais d'un versement au titre de la C3S figurait en loi de financement de la sécurité sociale (article 2 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999, n° 98-1194 du 23 décembre 1998) ;

- pour 2000, la même mesure était inscrite en loi de finances pour 2000 (article 54 de loi de finances pour 2000, n° 99-1172 du 30 décembre 1999). D'ailleurs le projet de loi de finances pour 2000 n'intégrait initialement pas ce prélèvement sur la C3S mais le gouvernement avait contré cette omission par un amendement présenté en fin de première partie. En revanche, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 ne prévoyait pas la répercussion de ce dispositif.

B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE GOUVERNEMENT : AUGMENTATION DU PRÉLÈVEMENT DE C3S DANS LE BUT DE FINANCER LE DÉFICIT D'EXÉCUTION DU BAPSA POUR 2000

Le présent article prévoit l'une des deux mesures d'équilibre annoncée par le gouvernement pour faire face au déficit d'exécution du BAPSA pour l'exercice 2000, l'autre mesure consistant dans le relèvement de la subvention d'équilibre du budget de l'Etat, inscrite au budget des charges communes, de 3,5 à 5,6 milliards de francs pour 2000.

1. Le déficit d'exécution du BAPSA pour l'exercice 2000

Les prévisions d'exécution du BAPSA pour 2000 font apparaître un déficit très important de l'ordre de 2,4 milliards de francs.

a) Des dépenses sous-estimées

Ce déficit résulte d'une part de l'accentuation, mais plus encore de la sous-estimation, de certaines dépenses par rapport aux prévisions initiales :

- une augmentation de l'ordre de 0,8 % du montant des restitutions de TVA qui passe de 5.511 millions de francs à 5.552 millions de francs ;

- une dérive des dépenses d'assurance maladie (AMEXA) qui augmentent de 2,6 % passant d'un montant prévu en loi de finances initiale 2000 de 33.859 millions de francs à un montant en exécution de 34.729,50 millions de francs ;

- une nette augmentation des prestations familiales de l'ordre de 3,5 % qui passent de 3.801 millions de francs en loi de finances initiale pour 2000 à 3.931millions de francs en exécution ;

- le montant des prestations vieillesse reste a peu près stable en exécution ;

- enfin, les intérêts dus au titre de la dette (titre I) connaissent une très nette augmentation de 52 % et passent d'un montant prévu en loi de finances initiale pour 2000 de 230 millions de francs à 350 millions de francs en exécution.

b) Des recettes surestimées

D'autre part, certaines recettes, qui avaient d'ailleurs fait l'objet d'une surestimation manifeste, diminuent en exécution par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale pour 2000 :

- l'ensemble des cotisations professionnelles connaissent en exécution une baisse de l'ordre de 3,6 % ;

- le versement au titre de la compensation démographique est également moindre que prévu en loi de finance initiale : une différence de 660 millions de francs soit - 1,9 % ;

- la contribution de la Caisse nationale des allocations familiales au financement des prestations familiales servies aux non-salariés agricoles est en baisse de - 8,6 % et passe de 1.318 millions de francs à 1.205 millions de francs ;

- enfin les versements au Fonds de solidarité vieillesse marquent une baisse importante de l'ordre de - 20 %, passant d'un montant en prévision de 1.981 millions de francs à un montant en exécution de 1.589 millions de francs.

Au total, le BAPSA présente donc en exécution un déficit de 2,4 milliards de francs, déficit qui résulte avant tout d'erreurs de prévision budgétaire systématiques.

2. Le financement du déficit d'exécution du BAPSA pour 2000

Pour financer une petite partie du déficit d'exécution du BAPSA pour 2000, le gouvernement propose de majorer de 350 millions de francs le prélèvement sur le produit de la C3S prévu à l'article 2 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 précitée et reconduit par l'article 54 de la loi de finances pour 2000 précitée.

Cette majoration permettra de porter le montant de ce prélèvement au profit du BAPSA pour 2000 au même montant que celui effectué au profit du BAPSA pour 2001, c'est-à-dire 1,35 milliard de francs.

C. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

A. UN FINANCEMENT INACCEPTABLE

1. Un financement sans doute insuffisant


L'estimation des dépenses supplémentaires proposée par le projet de loi de finances rectificative apparaît, selon toute vraisemblance, erronée compte tenu notamment des quelque 120 millions de francs de dépenses de frais financiers prévus par le ministère chargé de la tutelle du régime social des exploitants agricoles ; de même, la réalité de l'exécution du BAPSA pour 2000 pourrait dépasser le montant des dépenses de maladie supplémentaires prévues par le présent projet de loi.

Faute de crédits ouverts par celui-ci à cet effet, le financement de ces dépenses supplémentaires pourrait être couvert par appel au fonds de roulement, correspondant au cumul des résultats bénéficiaires clos depuis 1949. Le prélèvement sur celui-ci pourrait atteindre 300 millions de francs.

En outre, il semble acquis que les recettes effectivement recouvrées au profit du BAPSA pour 2000 seront inférieures aux prévisions révisées inscrites dans le présent projet de loi. En effet, compte tenu du fait que les estimations révisées ont été calculées avant que ne soit connu le revenu agricole national pour 2000, qui sera sans doute faible cette année encore, et en particulier sans que soit prise en compte l'incidence financière de la crise actuelle de la filière bovine, il est vraisemblable que les cotisations effectivement recouvrées en 2000 seront inférieures aux prévisions révisées présentées dans le présent projet de loi.

En outre, alors même que l'exposé des motifs du présent article souligne explicitement qu'il s'agit de porter le prélèvement sur la C3S opéré au profit du BAPSA pour 2000 au niveau proposé dans le projet de loi de finances pour 2000 à l'article 24, le gouvernement a décidé, lors de la nouvelle lecture du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 à l'Assemblée nationale, d'augmenter de 350 millions de francs le versement de C3S au BAPSA pour 2001 - soit un versement total de 1,7 milliard de francs au lieu de 1,35 milliards de francs prévus. Cette majoration intervient dans le but de compenser la diminution de 350 millions de francs de la subvention d'équilibre de l'Etat versée au BAPSA, diminution elle-même destinée à compenser la réduction de 350 millions de francs du versement de la CADES à l'Etat.

Autant de tours de « passe-passe » qui font de ce versement de C3S au profit du BAPSA un financement particulièrement chaotique et complexe tout en le plaçant à la limite de l'inconstitutionnalité.

2. Un financement chaotique


L'historique du prélèvement sur la C3S et son affectation au BAPSA, précédemment évoqué, reflète parfaitement les tergiversations et les hésitations du gouvernement quant à l'affectation de la C3S au régime agricole.

Les conséquences de ces hésitations sont que le prélèvement opéré au profit du BAPSA modifie, en dehors de toute règle de calcul affichée, la répartition à trois étages de la C3S définie par l'article 651-1 du code de la sécurité sociale, entre le fonds de réserve des retraites, la première section du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) et les régimes maladie et vieillesse de certains non-salariés non-agricoles, au profit du régime de retraite et du régime maladie des exploitants agricoles.

Cette méthode contrevient donc à une règle de répartition fixée pour la dernière fois en 1996. La récurrence de cette dérogation aurait d'ailleurs pu être pressentie puisque la contribution a pour objet de financer les étapes annuelles successives du plan de revalorisation des retraites agricoles engagé au début de la législature.

Les conséquences de cette dérogation font que le fonds de réserve pour les retraites est le véritable « perdant » du prélèvement envisagé : le produit de la C3S ne compensera que partiellement le déséquilibre du FSV prévu par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 (un déficit de 1,08 milliard de francs en 2001, soit un ordre de grandeur comparable à celui du prélèvement opéré au profit du BAPSA). Ce sont autant de recettes dont ne bénéficiera plus la première partie du FSV dont les excédents doivent pourtant abonder le fonds de réserve pour les retraites.

Votre rapporteur général s'étonne de ces tergiversations, de ces arbitrages tardifs et de ces financements qui ne sont ni pérennes ni intégraux.

3. Un financement de plus en plus complexe et un article sans doute inconstitutionnel


L'affectation de 350 millions de francs de C3S supplémentaires par le présent article montre, une fois de plus, l'utilisation d'une des « tuyauteries » préférées du gouvernement.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 avait exclu le régime des exploitants agricoles de la liste des bénéficiaires de la C3S, tout en prévoyant un versement forfaitaire de 1 milliard de francs, en quelque sorte pour « solde de tout compte ».

La loi de finances pour 2000 a prévu, par dérogation à une règle posée en loi de financement et concernant une imposition affectée exclusivement à des régimes et organismes sociaux, un nouveau versement de 1 milliard de francs, prélevé sur le solde de la C3S. Cette disposition aurait dû logiquement être adoptée en loi de financement. Elle a été « coordonnée » en loi de financement par le vote de l'article fixant les prévisions de recettes.

Les dispositions du présent article reviennent donc rétroactivement sur la catégorie « impôts et taxes » des prévisions de recettes de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 et modifient les comptes du Fonds de solidarité vieillesse, présentés à l'annexe f du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001.

Or, la loi organique du 22 juillet 1996 relative aux lois de financement de la sécurité sociale a bien prévu que « seules des lois de financement peuvent modifier » 20( * ) les cinq dispositions faisant partie du domaine réservé de la loi de financement : les orientations de la politique de santé et de sécurité sociale et les objectifs qui déterminent les conditions générales de l'équilibre financier de la sécurité sociale, les recettes par catégorie de l'ensemble des régimes obligatoires de base et les organismes créés pour concourir à leur financement, les objectifs de dépenses des régimes de base comptant plus de 20.000 cotisants actifs ou retraités titulaires de droits propres, l'objectif national de dépenses d'assurance maladie et les plafonds d'avance de trésorerie.

Le présent article, en modifiant les prévisions de recettes de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000, apparaît ainsi contraire à la loi organique du 22 juillet 1996.

B. LA SUPPRESSION DE CET ARTICLE

Afin de réaffirmer clairement la position de principe de la commission concernant le prélèvement sur la C3S opéré au profit du BAPSA, votre rapporteur général estime nécessaire de supprimer cet article, qui est, en outre, inconstitutionnel.

Traditionnellement, la commission propose une solution alternative à ce financement par prélèvement sur la C3S, qui consiste dans l'augmentation du taux de la cotisation incluse dans les taux de TVA, actuellement fixé à 0,70 % par l'article 1609 septdecies du code général des impôts.

Cette solution alternative ne peut être envisagée ici car elle serait, comme la majoration proposée par le gouvernement, inconstitutionnelle.

La solution consisterait pour le gouvernement à augmenter la subvention d'équilibre au BAPSA, ce que ne peut en aucun cas suggérer votre commission, sous peine de contrevenir aux règles constitutionnelles de recevabilité financière des amendements parlementaires.

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.

ARTICLE 4

Modification des ressources du compte d'affectation spéciale n° 902-24 « Compte d'affectation des produits de cessions de titres, parts et droits de sociétés »

Commentaire : le présent article vise, en premier lieu, à affecter les recettes provenant des cessions des titres des sociétés Thomson CSF, Thomson Multimédia et Banque Hervet aux dépenses retracées dans le compte n° 902-24 et, en second lieu, à élargir la nomenclature desdites dépenses aux investissements de l'Etat dans les fonds de capital-risque.

I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ


L'article tend à modifier les recettes et les dépenses du compte n° 902-24.

A. UNE REDÉFINITION DES RECETTES DU COMPTE N° 902-24

Il s'agit en premier lieu de supprimer la mention d'une catégorie de recettes et, en second lieu, d'introduire la mention de nouvelles recettes.

1. La suppression d'une catégorie de recettes

La loi de finances pour 1993 avait décidé l'affectation aux comptes d'affectation spéciale retraçant la gestion des produits des cessions de titres publics du « reversement par l'Entreprise de recherches et d'activités pétrolières (ERAP) sous toutes ses formes, du produit de cessions de titres de la société nationale Elf-Aquitaine ».

Les derniers titres Elf-Aquitaine détenus par l'ERAP ont été cédés en 1997 et 1998 ce qui, à condition de vérifier que l'ensemble des produits de ces cessions sont bien « remontés » sur le compte, rend en effet sans objet cette mention, sous réserve des commentaires ci-dessous.

2. De nouvelles affectations de recettes

Il s'agit de prévoir l'encaissement par le compte des recettes provenant des cessions de titres Thomson CSF, Thomson Multimédia et Banque Hervet.

Ces trois sociétés sont des filiales d'entreprises (Thomson SA et Compagnie Financière Hervet) qui ont encaissé ou devraient encaisser dans un proche avenir le produit des cessions des titres qu'elles y détenaient. Ces « têtes de groupes » faisant écran, la budgétisation du produit de ces cessions ne pourrait provenir que d'une inscription au budget général d'un dividende exceptionnel, solution qui manquerait de clarté. C'est pour permettre le rattachement de ces recettes au compte n° 902-24 que le gouvernement a conçu le présent article.

Pour les opérations relatives au groupe Thomson, il s'agit de prévoir les conséquences des opérations portant sur Thomson CSF et sur Thomson Multimédia.

Pour Thomson CSF, sa privatisation est intervenue en 1998 sous la forme d'une augmentation de capital rémunérant les apports, à Thomson CSF, des activités d'électronique professionnelle et de défense d'Alcatel et de Dassault industries ainsi que de l'activité satellites d'Aérospatiale.

Après cette opération, Thomson SA détenait 40 % du capital, Aérospatiale Société nationale industrielle 4 %, Alcatel SA 16 % et Dassault Industries 4 %. Cette opération industrielle ne s'est pas traduite par des mouvements financiers sur le compte.

Puis, en décembre 1999, l'Etat a acheté des actions Thomson CSF à Thomson SA (2,9 milliards de francs) et a cédé des titres Thomson CSF à Alcatel et aux salariés de Thomson CSF pour un montant de 3,7 milliards de francs.

En septembre 2000, Thomson SA a reçu 148 millions de francs au titre d'une partie de l'opération salariés de la privatisation de Thomson CSF de 1998 (solde du paiement de l'offre à paiement différé).

Pour Thomson Multimédia (TMM), à l'occasion de l'augmentation de son capital, Thomson SA a cédé en octobre 2000 une partie de sa participation dans l'entreprise. Le produit de cette cession est de 1.446 millions € (1.504 millions € en valeur brute) auxquels s'ajoute le produit de la cession de bons de souscription d'actions pour un montant de 17 millions €. La recette totale de cession des titres TMM (cf. annexe) se décompose en :

- 1.154 millions € (1.207 millions € en valeur brute) de titres cédés aux particuliers (Offre à Prix Ouvert : OPO) ;

- 214 millions € (219 millions € en valeur brute) de titres cédés aux investisseurs institutionnels (Placement Global Garanti : PGC) ;

- 78 millions € de titres cédés aux salariés (Green shoe) ;

- 17 millions € de bons de souscription.

A la suite de cette opération, Thomson Multimédia a été transférée au secteur privé, Thomson SA conservant cependant 36,6 % du capital de Thomson Multimédia.

Bilan de l'opération TMM

Composition du capital avant opération

Modalités

Prix de cession en euros

Recettes brute en
M euros

Recette nette en Meuros

Composition du capital après opération

Thomson SA : 51,73 %

OPO : cession de 22.393.228 actions

53,9

1.207

1.154

Thomson SA : 36,56 %

Alcatel : 6,80 %

PGG : 3.611.597 actions

55,9

202

197

Alcatel : 6,38 %

Direct TV : 5,19 %

Green shoe : 303.472 actions

55,9

17

17

Direct TV : 4,87 %

Microsoft : 6,80 %


Cession de 128.670.436 BSA à 0,13333 euro


0,13333


17


17

Microsoft : 6,38 %

NEC : 6,80 %

 
 
 
 

NEC : 6,38 %

Public : 17,60 %

 
 
 
 

Public : 33,64 %

Salariés : 5,54 %

*Cession aux salariés : 1.734.992 actions (*)

 

78

78

Salariés : 5,84 %

Autodétention : 0,05 %

 
 
 
 

Autodétention : 0,04 %

 

Total

 

1.521

1.463

 

(°) Chiffres prévisionnels

Pour les opérations relatives à la Banque Hervet, qui devrait être cédée de gré à gré, le produit attendu est d'au moins 1,5 milliard de francs.

Les titres sont détenus par la Compagnie Financière Hervet (société détenue à 99,76 % par l'Etat) qui possède 94,53 % de la Banque Hervet dont le reste du capital est détenu pour 3 % par l'Etat en direct et, pour le reste, par France Télécom, les AGF et la Caisse des dépôts et consignations (2,47 % du capital).

B. UN ÉLARGISSEMENT DE LA NOMENCLATURE DES DÉPENSES DU COMPTE N° 902-24

En l'état du droit, les crédits du compte n° 902-24 peuvent être utilisés pour effectuer les dépenses suivantes :

- dépenses afférentes aux ventes de titres ;

- dépenses de dotations en capital, d'avances d'actionnaire et d'apports aux entreprises publiques et aux établissements publics ;

- reversements au budget général ;

- reversement à la Caisse d'amortissement de la dette publique (CADEP) et au fonds de soutien des rentes (FSR).

Il est proposé de créer un nouveau chef de dépenses, « les investissements réalisés directement ou indirectement par l'Etat dans des fonds de capital-investissement ».

Ces fonds d'investissement dédiés au capital-risque, au capital-développement et au capital d'amorçage prennent aujourd'hui la forme, d'une part, d'investissements de la Caisse des Dépôts et Consignations pour le compte de l'Etat, dans des fonds communs de placement à risque et d'investissement, aux côtés d'investisseurs privés, d'autre part, d'investissements dans des fonds via une société de valorisation, filiale d'un ou plusieurs établissements d'enseignement ou de recherche.

Ils bénéficient de l'effet de levier apporté par la contribution financière de l'Etat et investissent ensuite dans des sociétés en développement. L'Etat est associé aux éventuelles plus-values engendrées par les cessions ultérieures réalisées par les fonds.

On relèvera que cette extension de la nomenclature de crédits du compte provient d'un amendement du gouvernement au présent article.

II. OBSERVATIONS

Les deux objectifs poursuivis par le présent article appellent des réactions contrastées. Autant la modifications des recettes du compte apparaît acceptable dans son principe sous quelques réserves, autant l'extension de la gamme des dépenses du compte aux fonds de capital risque ne mérite pas la même attitude.

A. LA MODIFICATION DES CATÉGORIES DE RECETTES AFFECTÉES AU COMPTE EST ACCEPTABLE SOUS RÉSERVE DE QUELQUES COMMENTAIRES

1. Une révision acceptable dans son principe


La révision de la nomenclature des recettes du compte correspond à un préalable nécessaire au rattachement au compte n° 902-24 des produits de cessions sus-visées dont, ainsi, la budgétisation est assurée.

Les recettes sont retracées dans le budget de l'Etat ; elles sont affectées à des dépenses patrimoniales, ce qui est satisfaisant.

Elle doit donc être approuvée dans son principe.

2. Plusieurs nuances doivent autour cette approbation

Plusieurs commentaires doivent nuancer cette approbation.

a) La suppression de la mention des reversements de l'ERAP est peut être prématurée

La suppression de la mention des reversements du produit des cessions de titres Elf-Aquitaine n'est justifiée que pour autant que l'ensemble de ces produits aient été versés au compte. Cela doit être vérifié et le gouvernement doit fournir toutes les précisions nécessaires sur ce point.

En outre, l'ERAP s'il ne détient plus de titres d'Elf Aquitaine, n'en n'est pas moins doté d'un portefeuille constitué d'une participation de 7,6 % dans le capital de la Cogema. Il est peut être prématuré dans ces conditions d'éliminer toute référence aux reversements de l'ERAP. Un amendement pourrait apporter une solution à cette difficulté.

b) Le sort des produits de cession encaissés par Thomson SA doit être précisé.

En réponse au questionnaire parlementaire adressé à l'occasion du projet de loi de finances rectificative sur le niveau des recettes attendues au titre des opérations Thomson CSF (TCSF) et TMM, le gouvernement a donné les éléments de réponse suivants :

« Au titre de la part différée du paiement des actions TCSF cédées par l'Etat aux salariés de cette entreprise début 2000, une recette de l'ordre de 110 MF est attendue en juin 2001.

Le produit de la récente cession d'actions TMM a, pour l'essentiel (à l'exception de la part différée du paiement des actions acquises par les salariés), d'ores et déjà été encaissé par TSA (
Thomson SA) .

Une partie remontera sur le CAS -
compte d'affectation spéciale- au printemps 2001, après que les comptes 2000 de TSA auront été arrêtés et en fonction du niveau de dette que l'évolution de la politique de dividendes de TCSF et TMM permettra à TSA d'assumer. Il est en effet nécessaire de diminuer la dette de TSA (près de 10 Milliards de francs correspondant à des recapitalisations de TMM antérieures à 1997), dont la charge excède les capacités financières de TSA telles qu'elles résultent actuellement des dividendes encaissés par la holding. Les perspectives de versement de dividendes de la part de TCSF et de TMM détermineront ainsi le niveau de dette soutenable par TSA et la répartition optimale du produit de cession TMM entre le désendettement de TSA et l'alimentation du CAS ».

Il faut souligner les grandes incertitudes sur le niveau des versements, en recettes du compte, des produits des cessions des titres Thomson CSF et TMM.

Des précisions s'imposent sur ce point.

Il faut également relever le caractère contradictoire de la démarche du gouvernement
. En effet, par le présent article, celui-ci demande au Parlement de prévoir que le compte d'affectation spéciale enregistrera en recettes les produits de cessions dont, dans sa réponse, le gouvernement indique qu'une partie d'entre eux ne sera pas versée au compte.

Une certaine confusion s'ensuit qui est d'autant moins admissible que le maintien d'une partie des produits de la cession de TMM au sein de Thomson SA revient à opérer une contraction entre des recettes et des dépenses publiques. Il serait nettement plus conforme à l'orthodoxie budgétaire et à la sincérité comptable d'enregistrer la totalité de ces recettes sur le compte n° 902-24 et, en parallèle, d'inscrire en dépenses de ce compte les crédits nécessaires à l'équilibre de la holding Thomson SA.

Ce n'est que moyennant un engagement de cette sorte, donné par le gouvernement, que votre commission vous proposera d'adopter le volet recettes du présent article.

B. L'EXTENSION DE LA GAMME DES DÉPENSES DU COMPTE N° 902-24 NE SAURAIT ÊTRE APPROUVÉE


Votre commission des finances est particulièrement favorable au développement du capital-risque. L'Etat doit s'efforcer de le faciliter en adoptant une fiscalité adaptée.

Elle reconnaît en outre que l'Etat a un rôle à jouer pour financer des projets innovants et à rentabilité incertaine ou différée, par des interventions publiques. C'est d'une politique de recherche bien conçue que la France a besoin.

L'élargissement du champ d'affectation des recettes de privatisation à des fonds de capital risque ne répond pas à cette exigence. De plus, contrairement à ce que prétend l'exposé des motifs de l'amendement du gouvernement, les dépenses dont s'agit ne sont pas du tout de même nature que celles que réalise l'Etat quand il investit dans une entreprises à partir du compte n° 902-24. En effet, les opérations du compte sont réalisées lorsqu'elles concernent des entreprises, dans le cadre de dotations destinées à des entreprises publiques. L'extension ici proposée modifierait la vocation du compte qui pourrait alimenter des placements financiers dans des entités destinées à alimenter n'importe quel type d'organisme. Ce n'est pas condamnable en soi mais il faut rappeler que le budget général, qui comporte un budget de la recherche, est le support naturel d'opérations de ce type.

Il n'est pas sain de confier au ministère des finances la responsabilité de gérer des moyens dont l'objet ne correspond pas à son activité naturelle.

Enfin, en matière de risques, le ministère des finances et le compte n° 902-24 semblent à votre commission avoir déjà suffisamment à faire avec les risques financiers pesant sur le secteur public du fait d'une maîtrise fort insuffisante... de certains risques.

En réponse à l'intervention du rapporteur spécial chargé des comptes spéciaux du Trésor, notre collègue Paul Loridant, qui lors de la séance publique du 8 novembre 2000 s'inquiétait des insuffisances de moyens que pourrait subir le compte n° 902-24 pour financer la dette du secteur public -plus de 500 milliards de francs-, M. le secrétaire d'Etat à l'industrie n'a-t-il pas indiqué que « si les cessions d'actifs ne suffisent pas, l'Etat utiliserait des recettes budgétaires classiques, pour assumer ses responsabilités ». C'était reconnaître l'éventualité d'un redoutable problème de financement de la dette du secteur public qui, d'ores et déjà, a rendu entièrement virtuel, depuis 1995, le financement de la CADEP à partir du compte n° 902-24. Il convient de ne pas l'aggraver en acceptant de distraire des moyens qui doivent, par priorité, être consacrés au désendettement public.

Votre commission vous propose l'adoption du volet recettes de l'article (1 er alinéa) moyennant un engagement du gouvernement sur le rattachement au compte de la totalité des opérations entre TSA et l'Etat et en prévoyant un amendement consistant à maintenir les reversements de l'ERAP. Elle propose en revanche de supprimer le volet-dépenses de l'article.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 5

Abandon de créances de l'Etat détenues sur la société nouvelle du journal l'Humanité et sur l'Agence France Presse

Commentaire : le présent article tend à autoriser des abandons de créances détenues à la suite de prêts sur ressources du fonds de développement économique et social (FDES) au profit de la société nouvelle du journal l'Humanité pour un total de 13 millions de francs et de l'Agence France Presse pour 45 millions de francs.

Initialement le présent article ne concernait que l'abandon de deux prêts au journal l'Humanité qui, on le sait, connaît de graves difficultés ; mais est venu s'y greffer, à la suite d'un amendement du gouvernement, un nouveau paragraphe prévoyant un abandon de créance au profit de l'Agence France Presse, qui vient, opportunément, aider l'organisme public au moment où celui-ci change de président et relativiser l'effort ainsi fait en faveur du journal l'Humanité.

I. QUESTION DE METHODES BUDGÉTAIRES

Le présent article appelle des commentaires de méthode, alors que le Parlement s'est saisi de la réforme de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959.

On rappelle que les prêts accordés par l'Etat sont budgétés à travers les comptes spéciaux du Trésor et, plus précisément, à travers deux catégories de comptes spéciaux du Trésor, les comptes d'avances lorsque l'échéance du prêt n'excède pas deux ans, les comptes de prêts pour les schémas supérieurs.

Si, théoriquement, un compte d'avance distinct est nécessaire pour chaque débiteur, une telle exigence n'est pas formulée pour les comptes de prêts, tandis qu'en pratique, son respect n'est pas assuré pour les comptes d'avances. Pour ceux-ci, les gouvernements présentent en fait un regroupement des crédits correspondant à des catégories de débiteurs, tellement englobantes que l'esprit de l'ordonnance organique (article 28) est trahi.

La consultation des documents budgétaires transmis par le gouvernement au Parlement ne permet pas à ce dernier d'identifier les bénéficiaires des prêts. Le vote du Parlement sur les crédits qui les permettent intervient ainsi à l'aveugle. Son consentement est insuffisamment éclairé. Il faudra traiter ce problème à l'occasion de la réforme en cours.

Il est d'autant plus piquant d'observer qu'à l'inverse, le présent article identifie très précisément le bénéficiaire de l'abandon de créances qu'il comporte que juridiquement rien n'obligeait le gouvernement à la mentionner dans le présent projet de loi de finances rectificative .

En la matière, la seule obligation 21( * ) posée par l'ordonnance organique est de constater les pertes intervenues sur les opérations des comptes spéciaux du Trésor et de les faire figurer, en loi de règlement, au compte des découverts du Trésor (articles 24 et 35 de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959). L'on pourrait se féliciter de la volonté de transparence du gouvernement qui, par une pratique « ultra petita », dévoile ses embarras financiers et ses largesses par le présent article. Cependant, il faudrait pour cela que le gouvernement ne limite pas cette pratique au journal l'Humanité mais l'applique à toutes les autres pertes. Ce n'est pas le cas comme l'a montré le rapporteur spécial des comptes du Trésor, notre collègue Paul Loridant.

Il conviendra là également que la réforme de l'ordonnance organique débouche sur une clarification du régime des abandons de créances, qui devront être précisément retracés à l'avance dans les lois de finances afin d'être dûment autorisés et évalués.

II. CARACTÉRISTIQUE DES PRÊTS ET MONTANTS DES ABANDONS DE CRÉANCE

Le premier prêt, d'un montant de 7 millions de francs, a été accordé en novembre 1990 pour une durée de 15 ans. Il présentait les caractéristiques suivantes :

•  un différé de 5 ans au taux de 4,5 %, différé prolongé par un avenant jusqu'en octobre 1999 ;

•  l'amortissement du capital en dix échéances annuelles de 700.000 francs (1996-2005) au taux minimum de 8,5 % (ramené à 4,5% en 1997) assorti d'une clause participative.

Le second prêt d'un montant de 6 millions de francs a été accordé en février 1993, pour une durée de 15 ans. Il présente les mêmes caractéristiques que le précédent :

•  5 ans de différé d'amortissement au taux de 4,5 % ;

•  amortissement du capital en dix échéances annuelles de 600.000 francs (1999-2008), au taux minimum de 8,5 % (ramené à 4,5 % en 1997) assorti d'une clause participative.

Il a été indiqué que, si aucun remboursement en capital n'est intervenu jusqu'à présent, la société nouvelle du journal l'Humanité a néanmoins versé les intérêts.

C'est ainsi que les intérêts au taux réduit de 4,5 % ont été perçus annuellement depuis la première échéance pour chacun des deux prêts, soit depuis novembre 1991 et février 1994. Seule l'échéance de novembre 2000 est restée impayée.

En revanche, les échéances en capital de novembre 1999 et novembre 2000 n'ont pas été honorées.

S'agissant du premier prêt et, en ce qui concerne le second, l'échéance de février 1999 a été reportée tandis que celle de février 2000 n'a pas été réglée.

Il a été précisé en outre que les intérêts contractuels échus en 1999 et 2000 ont été partiellement réglés :

•  677.500 francs sont restés impayés en 1999, soit 437.500 francs au titre du prêt de novembre 1990 et 240.000 francs au titre du prêt de février 1993.

•  au 31 décembre 2000, les intérêts à payer doivent se monter à 539.275 francs, dont 85.945 francs au titre du prêt de novembre 1990 et 453.330 francs au titre du prêt de février 1993.



III. LE CONTEXTE ÉCONOMIQUE ET BUDGÉTAIRE

La presse, et notamment la presse quotidienne bénéficiant de faibles ressources publicitaires et de petites annonces, fait l'objet d'un soutien constant de l'Etat. En dépit de certains précédents, c'est, semble-t-il, la première fois que l'Etat abandonne ainsi des créances avant même que l'entreprise ne soit mise en liquidation judiciaire.

Certes, on peut faire état de deux autres titres ayant bénéficié de prêts du FDES pour un montant de 11,6 millions de francs :

•  un prêt de 1,6 million de francs à la société éditrice du journal La Marseillaise, actuellement en cours de remboursement ;

•  un prêt de 10 millions de francs non remboursé du fait de la mise en redressement judiciaire de son bénéficiaire, le Quotidien de Paris.

On peut ajouter que l'Agence France Presse avait déjà bénéficié d'une telle mesure dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 1999, pour un montant de 45 millions de francs.

Par ailleurs, l'Humanité bénéficie d'un montant de subventions non négligeable comme le rappelle le tableau ci-joint.

Ce tableau appelle deux commentaires :

• d'une part, on voit que le journal l'Humanité a reçu près de 50 millions de francs d'aides de l'Etat en 5 ans, dont une bonne partie sous forme de subventions de fonctionnement par l'intermédiaire du fonds d'aide aux quotidiens à faibles ressources publicitaires, contrairement aux autres journaux, qui à l'exception de la Croix bénéficient plutôt des aides fonctionnelles au titre du portage ou de la modernisation ;

• d'autre part, l'aide au fonctionnement est insuffisante pour enrayer le déclin d'un journal qui n'a cessé de perdre des lecteurs, comme le montrent les chiffres ci-dessous. La diffusion totale payée ne se monte plus en 1999 qu'à 52.269 exemplaires contre 54.835 en 1998, 56.444 en 1997 et 58.245 en 1996. En ce qui concerne l'équilibre financier, la Société nouvelle du journal l'Humanité a enregistré un déficit de 29,2 millions de francs pour un chiffre d'affaires de 180,3 millions de francs, soit une nette détérioration par rapport aux années précédentes : le déficit est passé de 3,6 millions de francs en 1996 (pour un chiffre d'affaires de 205,5 millions de francs) à 8,4 millions de francs en 1997 (pour 197,8 millions de francs) et 8,6 millions de francs en 1998 (pour 193,2 millions de francs).





On note que dans la perspective d'une ouverture du capital 22( * ) , le nouveau directeur de l'Humanité, a lancé officiellement au début décembre une souscription nationale dont les participants «deviendront propriétaires d'une partie du journal au travers d'une société des lecteurs».

En définitive, votre commission des finances, malgré son attachement au maintien du pluralisme, estime, au vu des chiffres de diffusion et des résultats financiers de ce quotidien, que l'aide proposée relève de l'acharnement thérapeutique. Au surplus, elle conteste l'empressement du gouvernement à effacer une dette sans attendre que l'actionnaire actuel fasse, lui aussi, un effort financier à la mesure de ses engagements : il ne faudrait pas qu'il y ait « deux poids deux mesures », selon la couleur politique des journaux.

IV. L'ABANDON DE 45 MILLIONS DE FRANCS DE CRÉANCES SUR L'AFP


A l'initiative du gouvernement, il est proposé dans un second paragraphe d'abandonner la seconde moitié d'un prêt de 90 millions de francs, dont la première avait déjà fait l'objet d'un abandon de créance en vertu de la loi de finances rectificative pour 1999.

Tout comme la première fois, votre commission des finances ne conteste pas la nécessité de concevoir une nouvelle stratégie pour l'Agence France Presse, mais elle s'interroge sur la méthode consistant pour le gouvernement à procéder à une forme de recapitalisation qui ne dit pas son nom, de façon apparemment improvisée - la mesure ne figurait pas dans les deux cas dans le projet de loi initial - et, surtout, indépendamment d'un projet d'entreprise approuvé explicitement par l'Etat s'inscrivant dans un cadre juridique rénové.

Le statut de l'Agence France Presse doit être adapté aux nouvelles règles du jeu mondiales : l'agence a manqué la révolution de l'information économique ; elle ne doit pas rater celle d'Internet. Elle a sans doute besoin d'être recapitalisée mais faut-il pour autant ne pas lier cet effort à un changement de statut et à la définition d'une stratégie de conquête de nouveaux marchés ?

Une tentative avait été faite avec l'ancien président qui, on l'a vu n'a guère été soutenu par le gouvernement dans sa volonté de modernisation. Il faut espérer qu'une fois encore, on accordera au nouveau président les moyens qu'on a refusé à son prédécesseur, à commencer par la définition d'un nouveau statut, qui, comme le montre la proposition de loi déposée par notre collègue Louis de Broissia, pourrait prendre des formes simples.



Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.

ARTICLE 5 bis (nouveau)

Aménagement de l'assiette de la taxe spéciale alimentant le compte de soutien aux industries cinématographiques et audiovisuelles

Commentaire : le présent article tend à aménager l'assiette de la taxe spéciale alimentant le compte de soutien à l'industrie cinématographique pour tenir comte de la commercialisation de formules d'abonnement au cinéma à entrées illimitées.



Lors de l'examen du texte sur les nouvelles régulations économiques, le Sénat a accepté un amendement du gouvernement autorisant, en les encadrant, les formules d'abonnement au cinéma à entrées illimitées.

Cet article additionnel introduit à l'initiative du gouvernement tire les conséquences de la légalisation de ce mode de commercialisation en ce qui concerne l'assiette de la taxe alimentant le compte de soutien aux industries cinématographiques et audiovisuelles.

Certes, il s'agit d'une mesure de coordination tout à fait utile de nature à compléter le dispositif déjà adopté par le Sénat dans le sens d'une plus grande transparence de ces nouvelles pratique commerciales et, notamment, de la garantie de la remontée des recettes vers les ayants droit des oeuvres cinématographiques.

Mais, pour des raisons de procédure, elle vous propose d'inciter le gouvernement à introduire cette disposition en nouvelle lecture du texte sur les nouvelles régulations économiques en supprimant cet article.

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.

ARTICLE 5 ter (nouveau)

Création d'un compte de commerce n° 904-22 intitulé
« Gestion active de la dette et de la trésorerie de l'Etat »





Commentaire : le présent article vise à créer un compte spécial du Trésor, le compte de commerce n° 904-22, destiné à retracer certaines opérations de gestion de la dette et de la trésorerie de l'Etat.



I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

L'article 5 ter est issu d'un amendement du gouvernement, lui-même sous-amendé à l'initiative du rapporteur général du budget de l'Assemblée nationale.

A. L'AMENDEMENT DU GOUVERNEMENT

1. Un nouveau compte spécial du Trésor


IL s'agit de créer un compte de commerce qui retracerait certains flux financiers intervenant à l'occasion des opérations de gestion active de la dette de l'Etat.

Il comporterait :

. en recettes, les produits des opérations d'échanges de devises ou de taux d'intérêt ainsi que de la vente d'options ou de contrats à terme sur titres d'Etat ;

. en dépenses, les charges des opérations d'échange de devises ou de taux d'intérêt et les achats d'options ou de contrats à terme sur titres d'Etat.

Le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie serait l'ordonnateur de ce compte.

2. Un rapport d'activité

En annexe du projet de loi de finances, un rapport devrait être déposé chaque année rendant compte de l'activité de gestion de la dette de l'Etat auquel serait joint un compte rendu d'audit. Cet audit devrait :

. analyser les états financiers du compte ;

. porter une appréciation sur les procédures prudentielles mises en oeuvre ;

. ainsi que sur l'ensemble des opérations effectuées en vue de couvrir les « charges de la trésorerie » et de gérer les instruments d'endettement de l'Etat.

Une analyse de l'impact de cette gestion sur le coût de la dette figurerait dans cet audit.

B. L'AMENDEMENT ADOPTÉ À L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a souhaité élargir le champ du dispositif aux opérations de gestion active de la trésorerie de l'Etat.

Le texte du gouvernement, en ne mentionnant que la dette de l'Etat, pouvait être interprété comme excluant du mécanisme les opérations de gestion infra-annuelle des avoirs et engagements de l'Etat.

II. UNE INITIATIVE PRÉMATURÉE

L'article 5 ter est destiné à permettre d'assurer un enregistrement budgétaire des opérations de gestion active de la dette et de la trésorerie que le gouvernement souhaite activer.

A. RAPPEL DU CONTEXTE

1. Une latitude sans utilisation


Depuis 1990, le gouvernement demande au Parlement de voter chaque année une disposition, incluse dans l'article d'équilibre des lois de finances, autorisant le ministre chargé des finances à procéder, dans des conditions fixées par décret, aux opérations nécessaires à la gestion de la dette. C'est ainsi que l'article 29 « Equilibre général du budget » du projet de loi de finances pour 2001 disposait : « Le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie est autorisé à procéder, en 2001, dans des conditions fixées par décret :

1. à des emprunts à long, moyen et court terme libellés en euros pour couvrir l'ensemble des charges de trésorerie ou pour renforcer les réserves de change ;

2. à des conversions facultatives, à des opérations de pension sur titres d'Etat, à des opérations de dépôts de liquidités sur le marché interbancaire de la zone euro et auprès des Etats de la même zone, des rachats, des échanges d'emprunts, à des échanges de devises ou de taux d'intérêt, à l'achat ou à la vente d'options ou de contrats à terme sur titres d'Etat
».

On relèvera que ce sont ces dernières opérations qui seraient retracées dans le nouveau compte de commerce.

Cependant, faute de réunir les conditions de « front office », le savoir-faire financier, et de « back office », les infrastructures comptables, qu'impliquent de telles opérations, elles n'ont dans les faits pas reçu de traduction concrète 23( * ) .

L'utilité financière d'une gestion de la dette et de la trésorerie passant par l'utilisation d'instruments dérivés n'est plus à démontrer. Mais, les risques ne sont pas négligeables non plus et c'est une des raisons pour laquelle le Trésor ne s'y est jusqu'à présent pas « aventuré ».

Mais une autre de ces raisons tient aux contraintes de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959 qui n'offre pas le cadre politique juridique et comptable propre au développement de telles opérations.

Sur les plans politique et juridique, les autorisations d'engagement financier que comporte l'article d'équilibre des lois de finances pose un problème dès lors qu'elles ne trouvent qu'un fondement fragile dans le texte de l'ordonnance de 1959 et ne s'accompagnent pas, en contravention avec celui-ci (article 31 de l'ordonnance), d'une évaluation du montant des ressources d'emprunt et de trésorerie.

Sur le plan comptable, ni la comptabilité budgétaire, ni la comptabilité publique ne permettent d'enregistrer les flux financiers correspondant à des « swaps » ou les avoirs et engagements correspondant à des achats ou ventes d'options ou de contrats à terme.

2. Les annonces du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie

La volonté du nouveau ministre de l'économie, des finances et de l'industrie s'est toutefois exprimée le 10 juillet dernier dans le sens d'une activation de telles opérations.

Intervenant au cours des entretiens annuels organisés par les acteurs de la place financière de Paris, il a annoncé qu'il avait demandé à France Trésor -la structure qui regroupe, au sein d'une même plate-forme consacrée à la dette, les services de la direction du Trésor et de la direction générale de la comptabilité publique- de travailler à la mise en place rapide d'un portefeuille de swaps de taux et de procéder à un « allégement de l'encours de la dette » d'ici à la fin de l'année 2000, sous la forme d'un programme de rachat de titres publics à hauteur de 10 milliards d'euros.

Dans le même sens, le ministre a annoncé la création d'une agence de la dette. Directement rattachée au directeur du Trésor, elle semble devoir constituer un instrument technique, apte à intervenir directement et de façon quasi immédiate sur les marchés. A ce titre, le ministre a pu indiquer qu'elle disposerait de moyens nouveaux et recruterait des professionnels de marché.

B. UNE INITIATIVE TOTALEMENT PRÉMATURÉE

Il est à déplorer que le gouvernement ait pris l'initiative d'introduire par voie d'amendement au coeur de la discussion du second collectif pour 2000 un dispositif aussi complexe et qui pose une série de questions fondamentales sur les conditions d'enregistrement des charges et recettes de la gestion de la dette et de la trésorerie de l'Etat dans les documents budgétaires et financiers présentés en lois de finances.

Il s'agit d'une question très importante qui devra être réglée dans le cadre de la réforme de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959.


Plutôt que de légiférer « à la hussarde », le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie ferait bien de s'engager dans la voie de la « concertation active » sur la réforme de l'ordonnance organique, annoncée dans le communiqué de presse du ministre du 6 octobre dernier.

En toute hypothèse, ni les conditions relatives au « front office », ni les conditions relatives au « back office » de telles opérations ne sont actuellement réunies.

Pour le « front office », il suffit de rappeler que la création de l'agence de la dette, qui devra démontrer son savoir-faire, n'est pas encore intervenue.

Pour le « back office », il est totalement illusoire d'imaginer que la création d'un compte de commerce pourrait permettre de lever toutes les difficultés. Outre les questions de comptabilité publique qui restent à résoudre, il faut aussi rappeler au gouvernement qui, semble-t-il, l'oublie trop souvent, que la comptabilisation budgétaire de ses engagements n'est pas qu'une pure formalité. Elle est avant tout le support de l'autorisation parlementaire.

Or, on rappelle que, dans le cadre d'un compte de commerce, ni les recettes, ni les dépenses ne sont l'objet d'une telle autorisation qui ne porte, en vertu de l'article 26 de l'ordonnance organique, que sur leur découvert. Il est évident qu'une telle caractéristique fait que le recensement de telles opérations dans un compte de commerce ne suffirait pas à asseoir l'autorité du Parlement qui doit particulièrement se manifester s'agissant d'opérations si essentielles. On observera d'ailleurs que le gouvernement n'hésite pas à violer ce même article 26 avec l'article ici sous revue en ne prenant même pas la peine d'évaluer les recettes et les dépenses du compte.

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.

ARTICLE 6

Equilibre général

Commentaire : le présent article traduit l'incidence sur l'équilibre prévisionnel du budget de 2000 des dispositions du projet de loi et des textes réglementaires affectant l'équilibre.



L'équilibre pour 2000 est modifié comme suit compte tenu des dispositions initiales du présent projet de loi et de l'arrêté d'annulation du 15 novembre 2000.

(en millions de francs)

 

Loi de finances initiale (1)

LFR du 13 juillet (2)

Décret d'avance du 1 er août (3)

Modifications proposées dans le présent projet

Total des mouvements 5= (3)+(4)

Situation nouvelle = (1)+(2)+(5)

 
 
 
 

Ouvertures

Annulations

Net (4)

 
 

A. Opérations à caractère définitif
Charges :

Dépenses ordinaires civiles du budget général (nettes de remboursements et dégrèvements)

1.358.148

7.174

153

19.554

15.399

4.155

4.308

1.369.630

Dépenses civiles en capital du budget général

81.043

2.547

 

3.890

2.436

1.454

1.454

85.044

Dépenses militaires du budget général

242.833

310

 

910

3.982

- 3.072

- 3.072

240.071

Dépenses des budgets annexes

106.157

 
 

813

10

803

803

106.960

Solde des comptes d'affectation spéciale

- 1

 
 

17

17

0

0

- 1

Total des charges

1.788.180

10.031

153

25.184

21.844

3.340

3.493

1.801.704

Ressources :

 
 
 
 
 
 
 
 

Ressources du budget général (nettes de remboursements et dégrèvements)

1.463.698

10.095

153

 
 

17.105

17.258

1.491.051

Ressources des budgets annexes

106.157

 
 
 
 

803

803

106.960

Total des ressources

1.569.855

10.095

153

 
 

17.908

18.061

1.598.011

Solde des opérations définitives

- 218.325

64

 
 
 

14.568

14.568

- 203.693

B. Opérations à caractère temporaire

Total des charges

384.392

 
 

3.300

 

3.300

3.300

387.692

Total des ressources

387.390

 
 
 
 

- 5.463

- 5.463

381.927

Solde des opérations temporaires

2.998

 
 
 
 

- 8.763

- 8.763

- 5.765

Solde général

- 215.327

64

 
 
 

5.805

5.805

- 209.458



Lors de l'examen à l'Assemblée nationale, l'équilibre du présent collectif a été modifié. Le solde des opérations définitives a été minoré de 231 millions de francs, pour s'établir à 14.337 millions de francs, tandis que le déficit des opérations temporaires s'est accru, passant de 8.763 millions de francs à 8.808 millions de francs, soit une progression de 45 millions de francs.

Au total, la réduction du déficit prévu pour 2000 a donc été minorée à l'issue de la discussion par l'Assemblée nationale en première lecture de 276 millions de francs, et s'établit à 209,734 milliards de francs.

Votre commission estime cependant que le niveau affiché de déficit budgétaire ne correspond pas à la réalité, notamment en raison du report arbitraire de la perception de 15,022 milliards de francs de recettes non fiscales sur 2001. Elle vous proposera, par souci de transparence et de sincérité budgétaires, de prélever effectivement ces recettes non fiscales en 2000 et de réduire, ainsi, à due concurrence, le niveau du déficit.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

DEUXIEME PARTIE

MOYENS DES SERVICES ET DISPOSITIONS SPECIALES


TITRE PREMIER

DISPOSITIONS APPLICABLES A L'ANNEE 2000


I.- OPERATIONS A CARACTERE DEFINITIF



A. - Budget général


ARTICLE 7

Dépenses ordinaires des services civils - Ouvertures

Commentaire : le présent article propose l'ouverture, au titre des dépenses ordinaires des services civils pour 2000, de crédits supplémentaires d'un montant de 38,06 milliards de francs.



Le détail des ouvertures de crédits figure à l'état B annexé au présent projet de loi de finances rectificative.

La majeure partie de ces ouvertures, soit 25,52 milliards de francs (67,3 % du total), porte sur le budget des charges communes :

- 20,69 milliards de francs sur son titre I, dont 2,3 milliards de francs au titre des charges de la dette publique, qui résultent de la remontée des taux d'intérêt et qui mettent en évidence le poids croissant de ce poste de dépenses , et 18,38 milliards de francs au titre des dépenses en atténuation de recettes ;

- 4,83 milliards de francs sur son titre IV : 700 millions de francs représentant l'ajustement de la dotation aux dépenses anticipées au titre de l'épargne logement, 3,58 milliards de francs pour la majoration de l'allocation de rentrée scolaire (1,72 milliard de francs) et pour le versement au BAPSA 24( * ) (1,86 milliard de francs), et 550 millions de francs au titre du versement du complément de l'indemnité allouée aux malades du SIDA, appelé « quart SIDA ».

Parmi les autres ouvertures de crédits les plus conséquentes, il convient de citer :

- 4,04 milliards de francs sur le budget de l'emploi pour la compensation d'exonérations de cotisations sociales ;

- 1,73 milliard de francs sur le budget de l'agriculture et de la pêche, dans le cadre de l'apurement FEOGA et du préfinancement des aides européennes ;

- 948 millions de francs au budget des affaires étrangères, au titre des contributions à divers organismes internationaux ;

- 947 millions de francs au budget de la santé et de la solidarité au titre du remboursement à la CNAF de sa contribution au fonds d'action sociale pour les travailleurs immigrés et leurs familles (FASTIF).

Par ailleurs, l'Assemblée nationale a adopté cinq amendements présentés par le gouvernement se traduisant par des ouvertures de crédits supplémentaires :

- une majoration du budget de la culture de 6,5 millions de francs provenant de celui de l'enseignement supérieur, au titre de la contribution du ministère de l'éducation nationale au financement de l'établissement public de maîtrise d'ouvrage des travaux culturels, en charge de la réalisation du projet « Paris Rive Gauche » devant permettre, dans le cadre du plan Université du troisième millénaire (U3m), l'implantation de l'université Paris VII sur la zone d'aménagement concerté (ZAC) de Paris Tolbiac ;

- un abondement de 20 millions de francs des crédits de la santé et de la solidarité, destiné à financer des manifestations et colloques organisés dans le cadre de la célébration du centenaire de la loi du 1 er juillet 1901 sur les associations ;

- le budget de l'équipement se voit ouvrir des crédits à hauteur de 7 millions de francs au titre des frais de justice en raison d'un retard dans le paiement d'une condamnation, dont le secrétaire d'Etat au Budget n'a toutefois pas pu préciser le motif ;

- les crédits du ministère de l'environnement ont été majorés de 40 millions de francs afin de financer des mesures de mise en oeuvre du programme d'efficacité énergétique présenté par le gouvernement ;

- le budget du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie a été abondé de 43,12 millions de francs au titre de l'ajustement de la dotation permettant d'appliquer les conventions fiscales.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 8

Dépenses en capital des services civils - Ouvertures

Commentaire : le présent article propose l'ouverture, au titre des dépenses en capital des services civils pour 2000, de 13,10 milliards de francs en autorisations de programme, et de 3,99 milliards de francs en crédits de paiement.



Le détail des ouvertures d'autorisations de programme et de crédits de paiement figure à l'état C annexé au présent projet de loi de finances rectificative.

Les chapitres budgétaires concernés par ces abondements de crédits sont très nombreux, mais il est toutefois possible de mettre en évidence les principaux.

• Au titre des autorisations de programme, la principale d'entre elles porte sur le budget des charges communes, pour un montant de 7,67 milliards de francs représentant la mise en oeuvre des fonds structurels correspondant aux tranches 2000 à 2002.

Il convient également citer une ouverture de 1,47 milliard de francs représentant la contribution de l'Etat à la création de la fondation pour la mémoire de la Shoah, qui vient abonder le budget des services généraux du Premier ministre, et une autre de 974 millions de francs au budgets des transports terrestres au titre de subventions aux projets de transports collectifs en province.

• Au titre des crédits de paiement, le budget des charges communes est majoré de 1,28 milliard de francs représentant le versement de la moitié des sommes dues par la France au titre de l'ancien instrument de stabilisation des recettes d'exportation (STABEX) dont les fonds viennent désormais abonder l'activité courante du FED 25( * ) .

Par ailleurs, les services généraux du Premier ministre se voient allouer 700 millions de francs destinés à la fondation pour la mémoire de la Shoah.

En outre, 552 millions de francs supplémentaires sont inscrits au budget de l'économie, des finances et de l'industrie, dans le cadre de la participation de la France à divers fonds.

L'Assemblée nationale a, en outre, adopté cinq amendements du gouvernement :

- les autorisations de programme et crédits de paiement du budget de l'enseignement scolaire ont été réduits de 16,98 millions de francs, suite à la modification du chapitre de rattachement des produits de cessions immobilières du ministère de l'éducation nationale ;

- dans le même temps, les autorisations de programme et crédits de paiement du budget de l'enseignement supérieur ont été majorés de 10,48 millions de francs ; cet abondement, ainsi que celui opéré par l'article 7 du présent projet de loi de finances rectificative portant sur 6,5 millions de francs sur le budget de la culture, ont été gagés par l'annulation de 16,98 millions de francs précitée ;

- les crédits de l'environnement ont été accrus de 170 millions de francs au titre des autorisations de programme et de 62 millions de francs au titre des crédits de paiement, afin de financer les mesures nécessaires à la mise en oeuvre du programme d'efficacité énergétique arrêté par le gouvernement ;

- le même programme gouvernemental conduit à accroître les dotations du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, de 80 millions de francs au titre des autorisations de programme, et de 30 millions de francs au titre des crédits de paiement ;

- il se traduit également par la majoration des autorisations de programme à hauteur de 50 millions de francs, et des crédits de paiement à hauteur de 18 millions de francs du budget de la recherche et de la technologie.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 9

Dépenses ordinaires des services militaire - Ouvertures



Commentaire : le présent article propose l'ouverture de 910 millions de francs au titre des dépenses ordinaires des services militaires destinées pour l'essentiel à l'ajustement de la dotation carburants et au financement des mesures spécifiques gendarmerie, ainsi que, dans une moindre mesure, au financement des opérations extérieures.



Les crédits demandés par le présent projet de loi de finances rectificative au titre des dépenses ordinaires militaires s'élèvent à 910 millions de francs, ce qui amène à 3.610 millions de francs, soit 3,4 % de la dotation initiale du titre III, la majoration totale des crédits de dépenses ordinaires en cours d'exercice 2000.

I. LE FINANCEMENT DES OPÉRATIONS EXTÉRIEURES

Sur l'exercice 2000, les « surcoûts » liés aux opérations extérieures, tels qu'estimés au 31 août 2000, s'élèvent au total à 2.893 millions de francs pour les dépenses ordinaires, en légère diminution de 1,4 % (- 40 millions de francs) par rapport aux dépenses 1999.

Ces surcoûts correspondent pour 2.074 millions de francs à des dépenses de rémunérations 26( * ) et pour 819 millions de francs à des dépenses de fonctionnement 27( * ) .

Au total, les ouvertures de crédits votées dans le cadre de la loi de finances rectificative du 13 juillet 2000 (2.190 millions de francs) et proposées pour le présent collectif (100 millions de francs) s'élèvent à 1.850 millions de francs pour les rémunérations, soit, compte tenu de la provision de 160 millions de francs inscrite en loi de finances initiale, un taux de couverture de 97 %, et à 440 millions de francs pour les dépenses de fonctionnement, soit un taux de couverture de 74 %, laissant donc 443 millions de francs de dépenses non financées (379 millions de francs pour le fonctionnement et 64 millions de francs pour les rémunérations).

II. L'AJUSTEMENT DE LA DOTATION CARBURANTS

Le niveau peu réaliste du cours du baril retenu 28( * ) lors de l'élaboration du projet de loi de finances initial pour 2000 a nécessité d'importants abondements de la dotation carburants en cours d'exercice : 315 millions de francs (hors OPEX) par la loi de finances rectificative du 13 juillet précitée, 500 millions de francs par le présent projet de loi de finances rectificative 29( * ) , soit un total de 815 millions de francs, représentant plus du tiers (34,8 %) de la dotation initiale. Cet abondement important laisse toutefois subsister un report de charges de 200 millions de francs sur la gestion 2001.

En outre, les hypothèses du projet de loi de finances pour 2001 -baril à 20 dollars, dollar à 6,50 francs- laissent à nouveau présager que d'importants abondements seront à nouveau nécessaires en cours d'exercice.



III. LE FINANCEMENT DES MESURES SPÉCIFIQUES GENDARMERIE

En dehors des surcoûts carburants et OPEX, la gendarmerie bénéficie d'une majoration spécifique de crédits de 210 millions de francs dans le présent projet de loi, qui complète les 160 millions de francs inscrits en loi de finances rectificative de l'été 2000.

Sur ce montant, 100 millions de francs sont destinés au paiement des loyers et 110 millions de francs aux moyens de fonctionnement des brigades (fournitures de bureaux, matériel informatique, communications téléphoniques, déplacements, entretien des véhicules et des locaux).

Ce nouvel abondement ne suffira pas à couvrir les besoins constatés ou les promesses faites, qui laissent subsister des dépenses non couvertes estimées à 310 millions de francs pour les loyers.

IV. L'APUREMENT DE LA DETTE SNCF


Le présent projet de loi prévoit l'inscription de 60 millions de francs au titre de l'apurement partiel de la dette vis-à-vis de la SNCF, liée au remboursement des avantages tarifaires consentis aux militaires.

Toutefois, malgré cet abondement, et l'effet d'un rebasage de 90 millions de francs dans le projet de loi de finances pour 2001, le passif contracté auprès de la SNCF 30( * ) depuis 1998 est loin d'être apuré : le solde à payer est estimé à 240 millions de francs.

V. LES INTEMPÉRIES DE DÉCEMBRE


L'armée de terre bénéficie de 40 millions de francs destinés à couvrir partiellement les dégâts causés par les intempéries de décembre 1999. On rappellera en effet que, à l'inverse des budgets civils, la défense n'avait bénéficié d'aucune ouverture de crédits à ce titre dans la loi de finances rectificative du 13 juillet 2000, alors que les dégâts non patrimoniaux avaient été évalués à 60 millions de francs. Il resterait donc 20 millions de francs non couverts.

VI. LES DÉPENSES INDEMNITAIRES


De façon récurrente, le chapitre 31-32 consacré aux indemnités et allocations diverses des personnels militaires des armées, a été insuffisamment dotée en loi de finances initiale (malgré un premier « rebasage » de 200 millions de francs).

De fait, ce chapitre bénéficie en gestion de 874,7 millions de francs supplémentaires, soit 6 % de la dotation initiale, transférés comme suit :

- décret de virement du 23 novembre 2000 : 818 millions de francs (dont 602 millions de francs en provenance des crédits de rémunération de personnels civils non consommés faute de recrutement) ;

- arrêté de répartition du 23 novembre 2000 : 56,7 millions de francs.



Décision de la commission : sous le bénéfice de ces observations, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 10

Dépenses en capital des services militaires - Ouvertures



Commentaire :  le présent article prévoit l'ouverture de 18.194 millions de francs d'autorisations de programme, destinées pour l'essentiel à financer la moitié de la commande globale française des 50 avions de transport A 400-M destinés à remplacer les C 160-Transall.

Le présent projet de loi de finances rectificative prévoit l'ouverture de 18.194 millions de francs d'autorisations de programme sur le chapitre 53-81-Equipement des armées, dont 17.894 millions de francs sont destinés à financer la moitié de la commande globale française des 50 avions de transport futur A 400-M, destinés à remplacer les C 160-Transall. La couverture en crédits de paiement devra être prévue dès 2002.

Ces ouvertures de crédits sont partiellement financées par un redéploiement de 1.956 millions de francs d'autorisations de programme, au sein du chapitre concerné.

Elles sont en outre complétées par l'annulation de 3.112 millions de francs au sein d'autres chapitres du titre V 31( * ) . Ceci permet au total d'atteindre les 20.000 millions de francs nécessaires au financement de la moitié de la commande globale.

L'enjeu européen fort de ce projet, qui traduit notamment la préférence britannique pour Airbus, amène votre commission à considérer qu'il aurait été préférable d'ouvrir « d'entrée de jeu » la totalité du montant nécessaire au financement de l'engagement global de la France, de façon à le confirmer pleinement, tant vis-à-vis des autres partenaires européens de ce projet, qu'à l'égard de l'industriel concerné.

Plus généralement, il apparaît souhaitable de réfléchir de manière approfondie aux modalités de financement budgétaire des procédures de « commande globale » appelées à se généraliser dans le domaine des équipements militaires, et actuellement traitées de façon sinon insatisfaisante, du moins insuffisante dans le cadre de l'ordonnance de 1959.

Ce même chapitre prévoit également l'ouverture de 150 millions de francs, destinés à l'achat de deux Airbus A 319 d'occasion pour l'armée de l'Air.

Le chapitre 66-50 - Participation à des travaux d'équipement civil et subventions d'équipement social intéressant la collectivité militaire bénéficie également d'une ouverture de 145 millions de francs en autorisations de programme, qui sera affectée sous forme de subventions à l'IFREMER pour cofinancer la construction du bâtiment hydrographique et océanographique futur de la marine nationale.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

B. - Budgets annexes


ARTICLE 11

Budgets annexes - Ouvertures



Commentaire : le présent article ouvre 813,2 millions de francs de crédits au sein des budgets annexes.



Les crédits de paiement concernent à hauteur de 809,8 millions de francs des dépenses ordinaires. Ils bénéficient pour 800 millions de francs au budget annexe des prestations sociales agricoles et pour 9,8 millions de francs au budget annexe des monnaies et médailles. Il s'agit d'un « ajustement aux besoins constatés ».

Par ailleurs 3,4 millions de francs de crédits bénéficient au budget annexe de la Légion d'honneur. Il s'agit d'un « reversement à la section d'investissement du budget annexe de la subvention complémentaire obtenue en vue de la remise en état des bâtiments des maisons d'éducation, suite aux intempéries de décembre 1999 ».

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

C. - Comptes d'affectation spéciale


ARTICLE 12

Comptes d'affectation spéciale - Ouvertures



Commentaire : le présent article vise à redéployer 17,5 millions de francs de crédits du fonds national de solidarité pour l'eau en ouvrant des crédits d'études et de fonctionnement (chapitre 8 du fonds) au détriment des crédits de subvention de fonctionnement (chapitre 9 du fonds).

I. UN DISPOSITIF RÉPONDANT AU SOUCI DE RÉPARER UNE MALFAÇON DANS LA DÉTERMINATION DES CHARGES DU COMPTE


Le fonds national de solidarité pour l'eau (FNSE), créé au sein du fonds national de l'eau -compte d'affectation spéciale n° 902-00- par la loi de finances pour 2000 avait fait l'objet d'un avis très défavorable de votre commission et sa création avait été rejetée par le Sénat.

Le calibrage des crédits en loi de finances initiale pour 2000 a fait l'objet d'une malfaçon. Des moyens ont été inscrits au chapitre 9 du compte pour financer des études réalisées par des prestataires de services. Or le chapitre 9, qui est un chapitre regroupant les crédits de subvention de fonctionnement, ne saurait être utilisé à de telles fins.

Les objections du contrôle financier ont ainsi gelé l'utilisation de 17,5 millions de francs de crédits destinés à financer des études interbassins qui doivent être réalisées, sous maîtrise d'ouvrage de l'Etat, par l'institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (IFREMER), le bureau de recherches généalogiques et minières (BRGM), le Centre national du machinisme agricole, du génie rural et des eaux et forêts (CEMAGREF) ou l'institut de recherche et de développement. (IRD).

Ce gel se transformerait en annulation si l'arrêté d'annulation du 15 novembre 2000 joint au collectif devait être validé dans le cadre du présent projet de loi.

Le présent article vise, quant à lui, à doter à due proportion le chapitre 8 qui seul peut abriter les dépenses susmentionnées.

II. OBSERVATIONS

Votre commission est très défavorable à l'ouverture de crédits en loi de finances rectificative lorsque les crédits ainsi ouverts sont manifestement appelés à n'être pas consommés. Ces ouvertures de crédits se traduisent en effet alors par des reports sur l'exercice suivant.

Or, les comptes spéciaux du Trésor se caractérisent déjà par l'importance excessive de tels reports (plus de 15 milliards de francs de 1998 à 1999) qui troublent la lisibilité des opérations budgétaires qu'ils sont censés retracer.

En outre, votre commission remarque que si le gouvernement avait souhaité consommer les crédits en cause, il lui aurait été loisible de procéder à un virement de crédits en cours d'exécution. S'il est vrai que les crédits susceptibles de faire l'objet d'un telle mesure n'auraient pu atteindre le montant du réajustement proposé par le présent article, il n'en est pas moins vrai que ce procédé aurait favorisé l'exécution des dépenses du FNSE, exécution qui d'ailleurs est particulièrement mauvaise s'agissant de ses crédits d'investissement.

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.

II. - OPÉRATIONS A CARACTÈRE TEMPORAIRE


ARTICLE 13

Compte de prêts - Ouverture



Commentaire : le présent article vise à ouvrir un crédit de 400 millions de francs au titre du compte de prêts n° 903-07 « Prêts du Trésor à des Etats étrangers et à l'Agence française de développement en vue de favoriser le développement économique et social ».



I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ...

Le compte de prêts n° 903-07 abrite deux catégories d'interventions, la première au bénéfice des Etats étrangers dans le cadre du financement des « prêts sur protocole » du Trésor, la seconde au bénéfice de l'Agence française de développement (AFD) pour financer ses interventions ou celles de ses filiales dont la PROPARCO.

Il est proposé par cet article de procéder à une ouverture de crédits destinés à cette seconde catégorie d'interventions. En réponse au questionnaire parlementaire adressé dans le cadre de l'examen du présent projet de loi de finances rectificative, le gouvernement a justifié cette mesure dans les termes suivants :

« Le chapitre 02, sur lequel est demandée une mesure en LFR, fournit à l'Agence française de développement (AFD) une ressource de prêt très concessionnelle qu'elle utilise pour l'adossement des prêts au secteur privé directement ou par l'intermédiaire de sa filiale PROPARCO.

Dans la mesure où cet établissement financier a l'obligation de se conformer à la réglementation prudentielle définie par la Commission bancaire et de respecter les règles relatives au ratio de division des risques (plafonnement de l'encours d'un risque sur un seul débiteur à hauteur de 25 % des fonds propres), l'Etat a décidé d'augmenter les fonds propres de l'AFD à compter du 1 er janvier 1999, conduisant à la transformation d'une partie de l'encours des prêts du Trésor accordés sur ce chapitre en dette subordonnée.

Dans ce contexte, le chapitre a été doté en LFI 2000 de 350 millions de francs en crédits de paiement. La situation des décaissements effectués par l'AFD, soit 750 millions de francs, conduit à inscrire une dotation complémentaire de 400 millions de francs en LFR en vue d'assurer l'équilibre des comptes de l'établissement, qui a préfinancé cette somme. Ce besoin de financement correspond au régime permanent du plafond d'engagement autorisé à l'AFD ces dernières années.

Une mesure de ce type avait d'ailleurs déjà été mise en place pour l'exercice 1999. Le projet de LFI 2001 prévoit une dotation de 750 millions de francs
».

II. ... APPELLE QUELQUES OBSERVATIONS CRITIQUES

Les justifications avancées par le gouvernement suscitent des interrogations sur les conditions dans lesquelles intervient l'ouverture de crédits prévue par le présent article.

A. LES QUESTIONS RELATIVES AU RESPECT DES RÈGLES PRUDENTIELLES

Dans sa réponse, le gouvernement précise que cette ouverture de crédits serait justifiée par la nécessité de respecter la réglementation prudentielle appliquée par la Commission bancaire.

Il mentionne tout particulièrement la règle de division des risques. Il indique enfin que les engagements de l'AFD intervenus en sus des prévisions initiales ont été préfinancés par elle.

La nature des opérations de l'AFD au bénéfice de débiteurs fragiles invite à s'interroger sur la nature précise des règles prudentielles qui lui sont appliquées. Il faut, plus globalement, que le gouvernement permette au Parlement de mesurer la situation de risques de l'établissement en lui donnant les informations nécessaires. Celles-ci doivent notamment porter sur la répartition des engagements de l'AFD et sur les conditions dans lesquelles elle est amenée à préfinancer ses interventions dans le respect des règles prudentielles qui s'appliquent à elle.

B. LES QUESTIONS RELATIVES À L'IMPUTATION BUDGÉTAIRE DES INTERVENTIONS DE L'ETAT EN FAVEUR DE L'AFD

Deux problèmes doivent être évoqués.

1. La séquence temporelle des interventions de l'Etat

Dans la réponse susmentionnée, le gouvernement fait état du profil temporel des versements réalisés au profit de l'AFD en 1999 et 2000.

* 1999 : 5 versements

486 millions de francs

 

- mai :

 

60 MF

- juin :

 

60 MF

- juillet :

 

60 MF

- août :

 

56 MF

- janvier 2000 (période complémentaire) :

 

250 MF

* 2000 : 2 versements

350 millions de francs

 

- mars :

 

250 MF

- septembre :

 

100 MF



Il faut remarquer le caractère tardif du versement réalisé en période complémentaire de l'exercice 1999 : 250 millions de francs ont été ordonnancés le 27 janvier 2000 sans appel de fonds de la part de l'établissement. Il s'est agi d'un des artifices utilisés pour piloter le solde 1999 et dénoncé comme tel par votre commission.

La mesure prévue par le présent article procède des mêmes travers mais pour un montant encore plus élevé que l'année dernière.

2. L'imputation de la dépense au compte n° 903-07 ne semble pas conforme à la nomenclature budgétaire

Dans sa réponse, le gouvernement indique que, depuis le 1 er janvier 1999, il a été décidé d'augmenter les fonds propres de l'AFD en transformant la nature des interventions réalisées à son profit.

Les interventions financées à partir du compte n° 903-07 serviraient à transformer une partie de l'encours de la dette de l'AFD auprès du Trésor en éléments de dette subordonnée. Dans les comptes de l'AFD, ceux-ci sont traités en fonds propres complémentaires (Tier-Two). Cette nouvelle orientation se traduit pour le compte n° 903-07 par une décrue des remboursements en provenance de l'AFD, qui se réduisent d'un cinquième en 2001 par rapport à 2000 (- 116 millions de francs sur un total de 377 millions de francs prévus en 2001).

Dans ces conditions, il conviendrait d'imputer budgétairement ces dépenses, non pas au compte de prêt n° 903-07, mais au compte d'affectation spéciale n° 902-24 qui retrace les apports de l'Etat au capital des entreprises et établissements publics.

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.

ARTICLE 14

Compte d'avance du Trésor - Ouverture



Commentaire : le présent article vise à ouvrir 2,9 milliards de francs de crédits dans le compte spécial du Trésor n° 903-54 « Avances sur le montant des impositions revenant aux départements, communes, établissements et divers organismes ».



Le compte n° 903-54 est le compte spécial du Trésor qui décrit les relations financières entre l'Etat et les collectivités locales à l'occasion des opérations de recouvrement des impôts directs locaux (IDL).



I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Il est proposé d'augmenter de 2,9 milliards de francs les crédits du compte afin de tenir compte de la progression réelle des émissions de rôle.

Le tableau ci-après récapitule leur évolution depuis 1998.

Evolution des émissions de rôle provisionnées dans le compte d'avances
aux collectivités locales depuis 1998

(en millions de francs)

 

1998

1999

LFI 2000

Révisé 2000

PLF 2001

Emissions des IdL

354.716

359.306

363.000

365.900

362.700

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

En exécution, l'année 1999 s'était traduite par une progression des émissions de 1,3 % et les prévisions associées au projet de loi de finances initiale pour 2000 retenaient une variation de 1 %.

La révision entreprise par le présent article porte cette prévision à 1,8 %. Elle s'explique par les facteurs suivants. Les émissions demeurent en progression, les taxes foncières augmentant de + 2,6 %, la taxe professionnelle étant stable (+ 0,1 %) du fait de la prise en compte de la suppression progressive de la part salariale dans l'assiette de la taxe.

S'agissant de la taxe d'habitation, la suppression de la part régionale, pour la première année de mise en oeuvre, n'a pas d'effet sur le niveau des émissions, qui progressent de + 3,4 %.

On remarquera que pour 2001, des évolutions inverses sont anticipées.

Une diminution globale des émissions des quatre taxes locales interviendrait. La taxe d'habitation diminuerait de - 4,1 % du fait de la première année de prise en compte de la suppression de la part régionale dans l'assiette de la taxe. La taxe professionnelle baisserait de - 2,7 % du fait de la nouvelle « tranche » de la suppression progressive de la part salariale engagée en 1999. Les émissions de taxes foncières progresseraient, quant à elles, de + 2,7 %.

II. QUELQUES OBSERVATIONS

Il n'y a pas lieu de s'opposer à une révision qui procède d'un affinement des prévisions de dépenses du compte.

Il faut cependant observer la tendance récente à une très vive augmentation de l'excédent du compte d'avances.

Ainsi, les révisions de recettes du compte intervenues dans le présent projet de loi (+ 4,8 milliards de francs) excédant les révisions de dépenses, se traduisent par une contribution significative du compte d'avances à la formation du solde budgétaire. Par rapport à un excédent prévisionnel de 1,7 milliard de francs, ces révisions se traduisent par un excédent de 3,1 milliards de francs, soit une contribution positive de 1,4 milliard de francs.

Le tableau ci-après présente l'évolution du solde du compte d'avances sur moyenne période.

Solde du compte d'avances aux collectivités locales depuis 1993

(en millions de francs)

 

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

LFI 2000

Révisé 2000

PLF 2001

Emissions des IdL

266.367

288.289

303.498

324.951

340.566

354.716

359.306

363.000

365.900

362.700

Recouvrements des IdL

256.062

278.058

288.190

326.882

340.718

355.271

363.537

364.700

369.000

366.600

Solde

- 9.765

- 10.231

- 15.308

+ 1.937

+ 152

+ 555

+ 4.231

+ 1.700

+ 3.100

+ 3.900

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

On constate que les émissions de rôle -les dépenses du compte- ralentissent depuis 1998, tandis que les recouvrements évoluent à un rythme plus rapide.

Cette situation, qui provient sans doute d'une amélioration des performances en matière de recouvrement vient également des différentes mesures 32( * ) qui ont eu pour effet de substituer des mécanismes de compensation aux émissions des collectivités locales.

On soulignera d'abord ici à nouveau le caractère attentatoire au principe d'autonomie fiscale des collectivités locales de telles mesures.


On remarquera aussi que, techniquement, elles engendrent une amélioration du taux de recouvrement obtenu par les services fiscaux.

On observera enfin que ces évolutions sont tout à l'avantage de l'Etat. De leur fait, celui-ci tire désormais un profit budgétaire et de trésorerie des relations fiscales qu'il entretient avec les collectivités locales. En outre, la charge de travail de ses services en ressort atténuée, le coût de gestion des dégrèvements et des compensations étant plus faible que celui des impôts locaux.

Deux conclusions s'imposent. La première c'est qu'il faudra garder ces données à l'esprit dans le cadre de la réforme de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959 lorsque celle-ci abordera le sujet des relations financières entre l'Etat et les collectivités locales. La seconde consiste à mettre en évidence l'utilité d'interroger le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la traduction budgétaire des gains d'efficacité engendrés par la substitution de la gestion de compensations à celle des impôts directs locaux.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

III. - AUTRES DISPOSITIONS



ARTICLE 15

Ratification des crédits ouverts par décret d'avance



Commentaire : le présent article propose au Parlement de ratifier le décret d'avance du 1 er août 2000, en application des dispositions de l'article 11 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances.



Deux dispositions de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959 sont relatives aux règles de ratification d'un décret d'avance :

- son article 11, 4 ème alinéa (2°) dispose que « en cas d'urgence, s'il est établi, par rapport du ministre des finances au Premier ministre, que l'équilibre financier prévu à la dernière loi de finances n'est pas affecté, des crédits supplémentaires peuvent être ouverts par décrets d'avance pris sur avis du Conseil d'Etat. La ratification de ces crédits est demandée au Parlement dans la plus prochaine loi de finances » ;

Il convient toutefois de préciser que ces dispositions doivent se lire en fonction de l'article 2 de la même ordonnance qui prévoit, en son quatrième alinéa, que « la loi de finances de l'année prévoit et autorise, pour chaque année civile, l'ensemble des ressources et des charges de l'Etat » , tandis que son sixième alinéa précise que « seules des lois de finances dites rectificatives peuvent, en cours d'année, modifier les dispositions de la loi de finances de l'année ».

- son article 34 dispose que « les lois de finances rectificative ... soumettent obligatoirement à la ratification du Parlement toutes les ouvertures de crédits opérées par décrets d'avances ».

Toutefois, dans les faits, les décrets d'avance sont le plus souvent pris pour procéder aux mouvements de crédits qui ne peuvent attendre la promulgation du collectif de fin d'année.

Cette procédure, à l'origine exceptionnelle, est devenue courante. Le rapporteur général du budget de l'Assemblée nationale estimait ainsi l'année dernière 33( * ) qu'un « décret d'avance apparaît toujours comme une intrusion de l'exécutif dans le domaine de compétence essentiel du Parlement ». Il ajoutait ainsi : « le recours à cette procédure doit donc être strictement limité et entouré de la plus grande transparence ».

Du reste, la portée de la ratification semble essentiellement symbolique, car les crédits ratifiés sont le plus souvent déjà dépensés, en tout ou partie. Les conséquences d'un éventuel refus de ratification n'ont d'ailleurs pas été clairement identifiées par la doctrine.

Le contenu du décret d'avance du 1 er août 2000 a été analysé dans l'exposé général. Celui-ci porte sur une ouverture de crédits de 152,5 millions de francs destinée à financer l'organisation du référendum du 24 septembre 2000.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 16

Répartition des excédents de redevance

Commentaire : le présent article tend à répartir les excédents de redevance disponibles pour l'exercice 1999 par rapport aux prévisions contenues dans la loi de finances entre les différents organismes de l'audiovisuel public, conformément à l'article 53 de la loi n° 1067 du 30 septembre 1986



Dans la mesure où, ces dernières années, le produit de la redevance excède de façon chronique les prévisions contenues dans les lois de finances initiales, les lois de finances rectificatives comportent traditionnellement un article proposant une nouvelle répartition de la redevance entre les organismes faisant partie du secteur public de la communication audiovisuelle.

L'année dernière, le projet de loi de finances rectificative déposé par le gouvernement, ne proposait pas, initialement, la répartition de l'ensemble de l'excédent de redevance dégagé au cours de l'exercice précédent.

En fait, le gouvernement a décidé de répartir les quelque 350 millions de francs d'excédents 1998, en deux parts égales :

•  la première est placée de façon classique en loi de finances rectificative pour 1999 afin d'offrir des compléments de financements à certaines sociétés de l'audiovisuel ayant des besoins urgents ;

•  la seconde a été affectée en projet de loi de finances initiale pour 2000 de façon à compléter les ressources du compte d'affectation spéciale et partant les moyens publics mis à la disposition du secteur public audiovisuel.

On peut rappeler que ces excédents ont à la fois pour origine la modification des conditions d'exonération et l'efficacité accrue des contrôles exercés par le service de la redevance dans le cadre des opérations dites « de recherche de postes non déclarés ». Ces opérations, on le sait, se sont trouvées grandement facilitées par la possibilité de rapprochement de fichiers de la taxe d'habitation et de la redevance, autorisée à l'initiative du Sénat, par la loi du 12 avril 1996.

En 1998, le gouvernement avait initialement tenté de mettre en réserve l'excédent 1997, déduction faite de 50 millions de francs destinés à France 3. La commission des finances de l'Assemblée nationale est alors intervenue pour répartir l'ensemble du reliquat.

La même logique avait conduit, l'année dernière, l'Assemblée nationale à souhaiter, dans un premier temps, corriger la copie du gouvernement et à affecter - par un vote acquis à l'unanimité des groupes politiques - l'ensemble des excédents de l'exercice 1998 à la dotation 2000, privant de ce fait, de financement les mesures d'urgence prévues en projet de loi de finances rectificative.

En fait, le gouvernement qui avait réussi à faire supprimer en seconde délibération, a vu la question resurgir au moment de la discussion du projet de loi de finances rectificative. Il est parvenu avec les rapporteurs - qui avaient déposé un amendement répartissant 100 millions de francs pris cette fois-ci sur les excédents 1999 - à un compromis sur la base d'un supplément de 70 millions de francs. Et c'est le prélèvement opéré par anticipation sur les excédents de 1999 qui explique que l'on n'ait plus à répartir dans la présente loi de finances que 200 millions de francs au titre de cette année.

Le Sénat avait d'ailleurs également voulu sur proposition de votre commission des finances aller au delà de la ponction opérée par l'Assemblée nationale et répartir la totalité de l'excédent prévisible pour 1999, soit 270 millions de francs.

Cette année, l'Assemblée nationale s'était initialement contentée de répartir les excédents non distribués de 1999. Mais, sur proposition, du rapporteur spécial de la communication audiovisuelle, notre collègue député Jean-Marie Le Guen, elle a adopté un amendement proposant en faveur de Radio-France International (RFI) une nouvelle répartition de l'excédent de redevance pour permettre le financement du renouvellement de la concession de l'émetteur de Chypre à destination du Moyen-Orient. La mesure est compensée par la réduction de la dotation de RFO (- 3 millions de francs), de France 2 (- 1 million de francs), de France 3 (- 1 million de francs) et de Radio France (- 1 million de francs).

Favorable aux objectifs recherchés par cette initiative destinée à affirmer la présence française dans cette région du monde, votre commission des finances souhaite, par réalisme, l'adoption du nouveau dispositif, même si elle s'interroge sur les raisons qui ont conduit l'Assemblée nationale à ne pas adopter la même attitude que l'année dernière en anticipant sur les excédents pour l'exercice 2000, a priori, suffisants pour faire face aux quelque 7 millions de francs nécessaires pour la première tranche de la concession.

Maintenant, au delà de ces questions d'opportunité, une question demeure : l'affectation des reliquats de redevances de l'année « N » en fin d'exercice de l'année « N+1 » ne permet pas aux sociétés et organismes de l'audiovisuel d'être gérés dans des conditions qui fassent apparaître clairement les responsabilités dans la formation du résultat de l'entreprise.

S'il y a là un élément de souplesse de gestion qui peut venir compenser des sujétions spéciales, et tel est le cas cette année où les dotations viennent permettre de financer le coût de la réduction du temps de travail, l'intervention correctrice intervient, en effet, en fin d'exercice pour corriger un résultat qui dépend alors en partie de la bienveillance des autorités de tutelle.

Tout cela n'est pas de nature à clarifier la gestion des sociétés et aboutit à conforter l'emprise financière de l'État sur l'audiovisuel public.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification

TITRE II

DISPOSITIONS PERMANENTES


I. - MESURES CONCERNANT LA FISCALITÉ



ARTICLE 17 A (nouveau)

Réduction d'impôt pour frais d'hébergement et de cure médicale



Commentaire : le présent article étend le bénéfice la réduction d'impôt pour frais d'hébergement et de cure médicale aux frais de dépendance et à chaque personne hébergée (plutôt que le foyer fiscal).



I. LE TEXTE PROPOSÉ

L'article 199 quindecies du code général des impôts prévoit que les contribuables peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu pour frais d'hébergement dans un établissement de long séjour ou une section de cure médicale. Cette réduction est applicable sans condition d'âge ni de situation de famille. Elle est égale à 25 % des dépenses engagées dans la limite annuelle de 15.000 francs par foyer et offre donc une réduction maximale de 3.750 francs.

Les établissements de long séjour et les sections de cure médicale sont des services d'établissements hospitaliers publics ou privés ou d'établissements sociaux médicalisés. L'admission se fait sur prescription médicale. Les dépenses visées concernent le seul hébergement c'est-à-dire le logement, les repas et l'entretien. Depuis le 1 er janvier 1999 (article 14 de la loi n° 99-1172), le bénéfice de la réduction d'impôt n'est plus réservé aux personnes âgées de plus de 70 ans.

Le 1° du présent article étend le dispositif à chaque personne hébergée. La réduction sera ouverte par « personne hébergée » et non plus limitée à l'ensemble du foyer fiscal.

Le deuxième alinéa de l'article 199 quindecies prévoyait que la réduction s'appliquait quelle que soit la situation de famille de la personne hébergée. Il n'a alors plus lieu d'être.

Le 2° du présent article étend la réduction d'impôt « aux dépenses afférentes à la dépendance effectivement supportées à raison de l'accueil dans un établissement » ayant conclu une convention pluriannuelle en vertu de l'article 5-1 de la loi n° 75-535 du 30 juin 1975 relative aux institutions sociales et médico-sociales. Cette convention passée entre l'établissement, le conseil général et l'assurance maladie permet l'accueil de personnes âgées dépendantes bénéficiant de la prestation spécifique dépendance, en définissant les conditions de fonctionnement de l'établissement tant au plan financier qu'à celui de la prise en charge des personnes et des soins qui sont prodigués à ces dernières et à celui de la formation des personnels, et en fixant les modalités d'évaluation de l'établissement. Il s'agit donc d'étendre aux dépenses de dépendance pour les personnes hébergées dans ces établissements le bénéfice de la réduction d'impôt prévue à l'article 199 quinquies précité.

Enfin, le II fixe au 1 er janvier 2000 l'entrée en vigueur de ce nouveau dispositif.

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION : UN PREMIER PAS ENCOURAGEANT

Votre rapporteur général ne peut que se réjouir de voir enfin pris en compte le problème de l'insuffisance manifeste de la réduction d'impôt pour les personnes hébergées dans les établissements de longue durée et les sections de cure médicale. De même, il ne peut que se féliciter de l'extension de son bénéfice aux dépenses afférentes à la dépendance. Il n'était pas normal en effet qu'une personne qui bénéficiait de la réduction d'impôt la perde en cas de dépendance et de prise en charge dans un établissement spécialisé.

Il remarque cependant que cette question a déjà été abordée par le Sénat, à plusieurs reprises. Lors de la discussion de la première partie de la loi de finances pour 2001, il a ainsi examiné un amendement proposé par notre collègue Jean Chérioux qui prévoyait :

• de porter à 45.000 francs le plafond des dépenses prises en compte pour le calcul de la réduction d'impôt ;

• d'ouvrir le bénéfice de la réduction d'impôt aux dépenses engagées dans les établissements accueillant des personnes âgées dépendantes ;

• de porter à 90.000 francs le plafond des dépenses prises en compte lorsque la personne est hébergée.

Dans le même temps, notre collègue Bernard Angels avait proposé, soit de porter la réduction à 50 % d'un plafond de dépenses de 30.000 francs, soit de la porter à 50 % des dépenses dans un plafond de 30.000 francs pour les personnes invalides séjournant dans des établissements de long séjour et médicalisés.

Le gouvernement s'était engagé lors de la discussion de ces amendements à prendre une initiative dans le cadre du présent projet de loi de finances rectificative : « je vous propose de réfléchir à la mise en place d'un dispositif cohérent qui pourrait, par exemple, être discuté dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2000 » avait indiqué la secrétaire d'Etat au budget 34( * ) . Le Sénat, à l'invitation de votre commission des finances, avait souhaité aider le gouvernement dans sa tâche et adopté l'amendement de notre collègue Jean Chérioux.

Le dispositif adopté à l'Assemblée nationale est en retrait par rapport à celui du Sénat. Il inclut certes les dépenses liées à la dépendance dans le dispositif de l'article 199 quindecies , et il étend la réduction à chaque personne hébergée, soit par exemple 30.000 francs lorsqu'il s'agit d'un couple. Ceci constitue un progrès dans le cas où les deux conjoints ont besoin d'un hébergement en établissement.

Cependant, ce faisant il ne règle pas le principal problème qui concerne le décalage entre la réduction d'impôt et les frais réels engagés par le contribuables. Lorsque dans un couple, une personne est hébergée dans un établissement, le conjoint continue à devoir assumer les charges courantes de la vie. Or le texte proposé par l'Assemblée nationale maintient le droit existant dans ce cas de figure, c'est-à-dire une réduction d'impôt au plus égale à 3.750 francs.

Votre rapporteur général estime qu'il faut aller au-delà. Avant la réforme proposée par le présent article, la perte de recettes pour l'Etat en raison de la réduction d'impôt s'élevait en 2000 à 240 millions de francs. Il doit être possible pour un coût budgétaire raisonnable d'apporter une véritable aide aux foyers dont un membre est hébergé.

Il vous proposera donc de réitérer le vote intervenu au Sénat le 24 novembre 2000 sur l'amendement de notre collègue Jean Chérioux.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 17

Suppression de la majoration de 3 % applicable aux contribuables défaillants ayant opté pour le paiement mensuel de l'impôt

Commentaire : le présent article tend à supprimer la majoration de 3 % applicable aux prélèvements mensuels d'impôts sur le revenu, de taxes d'habitation, de taxes foncières ou de taxes professionnelles, qui ne peuvent être opérées à la date fixée, pour ne laisser subsister qu'une seule sanction spécifique en cas de défaillance : la perte du bénéfice de l'option pour la mensualisation.

Ainsi la suppression de toute majoration de droits prévus par les paragraphes a) et b) ne laisse subsister dans le nouveau dispositif que deux paragraphes :

• le I qui prévoit que, lorsqu'un prélèvement mensuel n'est pas opéré à la date fixée, la somme due est acquittée avec le prélèvement suivant ;

• le II en vertu duquel le contribuable perd le bénéfice de son option pour le paiement mensuel après deux défaillances.

Le nouveau régime entrerait en vigueur le 1er janvier 2001.

Il s'agit d'une mesure de simplification dont le dispositif, très technique, a été analysé de façon détaillée et illustré par des exemples concrets dans le rapport du rapporteur général du budget de l'Assemblée nationale.

Afin de favoriser le développement de la mensualisation, qui concerne actuellement 51,3 % des foyers fiscaux pour l'impôt sur le revenu, il est prévu de supprimer la majoration de 3 % prévu à l'actuel article 1762 A du code général des impôts.

Le nouveau dispositif concernant l'ensemble des impôts directs pouvant faire l'objet d'un paiement mensuel, le texte modifié de cet article est désormais inséré dans un nouvel article 1724 quinquies du code général des impôts placé dans les dispositions communes du chapitre 1er - « Paiement de l'impôt » du livre II sur le recouvrement de l'impôt.

La mesure semble effectivement opportune. Il y avait dans le dispositif actuel une pénalisation dissuasive pour les contribuables, alors qu'il s'agit de favoriser la diffusion de ce mode de paiement de l'impôt et au surplus, une source de complications inutiles pour les agents chargés du recouvrement.

En effet, la pénalité spécifique de 3 % exigible en cas d'impossibilité d'opérer le prélèvement mensuel n'était pas cumulable avec une majoration de 10 % du régime traditionnel, les sommes correspondant aux majorations de 3 % s'imputant sur celles encourues à la suite de l'application des pénalités de droit commun de 10 % en cas de retard de paiement de l'impôt. C'est ce mécanisme qui est supprimé par le c) du I de cet article.

En outre, comme cela est indiqué dans le rapport général de l'Assemblée nationale, il existait un écart important entre le nombre de pénalités appliquées, 418.900 en ce qui concerne l'impôt sur le revenu, et le nombre de pénalités effectivement payées, 171.300 pour un montant finalement modeste. Au total, le montant des pénalités effectivement perçues ne dépasse pas, toujours pour l'impôt sur le revenu, 5.740.000 francs. Cette différence tient au nombre de recours gracieux accordés par l'administration des impôts.

En définitive, cette mesure de simplification n'aurait selon les informations contenues dans le rapport de la commission de finances de l'Assemblée nationale qu'un impact budgétaire assez limité, de l'ordre de 10 à 15 millions de francs.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 18

Exonération de l'impôt sur le revenu des primes des médaillés olympiques

Commentaire : le présent article propose d'exonérer d'impôt sur le revenu les primes à la performance versées par l'Etat aux médaillés olympiques français.



La participation de la France aux jeux olympiques de Sydney a été un succès remarquable, puisque 38 médailles 35( * ) ont été remportées par des athlètes français, soit une médaille de plus que lors de la précédente édition des jeux olympiques d'été, à Atlanta, en 1996. Par ailleurs, il faut souligner la bonne performance d'ensemble des sportifs français, puisque, sur les 338 athlètes membres de la délégation française, 242 d'entre eux ont participé à une finale olympique.

S'agissant des jeux paralympiques qui se sont déroulés à Sydney du 18 au 29 octobre 2000, la délégation française, composée de 147 sportifs, a remporté 86 médailles 36( * ) contre 95 lors de la précédente édition.

I. L'EXONÉRATION DES PRIMES DES MÉDAILLÉS OLYMPIQUES

A. LES MÉDAILLÉS AUX JEUX OLYMPIQUES


Depuis les jeux olympiques de Los Angeles en 1984, l'Etat attribue des « primes à la performance » aux sportifs médaillés aux jeux olympiques . Le montant de ces primes est fixé par le ministère de la jeunesse et des sports, après avis de la commission nationale du sport de haut niveau. Pour les jeux olympiques de Sydney, elles s'élèvent, comme pour les jeux olympiques de 1996 à Atlanta, à 250.000 francs pour une médaille d'or, 120.000 francs pour une médaille d'argent, et 80.000 francs pour une médaille de bronze . Compte tenu des compétitions par équipe, 67 sportifs bénéficieront des primes à la performances versées par l'Etat .

Il convient de rappeler qu'il s'agit des seules rémunérations des sportifs au titre de leur performance, puisque l'obtention d'une médaille ne donne pas lieu au versement d'une récompense de la part des organisateurs des jeux olympiques.

S'agissant des compétitions par équipe, seuls les joueurs figurant sur la « feuille de match » de la finale (ou, le cas échéant, de la demi-finale) olympique bénéficient, en principe, de la prime. Cependant, les primes sont versées aux fédérations sportives qui redistribuent en général les montants à l'ensemble des sportifs faisant partie de la délégation. Une telle mesure permet d'éviter qu'un athlète blessé au cours des jeux, par exemple, soit privé de prime, alors qu'il a contribué, avec ses coéquipiers, à l'obtention d'une médaille olympique.

Un problème spécifique s'est posé pour les équipes de France de fleuret et de sabre : en effet, les équipes sont composées de trois athlètes et d'un remplaçant. Or, si les équipes ne sont composées que de trois titulaires, quatre médailles sont désormais attribuées.

Aucune prime n'a été prévue pour ces « quatrième homme », et l'équipe de fleuret championne olympique devrait se voir attribuer un montant total de primes de 750.000 francs. Ce montant devrait, selon les règles indiquées plus haut, être divisé par quatre, chaque athlète bénéficiant, dans ce cas, d'une prime de 187.500 francs.

La fédération française d'escrime a souhaité qu'une prime soit versée pour les deux remplaçants, et a reçu, d'après les informations recueillies par votre rapporteur général, un avis bienveillant de la part du ministre de la jeunesse et des sports.

Au total, une somme de 9,85 millions de francs a été engagée par le ministère de la jeunesse et des sports au profit des sportifs valides médaillés . Le coût de l'exonération proposée par le présent article pourrait s'élever, quant à lui, à environ 1,4 million de francs.

B. LES MÉDAILLÉS AUX JEUX PARALYMPIQUES

Concernant les jeux paralympiques, qui se sont déroulés à Sydney du 18 au 29 octobre 2000, le ministre de la jeunesse et des sports a également décidé de récompenser les sportifs qui ont obtenu une médaille. Cette mesure avait été prise pour la première fois à l'occasion des jeux olympiques d'Atlanta, en 1996 . En accord avec la fédération française handisport, les primes allouées aux médaillés des jeux paralympiques s'élèvent à 10.000 francs pour une médaille d'or, 6.000 francs pour une médaille d'argent, et 4.000 francs pour une médaille de bronze .

La multiplicité des classements aux épreuves paralympiques, résultant de la typologie des différents handicaps, conduit à distribuer un nombre de médailles plus important que pour les jeux olympiques, en proportion du nombre de participants. Ce facteur constitue un des éléments qui explique l'écart important entre les primes versées aux sportifs valides et aux sportifs handicapés.

Compte tenu des difficultés particulières des sportifs handicapés, le ministre de la jeunesse et des sports a également décidé d'attribuer à chaque sportif membre de la délégation française aux jeux paralympiques de Sydney, une indemnité forfaitaire de 4.000 francs. Cette mesure correspond au double de la somme versée aux jeux paralympiques d'Atlanta , et porte sur un montant total de 600.000 francs environ.

Le montant total des sommes versées aux athlètes paralympiques au titre de leur participation aux jeux de Sydney s'élève à environ 960.000 francs.

C. UNE EXONÉRATION TRADITIONNELLE, ÉTENDUE DÉSORMAIS AUX MÉDAILLÉS DES JEUX PARALYMPIQUES

Les primes versées aux sportifs médaillés aux jeux olympiques sont traditionnellement exonérées d'impôt sur le revenu. Ainsi, l'article 19 de la loi de finances rectificative pour 1991 avait prévu une telle exonération pour les jeux olympiques d'Albertville et de Barcelone ; l'article 44 de la loi n° 96-314 du 12 avril 1996 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier avait prévu une exonération pour les jeux d'Atlanta ; l'article 17 de la loi de finances rectificative pour 1997 avait prévu une exonération pour les jeux olympiques d'hiver de Nagano.

S'agissant des jeux olympiques d'hiver de Lillehammer, l'exonération avait été considérée comme tacitement reconduite. Or, cette solution ne respecte pas les termes de l'article 34 de la Constitution, selon lesquels seule la loi fixe « l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures ». Par conséquent, l'administration fiscale a considéré qu'un texte de nature législative devait désormais prévoir de telles exonérations.

Cette année, l'exonération est étendue, pour la première fois, aux sportifs handicapés . S'agissant de l'indemnité forfaitaire versée à ces mêmes athlètes, aucune disposition d'exonération n'est prévue. Cependant, il est probable que cette indemnité sera considérée comme une « compensation de frais », et pourra par conséquent bénéficier également de l'exonération prévue par le présent article.

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre commission considère qu'il est parfaitement légitime que les primes à la performance versées par l'Etat soient exonérées d'impôt sur le revenu, compte tenu du caractère exceptionnel de celles-ci. En effet, ces primes sont attribuées aux sportifs médaillés, quels que soient par ailleurs leur notoriété et leur niveau de ressources. Le fait d'assujettir ces primes à l'impôt sur le revenu reviendrait de fait à lui conférer un caractère différencié, selon les revenus perçus par l'athlète au cours de l'année, ce qui serait en contradiction avec l'esprit d'une telle mesure .

Par ailleurs, votre commission se félicite de la majoration de l'indemnité forfaitaire versée à l'ensemble des sportifs ayant participé aux jeux paralympiques. Elle considère cependant que les primes versées aux athlètes médaillés à ces même jeux mériteraient d'être réévaluées, afin de leur conférer un caractère moins symbolique en comparaison des primes versées aux athlètes valides.

Décision de votre commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification

ARTICLE 19

Allégement de droits d'enregistrement pour certaines opérations d'intérêt général



Commentaire : le présent article tend, à la fois, à exonérer de droit d'enregistrement, les ventes aux enchères publiques réalisées au profit des organismes d'intérêt général ayant une vocation humanitaire, d'assistance ou de bienfaisance, et à ne plus percevoir la taxe fixe de 100 francs sur les transmissions d'immeubles entre organismes poursuivant une oeuvre d'intérêt public et établissements d'utilité publique.

I. EXONÉRATION DE DROITS D'ENREGISTREMENT POUR LES VENTES AUX ENCHÈRES D'OEUVRES D'ART À CARACTÈRE HUMANITAIRE OU DE BIENFAISANCE


Le paragraphe I du présent article a pour objet de donner un fondement légal à une pratique ancienne.

On peut rappeler que le droit d'enregistrement perçu sur les ventes publiques de meubles aux enchères était destiné, au départ, à compenser l'exonération de TVA dont bénéficiaient les objets d'art, d'antiquités et de collection. Le droit d'enregistrement qui était initialement fixé à 4,2 % pour l'Etat, 1,6 % pour le département et 1,2 % pour la commune a été ramené par la loi de finances pour 1989 à 1,1 % pour l'Etat, 0,5 % pour le département et 0,4 % pour la commune.

C'est ce droit, qui n'est perçu que lorsque le commissaire-priseur agit en tant qu'intermédiaire « transparent », ce qui correspond à des cas en pratique très restreints, que le présent article se propose de ne pas appliquer pour les ventes à caractère humanitaire ou de bienfaisance.

Le dispositif s'articule sur une série de notions et de procédures existant déjà au sein du code général des impôts :

1°) Il vise les objets d'art, d'antiquités ou de collection qui est la notion que l'on retrouve à l'article 885-I du code général des impôts pour définir l'exonération d'impôt de solidarité sur la fortune, ainsi que, sous une forme voisine à l'article 150 V bis du code général des impôts relatif à la taxe forfaitaire sur les métaux précieux ;

2°) La formule « d'organisme d'intérêt général » ayant une vocation humanitaire, d'assistance ou de bienfaisance se rattache, en plus synthétique, à celle que l'on trouve à l'article 238 bis du code général des impôts, ainsi que de l'article 200 du même code ;

3°) Enfin, la mention des six manifestations de bienfaisance exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée renvoie expressément au c) du 1 er du VII de l'article 261 du code général des impôts.

Le texte du présent article assortit l'exonération de trois conditions supplémentaires :

1°) La vente doit être réalisée au profit exclusif des organismes d'intérêt général ;

2°) Le commissaire-priseur doit renoncer à percevoir des honoraires pour la direction de la vente, étant entendu qu'à l'heure actuelle les prestataires de services nécessaires à la tenue de la vente, facturent leur intervention à « prix coûtant » ;

3°) Enfin, la vente doit être dépourvue de caractère commercial pour le donateur : cette clause a été prévue pour éviter tout détournement de la manifestation à des fins publicitaires par les éventuels donateurs des objets proposés aux enchères.

Favorable au principe de l'amendement, votre commission des finances vous propose, d'une part, de supprimer la référence à la notion de « commissaire-priseur » dans la mesure où est intervenue la loi du 10 juillet 2000 créant les maisons de ventes aux enchères. En outre, elle s'interroge sur l'opportunité, dès lors qu'il est expressément mentionné que la vente doit avoir lieu au profit des organismes d'intérêt général précités, de préciser que la vente doit être dépourvue de caractère commercial. Le risque du détournement de l'opération à des fins publicitaires apparaît en effet secondaire au regard du bénéfice qui peut être tiré du produit de la vente.

II. EXONÉRATION DE DROITS D'ENREGISTREMENT POUR LA TRANSMISSION D'IMMEUBLES ENTRE ORGANISMES D'INTÉRÊT GÉNÉRAL

En application des dispositions des articles 1020 et 1039 du code général des impôts, les actes portant transmission d'immeubles entre organismes poursuivant une oeuvre d'intérêt public et établissements d'utilité publique (c'est-à-dire essentiellement les associations reconnues d'utilité publique et les fondations reconnues d'utilité publique) sont actuellement assujettis à une taxe départementale de publicité foncière de 0,6 % à laquelle s'ajoutent 2,5 % de frais d'assiette perçus par l'Etat.

Le II du présent article tend à alléger encore ce régime favorable -qui suppose que l'autorité ait autorisé le transfert de propriété après avoir constaté que les biens transmis restaient affectés au même objet- en prévoyant que la taxe départementale de publicité foncière de 0,6 % est remplacée par un simple droit fixe de 100 francs.

On note qu'il n'est prévu aucune disposition relative aux modalités de compensation des pertes de ressources résultant du présent paragraphe pour les collectivités territoriales.

Le rapport de votre collègue député, rapporteur général du budget de l'Assemblée nationale, précise que la compensation se fera suivant les règles de droit commun telles qu'elles résultent notamment de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 pour les recettes transférées par ladite loi.

L'article 1614-5 du code général des collectivités territoriales dispose en effet que : « les pertes de produit fiscal résultant, le cas échéant, pour les départements ou les régions, de la modification, postérieurement à la date de transfert des impôts et du fait de l'Etat, de l'assiette ou des taux de ces impôts sont compensées intégralement, collectivité par collectivité, soit par des attributions de dotation de décentralisation, soit par des diminutions des ajustements au deuxième alinéa de l'article L.1614-4.

Le montant de la perte de produit fiscal à compenser, pour chaque collectivité concernée, est constaté dans les mêmes conditions que les accroissements et diminutions de charges visés à l'article L.1614-3
».

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 19 bis (nouveau)

Modification des règles relatives à la durée et aux tarifs des passeports

Commentaire : le présent article vise à allonger la durée de validité des passeports à dix ans, à appliquer un tarif de 200 francs pour la délivrance d'un passeport à un mineur dont la durée est de cinq ans, à alourdir le coût d'un passeport délivré en urgence ou par une autorité qui n'est pas celle du lieu de résidence ou de domicile du demandeur et à donner une base légale à la délivrance gratuite des passeports dans certaines circonstances.

I. LE DISPOSITIF ACTUEL


L'article 953 du code général des impôts fixe la durée de validité des passeports et leur prix. Ainsi, un passeport est valide pendant cinq ans et son coût s'élève à 400 francs.

Les autres règles relatives aux modalités de la délivrance des passeports relèvent essentiellement de circulaires.

Ainsi, en cas d'urgence, un passeport peut être délivré pour une durée de trois mois (et sept mois lorsque le demandeur se rend dans un pays qui exige une validité du passeport supérieure à six mois) pour un coût de 400 francs. Il peut en outre être renouvelé sans frais supplémentaire pour une durée qui ne peut être supérieure à cinq ans en prenant en compte sa durée de validité initiale à condition que le demandeur se présente devant l'autorité compétente et présente les documents exigés pour la délivrance d'un passeport.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article propose quatre modifications : l'allongement de la durée de validité du passeport, l'application d'un tarif réduit pour la délivrance d'un passeport à un mineur, l'alourdissement du coût d'un passeport délivré en urgence et la légalisation de la délivrance gratuite des passeports dans certaines circonstances.

1. L'allongement de la durée de validité

Lors d'une communication le 22 novembre dernier, le ministre de l'intérieur, M. Daniel Vaillant, avait manifesté sa volonté d'allonger la durée de validité du passeport à dix ans afin de l'harmoniser avec celle de la carte d'identité.

Le 1° du paragraphe I du présent article modifie dans ce sens l'article 953 du code général des impôts.

2. L'application d'un tarif réduit pour la délivrance d'un passeport à un mineur

Le deuxième alinéa du 3° du I du présent article propose de maintenir l'actuelle durée de validité de cinq ans pour les passeports délivrés à un mineur ou portant inscription d'un mineur de moins de quinze ans. En effet, la présence d'une photo du mineur sera désormais exigible. Or, la morphologie des visages des enfants évolue rapidement. La présence d'une photo sur le passeport ne permettrait pas de pouvoir contrôler l'identité du porteur du passeport si le mineur dispose pendant dix ans du même passeport.

En contrepartie d'une durée de validité du passeport pour les mineurs de moins de quinze ans limitée à cinq ans, le tarif applicable est fixé à 200 francs.

3. L'alourdissement du coût d'un passeport délivré en urgence

Les passeports sont rarement délivrés immédiatement et le citoyen doit généralement attendre quelques jours. En outre, il doit apporter les documents nécessaires pour justifier son identité et sa résidence. Toutefois, en cas d'urgence et à titre exceptionnel, la délivrance d'un passeport peut être immédiate et sans coût supplémentaire, même lorsque l'autorité auprès de laquelle la demande est faite n'est pas celle du lieu de résidence ou du domicile du demandeur.

La durée de validité de ce document est cependant limitée à quelques mois : le propriétaire du passeport devra donc ultérieurement se présenter à l'autorité compétente afin d'obtenir un nouveau passeport d'une durée normale de validité.

Le troisième alinéa du 3  du I du présent article fixe à six mois la durée de validité des passeports qui sont délivrés soit à titre exceptionnel et pour un motif d'urgence dûment justifié, soit par une autorité qui n'est pas celle du lieu de résidence ou du domicile du demandeur.

En outre, ce dernier devra payer 200 francs pour ce document qui ne pourra plus être renouvelé gratuitement.

Selon les informations obtenues par votre rapporteur général, l'administration souhaite par cette mesure dissuader la délivrance de passeports en urgence en raison de la négligence des demandeurs. Dans la plupart des cas, il s'agit de personnes sur le point de partir en voyage qui constatent que leurs passeports ne sont plus valides.

4. La légalisation de la délivrance gratuite des passeports dans certaines circonstances

Dans la pratique, le renouvellement du passeport jusqu'à concurrence de sa durée de validité restante s'avère gratuit dans certaines situations. C'est par exemple le cas, lorsque le demandeur change d'adresse ou lorsque sa situation matrimoniale est modifiée.

Toutefois, cette pratique ne reposait pas sur une base légale car elle était organisée par des circulaires.

Le dernier alinéa du 3° du présent article complète donc l'article 953 du code général des impôts en précisant les cas dans lesquels le renouvellement du passeport est effectué à titre gratuit. Il s'agit des cas :

- de modification d'état civil ;

- de changement d'adresse ;

- d'inscription ou de radiation d'enfants ;

- d'erreur imputable à l'administration ;

- de pages du passeport réservées au visa entièrement utilisées.

Enfin, le paragraphe II du présent article précise que les dispositions précédemment mentionnées s'appliqueront aux passeports délivrés à compter du 1 er mars 2001.

Selon les informations obtenues par votre rapporteur général, cette date a été choisie afin de permettre l'élaboration du décret qui doit préciser les mesures législatives énoncées dans le présent article.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 19 ter (nouveau)

Report d'un an des dispositions relatives aux droits de succession en Corse

Commentaire : le présent article vise à reporter d'un an les dispositions visant à sanctionner le défaut de déclaration en cas de succession et à appliquer les règles de droit commun pour l'évaluation des biens immobiliers situés en Corse. En outre, il propose également de proroger d'un an les dispositions fiscales visant à encourager le règlement des indivisions.

I. LE STATUT FISCAL SPÉCIFIQUE DE LA CORSE : UN HÉRITAGE DIFFICILE À METTRE EN CAUSE

A. LA SPÉCIFICITÉ FISCALE CORSE : LE POIDS DES HÉRITAGES


Jusqu'en 1998, la spécificité fiscale de la Corse résultait de la combinaison de trois facteurs : l'absence de sanction en cas de non respect des obligations déclaratives en matière de succession, le défaut de base légale pour évaluer les biens immobiliers situés en Corse et le problème de l'indivision des propriétés.



1. Le défaut de sanction en cas de non respect de l'obligation de déclaration des successions

La Corse bénéficie depuis plus de deux siècles d'un régime fiscal particulier en matière de droits des successions.

Les délais d'enregistrement des successions s'élèvent à six mois à compter du décès sous peine de sanctions prévues à l'article 1728 A du code général des impôts.

Le dernier alinéa du l'article III du 21 prairial an IX pose pour principe que « la peine du droit en sus encourue pour défaut de déclaration dans le délai de six mois restera abrogée » pour les biens immobiliers et mobiliers situés en Corse.

Certes, l'arrêté Miot ne supprime pas le délai de déclaration, mais la peine qui sanctionne son inobservation par les parties concernées. De facto , le nombre de déclarations en cas de succession est très faible en Corse.

2. L'absence de base légale de l'évaluation des biens immobiliers

Le premier alinéa de l'article 761 du code général des impôts dispose que pour la liquidation des droits de mutation à titre gratuit, les immeubles, quelle que soit leur nature, sont estimés d'après leur valeur vénale réelle à la date de la transmission, d'après la déclaration détaillée et estimative des parties.

En Corse, il en va différemment puisque l'article 3 de l'arrêté du 21 prairial an IX précise que « la valeur des immeubles situés en Corse est déterminée pour l'assiette des droits de succession en multipliant par 100 le montant de la part de la contribution foncière revenant à l'Etat ».

L'application de ce dispositif conduisait à attribuer une valeur « fiscale » des biens immobiliers qui correspondait à environ 1 à 2  % de leur valeur vénale. Le décret du 9 décembre 1948 ayant donné un caractère d'impôt exclusivement local à la contribution foncière, le ministre des finances avait décidé, le 24 avril 1951, que les immeubles situés en Corse seraient évalués, comme sur le continent, à leur valeur vénale.

Cette décision avait soulevé de telles protestations que le ministre avait accepté, le 14 juin suivant, de surseoir à la mise en vigueur du régime de droit commun jusqu'à ce que le Parlement se soit prononcé sur le régime applicable en Corse.

En l'absence de règles nouvelles, la valeur des immeubles avait été calculée, depuis le 14 juin 1951, en appliquant au registre cadastral servant de base à la contribution foncière perçue au profit des départements et des communes, le coefficient de 18, puis de 22, correspondant au taux de la taxe proportionnelle sur le revenu des personnes physiques. Cette taxe ayant été supprimée en 1959, le taux de 22 % avait été remplacé par le taux de 24 correspondant à celui de la seule taxe proportionnelle qui subsistait en matière d'impôt sur le revenu, à savoir celle perçue sur les revenus de capitaux mobiliers. Or, cette méthode d'évaluation a été condamnée par la Cour de cassation dans un arrêt Perrino du 2 janvier 1992. Faute d'une base de calcul légale, les droits de succession sur les biens immobiliers en Corse ne pouvaient plus être recouvrés.

3. Les indivisions successorales

Pour des raisons à la fois historiques et culturelles, le partage des biens n'a souvent pas été effectué depuis plusieurs générations en Corse et les successions consécutives n'ont pas été liquidées. Or, pour que les déclarations futures puissent être déclarées, il faut que celles qui les ont précédées aient été préalablement réglées.

Afin de faciliter le règlement du problème de l'indivision en Corse, le Parlement avait adopté deux dispositions lors de la discussion de la loi de finances pour 1986 devenues les articles 750 bis A et 1135 du code général des impôts.

L'article 750 bis A précité exonère les actes de partage de succession et les licitations de biens héréditaires établis entre le 1 er janvier 1986 et le 31 décembre 1991 du droit d'enregistrement de 1 % à hauteur de la valeur des immeubles situés en Corse.

L'article 1135 précité exonère les procurations et attestations notariées après décès dressées entre le 1 er janvier 1986 et le 31 décembre1991 de toute perception au profit du Trésor lorsqu'elles sont établies en vue du règlement d'une indivision successorale comportant des biens immobiliers situés en Corse.

Ces deux dispositifs ont été prorogés une première fois jusqu'au 31 décembre 1997, puis une deuxième fois jusqu'au 31 décembre 2000.



B. UNE SPÉCIFICITÉ FISCALE QUI PERDURE

1. L'alignement théorique du régime applicable en Corse sur celui appliqué dans les autres départements de la République


La commission d'enquête créée par l'Assemblée nationale en 1998 sur l'utilisation des fonds publics et la gestion des services publics en Corse a critiqué le maintien de cette spécificité fiscale et a estimé que l'absence de sanction en cas de non déclaration des successions a permis à l'indivision de se perpétuer plus facilement.

Afin d'aligner le régime applicable en Corse sur celui appliqué dans les autres départements de la République, l'Assemblée nationale a adopté, lors de l'examen de la loi de finances pour 1999, un amendement visant à rétablir des sanctions en cas d'absence de déclaration successorale.

Le Sénat a alors amélioré le dispositif proposé.

D'abord, afin que celui-ci puisse réellement entrer en application, le Sénat a donné une base légale aux règles d'évaluation des biens immobiliers situés en Corse.

Ensuite, il a réactivé une commission paritaire créée par la loi du 13 mai 1991 portant statut de la collectivité territoriale de Corse en exigeant qu'elle remette ses propositions relatives au régime fiscal spécifique applicable en Corse dans les six mois à compter de la promulgation de la loi de finances pour 1999.

Enfin, il a demandé que les dispositions fiscales en matière de droits de succession ne soient appliquées à la Corse que pour les successions ouvertes à compter du 1 er janvier 2001, date d'expiration des mesures transitoires prévues aux articles 750 bis A et 1135 du code général des impôts en vue de faciliter les partages successoraux en Corse.

2. Des dispositions sans incidence pratique mais qui ont permis de renouer le dialogue

L'Assemblée nationale a refusé le report d'un an de l'entrée en vigueur des dispositions précitées. Toutefois, lors de l'examen de la loi de finances rectificative pour 1999, le gouvernement a proposé un amendement dans ce sens devant le Sénat, donnant après coup raison à la commission des finances qui d'ailleurs proposait à cette occasion un amendement identique.

Certains ont pu regretter le report de l'entrée en vigueur des dispositions visant à sanctionner le défaut de déclaration en cas de succession et à appliquer les règles de droit commun pour l'évaluation des biens immobiliers situés en Corse.

Toutefois, la réactivation de la commission paritaire a été un succès puisqu'elle a permis de renouer le dialogue entre les représentants de la collectivité territoriale de Corse et les représentants de l'Etat. Certes, l'Assemblée de Corse a demandé que la mesure abrogeant les arrêtés Miot n'entre pas en vigueur immédiatement, mais elle s'est également engagée à présenter des propositions constructives visant à bâtir un statut fiscal en Corse qui tienne compte de la spécificité corse sans exclure toute taxation.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : LE MAINTIEN DU STATU QUO EN ATTENDANT L'EXAMEN DU PROJET DE LOI SUR LA CORSE

A. LE MAINTIEN DU STATU QUO...


Le paragraphe I du présent article propose de modifier une nouvelle fois l'article 21 de la loi de finances pour 1999 (n°98-1266 du 30 décembre 1998) afin de repousser l'entrée en vigueur des dispositions visant à sanctionner le défaut de déclaration en cas de succession et à appliquer les règles de droit commun pour l'évaluation des biens immobiliers situés en Corse. Ces mesures s'appliqueraient pour les successions ouvertes à compter du 1 er janvier 2002.

Par ailleurs, le paragraphe II du présent article propose de proroger d'un an les dispositions prévues aux articles 750 bis A et 1135 du code général des impôts qui visent à encourager le règlement des indivisions.

B. ... EN ATTENDANT L'EXAMEN DES DISPOSITIONS RELATIVES AUX DROITS DE SUCCESSION DANS LE PROJET DE LOI SUR LA CORSE

Comme il a été précisé lors de l'examen du présent article par la commission des finances de l'Assemblée nationale, le gouvernement a demandé le maintien du statu quo en matière de fiscalité sur les droits de successions en Corse dans l'attente de la mise en oeuvre des dispositions fiscales qui seront proposées au Parlement dans le cadre du projet de loi modifiant et complétant le statut de la collectivité territoriale de Corse.

Avant-projet de loi sur la Corse : les principales caractéristiques des dispositions relatives aux droits de succession

Le chapitre II du titre III de l'avant-projet de loi modifiant et complétant le statut de la collectivité territoriale de portent sur les dispositions relatives aux droits de succession.

Selon l'exposé des motifs, l'article 45 « a pour objet de préciser les modalités de mise en oeuvre des droits de succession en Corse à compter du 1 er janvier 2002. Comte tenu du désordre dans les titres de propriété, le délai de dépôt des déclarations comportant des immeubles situés en Corse sera allongé et ces immeubles bénéficieront d'une exonération totale puis partielle. Ces dispositions particulières s'appliqueront pour une période transitoire et seront subordonnées à la reconstitution des titres de propriétés . »

Concrètement, l'article 45 instaure un dispositif spécifique pour les successions ouvertes entre le 1 er janvier 2002 et le 31 décembre 2010 qui est plus favorable que le droit commun à condition que les biens transmis ne soient plus détenus sous le régime de l'indivision.

Ainsi, le délai pour l'enregistrement des déclarations est porté à vingt-quatre mois pour les déclarations de succession comportant des immeubles ou droits immobiliers situés en Corse.

En outre, si le défaut de déclaration est désormais sanctionné, pendant cette période transitoire, les immeubles et droits mobiliers situés en Corse sont exonérés de droits de mutation par décès. Pour les successions ouvertes entre le 1 er janvier 2011 et le 31 décembre 2015, l'exonération est applicable à concurrence de la moitié de la valeur des immeubles et droits immobiliers situés en Corse.

Toutefois, ces dispositions ne sont applicables qu'aux déclarations de succession pour lesquelles le droit de propriété du défunt a été constaté antérieurement à son décès par un acte régulièrement transcrit ou publié ou, le cas échéant, si les attestations notariées en vue de constater la transmission ou la constitution par décès de droits réels immobiliers sont publiées dans les vingt-quatre mois du décès.

Si cette condition n'est pas respectée, les héritiers doivent non seulement acquitter les droits de mutation dont la transmission par décès avait été dispensée, mais également un droit supplémentaire de 1 % et l'intérêt de retard.

Enfin, l'article 45 prévoit la prorogation des dispositions prévues aux articles 750 bis A et 1135 du code général des impôts.

Sont ainsi exonérés les actes de partage de succession et les licitations de biens héréditaires établis entre le 1 er janvier 1986 et le 31 décembre 2015 du droit d'enregistrement de 1 % à hauteur de la valeur des immeubles situés en Corse.

De même, sont exonérées les procurations et attestations notariées après décès dressées entre le 1 er janvier 1986 et le 31 décembre 2015 de toute perception au profit du Trésor lorsqu'elles sont établies en vue du règlement d'une indivision successorale comportant des biens immobiliers situés en Corse.

Source : document transmis au rapporteur général par les services de la direction de la législation fiscale



III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre commission n'est pas hostile au report des mesures visant à sanctionner le défaut de déclaration en cas de succession et à appliquer les règles de droit commun pour l'évaluation des biens immobiliers situés en Corse dans la mesure où le présent article se justifie par l'élaboration d'un dispositif complet sur la fiscalité en matière de succession en Corse qui sera examiné prochainement par le Parlement.

Le vote, il y a deux ans, des dispositions devenues l'article 21 de la loi de finances pour 1999 a été salutaire car il a permis de relancer le débat entre les représentants de l'Assemblée corse et les représentants du gouvernement. Les premiers ont compris que la Corse ne pouvait échapper à toute imposition en matière de succession tandis que les seconds ont pris conscience des difficultés à transposer certaines règles de droit commun à la Corse en raison de son héritage culturel et sociologique.

Les dispositions prévues à l'article 45 de l'avant-projet de loi modifiant et complétant le statut de la collectivité territoriale de Corse en matière de droits de succession reflètent ce compromis.

Votre commission souhaite à ce sujet faire deux remarques.

D'abord, l'article 45 prévoit un régime transitoire jusqu'en 2010 pour les délais d'enregistrement des déclarations et jusqu'en 2015 pour les exonérations de droits de mutation par décès. Il en résulte qu'à partir de 2015, la Corse devrait donc être soumise aux règles de droit commun en matière de droits de succession.

Par ailleurs, votre commission s'interroge sur l'impact de la prorogation d'une part des exonérations du droit d'enregistrement de 1 % des actes de partage de succession et des licitations de biens héréditaires établis entre le 1 er janvier 1986 et le 31 décembre 2001 (article 750 bis A du code général des impôts) et, d'autre part, de l'exonération de toute perception au profit du Trésor des procurations et attestations notariées après décès dressées entre le 1er janvier 1986 et le 31 décembre 2001 lorsqu'elles sont établies en vue du règlement d'une indivision successorale comportant des biens immobiliers situés en Corse.

Comme il a été rappelé précédemment, ces dispositions visant à régler le problème des indivisions ont été adoptées dans la loi de finances pour 1986.

Le paragraphe II du présent article propose de les proroger pour la troisième fois jusqu'au 31 décembre 2001. L'article 45 de l'avant-projet de loi modifiant et complétant le statut de la collectivité territoriale de la Corse proposera de repousser la date d'expiration de ces mesures au 31 décembre 2015.

Pour autant, aucune étude d'impact n'a été commandée pour vérifier que ces dispositions contribuent réellement à régler le problème des indivisions.

Votre commission propose donc un amendement qui demande au gouvernement de remettre un rapport sur l'impact des mesures prévues aux articles 750 bis A et 1135 du code général des impôts sur le règlement des indivisions successorales. Il s'agira notamment d'appréhender l'évolution du nombre d'actes de partage de succession et du nombre d'attestations notariées après décès dressés depuis le 1 er janvier 1986 jusqu'à aujourd'hui.

Dans la mesure où le Parlement devrait être saisi du projet de loi sur la Corse au cours du deuxième trimestre 2001, ce rapport devra être remis au Parlement dans les trois mois qui suivront la promulgation de la présente loi.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 20

Exonération des impôts dus sur certains transferts effectués au profit d'établissements publics ou de collectivités locales

Commentaire : le présent article de permettre le transfert, en franchise d'impôt, de biens, droits et obligations appartenant à des établissements publics vers les établissements publics ou les collectivités locales appelées à reprendre l'exercice de leurs compétences.

Il faut distinguer deux sujets très différents traités par le présent article : les transferts de propriété résultant de la dissolution des établissements publics d'aménagement des villes nouvelles et les transferts résultant de la création d'un établissement public chargé de la radioprotection et de la sûreté nucléaire, dénommé IRSN (Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire).



I. LES DISPOSITIONS RELATIVES AUX VILLES NOUVELLES

A. LE DROIT EXISTANT


L'article 22 de la loi n° 83-636 du 13 juillet 1983 portant modification du statut des agglomérations nouvelles a prévu que les transferts de propriété entre les communes et l'établissement public d'aménagement des villes nouvelles ainsi que des biens et obligations qui sont attachés aux biens transférés ne peuvent donner lieu à indemnités, droits, taxes, salaires ou honoraires.

Ainsi, au terme de l'article 1043 du code général des impôts, les transferts prévus à l'article L. 5333-7 du code général des collectivités territoriales sont-ils exonérés.

En effet, le transfert de propriété entre les communes et l'établissement public d'aménagement des villes nouvelles s'explique par le fait que la structure administrative de gestion de la ville nouvelle, le syndicat d'agglomération nouvelle, n'assure pas lui-même la réalisation technique de l'agglomération nouvelle, mais que cette tâche revient à l'EPAVN créé par décret en Conseil d'Etat.

B. LES DISPOSITIONS DU PRÉSENT ARTICLE

Le présent article propose de retenir la même neutralisation de droits pour les transferts de propriété résultant de l'achèvement de la mission de l'EPAVN.

Lorsque les opérations de construction et d'aménagement de l'agglomération nouvelle sont terminées, un décret en Conseil d'Etat prononce la dissolution de l'EPAVN et les compétences d'aménagement opérationnel reviennent aux collectivités locales.

Or, le gouvernement s'est engagé dans une sortie progressive du dispositif des villes nouvelles. Il s'agit de transférer aux collectivités locales l'ensemble de leurs prérogatives normales, notamment en matière d'urbanisme.

Concernant la ville nouvelle d'Evry, un décret du 29 août 2000 a fixé au 31 décembre 2000 l'achèvement des opérations de construction. En application de l'article L. 5341-2 du code général des collectivités locales, au terme d'un délai de six mois suivant la date de publication du décret, le syndicat d'agglomération nouvelle pourra se transformer en communauté d'agglomération, selon les dispositions prévues par la loi du 12 juillet 1999 sur l'intercommunalité.

L'achèvement des opérations de construction ne devrait pas concerner les villes nouvelles de Cergy et Saint-Quentin-en-Yvelines avant 2002.

Le I. 1° de l'article dispose ainsi que les transferts, au profit des communes et de leurs établissements publics, de biens, droits et obligations résultant de la dissolution des EPAVN de Cergy-Pontoise, Saint-Quentin en Yvelines, l'Isle d'Abeau, des Rives de l'Etang de Berre, ne donneront lieu à aucune indemnité ou perception d'impôts, de droits ou de taxes, ni à aucun versement de salaires ou honoraires au profit de l'Etat. Les établissements en cause ne sont pas précisés dans la mesure où ces opérations ne sont pas encore très avancées.

Le I. 2° règle le problème spécifique de la ville nouvelle d'Evry, dont le transfert de propriété s'effectuera à titre transitoire au profit de l'agence foncière et technique de la région parisienne. Il appartiendra ultérieurement au syndicat d'agglomération nouvelle, après transformation en communauté d'agglomération, conformément à l'article 59 de la loi du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale, d'assumer les responsabilités de l'aménagement opérationnel sur le site de l'agglomération nouvelle. Il semble que la suspension de droit soit prévue uniquement pour le dispositif transitoire.

On peut également se demander pour quelles raisons les villes nouvelles de Marne-la-Vallée et de Melun-Sénart ne sont pas concernées par ces dispositions. Elles ne sont toutefois pas encore en phase d'achèvement de leurs opérations de construction et d'aménagement et de telles mesures seraient ainsi prématurées.

II. LES DISPOSITIONS RELATIVES AU COMMISSARIAT À L'ÉNERGIE ATOMIQUE ET À L'OFFICE DE PROTECTION CONTRE LES RAYONNEMENTS IONISANTS

Le II du présent article propose d'exonérer d'impôts et de charges les transferts des biens, droits et obligations du CEA et de l'Office de protection contre les rayonnements ionisants au futur établissement public chargé de la radioprotection et de la sûreté nucléaire, de la même façon que ceux, évoqués ci-dessus relatifs aux villes nouvelles.

A ce propos, il convient de souligner les risques d'incohérence entre deux démarches actuellement menées en parallèle :

- le projet gouvernemental de réforme du dispositif existant de sûreté nucléaire, d'une part,

- la discussion, d'autre part, d'une proposition de loi tendant à la création d'une agence française de sécurité environnementale.

1. La réforme envisagée par le gouvernement du dispositif de sûreté nucléaire actuel doit être précisée par un prochain projet de loi relatif à l'information en matière nucléaire, à la sûreté et à la protection contre les rayonnements ionisants.

Elle a été déclenchée par les conclusions d'un rapport de notre collègue, Jean-Yves Le Déaut, remis au Premier Ministre le 7 juillet 1998, critiquant le caractère éclaté de l'ensemble du système de contrôle de la sûreté nucléaire et l'insuffisance de celui de la radioprotection.

Pour corriger ces défauts et séparer les fonctions d'exploitation, de contrôle et d'expertise des installations nucléaires, il est prévu :

- une scission, dans un premier temps, entre le CEA et l'Institut de protection et de sûreté nucléaire (IPSN) ;

- le regroupement, au sein d'un même établissement public, de l'IPSN, ainsi rendu indépendant, et de la partie de l'OPRI chargée de travaux d'expertise, de surveillance et de contrôle des installations ;

- la création, au sein de l'administration, d'une grande direction générale, chargée à la fois de la sûreté nucléaire et de la radioprotection, regroupant l'actuelle direction de la sûreté des installations nucléaires (DSIN) du ministère de l'industrie, les services compétents du ministère de la santé, et la partie de l'OPRI s'occupant de radioprotection.

En prévision de cette réforme, les crédits afférents au fonctionnement de l'IPSN ont été transférés, pour 2001, au budget de l'environnement, et une provision affectée, depuis l'an dernier, au CEA, pour couvrir les frais de la scission.

Le secrétaire d'Etat à l'industrie, M. Christian Pierret, a indiqué au Sénat, lors de la discussion de ses crédits, que l'établissement public (IRSN) et la direction générale futurs seraient placés sous une triple tutelle (industrie, environnement, santé). Il reste à déterminer cependant à quel ministère seraient rattachés les services de la nouvelle autorité administrative compétente.

En tout cas, il y aurait bien une distinction entre :

- l'exploitant (le CEA, pour les réacteurs expérimentaux ou EDF) ;

- l'expertise, confiée à un établissement public, regroupant l'IPSN et une partie de l'OPRI ;

- le contrôle, exercé par une direction générale spécialisée de l'administration, portant à la fois sur la sûreté et la radioprotection.

2. Se trouve, par ailleurs, en cours de discussion, une proposition de loi tendant à la création d'une Agence française de sécurité sanitaire environnementale.

Placée sous la tutelle des ministres chargés de l'environnement et de la santé (et pas de l'industrie), cette agence aurait des compétences, et des moyens très importants.

Elle serait chargée d'assurer la sécurité sanitaire dans le domaine de l'environnement en général et d'évaluer les risques sanitaires correspondants.

Elle pourrait se saisir elle-même de toute question qu'elle estimerait entrer dans son domaine de compétence, avoir accès aux données dont dispose l'administration, requérir le concours d'établissements publics compétents, proposer toute mesure aux autorités concernées.

Elle disposerait de 2 % du produit de la TGAP.

En seconde lecture de cette proposition de loi, notre collègue député, André Aschieri, a fait adopter par l'Assemblée nationale un amendement fusionnant l'OPRI et l'IPSN. Cela va à l'encontre des projets du gouvernement scindant l'Office en deux composantes dont l'une, compétente en matière de radioprotection, serait intégrée dans les services de la future direction générale de l'administration responsable de ces questions et l'autre, seulement, serait regroupée avec l'IPSN, en raison de ses capacités d'expertise dans le domaine de la sûreté des installations, au sein d'un nouvel établissement public.

L'OPRI et l'IPSN, ainsi regroupés, pourraient être appelés, selon le rapport de notre collègue député André Aschieri 37( * ) , à être incorporées ultérieurement dans l'agence de sécurité environnementale, ce qui ne semble pas compatible avec les intentions du gouvernement.

D'autres organismes tels que l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (INERIS) auraient également vocation à y être ensuite intégrés. Cet aspect soulève de graves objections et ne peut être considéré aujourd'hui comme ayant fait l'objet d'une analyse exhaustive.

Votre commission ne voit naturellement aucun inconvénient à la neutralité fiscale des transferts occasionnés par la réforme, dont nul ne nie la nécessité, du dispositif de sûreté nucléaire et de radioprotection.

Elle voudrait cependant profiter de l'examen du II de cet article pour attirer l'attention du gouvernement sur les risques de contradictions entre les intentions de ce dernier et les initiatives prises par le Parlement dans des domaines voisins.

Il lui semble important aussi :

- que soit traitée séparément la sûreté des activités nucléaires intéressant la défense qui ne sont pas de même nature (propulsion, armements) et nécessitent une expertise spécifique ;

- de se poser la question du maintien au sein du CEA des activités de recherche pure de l'IPSN et de l'OPRI qui ne sont pas indispensables à l'exercice des fonctions d'expertise et de contrôle des installations actuelles, mais peuvent intéresser la conception des équipements futurs.

Il semble, pour le moins prématuré, de régler le problème du traitement fiscal des transferts occasionnés par la réforme de la sûreté nucléaire alors que tant d'incertitudes demeurent quant au contenu des changements qui doivent être ainsi effectués. Aussi votre commission vous demande-t-elle de supprimer le II du présent article.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 20 bis (nouveau)

Prolongation des dispositions applicables à certains contrats conclus pour des immeubles situés dans les zones prioritaires d'aménagement du territoire

Commentaire : le présent article a pour objet de prolonger jusqu'en 2004 des dispositions applicables à certains contrats conclus pour des immeubles situés dans les zones prioritaires d'aménagement du territoire

I. LE DROIT EXISTANT


Les articles 239 sexies et 239 sexies A du code général des impôts précisent le régime fiscal des opérations de crédit-bail réalisées par les sociétés immobilières pour le commerce et l'industrie, les sociétés agréées pour le financement des économies d'énergie et les autres bailleurs.

Par dérogation à ces dispositions, l'article 239 sexies D du code général des impôts dispose que les locataires situés dans certaines zones d'aménagement du territoire, sont dispensés de réintégrer, lors de la levée d'option d'achat, la fraction des loyers représentative de l'acquisition du bien. Ces dispositions s'appliquent aux opérations conclues entre le 1er janvier 1996 et le 31 décembre 2000.

II. LES DISPOSITIONS DU PRÉSENT ARTICLE

Cet article a été adopté sur l'initiative de notre collègue député Yves Cochet.

Il tend simplement à apporter une précision au premier alinéa de l'article 239 sexies D (en mentionnant qu'il s'applique aux immeubles à caractère industriel et commercial) et à reconduire jusqu'au 31 décembre 2004 le dispositif prévu à l'article 239 sexies D qui devait s'achever à la fin de l'an 2000.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 20 ter (nouveau)

Garantie des communautés d'agglomération créées ex nihilo



Commentaire : le présent article a pour objet de faire bénéficier les communautés d'agglomération créées ex nihilo d'une garantie de dotation globale de fonctionnement dès leur deuxième année d'existence, au lieu de la troisième année.



Le présent article résulte d'un amendement présenté par notre collègue député Gilles Carrez et adopté par l'Assemblée nationale contre l'avis du gouvernement.

I. LE DROIT ACTUEL

A. LE MODE DE LA CALCUL DE LA DOTATION GLOBALE DE FONCTIONNEMENT DES COMMUNAUTÉS D'AGGLOMÉRATION

1. Les attributions individuelles sont calculées en tenant compte de la population, du potentiel fiscal et du coefficient d'intégration fiscal


La dotation globale de fonctionnement des communautés d'agglomération est calculée en application des dispositions de l'article L. 5211-30 du code général des collectivités territoriales.

Leur dotation d'intercommunalité est composée de deux sous-dotations :

- une dotation de base (15 % du total), calculée en tenant compte de leur population totale et de leur coefficient d'intégration fiscale (CIF) ;

- une dotation de péréquation (85 % du total), calculée en tenant compte de la population, du CIF et du potentiel fiscal.

Le CIF est calculé en rapportant :

- le montant total des recettes perçues par la communautés provenant des quatre taxes, de la taxe ou de la redevance d'enlèvement des ordures ménagères et de la redevance d'assainissement, minoré des dépenses de transfert du groupement 38( * ) ;

- au montant total des recettes liées à ces différentes taxes et redevances perçues sur le territoire de la communauté d'agglomération (recettes de la communautés, des communes membres et des syndicats auxquels appartiennent soit les communes membres, soit la communauté).

Les recettes prises en compte pour le calcul d'une CIF au titre d'une année sont celles perçues l'année précédente.

2. Le mode de calcul du coefficient d'intégration fiscale les première et deuxième années d'existence d'une communauté d'agglomération

L'article L. 5211-32 du code général des collectivités territoriales précise le mode de calcul du coefficient d'intégration fiscale pris en compte au cours des deux premières années au cours desquelles une communauté d'agglomération perçoit une DGF.

En effet, au cours de sa première année d'existence, une communauté d'agglomération n'a pas de CIF puisqu'elle ne percevait pas de fiscalité l'année précédente. Le CIF pris en compte est donc le CIF moyen de la catégorie 39( * ) .

La deuxième année, le CIF pris en compte est le CIF réel de la communauté d'agglomération. Toutefois, ce CIF n'est pas corrigé des dépenses de transfert. Il est pondéré par la moyenne des transferts de la catégorie : « Au titre de la deuxième année d'attribution de la dotation dans la même catégorie, le coefficient d'intégration fiscale non corrigé des dépenses de transfert (...) est pondéré par le rapport entre le coefficient d'intégration fiscale moyen de leur catégorie [corrigé des dépenses de transfert] et ce coefficient d'intégration fiscale moyen, non corrigé des dépenses de transfert ».

B. LES MECANISMES DE GARANTIE

Les attributions versées aux communautés d'agglomération ne sont pas forcément celles qui résultent du calcul présenté ci-dessus. En effet, il existe des mécanismes de garantie, qui déterminent le plancher en dessous duquel la dotation par habitant d'une communauté d'agglomération ne peut pas descendre.

L'article L. 5211-33 du code général des collectivités territoriales prévoit que les communautés d'agglomération « ne peuvent percevoir, à compter de la troisième année d'attribution de la dotation dans la même catégorie, une attribution par habitant inférieure à 80 % de la dotation par habitant de l'année précédente ».

Le principe est donc celui d'une garantie à 80 % à compter de la troisième année d'existence.

Toutefois, l'article L. 5211-33 prévoit un régime plus favorable pour les structures intercommunales issues de la transformation d'un établissement public de coopération intercommunale existant. Celles-ci sont en effet assurées de percevoir, au cours des deux premières année de leur passage à la taxe professionnelle unique, une attribution par habitant au moins égale à celle qu'ils ont perçu la dernière année au sein de leur ancienne catégorie.

Lorsqu'une structure intercommunale se transforme pour adopter la taxe professionnelle unique (pour les communautés d'agglomération, la taxe professionnelle unique est obligatoire), le régime est encore plus favorable puisque sa dotation par habitant ne peut être « inférieure, respectivement, à 95 %, 90 % et 85 % de la dotation par habitant perçue l'année précédente ».

Les dispositions de l'article L. 5211-33 reviennent donc à mettre en place un double régime pour les communautés d'agglomération, selon qu'elles sont issues d'une transformation ou d'une création ex nihilo :

- les créations ex nihilo n'ont pas de garantie les deux premières années et une garantie à 80 % au bout de la troisième année ;

- les transformations ont une garantie à 100 % les deux premières années, une garantie à 95 % la troisième année, à 90 % la quatrième année, à 85 % la cinquième année, le droit commun (garantie à 80 %) ne s'appliquant qu'au bout de la sixième année.

L'article 35 du présent projet de loi de finances rectificative prévoit d'aligner sur le régime applicable aux transformations la garantie des communautés d'agglomération issue de la dissolution d'EPCI existants, qui décident de se recréer sous forme de communauté d'agglomération.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article modifie l'article L. 5211-33 du code général des collectivités territoriales afin de mettre en place, la deuxième année au titre de laquelle elles perçoivent une dotation d'intercommunalité, une garantie à 100 % pour les communautés d'agglomération.

La deuxième année est toujours la plus délicate en matière de DGF puisque les groupements sont encore jeunes et ne sont pas très intégrés. Leur coefficient d'intégration fiscale est donc souvent inférieur au CIF moyen de leur catégorie (celui qui a servi à calculer leur DGF de l'année précédente).

Toutes les communautés d'agglomération ayant perçu une DGF pour la première fois en 2000 (première année d'existence de cette catégorie), les communautés d'agglomération créées en 1999 en seront toutes à leur deuxième année en 2001.

Par conséquent, celles qui auront un CIF non corrigé des dépenses de transfert inférieur au CIF moyen de leur catégorie sont celles qui auront le produit fiscal le plus faible au numérateur de leur CIF. Comme les communautés d'agglomération appliquent toutes le régime fiscal de la taxe professionnelle unique, ce sont vraisemblablement les communautés dans lesquelles la part de la taxe professionnelle dans les recettes fiscales totales perçues sur leur territoire est la plus faible qui auront un CIF moyen inférieur à celui de la catégorie.

Il convient également de relever que le mode du calcul du CIF de deuxième année défavorise les groupements qui pratiquent moins de transferts que la moyenne de la catégorie (c'est-à-dire, souvent, les EPCI les plus intégrés). En effet, les transferts pris en compte dans le calcul du CIF de deuxième année sont la moyenne de la catégorie. Si les transferts réels étaient pris en compte, celles qui pratiquent beaucoup de transferts auraient un CIF inférieur, et celles qui pratiquent peu de transferts auraient un CIF supérieur.

Le droit actuel en matière de calcul de la DGF des communautés d'agglomération au titre de leur deuxième année d'existence avantage donc :

- les communautés dans lesquelles les recettes de taxe professionnelle représentent une part importante des recettes totales perçues sur leur territoire ;

- les communautés qui pratiquent beaucoup de transferts.


Le dispositif proposé aura pour effet d'éviter une baisse des attributions de deuxième année des communautés d'agglomération qui ont peu de bases de taxe professionnelle.

S'agissant des communautés d'agglomération faiblement dotées en bases de taxe professionnelle et qui, en outre, pratiquent beaucoup de transferts, le maintien au niveau de la première année de la DGF de deuxième année permettra à la garantie de troisième année (80 % de n-1 ) de s'appliquer à un montant supérieur à ce qu'il aurait été dans le droit actuel. Cela limitera l'effet négatif sur leur CIF de la prise en compte des transferts réels à compter de la troisième année.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

A. UN DISPOSITIF QUI PÉNALISE LES NOUVEAUX ENTRANTS ET LES COMMUNAUTÉS D'AGGLOMÉRATION LES PLUS INTÉGRÉES


L'extension du régime de la garantie des communautés d'agglomération créées ex nihilo n'aura pas pour effet d'augmenter la masse totale des sommes consacrées aux communautés d'agglomération. Ce montant est déterminé en fonction du nombre d'habitants dans les communautés d'agglomération et de la dotation par habitant de cette catégorie.

En revanche, les dispositions du présent article modifient la répartition des crédits de l'enveloppe dévolue aux communautés d'agglomération entre les crédits consacrés au financement de la garantie et les crédits qui sont répartis entre les communautés en fonction du libre jeu des critères.

Au sein de l'enveloppe des communautés d'agglomération, la garantie constitue un préciput. Par conséquent, plus les sommes consacrées à la garantie sont importantes, plus le solde est réduit.

La réduction des crédits répartis spontanément affecte la « valeur de point » de la catégorie des communautés d'agglomération, en la réduisant. La valeur de point est obtenue en rapportant la totalité des crédits à répartir (hors garantie) à la somme de tous les critères pris en compte pour la répartition (population, potentiel fiscal, coefficient d'intégration fiscale). Plus la garantie est élevée, plus le numérateur baisse, donc plus la valeur de point est faible.

La baisse de la valeur de point va réduire le montant par habitant de toutes les communautés d'agglomération qui ne bénéficient pas de la garantie, c'est-à-dire les plus intégrées et les celles qui perçoivent une DGF pour la première fois.

Selon les informations transmises à votre rapporteur général par le ministère de l'intérieur, le dispositif proposé par le présent article serait neutre sur les attributions de 30 communautés d'agglomération et 6 seraient gagnantes. Les perdantes seraient 14 communautés d'agglomérations créées en 1999 (dont une création ex nihilo ) et toutes celles créées en 2000 et qui percevront pour la première fois une DGF en 2001 (leur nombre ne sera connu qu'au 31 décembre 2000 mais peut-être estimé entre 30 et 40).

L'impact financier serait le suivant. La dotation des communautés d'agglomération serait d'environ 2,5 milliards de francs en 2001. En l'absence des dispositions du présent article, 200 millions de francs seraient consacrés à la garantie. Avec les dispositions du présent article, les sommes consacrées à la garantie passeraient à 275 millions de francs 40( * ) .

B. LE REGIME DES COMMUNAUTÉS D'AGGLOMÉRATION ISSUES D'UNE TRANSFORMATION RESTE PLUS FAVORABLE QUE CELUI DES COMMUNAUTÉS D'AGGLOMÉRATION ISSUES D'UNE CRÉATION EX NIHILO

Le présent article a pour objet d'éviter que le montant des attributions par habitants d'une communauté d'agglomération créée ex nihilo puisse être inférieur la deuxième année à ce qu'il était la première année. A compter de la troisième année, la garantie à 80 % est maintenue.

Les communautés issues d'une transformation ne sont soumises au régime de la garantie à 80 % qu'à partir de la sixième année.

Le droit actuel et le dispositif proposé en matière de garantie des communautés d'agglomération

 

1 ère année

2 è année

3 è année

4 è année

5 è année

6 è année

Transformations

au moins 100 % de n-1

100 %

95 %

90 %

85 %

80 %

Ex nihilo

 
 
 
 
 
 

Droit actuel

DGF calculée à partir du CIF moyen de la catégorie

Pas de garantie

80 %

80 %

80 %

80 %

Dispositif proposé

DGF calculée à partir du CIF moyen de la catégorie

100 %

80 %

80 %

80 %

80 %



Il ressort du tableau ci-dessus que le présent article permet de réduire l'écart entre le régime très favorable dont bénéficient les transformations et le régime « sec » qui s'applique aujourd'hui aux créations ex nihilo .

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification

ARTICLE 21

Simplification des formalités pesant sur les débitants de tabac



Commentaire : le présent article supprime, sauf demande expresse de l'administration, la déclaration de stocks exigée de chaque débitant de tabac lors d'un changement de prix de vente des tabacs.



I. LE TEXTE PROPOSÉ PAR LE GOUVERNEMENT

A. UNE MESURE DE SIMPLIFICATION...


Le gouvernement propose dans le présent article de limiter la déclaration générale des stocks prévue par l'article 572 du code général des impôts à la seule « instruction expresse de l'administration ».

En effet, l'article 572 du code général des impôts prévoit, dans son dernier alinéa qu'en « cas de changement de prix de vente, les débitants de tabac sont tenus de déclarer, dans les cinq jours qui suivent la date d'entrée en vigueur des nouveaux prix, les quantités en leur possession à cette date ».

Il s'agit donc en apparence de la levée d'une formalité administrative pesant sur les débitants de tabac.

B. ...AUX CONSÉQUENCES FISCALES

1. De la déclaration des stocks au paiement du différentiel de fiscalité


Cependant, les conséquences de la mesure ne se limitent pas à la suppression d'une obligation administrative, car la déclaration générale de stocks a une signification fiscale.

Les prix de vente du tabac sont libres en France depuis 1994 (loi n° 94-679 du 8 août 1994 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier), mais les fabricants doivent procéder, selon le premier alinéa de l'article 572 précité, pour assurer l'unité de prix sur le territoire, à une demande d'homologation auprès du ministère de l'économie et des finances. La procédure en est fixé par l'article 284 de l'annexe II du code général des impôts : les fabricants et fournisseurs agréés communiquent à la direction général des douanes et des droits indirects les prix de vente au détail de chaque produit, un arrêté du ministre publié au Journal officiel les homologuant ensuite.

Dans les faits, existe une double procédure. Chaque année, en janvier, est publié un arrêté reprenant tous les produits, qui permet d'ajuster les prix de l'ensemble des gammes. Tous les deux mois est publié un arrêté dans lequel figurent les nouveaux produits et les ajustements partiels.

Comme la fiscalité des tabacs (la taxe sur la valeur ajoutée, la taxe perçue au profit du budget annexe des prestations sociales agricoles et les droits de consommation de la France continentale) est assise sur leur prix de vente, la variation de ce dernier a une conséquence fiscale importante.

D'après l'article 575 C du code général des impôts, « le droit de consommation est exigible à la mise à la consommation ». Il est ainsi liquidé le dernier jour de chaque mois d'après la déclaration des quantités de tabacs manufacturés mis à la consommation, et payé par le fournisseur au plus tard le 5 du deuxième mois suivant celui au titre duquel la liquidation a été effectuée.

Or la mise en consommation commence lors de la livraison par le fournisseur agréé des marchandises au débitant de tabac qui conserve donc des produits en droits acquittés. Cela signifie qu'un changement de prix, qui emporte un changement de la valeur des stocks emporte aussi un changement de la valeur fiscale de ces derniers. Le débitant se retrouve donc devoir au fournisseur, qui lui-même doit à l'administration, un reste à payer de fiscalité (en cas de hausse des prix de vente). En cas de baisse des prix, l'administration fiscale doit au fournisseur, qui doit au débitant, le trop-perçu de fiscalité.

C'est pourquoi l'article 572 du code général des impôts avait instauré la déclaration générale des stocks à adresser au service des douanes dans les cinq jours après variation des prix. Les douanes adressent aux fournisseurs la copie de cette déclaration, à charge pour eux de se retourner vers les débitants pour récupérer le reste à payer ou pour leur verser le trop-perçu. Enfin, le fournisseur reverse aux douanes le différentiel de fiscalité avant le 5 du quatrième mois suivant le changement des prix.

La même procédure vaut pour les fournisseurs s'agissant des marchandises qu'ils détiennent dans leur stocks. Cependant, la déclaration générale des stocks qui leur est imposée n'est pas prévue par l'article 572 du code général des impôts mais par l'article 286 D de l'annexe II du même code 41( * ) .

En moyenne, les arrêtés partiels occasionnent des versement de 150.000 francs de différentiel. L'arrêté global porte quant à lui sur 86 millions de francs, dont 16 millions pour les stocks des fournisseurs et 70 millions pour ceux des débitants.

2. La suppression du paiement automatique du différentiel

En supprimant l'automaticité de la déclaration générale des stocks du dernier alinéa de l'article 572, le gouvernement supprime en même temps l'automaticité du paiement par les débitants, mais aussi du versement aux débitants en cas de baisse des prix, du différentiel de fiscalité.

Cependant, comme l'article 286 D de l'annexe II n'est, en l'état, ni abrogé, ni modifié, d'une part la déclaration générale et le paiement/reversement du différentiel pour les fournisseurs demeure, d'autre part il conviendra d'opérer rapidement la coordination réglementaire pour assurer l'effectivité de la mesure législative pour les débitants qui, même en l'absence d'article 572 du code général des impôts restent soumis à l'article 286 D de l'annexe II du même code.

Par ailleurs, l'administration demandera une déclaration générale des stocks à l'occasion des arrêtés annuels d'homologation, c'est-à-dire pour les opérations les plus lourdes susceptibles en conséquence de générer les variations de recettes fiscales les plus fortes. Votre rapporteur général note d'ailleurs qu'il s'agira d'un pouvoir d'appréciation complet de l'administration qui pourra donc décider ou non de demander l'état des stocks et de recevoir ou reverser le différentiel de fiscalité.

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION : UNE SIMPLIFICATION DE FAIBLE PORTÉE

Cet article représente de toute évidence une mesure de simplification à la fois pour les débitants de tabac et pour l'administration.

S'agissant des débitants de tabac, cela leur évitera de devoir, dans les cinq jours suivant la publication de l'arrêté d'homologation au Journal officiel , recenser tout leur stock, même pour une variation mineure du prix d'un seul produit, ce qui arrive environ tous les deux mois. Pour l'administration, le rapporteur général de la commission des finances de l'Assemblée nationale illustre la porté de la mesure par l'exemple de l'arrêté d'homologation du 21 juin 2000 42( * ) : « il a permis à l'administration de recouvrer auprès de 34.400 débitants de tabac, des droits de consommation de 19.093 francs, soit une somme de 55,5 centimes par débit ! Ce montant ne couvrirait même pas les frais d'envoi engagés par l'administration pour adresser copie aux fournisseurs des déclarations de stocks des débitants ! »

Cependant, il convient d'en relativiser l'importance.

La mesure est essentiellement administrative. Financièrement, l'aide apportée aux débitants de tabac est de l'ordre de 150.000 francs par an pour les 34.400 débitants de France métropolitaine, soit 4,36 francs par débitant.

Par ailleurs, rien ne dit que l'administration demandera une déclaration générale en cas de baisse importante des prix du tabac.

Enfin, pour rendre la mesure effective, il faudra réformer l'article 286 D de l'annexe II. Or le gouvernement à l'Assemblée nationale n'a pas indiqué ses intentions en la matière.

Au total, votre rapporteur général approuve cette mesure qui, comme toute simplification, va dans le bon sens, même si les débitants de tabac pouvaient attendre mieux du gouvernement.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 21 bis (nouveau)

Suppression de la caution pour diverses opérations liées à la détention d'alcools et à la circulation des alambics



Commentaire : le présent article dispense du paiement d'une caution plusieurs opérations liées à la détention d'alcools et à la circulation des alambics dans un but d'allégement des formalités administratives.



I. LE TEXTE PROPOSÉ

Le présent article résulte d'un amendement, accepté par le gouvernement qui en a levé le gage, proposé par nos collègues députés Bernard Charles, Gérard Charasse et Alain Tourret défendu par Yves Cochet. Il propose un certain nombre d'allégements de formalités administratives liées au droit des accises.

Le I modifie le 2 du III de l'article 302 D du code général des impôts pour prévoir la possibilité de dispenser de la caution établie par cet article les alcools, boissons alcooliques et tabacs manufacturés. En effet, selon le 2 du III l'article 302 D l'impôt dû sur ces produits est acquitté auprès de l'administration, soit à la date de la liquidation, c'est à dire mensuellement au plus tard le cinquième jour de chaque mois, soit dans le délai d'un mois à compter de cette date. Il prévoit également que le paiement d'une caution garantit le paiement de l'impôt dans chacun des deux cas. Le I du présent article lève donc l'automaticité de cette caution, en laissant à un décret le soin d'en prévoir les conditions.

Le II du présent article procède de la même manière s'agissant de la caution exigée par l'article 302 H du code général des impôts. Ce dernier prévoit que des « personnes qui n'ont pas la qualité d'entrepositaire agréé peuvent, dans l'exercice de leur profession, recevoir des produits expédiés en suspension de droits en provenance d'un autre Etat membre de la Communauté européenne, si elles ont préalablement été agréées par l'administration en tant qu'opérateurs enregistrés ». Cette qualité est attribuée sous réserve de respecter les critères fixés à l'article 302 T du code général des impôts (tenir une comptabilité des livraisons de produits et la présenter à toute réquisition) et de « fournir une caution solidaire garantissant le paiement des droits ». Le II du présent article indique qu'un décret prévoira les limites et les conditions dans lesquelles ces opérateurs enregistrés pourront être dispensés du paiement de cette caution. Il s'agit de traiter le cas des marchandises détenues par des entrepositaires mais qui ne font que transiter chez eux avant de repartir dans un pays de l'Union européenne.

Enfin, le III complète l'article 307 du code général des impôts en prévoyant une exception aux lourdes contraintes pesant sur la circulation des alambics. En effet, ledit article prévoit : « à l'exception des alambics des loueurs ambulants, les appareils ou portions d'appareils propres à la distillation, à la fabrication ou au repassage d'eaux-de-vie ou d'esprits ne peuvent circuler en tous lieux, en dehors des propriétés privées, qu'en vertu des documents mentionnés au I de l'article 302 M. Ces documents sont seulement déchargés lorsque lesdits appareils ou portions d'appareils ont été reconnus au lieu de destination ou au point de sortie du territoire s'ils sont expédiés à l'étranger » . Le document en question est un document d'accompagnement établi par l'expéditeur selon un modèle communautaire. Le III du présent article ouvre la possibilité de se limiter à la détention de l'autorisation administrative de l'article 306 du code général des impôts - c'est à dire l'autorisation générale d'importation, d'acquisition, de location, de transformation, de réparation de alambics - dans le cas de la circulation en vue de réparation ou de transformation des appareils en question. Cette autorisation, à la différence du document d'accompagnement, n'est pas accompagnée d'une caution.

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Il s'agit de plusieurs mesures de simplification administrative. D'après les auteurs de l'amendement, elles permettraient d'alléger les contraintes pesants sur 8 à 10.000 opérateurs, qui se verraient dispenser d'un caution allant de 500 à 1.000 francs par dossier, et sur des milliers d'opérations de circulation d'alambics dans les zones de distillation.

Votre rapporteur général remarque cependant que les conséquences exactes de cet article dépendront des textes d'application qui en détermineront précisément le champ. Il s'étonne ainsi que les auteurs de l'amendement à l'origine de cet article n'aient pas cherché à préciser davantage le contenu des décrets en prévoyant notamment une indication sur le seuil à partir duquel l'obligation de caution sera levée.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 21 ter (nouveau)

Minimum de perception sur les tabacs



Commentaire : le présent article rapproche les minima de perception des cigarettes brunes et blondes, instaure un minimum de perception sur les cigares et relève celui sur les tabacs à rouler.



I. LE TEXTE PROPOSÉ PAR LE GOUVERNEMENT

Le présent article comprend un certain nombre de mesures « traditionnelles » de relèvement des minima de perception sur les tabacs et revoit la fiscalité pesant sur les cigares d'entrée de gamme.

S'agissant des cigarettes, depuis 1996, la France pratique, dans des conditions douteuses au regard du droit communautaire, une différence dans le minimum de perception des cigarettes selon qu'il s'agisse de tabac blond ou de tabac brun. Le minimum de perception du premier est traditionnellement fixé au dessus du second dans un double but de santé publique (dissuader les jeunes plus sensibles aux cigarettes blondes) et de politique industrielle (atténuer l'impact du relèvement de la fiscalité sur la fabrication de cigarettes brunes dont le marché décroît). Actuellement, le minimum de perception est de 470 francs pour les cigarettes brunes et de 530 francs pour les cigarettes blondes. Le gouvernement souhaitait ramener cet écart de 60 francs à 25 francs en relevant le minimum des cigarettes brunes à 505 francs. A l'initiative de notre collègue député Gilbert Mitterrand, le minimum de perception des cigarettes blondes serait porté à 540 francs et celui des brunes à 510 francs soit un écart de 30 francs.

Parallèlement à cette hausse du minimum de perception sur les cigarettes, le gouvernement a proposé à l'Assemblée nationale de relever le minimum de perception du tabac à rouler pour éviter un effet de substitution : la hausse des prix résultant de la hausse de la fiscalité sur les cigarettes pourraient être contournée par le développement du marché du tabac à rouler. Pour éviter cela, le gouvernement a proposé de relever le minimum de perception de ce dernier de 230 à 250 francs.

Enfin, l'Assemblée nationale a modifié la fiscalité applicable aux cigares en créant un minimum de perception - prévu par la législation communautaire mais n'existant pas encore en France - et en diminuant le taux de la fiscalité proportionnelle. Le minimum serait de 330 francs pour 1.000 cigares et le taux passerait de 29,55 % à 25 % du prix de vente au détail. L'objectif est de freiner le développement des cigares d'entrée de gamme aux prix moins élevés que les cigarettes. La baisse du taux permet en revanche d'éviter que ce minimum de perception ne provoque une hausse générale des prix des cigares : plus on montera en gamme, plus son effet sera atténué.

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Cet article contient des mesures traditionnelles d'ajustement de la fiscalité du tabac qui sert à tenter de financer les allégements de charges consentis dans le cadre des 35 heures.

Votre rapporteur général ne peut que partager le double souci de santé publique et de rapprochement avec la fiscalité communautaire qui motive cet article additionnel.

Il remarque cependant que la France reste dans une position fragile au regard du droit communautaire en maintenant un double minimum de perception selon le tabac. Il note aussi que le gouvernement augmente la fiscalité sur les cigares de bas prix en prévoyant les mesures adéquates pour éviter que cette hausse ne se répercute sur les cigares plus onéreux.

Il semblait en effet nécessaire de revoir la fiscalité pesant sur les cigares en France. Elle est aujourd'hui totalement proportionnelle au prix de vente (29,55 % de droit de consommation, 16,3856 % de TVA et 0,64142 de taxe au profit du BAPSA) et très supérieure à celle des pays voisins (droit de consommation de 5 % en Belgique, 10 % en Allemagne et au Luxembourg, 13 % en Allemagne, 15 % en moyenne dans l'Union européenne). Par ailleurs depuis quelques années sont apparus sur le marché français des produits très proches des cigarettes, déstructurants pour le marché des cigares et sources de vives tensions sur les prix d'entrée de gamme, de nature à contrarier l'objectif de santé publique. Ces produits, dont le mode de fabrication, le goût et la présentation sont proches de ceux des cigarettes sont en effet fiscalisés comme des cigares alors qu'ils peuvent attirer les fumeurs de cigarettes à la recherche des produits les moins chers. La mesure proposée par le gouvernement et adoptée par l'Assemblée nationale devrait permettre de répondre aux préoccupations de santé publique en réduisant la consommation des ces petits cigares qui s'apparentent aux cigarettes pour les jeunes à faibles revenus, mais aussi en permettant de réduire la fiscalité pesant sur les cigares de qualité. Cette mesure devrait en outre rapporter 50 millions de francs, dont votre rapporteur général note d'ailleurs qu'ils n'ont pas été pris en compte dans les prévisions de recettes adoptées par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, révélant une nouvelle fois la difficile articulation des projets de loi relatifs aux finances publiques.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 22

Aménagement du régime des déclarations électroniques et du télérèglement des impôts pour les grandes entreprises

Commentaire : le présent article propose d'étendre le champ des formalités déclaratives qui doivent être accomplies par voie électronique par les grandes entreprises, d'une part, d'étendre pour ces mêmes entreprises la faculté ou l'obligation d'acquitter certains impôts par télérèglement, d'autre part.



I. LE RÉGIME ACTUEL DES DÉCLARATIONS ET RÉGLEMENT D'IMPÔT PAR VOIE ELECTRONIQUE POUR LES ENTREPRISES

• Rappelons que l'article 1649 quater B bis du code général des impôts offre aux entreprises assujetties à l'impôt sur les sociétés, au régime des bénéfice industriels et commerciaux (BIC), au régime des bénéfices non commerciaux (BNC) ou au régime des bénéfices agricoles (BA), le choix entre l'envoi sur support papier de leur déclaration d'impôt et des documents annexes ou leur transmission électronique selon la procédure de transfert des données fiscales et comptables (TFDC).

En effet, l'article 1649 quater B bis du code général des impôts prévoit que « toute déclaration d'une entreprise destinée à l'administration fiscale peut être faite par voie électronique, dans les conditions fixées par voie contractuelle ».

Cette procédure de télédéclaration, introduite en 1991, est relativement simple pour les entreprises, puisque toutes les opérations techniques sont assurées par des prestataires de service habilités par la direction générale des impôts (DGI) : en 1999, plus de 500.000 entreprises avaient ainsi adhéré à TFDC.

Par ailleurs, le paiement de l'impôt, qui peut en principe être effectué en numéraire, par mandat, par virement, par chèque ou par titre électronique de paiement, doit être effectué sous la forme d'un virement directement opéré sur le compte du Trésor auprès de la Banque de France lorsque l'impôt dû dépasse un certain montant (entre 10.000 francs pour la contribution des institutions financières et 500.000 francs pour l'impôt sur les sociétés, les impôts locaux ou la taxe sur les salaires).

• Enfin, les articles 1649 quater B quater et 1740 undecies du code général des impôts, issus de l'article 41 de la loi de finances rectificative pour 1999, prévoient une double obligation pour les entreprises dont le chiffre d'affaires hors taxes réalisé au cours de l'exercice précédent est supérieur à 100 millions de francs :

- les déclarations d'impôt sur les sociétés relatives aux exercices clos à compter du 31 décembre 2000, et les déclarations de taxe sur la valeur ajoutée déposées à compter du 1 er mai 2001 devront être souscrites par voie électronique sous peine d'une majoration de 0,2 % du montant des droits recouvrés ;

- la TVA devra être acquittée par télérèglement à partir du 1 er mai 2001.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article propose un nouveau régime pour les formalités déclaratives et les modalités de paiement des contribuables qui dépendront de la « direction des grandes entreprises » qui doit être mise en place prochainement au sein de la direction générale des impôts pour y assurer la gestion et le recouvrement des impôts des grandes entreprises à partir du 1 er janvier 2002.

• A l'origine, le dispositif proposé par le gouvernement se contentait d'indiquer que les contribuables concernés étaient « les entreprises qui, quelles que soient leur chiffre d'affaires, sont tenues d'accomplir leur obligations déclaratives auprès du service chargé des grandes entreprises au sein de l'administration des impôts, en application des règles fixées par décret ».

En d'autres termes, le dispositif initialement proposé par le gouvernement prévoyait la création d'obligations déclaratives dont le champ devait être déterminé par décret, ce qui n'était guère satisfaisant.

Cependant, à l'initiative de son rapporteur général, l'Assemblée nationale a adopté un amendement précisant les contribuables concernés :

- les personnes physiques ou morales ou groupements de personnes de droit ou de fait dont, à la clôture de l'exercice, le chiffre d'affaires hors taxes ou le total de l'actif brut figurant au bilan est supérieur ou égal à 600 millions d'euros ;

- les personnes physiques ou morales ou groupements de personnes de droit ou de fait, qui, ou bien détiennent à la clôture de l'exercice, directement ou indirectement, plus de 50 % du capital ou des droits de vote d'une des personnes ou groupements précédents, ou bien sont détenues à plus de 50 % par l'une des personnes ou l'un des groupements précédents. En d'autres termes, les filiales détenues à plus de 50 % par une grande entreprise dépendront, quelle que soit leur taille, de la direction des grandes entreprises ;

- les sociétés agréées au régime du bénéfice mondial consolidé et celles incluses dans le périmètre de consolidation ;

- les personnes morales incluses dans un groupe au sens de l'article 223 A du code général des impôts lorsqu'au moins une personne du groupe répond à l'un des critères précédents.

Cette énumération reprend en fait la liste des contribuables qu'un projet de décret se propose de rattacher à la future direction des grandes entreprises.

• Pour tous ces contribuables, le présent article propose une nouvelle rédaction de l'article 1649 quater B quater du code général des impôts visant :

- à rendre la déclaration électronique obligatoire à compter du 1 er janvier 2002 pour les BIC, les BNC et les bénéfices agricoles ;

- à rendre la déclaration électronique obligatoire pour les déclarations de TVA, leurs annexes et les taxes assimilées au taxes sur le chiffre d'affaires.

En outre, les II. à IV. du présent article proposent une nouvelle rédaction pour l'article 1695 quater du code général des impôts, ainsi que l'insertion dans le code général des impôt de deux nouveaux articles 1681 septies et 1762 nonies visant :

- à rendre obligatoire pour ces contribuables, à partir du 1 er janvier 2002, le paiement par télérèglement de la TVA ; des taxes assimilées aux taxes sur le chiffre d'affaires ; de l'impôt sur les sociétés et des impositions recouvrées dans les mêmes conditions, notamment la contribution sur l'impôt sur les sociétés et la contribution sociale sur les bénéfices (CSB) ; de l'imposition forfaitaire annuelle (IFA)  ; enfin de la taxe professionnelle et de ses taxes additionnelles, c'est à dire la taxe pour frais de chambres de commerce et d'industrie et la taxe pour frais de chambres de métiers ;

- à rendre obligatoire le paiement par télérèglement de la taxe sur les salaires, des taxes foncières sur les propriétés bâties et non bâties et de leurs taxes additionnelles et annexes pour les contribuables qui ont opté pour les paiement de ces taxes auprès de la direction des grandes entreprises ;

- à sanctionner le non-respect de l'obligation de paiement par télérèglement d'une majoration de 0,2 % des impôts dus.

Par ailleurs, le V du présent article propose la création d'un nouvel article 654 bis offrant à ces mêmes contribuables, c'est à dire les contribuables dépendant de la direction des grandes entreprises, la faculté de faire enregistrer auprès de cette direction des actes de mutation (autres que les mutations par décès).

• Enfin, la nouvelle rédaction du premier alinéa de l'article 1649 quater B quater du code général des impôts proposée par le présent article prévoit pour les entreprises dont le chiffre d'affaires réalisé au cours de l'exercice précédent est supérieur à 100 millions de francs, même si ces entreprises ne relèvent pas de la direction des grandes entreprises :

- l'obligation à partir du 1 er mai 2001 de souscrire par voie électronique les annexes aux déclarations d'IS et de TVA, ainsi que les déclarations afférentes aux taxes assimilées aux taxes sur le chiffre d'affaires (et non plus seulement les déclarations d'IS et de TVA) ;

- l'obligation à partir du 1 er mai 2001 d'acquitter par télérèglement les taxes assimilées aux taxes sur le chiffre d'affaires (et non plus seulement la TVA).

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Plusieurs rapports ont récemment souligné que le coût de recouvrement des impôts était particulièrement élevé en France, en raison de la complexité de notre système de prélèvements obligatoires, comme de l'inefficience de l'organisation de l'administration fiscale.

Dans ce contexte, votre commission se félicite de la création d'une direction des grandes entreprises au sein de la direction générale des impôts, d'une part, du développement de la dématérialisation des formalités déclaratives et du règlement des impôts, d'autre part.

Le développement des télédéclarations et des télérèglements est d'ailleurs « gagnant-gagnant » pour l'administration fiscale et pour les contribuables.

En effet, la dématérialisation des déclarations réduit les coûts de saisie et de traitement des formalités déclaratives pour l'administration fiscale. En outre, le télérèglement des impôts facilite l'appariement des paiements et des déclarations. Enfin, la dématérialisation des procédures pourrait favoriser le contrôle fiscal.

Par ailleurs, la dématérialisation des déclarations réduit également le risque d'erreurs pour les contribuables, et le télérèglement leur permet de gagner deux jours de valeur en trésorerie : en effet, le télérèglement se traduit par un prélèvement direct sur le compte de l'entreprise, ce qui supprime le transit des fonds par virement auprès du compte du Trésor à la Banque de France.

Ces considérations expliquent le succès de la procédure TFDC.

Dans ces conditions, était-il opportun de rendre obligatoires, sous peine de sanctions, les déclarations et les règlements par voie électronique pour certains contribuables ?

Certes, cette obligation pourrait accélérer la dématérialisation des déclarations et des règlements, et de ce fait faciliter la réforme de l'administration fiscale.

Néanmoins, remplacer un processus « gagnant-gagnant » par une démarche autoritaire n'est sans doute pas la meilleure manière d'obtenir l'adhésion des contribuables : l'administration fiscale risque de voir son image être dégradée en reportant une partie de ses coûts de fonctionnement sur les assujettis. Cette démarche autoritaire pourrait d'ailleurs se retourner contre l'administration fiscale si la mise en place de la direction des grandes entreprises s'avérait plus difficile que prévu.

En outre, on peut s'interroger sur l'état de préparation des contribuables concernés, dont l'équipement informatique est sans doute très hétérogène.

En effet, comme le souligne le rapporteur général de l'Assemblée nationale 43( * ) « la compétence de la direction des entreprises peut s'étendre, du fait du régime d'intégration ou de l'actionnariat de personnes physiques, via des sociétés de personnes, notamment dans la grande distribution, à des catégories variées de contribuables », dont certains peuvent être éloignés de la notion de « grande entreprise ».

Il semble ainsi peu opportun d'ajouter de nouvelles contraintes à ces contribuables, dont certains en seront d'ailleurs peut-être tardivement informés, au moment même où ils auront également à gérer le passage à l'euro.

Votre rapporteur général vous propose donc à amendement visant à instaurer un moratoire pour l'application des sanctions jusqu'au 1 er janvier 2004, ce qui laisserait suffisamment de temps aux intéressés pour s'équiper, d'une part, à l'administration fiscale pour rôder le bon fonctionnement du nouveau dispositif, d'autre part.

Cet amendement ne supprime toutefois pas les obligations de télédéclaration et de télérèglement prévues par le présent article, et ce, afin d'inviter résolument les entreprises concernées à se moderniser.

Cette solution, consistant à prévoir une obligation sans y associer une sanction immédiate, n'est pas sans précédent en la matière. Par exemple, l'article 41 de la loi de finances rectificative pour 2000 prévoyait une double obligation de télédéclaration et de télérèglement de l'impôt sur les sociétés pour les entreprises de plus de 100 millions de francs de chiffre d'affaires, mais ne sanctionnait que le non-respect de l'obligation de télédéclaration, le non-respect de l'obligation de télérèglement n'étant pas sanctionné.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 23

Fixation des coefficients de majoration des valeurs locatives servant
de base aux impôts directs locaux en 2001

Commentaire : le présent article fixe les coefficients de revalorisation des valeurs locatives cadastrales pour 2001.

La valeur locative cadastrale correspond au loyer annuel théorique que produirait un immeuble bâti ou non bâti figurant au cadastre, s'il était loué aux conditions de marché. La valeur locative cadastrale constitue la notion fondamentale de la fiscalité directe locale, puisqu'elle est utilisée pour le calcul de la base de chacun des impôts directs locaux.

La valeur locative est calculée forfaitairement à partir des conditions du marché locatif de 1970 pour les propriétés bâties, et de 1961 pour les propriétés non bâties. Pour tenir compte de l'érosion monétaire et de l'évolution des loyers depuis ces dates, elle est modifiée régulièrement par des coefficients forfaitaires d'actualisation et de revalorisation.

La loi prévoit que les valeurs locatives cadastrales sont actualisées tous les trois ans et revalorisées chaque année. Pourtant, l'actualisation triennale prévue par la loi n'est intervenue qu'en 1980, et ses résultats n'ont été intégrés que dans les rôles de taxe foncière et de taxe d'habitation. Les actualisations suivantes ont été remplacées par des majorations forfaitaires. La valeur locative est également revalorisée chaque année par l'application d'un coefficient forfaitaire, fixé annuellement, au plan national, par la loi de finances.

Ces mécanismes d'ajustement n'empêchent pas un décalage croissant des bases avec le marché réel . La valeur locative est en effet « indexée » sur la hausse régulière moyenne des loyers, mais ne tient pas compte de la modification des normes de confort des différents locaux et donc, de l'évolution hétérogène des loyers. En conséquence, la valeur locative estimée est souvent irréaliste, d'autant que les propriétaires ne déclarent jamais spontanément les travaux d'embellissement et d'amélioration réalisés dans leur habitation. Enfin, il n'est pas tenu compte des phénomènes de mode qui font que certains quartiers deviennent très recherchés tandis que d'autres le sont moins.

I. L'ÉTERNELLE QUESTION DE LA RÉVISION DES BASES CADASTRALES

La loi du 30 juillet 1990 avait prévu la mise en oeuvre d'une révision des évaluations cadastrales de l'ensemble des propriétés bâties et non bâties, comportant :

- la mise en place d'une nouvelle nomenclature des propriétés ;

- une évaluation des tarifs fondée sur l'observation du marché ;

- un réexamen systématique des locaux professionnels et des biens divers ;

- une procédure associant les élus locaux, les contribuables et l'administration.

L'administration a réalisé les opérations dans les délai prévus par la loi, et un rapport analysant les résultats prévisibles de la révision a été remis au Parlement le 30 septembre 1992.

Le gouvernement avait annoncé son intention d'intégrer les résultats de la révision de 1990 dans les bases de la taxe d'habitation, des taxes foncières et de la taxe professionnelle au 1 er janvier 2000. Or, cette réforme a été abandonnée.

La révision des bases cadastrales locatives constitue un sujet particulièrement sensible, du fait de l'importance des transferts entre les communes et entre les contribuables au sein d'une même commune qui seraient induits par cette réforme. La proximité des élections municipales rend cette révision particulièrement inopportune, et celle-ci semble repoussée jusqu'en 2002.

De plus, la révision des valeurs locatives a été effectuée en 1990, au plus fort de la hausse du marché de l'immobilier. L'intégration de cette révision pourrait donc se concrétiser par une hausse importante de la taxe d'habitation, qui limiterait l'impact de la suppression de la part régionale et des exonérations prévues par la loi de finances rectificative pour 2000 du 13 juillet 2000.

II. LA REVALORISATION DES BASES
Les coefficients de revalorisation des valeurs locatives pour l'année 2001 sont uniformément fixés à 1,01 pour les propriétés non bâties, les immeubles industriels des entreprises relevant de plein droit d'un régime réel d'imposition, et les autres propriétés bâties. Cette modalité constitue une reconduction de la revalorisation effectuée en 1999 et en 2000, alors que les coefficients de revalorisation étaient auparavant différenciés selon les types de propriétés.
III. LES PRINCIPES QUI DOIVENT GUIDER LA RÉVISION DES VALEURS LOCATIVES CADASTRALES
Votre commission considère qu'une révision des valeurs locatives cadastrales est nécessaire afin d'adapter les impôts locaux à la réalité, car le décalage entre les valeurs locatives réelles et celles qui servent de base au calcul des impôts locaux s'accroît d'année en année, entraînant des situations injustes.

Votre commission tient à rappeler que, si la réforme est nécessaire, il convient de la réaliser conformément aux recommandations formulées par le Comité des finances locales pour tenir compte de la complexité d'un tel mécanisme et des bouleversements que cela entraînerait inévitablement sur la répartition de la charge fiscale.

Le Comité des finances locales avait, dans le cadre d'un groupe de travail chargé d'étudier les conséquences prévisibles de l'intégration dans les rôles des résultats de la révision générale des évolutions cadastrales, formulé un certain nombre de recommandations qui doivent guider la réflexion du gouvernement 44( * ) :

- l'homogénéisation des valeurs locatives constitue un préalable indispensable à une plus grande justice fiscale et à une meilleure péréquation entre les collectivités locales par le biais des concours financiers répartis par l'Etat ;

- tous les locaux d'habitation doivent être classifiés dans une catégorie unique ;

- le coefficient de révision des bases des bâtiments industriels doit être aligné, au minimum, sur la moyenne des hausses des autres locaux ;

- le gouvernement doit proposer les mesures de transition nécessaires et juger de l'opportunité d'un déverrouillage des règles de liaison entre les taux d'imposition ;

- il convient d'estimer l'impact de la révision sur les cotisations au terme de la période d'étalement, quand les plus fortes variations ne seront plus écrêtées ;

- les variations prévisibles des cotisations à la taxe foncière sur les propriétés non bâties doivent faire l'objet d'études approfondies ;

- des simulations doivent être réalisées sur les effets de la révision dans les communes, départements et territoires d'outre-mer ;

- le comité doit être étroitement associé au suivi de la mise en oeuvre de cette réforme.

Votre rapporteur général considère que ces recommandations doivent servir de base à la mise en oeuvre d'une révision des valeurs locatives.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 24

Aménagement de la taxe pour frais de chambres d'agriculture

Commentaire : le présent article vise à préciser les modalités de fixation et d'augmentation maximale du produit de la taxe pour frais de chambres d'agriculture.

I. LE DROIT EXISTANT


Actuellement la particularité des règles régissant la taxe pour frais des chambres d'agriculture tient à ce que le dispositif réellement appliqué est en contradiction avec le dispositif légalement défini.

A. LE DISPOSITIF DÉFINI PAR LA LOI

Le régime de la taxe pour frais de chambre d'agriculture est légalement régi par l'article L. 514-1 du code rural selon lequel les dispositions financières concernant les chambres d'agriculture et l'assemblée permanente des chambres d'agriculture (APCA) sont prévues par les deux premiers alinéas de l'article 30 de la loi n° 59-1472 du 28 décembre 1959 et, en ce qui concerne les mesures fiscales, par l'article 1604 du code général des impôts (CGI).

En outre, le montant des taxes que les chambres d'agriculture sont autorisées à percevoir en application de l'article 1604 du CGI est, nonobstant toute clause ou disposition contraire, remboursé pour moitié au propriétaire par le locataire fermier ou métayer.

L'article 30 de la loi du 28 décembre 1959 précitée dispose qu'il est pourvu aux besoins des chambres d'agriculture et de l'APCA au moyen d'une imposition additionnelle à la contribution foncière sur les propriétés non bâties ou, dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, à la taxe foncière sur les propriétés non bâties. Des décrets pris sur le rapport du ministre de l'agriculture et du ministre de l'économie et des finances déterminent chaque année les sommes qui permettront de subvenir aux besoins des chambres.

En outre, d'après les dispositions de l'article 23 de l'ordonnance n° 59-108 du 7 janvier 1959 relative aux impositions perçues au profit des collectivités locales et de divers organismes, les taux maxima et les conditions d'application de ces taxes additionnelles sont fixés par décret en Conseil d'Etat, ces taux pouvant varier sur l'ensemble du territoire.

Ces dispositions font d'ailleurs l'objet de l'article 1604 du CGI, qui dispose qu'une taxe calculée sur la même base que la taxe foncière sur les propriétés non bâties est perçue au profit des chambres d'agriculture. Elle est établie dans la circonscription territoriale de chaque chambre d'agriculture. Il est également spécifié dans le même article que le taux maximum et les conditions d'applications de la taxe sont fixés par décret en Conseil d'Etat, le taux peut ne pas être le même sur l'ensemble du territoire.

Pourtant ce décret en Conseil d'Etat n'a jamais été pris. Dès lors les règles appliquées, dans les faits, à la taxe pour frais de chambre d'agriculture ne sont pas celles résultant de la loi. Cette situation a pu entraîner une certaine insécurité juridique.

B. LE RÉGIME EFFECTIVEMENT APPLIQUÉ

Le dispositif aujourd'hui appliqué résulte d'une note de service annuelle adressée par le ministre de l'agriculture aux préfets, qui porte sur les conditions d'approbation du budget de chaque chambre d'agriculture par le préfet de département concerné.

Cette note précise le taux maximum de l'augmentation du produit perçu par chaque chambre au titre de la taxe pour frais de chambres d'agriculture. L'augmentation de ce produit est par la suite décidée par chaque chambre d'agriculture, dans le respect du taux maximum fixé, et le montant du produit à percevoir est transmis aux services fiscaux qui fixent les taux.

Les autorités de tutelle des chambres d'agriculture (ministre de l'agriculture et ministre de l'économie et des finances) ont cependant été alertées par la Cour des comptes quant à la fragilité de la procédure actuelle selon laquelle le ministre se substitue au Premier ministre seul compétent, d'après les textes, pour fixer, par décret contresigné par lesdits ministres de tutelle, la base et le taux de l'imposition. En effet, les impositions exigées de chaque contribuable pourraient faire l'objet de recours pour avoir été prises sur la base de décisions illégales du fait de l'incompétence de leur auteur.

En outre, alors qu'aucune dérogation n'est envisagée par la loi, le ministre de l'agriculture peut décider d'autoriser une chambre qui en a fait la demande, au préfet, à majorer exceptionnellement l'augmentation du produit perçu.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A. LA FIXATION ANNUELLE DU TAUX MAXIMUM D'ÉVOLUTION DE LA TAXE

1. Modification de l'article L. 514-1 du code rural


Le 1 du I du présent article vise à modifier l'article L. 514-1 du code rural afin de préciser que c'est un arrêté conjoint du ministre de l'agriculture et du ministre chargé du budget qui fixe annuellement l'augmentation maximale du produit de la taxe que chaque chambre départementale d'agriculture peut inscrire à son budget. Cet arrêté est pris au mois d'octobre de l'année précédant celle au titre de laquelle est établi ce budget.

En outre, et il s'agit d'une innovation par rapport au système actuellement appliqué, cette augmentation maximale ne pourra intervenir que dans la limite de 1,2 fois l'évolution prévisionnelle en moyenne annuelle des prix à la consommation des ménages hors prix du tabac, figurant au rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances de l'année au titre de laquelle le budget est établi (soit 1,2 fois l'évolution prévisionnelle de l'inflation). Ainsi, pour 2001, cette évolution prévisionnelle étant de 1,2 %, la limite serait fixée à 1,44 %.

Dans un souci de clarification juridique, le 2 du I du présent article précise que les dispositions précitées de l'ordonnance du 7 janvier 1959 et de la loi du 28 décembre 1959 sont abrogées.

Taxe pour frais de chambres d'agriculture

Montant du prix de la taxe et comparaison entre l'augmentation du produit de la taxe et celle de 1,2 fois l'indice prévisionnel des prix à la consommation hors tabac

(en millions de francs)

 

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

Montant du produit de la taxe

1.394,35

1.429,72

1.459,78

1.500,34

1.532,95

1.563,80

(nd)

Evolution (en %)

1,48

2,54

2,10

2,78

2,17

2,01

 

Indice prévisionnel des prix à la consommation X 1,2 (en %)

2,40

2,04

2,52

1,56

1,56

1,44

1,08

Montant du produit de la taxe avec application de l'indice des prix X 1,2

1.407,01

1.432,71

1.471,89

1.494,85

1.518,17

1.540,03

1.556,66

Source : Direction de la législation fiscale

2. Modification de l'article 1604 du CGI

Le 1 du II du présent article vise à modifier le II de l'article 1604 du CGI relatif à la taxe pour frais de chambres d'agriculture. Le principe de la fixation annuelle du produit de la taxe et non de son taux par les chambres d'agriculture y figure et acquiert donc valeur législative.

Ce produit est déterminé à partir de celui arrêté l'année précédente, augmenté, le cas échéant, dans les conditions fixées par l'article L 514-1 du code rural.

En outre, le II de l'article 1604 du CGI renvoie désormais à l'article 1639A du même code pour les modalités de recouvrement de la taxe pour frais d'agriculture.

B. LA POSSIBILITÉ DE MAJORATION DE L'AUGMENTATION FIXÉE

Actuellement, le ministre de l'agriculture peut accorder des autorisations de majoration de l'augmentation fixée par sa note de service et ce en dehors de tout cadre légal. De telles dérogations sont d'ailleurs fréquentes : sur un total de 94 chambres d'agriculture percevant la taxe, 5 autorisations de majoration ont été accordées pour les budgets 2000, 10 pour les budgets 1999 et 18 pour les budgets 1998.

D'après les dispositions du 1 du I du présent article, quatrième et cinquième alinéas, le ministre de l'agriculture pourra, à titre exceptionnel, autoriser une chambre départementale d'agriculture à majorer l'augmentation préalablement fixée, compte tenu de sa situation financière ainsi que des actions nouvelles mises en oeuvre ou des investissements à réaliser, dans le cadre de conventions conclues avec l'Etat, l'autorité compétente pour signer ces conventions étant le préfet du département dans lequel la chambre départementale d'agriculture a son siège.

En outre, cette majoration exceptionnelle, qui peut également être demandée l'année du renouvellement des membres des chambres d'agriculture qui a lieu tous les six ans, ne peut être supérieure à l'augmentation maximale du produit de la taxe fixée par l'arrêté conjoint du ministre de l'agriculture et du ministre chargé du budget.

De ce plafonnement de la majoration exceptionnelle résulte le fait qu'aucune chambre d'agriculture ne pourra augmenter le produit de sa taxe au-delà du double de l'augmentation maximale fixée par les deux ministres.

C. ENTRÉE EN VIGUEUR DU NOUVEAU DISPOSITIF ET DISPOSITIONS TRANSITOIRES

Le 2 du II du présent article précise que le nouveau régime de la taxe pour frais de chambres d'agriculture s'appliquera pour les impositions établies au titre de 2001 et des années suivantes.

Le 3 du II du présent article dispose que les ministres de tutelle devront fixer l'augmentation maximale du produit de la taxe par un arrêté publié au plus tard le 15 janvier 2001. A cette date cependant, les budgets des chambres d'agriculture pour 2001 auront déjà été transmis au préfet du département depuis plusieurs mois.

Cette entrée en vigueur dès 2001 sera source d'insécurité juridique notamment pour les chambres qui demanderont une majoration exceptionnelle et ne pourront savoir avant janvier 2001 si elle leur est accordée.

Enfin le 4 du II du présent article dispose que, sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, les impositions mentionnées à l'article 1604 du CGI établies au titre des années antérieures à 2001 sont réputées régulières en tant qu'elles seraient contestées par le moyen tiré de l'irrégularité des actes sur lesquels elles sont fondées. Il s'agit donc d'une validation législative de la pratique actuelle.

III. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté un amendement présenté parle rapporteur général du budget, tendant à permettre la signature de conventions pluriannuelles de majoration du produit de la taxe.

D'après l'auteur de cet amendement, des conventions pluriannuelles, dont le respect des engagements serait vérifié chaque année, permettraient aux chambres d'agriculture d'envisager sereinement de gros investissements ou des actions nouvelles de « longue haleine », avec des garanties quant à leur financement sur plusieurs années.

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

A. LA FIXATION PAR LA LOI PLUTÔT QUE PAR UN ARRÊTÉ MINISTÉRIEL DE L'AUGMENTATION MAXIMALE DU PRODUIT DE LA TAXE


On peut s'interroger sur l'opportunité voire la constitutionnalité d'une disposition qui laisse à un arrêté ministériel le soin de fixer l'augmentation maximale du produit de la taxe que chaque chambre peut inscrire à son budget. En la matière l'intervention de la loi serait préférable .

La question qui est ici posée est celle d'un plus grand respect des prérogatives du Parlement.

C'est pourquoi votre rapporteur général estime nécessaire de rétablir la compétence du législateur en la matière.

B. MODIFICATION DU TAUX MAXIMUM D'ÉVOLUTION DE LA TAXE

Le présent article plafonne le taux d'évolution de la taxe pour frais de chambres d'agriculture à 1,2 fois l'évolution prévisionnelle en moyenne annuelle des prix à la consommation des ménages, hors les prix du tabac.

Le niveau proposé peut cependant paraître restrictif.

En effet, cet encadrement ne permet pas de couvrir l'évolution habituelle de la masse salariale (inflation et GVT) alors que les métiers des chambres d'agriculture évoluent vers des compétences toujours renforcées. De plus, une telle limite pourrait être préjudiciable à la mise en place de tout programme nouveau tels ceux qui ont été confiés aux chambres d'agriculture ces dernières années (mise en place des Centres de Formalités des entreprises, suivi de la Directive Nitrates...).

En outre, une entrée en vigueur de ce plafonnement à partir de 2001 sera d'autant plus difficile que les chambres ont à faire face à la mise en place des 35 heures qui se traduit par la création de 3 % d'emplois nouveaux, sans qu'aucune ressource nouvelle n'ait été prévue à cet effet.

C'est pourquoi, il est proposé de fixer le taux maximum d'évolution du produit de la taxe pour frais de chambres d'agriculture à 1,3 fois, et non plus 1,2 fois, l'évolution prévisionnelle en moyenne annuelle des prix à la consommation des ménages, et ce d'autant plus que l'évolution des prix prise en compte est l'évolution prévisionnelle figurant au rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances, souvent inférieure à l'évolution réellement constatée.

Décision de votre commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 25

Modification de la taxe sur les achats de viande

Commentaire : le présent article tend à modifier le régime de la taxe sur les achats de viande prévue à l'article 302 bis ZD du code général des impôts (CGI), dite « taxe d'équarrissage ».

I. LE DROIT EXISTANT


La taxe sur les achats de viande, dite « taxe d'équarrissage », a été créée par la loi n° 96-1139 du 26 décembre 1996 relative à la collecte et à l'élimination des cadavres d'animaux et des déchets d'abattoirs, et codifiée à l'article 302 bis ZD du code général des impôts (CGI), dans le but de financer les besoins du service public de l'équarrissage.

Dans le contexte de la crise de la « vache folle », l'équarrissage est en effet devenu, au début de l'année 1997, une mission de service public relevant de la compétence de l'Etat.

A. LES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 302 BIS ZD DU CGI

L'article 302 bis ZD du CGI a été inséré par la loi du 26 décembre 1996 précitée et comprend les dispositions relatives au régime de la taxe sur les achats de viande.

1. Les personnes imposables

D'après les disposition du I cet article, il est institué, à compter du 1 er janvier 1997, une taxe due par toute personne qui réalise des ventes au détail de viandes et de produits énumérés ci-après.

Sont donc concernées par le paiement de cette taxe les entreprises, qu'il s'agisse d'entreprise individuelle ou de société, qui réalisent de la vente au détail de viandes et de produits carnés.

2. Les produits concernés

D'après les dispositions du II de l'article 302 bis ZD du CGI, la taxe est assise sur la valeur hors taxe sur la valeur ajoutée (TVA) des achats de toutes provenances :

- de viandes et abats, frais ou cuits, réfrigérés ou congelés, de volaille, de lapin, de gibier ou d'animaux des espèces bovine, ovine, caprine, porcine et des espèces chevaline, asine et de leurs croisements ;

- de salaisons, produits de charcuterie, saindoux, conserves de viande et abats transformés ;

- d'aliments pour animaux à base de viande et d'abats.

3. La fixation du taux de la taxe sur les achats de viande

D'après les dispositions du V de l'article 302 bis ZD du CGI, un arrêté conjoint du ministre chargés de l'économie et du budget et du ministre de l'agriculture fixe les taux d'imposition, par tranche d'achats mensuels hors TVA, dans les limites suivantes :

- jusqu'à 125.000 francs : 0,6 % ;

- au-delà de 125.000 francs : 1 %.

Les taux effectifs actuels, mentionnées à l'article 50 quaterdecies A de l'annexe IV du CGI, sont respectivement de 0,5 % et de 0,9 %.

4. Les exonérations

D'abord il convient de souligner que la taxe sur les achats de viande n'est pas due lorsque le montant d'achats mensuels est inférieur à 20.000 francs hors TVA.

En outre, les entreprises dont le chiffre d'affaires de l'année civile précédente est inférieure à 2.500.000 francs hors TVA sont exonérées de la taxe.

5. Le recouvrement de la taxe

D'après les dispositions du VI de l'article 302 bis ZD du CGI , la taxe est constatée, recouvrée et contrôlée selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions, garanties et privilèges que la taxe sur la valeur ajoutée.

B. LE PRODUIT DE LA TAXE D'ÉQUARRISSAGE

Dans un premier temps il convient de souligner que cette taxe sur les achats de viande a été complétée par la création d'une taxe additionnelle prévue par l'article 65 de la loi n° 98-546 du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier. Il s'agissait d'une taxe provisoire assise sur les achats réalisés entre le 1 er juillet 1998 et le 31 décembre 1998 au taux de 0,3 % pour la première tranche et de 0,5 % pour la deuxième tranche. Le seuil de chiffres d'affaires hors TVA retenu pour l'exonération était de 3,5 millions de francs et non les 2,5 millions de francs prévus par l'article 302 bis ZD du CGI.

Depuis 1997, date de l'entrée en vigueur de la taxe d'équarrissage, le produit de cette taxe établi sur la base des encaissements du réseau comptable de la direction générale des impôts (DGI), a été le suivant :

- en 1997 : 549 millions de francs ;

- en 1998 : 745 millions de francs dont 145 millions de francs de produit de taxe additionnelle ;

- en 1999 : 657 millions de francs dont 15 millions de francs de produit de la taxe additionnelle ;

- en 2000 : le produit de la taxe est estimé par les services de la DGI à 650 millions de francs.

Les chiffres fournis par les services de la direction générale des impôts ont cependant pu être contredits par d'autres sources. En outre, à ce jour, le ministère de l'agriculture n'a rendu publics que peu de bilans relatifs à cette taxe et à son produit.

Ainsi, en 1997, un rapport du Sénat évaluait au 18 août 1997 le produit de cette taxe à 273 millions de francs tout en précisant que les estimations du rendement de la taxe pour 1997 devaient conduire à une rentrée de 500 millions de francs contre les 700 millions de francs prévus.

En outre, la ressource attendue pour 2000, de l'ordre de 650 millions de francs, apparaît largement surestimée étant donné l'effondrement des ventes de détail des viandes de boeuf à partir du mois de novembre. Le produit global recouvré en 2000 devrait en effet baisser en raison de la réduction de la consommation de viandes et du fait que certains produits de substitution à la viande, comme le poisson ou les dérivés du lait, ne sont pas assujettis à la taxe.

C. L'AFFECTATION DE LA TAXE D'ÉQUARRISSAGE À UN FONDS GÉRÉ PAR LE CENTRE NATIONAL POUR L'AMÉNAGEMENT DES STRUCTURES DES EXPLOITATIONS AGRICOLES (CNASEA)

D'après les dispositions de l'article 1 B de la loi n° 96-1139 précitée, le produit de la taxe sur les achats de viande est affectée, à compter du 1 er janvier 1997, à un fonds ayant pour objet de financer la collecte et l'élimination des cadavres d'animaux et des saisies d'abattoirs reconnus impropres à la consommation humaine et animale et géré par le CNASEA. Ce fonds fait l'objet d'une comptabilité distincte.

En outre, l'article 65 de la loi n° 98-546 précitée, portant création d'une taxe additionnelle à la taxe d'équarrissage, dispose également que cette taxe est affectée à un fonds, différent du premier, ayant pour objet de financer l'élimination ou le retraitement des farines mammifères non conformes aux normes communautaires relatives à l'inactivation des agents de l'encéphalite spongiforme bovine (ESB) et notamment les dépenses induites d'achat, de transport, de stockage et de traitement. Ce fonds est géré par le CNASEA et fait l'objet d'une comptabilité distincte.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE GOUVERNEMENT

Le dispositif proposé par le gouvernement implique trois modifications du régime applicable à la taxe sur les achats de viande.

A. LE RELÈVEMENT DES TAUX PLAFONDS

Le b) du I du présent article vise à augmenter les taux plafonds prévus par l'article 302 bis ZD du CGI.

Il s'agit de porter de 0,6 % à 1,5 % le taux plafond de la première tranche de la taxe d'équarrissage, c'est-à-dire jusqu'à 125.000 francs, et de 1 % à 2,7 % le taux de la seconde tranche.

Ce relèvement pourrait en fait entraîner un triplement des taux actuels effectifs, respectivement de 0,5 % pour la première tranche et 0,9 % pour la deuxième tranche.

L'objectif affiché par le gouvernement est de couvrir les besoins annuels croissants du service public de l'équarrissage. Selon le gouvernement en effet, compte tenu des mesures de sécurité alimentaire décidées cette année, les besoins annuels du service public de l'équarrissage ont été réévalués de 670 millions de francs à 1,55 milliard de francs.

B. LE RELÈVEMENT DU SEUIL D'EXONÉRATION

Dans un souci de préservation des plus petites entreprises réalisant des ventes au détail de viandes et autres produits carnés et notamment des entreprises artisanales, le gouvernement propose de relever le seuil d'exonération de la taxe d'équarrissage fixé par l'article 302 bis ZD du CGI de 2,5 millions de francs à 5 millions de francs de chiffre d'affaires hors TVA.

Sur les 9.370 entreprises qui acquittent actuellement la taxe, 2.289 devraient cesser d'être assujetties en raison de ce relèvement du seuil d'exonération, soit une proportion de 24,5 %. En outre, actuellement, ce sont 28.000 entreprises, dont 18.081 bouchers et 9.183 charcutiers qui sont exonérés de la taxe sur les achats de viande en raison d'un montant de chiffre d'affaires hors TVA inférieur à 2,5 millions de francs.

Le coût en année pleine du relèvement du seuil d'exonération est estimé à 20 millions de francs, avant relèvement des taux.

C. LE VERSEMENT DU PRODUIT DE LA TAXE AU BUDGET GÉNÉRAL DE L'ETAT ET LA SUPPRESSION DE SON AFFECTATION AU FONDS GÉRÉ PAR LE CNASEA

Le paragraphe II du présent article vise à modifier l'article 1 B de la loi précitée n° 96-1139 du 26 décembre 1996 dans le but de supprimer à partir du 1 er janvier 2001 l'affectation à un fonds géré par le CNASEA du produit de la taxe sur les achats de viande.

Le produit de cette taxe serait dès lors affecté au budget général de l'Etat.

Le CNASEA devrait cependant conserver son rôle d'organisme payeur pour le service public d'équarrissage et les opérations d'élimination des déchets animaux, mais sur la base de dotations budgétaires provenant de l'Etat.

D. ENTRÉE EN VIGUEUR DU DISPOSITIF

Le présent article dispose que le nouveau régime applicable à la taxe sur les achats de viande entrera en vigueur à compter du 1 er janvier 2001.

III. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté un amendement présenté par le gouvernement tendant à relever davantage le niveau des taux plafonds de la taxe d'équarrissage et à élargir l'assiette de la taxe à tous les produits à base de viande.

Le relèvement supplémentaire des taux implique désormais que le taux plafond applicable à la première tranche (jusqu'à 125.000 francs) est de 2,1 % et le taux plafond applicable à la deuxième tranche (au-delà de 125.000 francs) est de 3,9 %.

En outre, la liste des produits concernés par cette taxe figurant à l'article 302 bis ZD du CGI est complétée par la mention « et autres produits à base de viande ». Il s'agit donc d'élargir l'assiette de la taxe sur les achats de viande à tous les produits à base de viande.

Cette modification a été justifiée par le gouvernement comme résultant de l'aggravation récente de la crise de la « vache folle » et de l'accroissement des besoins du service public de l'équarrissage qui s'élèverait désormais à 3,2 milliards de francs en raison notamment de l'interdiction totale de l'usage des farines carnées. Ce chiffre peut toutefois sembler encore largement sous-estimé compte tenu de l'ampleur de la crise et du coût des mesures à venir.

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Les surcoûts de fonctionnement du service public de l'équarrissage risquent d'accroître d'environ un milliard de francs les charges pesant sur les budgets publics. Il faudrait donc porter le produit de la taxe sur les achats de viandes de 650 millions de francs à 1,55 milliard de francs. Des estimations plus récentes font même état d'un besoin de financement de 3,2 milliards de francs.

Pour cela, le gouvernement a encore aggravé l'alourdissement de cette taxe prévu initialement par le présent article :

- en incluant les plats préparés dans son champ d'application,

- en portant à 3.9 % son taux maximum qui devait déjà être presque triplé, passant de 1 % à 2,7 %.

Lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2001, le Sénat avait adopté un amendement de nos collègues Francis Grignon, Philippe Arnaud et Denis Badré tendant à exonérer de la taxe les entreprises réalisant plus de 70 % de leurs chiffres d'affaires dans la vente de produits carnés ou de leurs dérivés (ce critère semble être plus pertinent que celui, actuellement retenu, du chiffre d'affaires de l'année ou du montant des achats mensuels).

La mise en oeuvre du dispositif prévu par le présent article soulèverait de sérieuses difficultés :

- l'augmentation des taux, par ses conséquences sur les prix de vente, risque d'accentuer l'effondrement de la consommation de viande ;

- par conséquent, le rendement de la mesure est très incertain d'autant que les seuils d'imposition et les plafonds d'exonération ont été relevés, ce qui tend à diminuer l'assiette ;

- le passage à un taux de 3,9 %, entraîne des risques de fraude susceptibles de mettre en cause la traçabilité des produits et donc la sécurité alimentaire ;

- on peut se demander s'il ne conviendrait pas d'inclure dans l'assiette de la taxe les achats, actuellement exemptés, des grandes chaînes de restaurants.

- des problèmes d'égalité devant les charges publiques risquent, en effet, de se poser car le surcoût de l'équarrissage, dans la rédaction actuelle, serait surtout supporté par le consommateur des grandes et moyennes surfaces ;

- l'eurocompatibilité de la taxe est, par ailleurs, douteuse : le fisc a déjà été condamné par le tribunal administratif de Dijon et une injonction adressée à la France par la Commission européenne, au motif que l'assiette serait discriminatoire envers les viandes en provenances d'autres Etats membres dont les producteurs ne bénéficient pas du service public français d'équarrissage ;

- enfin, alors que les règles de recouvrement de la taxe sont censées être les mêmes que celles de la TVA, elle est collectée et payée, non par le fournisseur mais par l'acheteur.

Différentes propositions ont été émises, visant notamment à diminuer les risques de fraude, en rendant obligatoire la mention du produit de la taxe sur la facture d'achat correspondante, ce qui éviterait aussi les possibilités de « ventes  à perte » (actuellement la taxe sur les achats de viande est perçue, comme la TVA, selon un système déclaratif. Elle est acquittée mensuellement ou trimestriellement).

De même il a été envisagé de faire payer la taxe en amont (et non plus au stade de la vente au détail), sous forme d'une taxe additionnelle à la redevance sanitaire d'abattage qui, elle aussi, est recouvrée selon les mêmes règles que la TVA. Tous les utilisateurs seraient ainsi immédiatement mis à contribution, y compris les industriels qui, actuellement, ne sont taxés que lors de la vente de leurs produits transformés à base de viande (conserves, plats cuisinés...).

A l'évidence la complexité des questions ici soulevées, et les implications notamment en termes de sécurité sanitaire justifient amplement une réflexion complémentaires de la part de votre commission.

Décision de la commission : votre commission vous propose de réserver sa position sur cet article.

ARTICLE 25 bis (nouveau)

Extension dans le temps de l'application du taux particulier de TVA sur les ventes d'animaux vivants de boucherie et de charcuterie à des personnes non assujetties à cette taxe

Commentaire : le présent article a pour objet de généraliser dans le temps l'application d'un taux particulier de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) à 2,1 % sur les ventes d'animaux vivants de boucherie et de charcuterie faites à des personnes non assujetties à cette taxe.

I. LE DROIT EXISTANT


La loi n° 85-1403 du 30 décembre 1985 portant loi de finances pour 1986 a instauré un taux particulier de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) de 2,10 % en ce qui concerne les ventes d'animaux vivants de boucherie et de charcuterie faites à des personnes non assujetties à cette taxe.

Ce taux s'applique depuis le 1 er juillet 1986 et la loi n° 96-1181 du 30 décembre 1996 portant loi de finances pour 1997 a étendu l'application de ce taux réduit de TVA au 31 décembre 2000.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Adopté à l'initiative de notre collègue député Bernard Charles, le présent article propose de supprimer la limitation dans le temps de l'application de ce taux particulier de TVA sur les ventes d'animaux vivants de boucherie et de charcuterie faites à des personnes non assujetties à cette taxe.

Ainsi, à compter du 1 er janvier 2001, la taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux de 2,10 % en ce qui concerne les ventes d'animaux de boucherie et de charcuterie précitées.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre commission est favorable à cet assouplissement de l'application du taux réduit de TVA à 2,1 % sur les ventes réalisées par les bouchers et charcutiers, taux qui trouverait désormais à s'appliquer sans limitation dans le temps.

Il s'agit d'une mesure fiscale bienvenue pour les boucheries et charcuteries aujourd'hui confrontées à de réelles difficultés économiques dans le contexte de la crise de la « vache folle ».

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 26

Aménagement de la taxe générale sur les activités polluantes

Commentaire : le présent article prévoit, à compter du 1 er janvier 2001, l'extension de l'assiette de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) aux consommations d'énergie des entreprises. Les ménages ainsi que les transports ne sont pas concernés par cette taxe. Des mécanismes d'atténuation de la taxe sont prévus pour préserver la compétitivité des entreprises les plus intensives en énergie. En outre, ces entreprises pourront prendre, à partir de 2002, des engagements de réduction de leur consommation d'énergie et de leurs émissions de dioxyde de carbone qui ouvriront droit à des atténuations supplémentaires.

Le présent article propose également quelques aménagements de la TGAP existante concernant notamment les grains minéraux.

I. LES MODIFICATIONS PRÉVISIBLES DU CLIMAT SON PRÉOCCUPANTES

Le phénomène de l'effet de serre constitue une menace environnementale de plus en plus préoccupante.
En termes scientifiques, ce phénomène traduit l'emprisonnement dans l'atmosphère du rayonnement solaire due à la concentration anormale dans l'atmosphère de certains gaz dits « à effet de serre » : l'énergie solaire, qui est ainsi emprisonnée et n'est donc pas renvoyée dans l'espace, contribue au réchauffement de la planète.

On reconnaît habituellement six gaz à effet de serre : le premier d'entre eux est le dioxyde de carbone (CO 2 ) dont la concentration dans l'atmosphère a augmenté de 30 % depuis 1750 (en raison principalement de l'utilisation des combustibles fossiles et de la déforestation qui réduit son captage par la biomasse) mais il ne faut pas oublier le méthane (CH 4 ), le protoxyde d'azote (N 2 O), et divers gaz contenant du fluor (SF 6 , HFC et PFC).

Le phénomène de l'effet de serre

(extrait du Livre Blanc du ministère de l'économie - juillet 1999)

« Les estimations des experts de l'IPCC (International Panel on Climate Change) réévaluées en 1995 font état pour le siècle à venir de possibilités de réchauffement de l'atmosphère comprises entre 1,5 et 4,5 degrés (1 à 3,5 degrés à la surface de la Terre). Les conséquences sur le climat des zones arides, sur le niveau des océans et sur les phénomènes climatiques violents (ouragans, etc.) seraient à terme extrêmement préjudiciables pour l'équilibre de la planète. Certains experts jugent l'effet de serre comme la principale menace environnementale à laquelle nous ayons à faire face aujourd'hui . (...) »

Pour la France , les prévisions en termes de températures et de précipitation sont à prendre au sérieux : des projections de Météo France 45( * ) indiquent que la température hivernale augmenterait de 1° à 2 ° et celle d'été et d'automne de plus de 2°. Les pluies augmenteraient en hiver et diminueraient en été.

A. LA MOBILISATION DE LA COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE

1. Les engagements internationaux


Au Sommet de Rio (1992), l'objectif d'une stabilisation des émissions de gaz à effet de serre sur 1990-2000 a été approuvé.

A la Conférence de Kyoto (1997), les pays développés ont souscrit un engagement ferme de réduction de leurs émissions entre 1990 et 2008-2012 et se sont répartit les efforts entre eux. Les pays de l'Union européenne se sont ainsi engagés à Kyoto sur une réduction de 8 %. Au sein de la « bulle européenne », l'objectif de la France est une stabilisation de ses émissions entre 1990 et 2008-2012.

2. Le projet de directive européenne

La taxation des consommations d'énergie s'inscrit dans le cadre de la discussion d'un projet de directive, au point mort depuis deux ans en raison de l'opposition farouche de certains Etats (et notamment l'Espagne, le Portugal et l'Irlande) sur un sujet de nature fiscale qui doit recueillir l'unanimité des Etats membres.

Ce projet de directive, dite « directive Monti », prévoit une extension du régime de taxation appliqué aux carburants à l'ensemble des produits énergétiques et l'électricité avec la fixation de niveaux minima de taxation pour ces produits énergétiques.

3. Les exemples étrangers

L'Allemagne, la Grande-Bretagne, les Pays-Bas et l'Italie ont instauré, sans attendre l'adoption de cette directive, des taxes sur les consommations d'énergie, selon des modalités très variables.

L'Allemagne a mis en place à compter du 1 er avril 1999 un dispositif de taxation de l'électricité, du gaz, des carburants et des fiouls (mais avec une exonération pour le charbon, les énergies renouvelables, l'électricité produite à partir de sources d'énergie renouvelables, la co-génération) pour financer une baisse des charges sociales. Des taux réduits sont prévus pour l'industrie manufacturière ainsi que des remboursements de taxe pour les entreprises pour lesquelles les taxes sur l'énergie excèdent de plus de 20 % l'économie induite par la baisse des charges sociales. Le produit attendu dans une première phase est de 30 milliards de francs. Le dispositif allemand a été accepté par la Commission pour une période allant du 1 er avril 1999 au 31 mars 2002, une nouvelle notification sera nécessaire après cette date.

Un accord bilatéral entre l'industrie et le gouvernement allemand a été signé le 16 octobre 2000 : l'industrie allemande s'y engage à faire des efforts particuliers pour réduire entre 1990 et 2005 les émissions de dioxyde de carbone et la consommation d'énergie de 20 % et entre 1990 et 2012 les émissions de gaz à effet de serre de 35 %. Ces accords sont indépendants de la taxe sur l'énergie.

Le Royaume-Uni devrait mettre en place à compter d'avril 2001, un dispositif de taxation des consommations d'énergie (électricité, charbon, gaz mais avec une exonération pour les carburants et les fiouls) de l'agriculture, de l'industrie et des secteurs tertiaires et publics, appelé « climate change levy ». Cette taxe serait prélevée au niveau des fournisseurs de produits énergétiques mais diverses exonérations seraient prévues (ménages, exportations, utilisation comme matière première, production d'énergie renouvelable, transports, etc.). Des engagements volontaires pourront être signés avec les pouvoirs publics et donner lieu à une réduction de 80 % du taux plein de la taxe. Ils porteront sur la période 2001-2013 avec des objectifs intermédiaires tous les deux ans. Le produit attendu est de 15 milliards de francs.

Les Pays-Bas ont instauré deux taxes : l'une est due sur les produits énergétiques au-delà d'une certaine quantité (avec des abattements pour les entreprises les plus consommatrices d'énergie) et l'autre est due sur les petites quantités d'énergie.

L'Italie a instauré un mécanisme de taxation des carburants, du gaz, du charbon et des fiouls pour financer des baisses de cotisations sociales. L'ensemble du mécanisme tend à une certaine neutralité fiscale pour les entreprises. Le produit attendu était de 8,5 milliards de francs en 1999 et 40 milliards de francs au terme de la réforme.

B. DES EFFORTS NÉCESSAIRES DE LA FRANCE

Dans le cadre du protocole de Kyoto, l'objectif défini pour la France est une simple stabilisation
mais étant donné l'impact insuffisant des développements technologiques et compte tenu de la croissance économique 46( * ) , cet objectif nécessite des efforts particuliers pour contrer la hausse « naturelle » des émissions 47( * ) .

Emissions de gaz à effet de serre en France 1990-2010

(millions de tonnes d'équivalent carbone)

1990

2010

CO 2 total

103,6

114,7

dont CO 2 industrie et énergie

43,1

41,5

dont CO 2 transports

31,4

39,3

dont CO 2 bâtiment

26,3

28,4

dont CO 2 autres

2,8

5,5

Méthane total

13,1

9,9

Protoxyde d'azote

13

7,7

Autres gaz

1,8

4,1

TOTAL

131,2

141,9

Source : Commissariat général au Plan

II. LE PROJET DU GOUVERNEMENT

A. UNE LONGUE PRÉPARATION ET DES ARBITRAGES HÂTIFS


Le gouvernement a annoncé le 20 mai 1999 sa décision d'élargir la TGAP à compter de 2001 aux consommations intermédiaires d'énergie. Un Livre Blanc a été diffusé en juillet 1999 pour consulter les acteurs économiques concernés qui ont rendu leurs conclusions en octobre 1999. Deux groupes de travail ont alors été constitués et ont rendu leurs conclusions en avril 2000.

Un arbitrage avait été initialement annoncé pour février 2000, mais aucune décision officielle n'est intervenue avant un communiqué de presse 48( * ) en date du 3 octobre 2000, qui s'éloigne fortement des conclusions rendues dans les deux rapports précités. Or, cet arbitrage officiel a été remis en cause dans les jours suivants 49( * ) . C'est finalement lors du conseil des ministres du 15 novembre 2000 , après d'ultimes modifications suite aux critiques émises par le Conseil d'Etat lors de son examen du projet de loi de finances rectificative pour 2001 50( * ) , qu'un dispositif a été présenté au Parlement.

Ces retards et revirements expliquent l'inscription de ce dispositif dans le projet de loi de finances rectificative pour 2000 , alors que sa place était dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 puisque cette nouvelle taxation est conçue comme un compartiment supplémentaire de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), affectée depuis le 1 er janvier 2000 au fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale (le FOREC, qui prévoit par anticipation 3,8 milliards de francs de recettes à ce titre).

L'objectif du gouvernement est de conduire les entreprises à adopter des comportements de production qui permettent de réduire les émissions de dioxyde de carbone et de maîtriser leurs consommations d'énergie, par l'instauration de ce nouveau compartiment de TGAP, dit « écotaxe ».

B. LES MÉCANISMES COMPLEXES DE L'ÉCOTAXE

1. Une taxe assise sur les consommations d'énergie des entreprises


a) Une assiette composée des principaux produits énergétiques (articles 266 sexies A et B du code général des douanes)

L'écotaxe s'applique à des produits énergétiques limitativement énumérés : l'électricité 51( * ) , le gaz naturel, le charbon (et les produits dérivés ou assimilé), le fioul domestique, les fiouls lourds, les gaz de pétrole liquéfiés livrés en vrac (GPL).

Ne sont donc pas dans le champ de la taxe les énergies renouvelables, ni les farines animales qui vont constituer dans les prochains mois une source importante d'énergie pour les cimenteries. Ces produits ne seront donc pas taxés.

Toutefois certains usages de ces produits sont mis hors champ de la taxation (article 266 sexies A II.) :

- lorsque le produit est utilisé comme matière première (par exemple : le charbon qui sert à fabriquer du coke) ; il s'agit en effet de taxer des consommations de produits seulement en tant qu'ils sont source d'énergie ;

- lorsque le produit est utilisé comme carburant de véhicule (ce qui permet l'exclusion de tout le secteur des transports ) ;

- lorsque le produit est utilisé pour le fonctionnement des installations et infrastructures ferroviaires, portuaires, aéroportuaires, fluviales ou lacustres (par exemple : la signalisation des pistes aéroportuaires ou des voies ferrées ; pour des raisons de sécurité) ;

- lorsque le produit est utilisé pour la production des produits suivants destinés à la revente : produits énergétiques, vapeur, eau chaude, froid (par exemple : les besoins de la production d'énergie d'EDF ; afin d'éviter une double taxation) ainsi que pour le chauffage des locaux d'habitation (afin de ne pas toucher directement les ménages et de ne pas créer de distorsion de concurrence entre le chauffage des locaux d'habitation individuelle et celui des locaux d'habitation collective qui bénéficie de l'exonération au titre de la production d'eau chaude) ;

- lorsque le produit est utilisé pour les besoins des installations de stockage et de transport des produits énergétiques (par exemple : oléoducs et gazoducs).

D'autres usages sont exonérés , quand ces produits énergétiques sont destinés à être utilisés par :

- des administrations de l'Etat et des collectivités locales (dans la mesure où cette exonération n'entraîne pas de distorsion de concurrence ; cette formulation est reprise des règles applicables en matière de TVA et de taxe sur les salaires),

- des établissements médicaux, sociaux, éducatifs, culturels et sportifs, de toute nature , 52( * )

- des redevables qui livrent ou revendent les produits en l'état (afin de ne pas taxer deux fois l'énergie et surtout de taxer le véritable consommateur de cette énergie ; ils ne sont exonérés que sur ces produits livrés ou revendus en l'état),

- des redevables qui produisent à partir des produits de l'électricité, du gaz ou du coke de houille destinés au moins pour partie à la revente (ils ne sont exonérés que sur la partie correspondant à cette revente),

- des redevables qui créent une activité (ils ne sont exonérés que sur les produits reçus jusqu'à la fin de la première année civile complète d'exercice, soit une durée d'un ou deux ans selon la date de création de l'activité) ; l'application des règles de calcul de la taxe qui fait référence à des périodes d'activité antérieures est en effet difficile à appliquer aux activités nouvellement créées ; toutefois, afin d'éviter des modifications de structures juridiques ayant pour objet ou pour effet d'échapper à la taxation, ne sont pas considérées comme création d'activités, les concentrations, restructurations, extensions d'activités préexistantes ou la reprise de telles activités.

Les conditions d'application de ces exonérations seront fixées par décret.

b) Les redevables : essentiellement des entreprises (articles 266 sexies C et 266 septies A)

Les redevables sont les personnes qui reçoivent les produits énumérés plus haut (article 266 sexies C) et le fait générateur intervient lors de la réception physique des produits 53( * ) (article 266 septies A).

Il peut donc, en théorie, s'agir aussi bien de personnes physiques que morales. En pratique, les particuliers et la quasi-totalité des exploitants agricoles sont exonérés par l'application de l'abattement de 100 tonnes équivalent pétrole (TEP) par an 54( * ) .

De fait, seules les personnes morales de droit privé sont redevables de la taxe. Ces entreprises soumises à la taxe seraient au nombre de 45.000.

c) L'assiette et les taux de la taxe (articles 266 octies A et nonies )

L'assiette de la taxe est constituée des quantités de produits reçus (mégawattheure, mégawattheure pouvoir calorifique supérieur 55( * ) , milliers de litres ou tonnes selon le produit considéré).

Les émissions de gaz à effet de serre étant difficilement mesurables il a été décidé d'asseoir la taxe sur les intrants énergétiques en fonction de leur contenu en carbone au taux de 260 francs par tonne de carbone. Du point de vue de l'efficacité économique, cette solution est satisfaisante en théorie : elle encourage en principe les effets de substitution au profit des énergies à faible intensité en dioxyde de carbone.

Toutefois, s'agissant de l'électricité, considérant que la production marginale d'électricité était produite par turbine à gaz, une taxation forfaitaire de l'électricité a été retenue, alignée sur la taxation du gaz naturel et sans aucun lien avec le contenu en carbone de cette source d'énergie (13 francs par mégawattheure). Il s'agit, dans l'esprit des auteurs de l'article, de contribuer par cette taxe non pas seulement à la réduction des émissions de gaz à effet de serre mais aussi à la maîtrise de l'énergie.

Emission de CO 2 par tonne de produit

Produits énergétiques

Emission de CO 2 par tonne

Charbon

1,08

Pétrole

0,83

Gaz naturel

0,65

Electricité

-

Source : d'après l'Observatoire de l'énergie

Les taux applicables, compte tenu des règles ainsi posées, sont les suivants.

Taux de l'écotaxe

 

Unité de perception

Quotité (en francs)

Electricité

mégawattheure

13

Gaz naturel

mégawattheure

13

Fioul domestique

1.000 litres

189

Fiouls lourds

tonne

234

Gaz de pétrole liquéfié

tonne

208

Charbon, produits dérivés et assimilés

tonne

174

Compte tenu du contenu en carbone de chaque produit, le coût fiscal de la tonne de carbone émise est de l'ordre de 260 francs .

Il convient de rappeler que la base de discussion avec les industriels, officialisée dans le Livre Blanc précité était de 150 à 200 francs la tonne de carbone et non pas 260 francs comme retenu dans le présent dispositif. Par ailleurs, le Premier ministre a annoncé que ce tarif augmenterait progressivement pour atteindre 500 francs en 2010 .

2. Des mécanismes d'atténuation multiples en fonction de l'intensité énergétique des entreprises

a) Une franchise en base réservée aux entreprises peu intensives en énergie (article 266 octies B)

Une franchise de taxe, égale à 100 tonnes équivalent pétrole (TEP) par an, est accordée aux redevables peu intensifs en énergie (définis comme consommant moins de 25 TEP par million de francs de valeur ajoutée). Les redevables qui dépasseraient ce seuil de 25 TEP par million de francs de valeur ajoutée sont exclus du bénéfice de la franchise en base.

Si le seuil de 100 TEP n'est franchi à aucun moment de l'année, la taxe n'est pas due. Concrètement cette franchise en base exonère les ménages 56( * ) qui consomment habituellement entre une et 10 (grand maximum) TEP par an. Elle exonère aussi la majorité des entreprises, en premier lieu les entreprises individuelles et d'une façon générale les exploitants agricoles. Seules environ 45.000 entreprises seront soumises effectivement à la taxe sur un total de 2,8 millions d'entreprises en France.

Si ce seuil de 100 TEP est franchi au cours de l'année, la taxe n'est due que lors du trimestre de franchissement et, conformément au mécanisme classique de la franchise, seulement sur la fraction de quantité de produits énergétiques supérieure à ce seuil.

Ce mécanisme d'atténuation de la taxe permet de maintenir, au-delà du seuil, une incitation marginale à réduire sa consommation d'énergie. Au-dessous du seuil, il n'existe plus aucune incitation à consommer moins : que l'on consomme 0 ou 99,9 TEP par an, la taxation demeure nulle.

La conversion des quantités des différents produits en TEP est réalisée par l'application de coefficients de correspondance qui seront fixés par un décret en Conseil d'Etat « selon les normes usuelles en la matière ». Ces coefficients sont communément admis, une seule question demeure toutefois sur celui de l'électricité. En effet, d'après les informations recueillies par votre rapporteur général, la norme « internationale » (0,222 TEP par mégawattheure) serait retenue au détriment de la norme « française » 57( * ) qui aurait été plus favorable puisque l'électricité produite en France a un contenu en carbone particulièrement bas par rapport aux autres pays en raison de la part importante de la production réalisée à partir de centrales nucléaires et hydrauliques (+ de 95 % du total).

Coefficients de conversion et coût fiscal d'une TEP

 

Unité

Tarif / Unité (en F)

TEP / Unité

Tarif / TEP (en F)

Electricité

mégawattheure

13

0,222

58,55

Gaz naturel

mégawattheure

13

0,077

168,83

Fioul domestique

1.000 litres

189

0,845

223,67

Fiouls lourds

tonne

234

0,952

245,79

GPL

tonne

208

1,095

189,25

Houille

tonne

174

0,619

281,09

Exemple : une entreprise atteint 120 TEP de consommation d'énergie au 30 juin 2001. Elle ne sera taxée que sur 120 - 100 = 20 TEP. Si elle consomme 1/3 de fioul lourd (soit 5 TEP) et 2/3 d'électricité (soit 10 TEP), elle devra s'acquitter d'une taxe ce trimestre là égale à (5 x 245,79) + (10 x 58,55) = 1.228,95 + 585,5 = 1.814,45 francs. Les trimestres suivants, le redevable s'acquittera de ce qu'il reçoit effectivement car il a déjà utilisé le bénéfice de sa franchise.

b) Les abattements pour les entreprises intensives en énergie (articles 266 nonies A et B)

Le Conseil des ministres du 13 décembre 1999 a acté le principe d'une préservation de la compétitivité des entreprises qui seraient les plus touchées par une taxation des consommations d'énergie car les plus intensives en énergie. Le dispositif prévoit donc un abattement spécifique pour les entreprises dont la consommation de produits énergétiques est supérieure à 25 TEP par million de francs de valeur ajoutée. Il convient toutefois de rappeler que ces entreprises ne bénéficieront pas de la franchise en base de 100 TEP.

Ces abattements concerneront environ 2.500 entreprises.

Consommation d'énergie par unité de richesse produite et par salarié
dans les différents secteurs industriels 58( * )

Secteurs industriels

TEP / MF de VA

TEP / salarié

Engrais et chimie minérale

385

188

Sidérurgie et première transformation de l'acier

363

151

Métaux non ferreux

dont production d'aluminium

300

1260

107

Cycle de l'uranium

277

415

Papier-carton

125

67

Carrières, ciment et matériaux de construction

103

41

Verre

110

39

Chimie organique et pharmacie

Limite des > 50 TEP / MF de valeur ajoutée

55

35

Caoutchouc et transformation du plastique

35

11

Fonderie, travail des métaux

29

6

Textile, cuir, habillement

Limite des > 25 TEP / MF de valeur ajoutée

25

6

Automobile, naval, aéronautique, ferroviaire

17

6

Source : Livre Blanc de juillet 1999

L'intensivité énergétique est calculée en fonction du rapport consommation annuelle de produits énergétiques (exprimée en TEP) / valeur ajoutée (exprimée en millions de francs).

Le numérateur de ce rapport est obtenu en ajoutant les quantités totales de produits passibles de la taxe, d'énergies renouvelables produites par le redevable lui-même 59( * ) , et de produits exonérés au titre de la création d'activités 60( * ) , consommées au cours de l'année civile précédant celle au titre de laquelle la taxe est due.

Le dénominateur de ce rapport est obtenu par la valeur ajoutée 61( * ) du dernier exercice de douze mois clos au cours de l'année précédant celle au titre de laquelle la taxe est due.

Calcul de l'abattement en fonction de l'intensité énergétique

Intensité énergétique (A) (en TEP/MF de VA)

Abattement (en %)

De 0 à 25

0

De 25 à 50

2 x (A - 25)

De 50 à 100

50 + 0,6 x (A - 50)

De 100 à 200

80 + 0,1 x (A - 100)

De 200 à 400

90 + 0,025 x (A - 200)

Plus de 400

95

Pour ces entreprises, la quantité de produits passible de l'impôt sera égale à la différence entre :

- la quantité de produits effectivement reçus le trimestre considéré

- et le quart de la quantité de produits reçus l'année précédant celle au titre de laquelle les redevables ont rempli pour la première fois la condition relative à l'intensité énergétique (>= 25 TEP/MF de VA) 62( * ) , abattu du pourcentage calculé ci-dessus.

Exemple : une entreprise consomme 50 TEP par million de francs de valeur ajoutée, elle a donc droit à un abattement de 50 %. En 2000, elle consomme 2.000 TEP soit 500 TEP par trimestre. Au premier trimestre 2001, elle consomme aussi 500 TEP. L'assiette des TEP taxables sera donc égale à 500 (au titre du premier trimestre de 2001) - 500 (base de référence 2000) x 0,5 (coefficient d'abattement) = 250 TEP taxables. Si au premier trimestre 2001 elle n'avait consommé que 450 TEP, l'assiette de TEP taxables aurait été de 200. Si au contraire, elle avait consommé 550 TEP, l'assiette de TEP taxables aurait été de 300.

Ce mécanisme d'atténuation de la taxe par abattement permet, en principe, de préserver un petit effet incitatif à la limitation des consommations d'énergie : cet effet sera décroissant avec le coefficient d'abattement.

Toutefois, il faut remarquer que des effets de seuils joueront dans ce dispositif : un redevable pourra voir sa taxe diminuer en augmentant son rapport d'intensité énergétique (en augmentant sa consommation d'énergie ou en ralentissant ses efforts d'économie d'énergie) pour atteindre un niveau d'abattement supérieur et réduire ainsi sa dette fiscale . Le rapporteur général de l'Assemblée nationale a également souligné ces effets pervers probables du dispositif.



c) Des « engagements » ouvrant droit à une réduction d'impôt supplémentaire et réservés aux entreprises très intensives en énergie à partir de 2002

(1) Des engagements réservés aux entreprises très intensives en énergie

Les entreprises dont la consommation énergétique annuelle est supérieure à 50 TEP par million de francs de valeur ajoutée pourront, à compter du 1 er janvier 2002, passer des accords avec l'administration s'engageant sur cinq ans à réduire leurs consommations de produits passibles de la taxe et leur contribution aux émissions de dioxyde de carbone par rapport à une situation de référence 63( * ) .

Environ un millier d'entreprises pourrait être concerné par ces engagements.

Cette situation de référence sera établie pour chaque année de l'engagement par un expert indépendant agréé par le ministre et rémunéré par le redevable. Cette situation devra tenir compte des prévisions de production du redevable et des ratios d'efficacité énergétique constatés dans le secteur d'activité considéré. Elle prévoira donc éventuellement une augmentation des quantités de produits énergétiques reçus et/ou des émissions de dioxyde de carbone. La situation de référence tiendra compte des réduction de consommation de produits énergétiques et d'émissions de dioxyde de carbone intervenues au cours de la période 1990-2000 et dont le contribuable peut apporter la preuve.

Sur la base de cette situation de référence, le redevable pourra ensuite contracter un engagement avec « le service ou l'organisme compétent ». Cet engagement portera sur les réductions de consommation de produits énergétiques (et d'émissions de dioxyde de carbone) par rapport à la situation de référence.

(2) Une réduction d'impôt supplémentaire à compter de 2002

En cas d'engagement conclu entre le redevable et l'administration, à partir de 2002, la taxe demeure calculée comme précédemment exposé avec l'application de l'abattement, mais elle fait en outre l'objet d'une réduction d'impôt égale à la différence entre les quantités de produits énergétiques définies dans la situation de référence et celles réellement reçues multipliée par 26 francs par mégawattheure pour l'électricité et 520 francs par tonne de carbone pour les autres produits énergétiques.

En cas de dénonciation 64( * ) de l'engagement par le redevable ou les services de l'administration compétents, le bénéfice de la réduction d'impôt est perdu et la taxe devient exigible dans les conditions de droit commun, comme pour toute autre entreprise qui n'aurait pas conclu d'engagement. Toutefois, à l'expiration de l'engagement ou après sa dénonciation, un nouvel engagement peut être contracté et ouvrir à nouveau le bénéfice de la réduction d'impôt.

3. Le recouvrement et le contrôle

S'agissant des règles générales, l'écotaxe sera déclarée, contrôlée et recouvrée selon les règles, garanties, privilèges et sanctions qui figurent dans le code des douanes, à l'article 266 duodecies modifié par le G du I du présent article.

a) Un recouvrement trimestriel sous forme déclarative (article 266 undecies A)

(1) Cas général (article 266 undecies A)

Le présent article prévoit un mécanisme de déclaration automatique et volontaire du redevable accompagnée du paiement . Il n'y aura donc pas émission de rôle.

Le redevable devra adresser à l'administration chargée du recouvrement (les services des douanes et des droits indirects) une déclaration tous les trimestres, soit quatre déclarations par an . Les dates-limites de remise des déclarations sont les suivantes : 5 mai pour le premier trimestre, 5 août pour le deuxième trimestre, 5 novembre pour le troisième trimestre et 5 décembre pour le dernier trimestre. Le contenu de cette déclaration sera fixé par décret.

La taxe qui accompagne cette dernière déclaration est égale à la moyenne de la taxe acquittée les trois trimestres précédents ; une régularisation est déposée en même temps que la déclaration du premier trimestre de l'année suivante ; le cas échéant, lorsque la régularisation est négative, le redevable peut imputer cet excédent sur la taxe qu'il devra acquitter les trimestres suivants jusqu'à épuisement de cet excédent.

(2) Cas particulier des redevables soumis à la franchise (articles 266 undecies A et 266 undecies B)

Chaque année, la taxe n'est due que lors du trimestre de franchissement du seuil de la franchise : le redevable doit alors remplir une déclaration ainsi que les trimestre suivants de la même année. Si le redevable dépasse la franchise au titre de son quatrième trimestre après la date-limite de dépôt des déclarations (soit après le 5 décembre), il doit remplir une déclaration de régularisation à déposer avant le 5 mai de l'année suivante accompagnée du paiement.

(3) Cas particulier des redevables ayant contracté un engagement (article 266 undecies C)

Les redevables ayant contracté un engagement s'acquitteront annuellement de leur dette fiscale, au plus tard le 5 mai de l'année civile suivant celle au titre de laquelle la taxe est due (pour la première fois le 5 mai 2003). Le contenu de cette déclaration sera fixé par décret.

b) De nombreuses dispositions relatives au contrôle

(1) Le contrôle

Des dispositions prévoient le contrôle des engagements par les services ou organismes qui sont chargés de ces engagements (notamment le II de l'article 266 nonies C). En particulier, les redevables concernés doivent adresser à ces services ou organismes une déclaration annuelle de suivi de leurs engagements (au plus tard le 5 mai de l'année suivante) selon le premier alinéa de l'article 266 undecies C.

(2) Coopération entre contrôleurs

Il est également prévu dans le présent article que l'administration chargée de contrôler les engagements doivent apporter son soutien aux services des douanes. En particulier, il est prévu la transmission de la liste des redevables ayant pris un engagement, de tous les éléments recueillis lors des contrôles (et relatifs à l'assiette et au montant de la taxe due) ainsi que des modifications des engagements ayant une incidence sur le montant de la taxe exigible (article 266 duodecies A).

Les agents de la Direction générale des douanes et des droits indirects (chargée du recouvrement) pourront aussi demander l'assistance des agents des Directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement (DRIRE) pour contrôler les quantités de produits énergétiques reçus par un redevable. Ce contrôle ne pourra avoir pour effet de faire obstacle à d'autres contrôles diligentés par les agents des douanes.

Les procès-verbaux de constatation établis par les agents des DRIRE ou ceux des douanes pourront être transmis à l'une ou l'autre administration, spontanément ou sur demande expresse (article 266 duodecies B).

L'administration des impôts transmettra à l'administration chargée des engagements sur demande écrite le montant de la valeur ajoutée (paragraphe II de l'article qui modifie le livre des procédures fiscales).

C. L'AFFECTATION AU FINANCEMENT DES 35 HEURES

L'écotaxe constitue l'un des compartiments de la taxe générale des activités polluantes (TGAP) définie aux articles 266 sexies à 266 terdecies du code des douanes.

La TGAP a été créée par l'article 45 de la loi de finances pour 1999 65( * ) pour regrouper cinq taxes parafiscales et fiscales 66( * ) affectées à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME). Son produit était initialement affecté au budget général de l'Etat.

Les articles 5 et 7 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 67( * ) l'ont étendue à de nouveaux produits 68( * ) et ont prévu qu'à compter du 1 er janvier 2000, son produit serait intégralement versé au fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale (FOREC).

Le présent compartiment de TGAP devrait rapporter en 2001 3,8 milliards de francs, 6 à 7 milliards de francs en 2002 « en régime de croisière ».

Il est donc prévu, compte tenu du produit de 3,8 milliards de francs initialement estimé pour l'écotaxe, la TGAP permettra en 2001 d'apporter 6,64 milliards de francs au profit du FOREC, soit près de 8 % du financement de la politique des 35 heures pour 2001.



Montants recouvrés de la TGAP (1999-2001)

(en millions de francs)

Assiette

1999

2000*

2001*

Déchets ménagers et assimilés

1.310

1.480

1.400

Déchets industriels spéciaux

118

160

160

Bruit

66

80

80

Air

185

190

220

Huile

129

160

160

Sous-total n° 1

1.808

2.070

2.020

Installations classées

-

130

130

Phosphates

-

450

450

Phytosanitaires

-

100

150

Granulats

-

90

90

Sous-total n° 2

-

770

820

Consommations d'énergie

-

-

3.800

Total général

1.808

2.840

6.640

* prévisions

D. DES MODIFICATIONS DE LA TGAP ACTUELLE


Le présent article propose également quelques modifications de la TGAP actuelle, sans lien avec la problématique de l'écotaxe.

1. L'élargissement de la TGAP sur les grains minéraux

Le A. du III du présent article propose d'étendre la TGAP sur les grains minéraux 69( * ) à l'ensemble des matériaux d'extraction de toutes origines. La rédaction actuelle du 6 du I de l'article 266 sexies du code des douanes prévoit en effet que seuls les « grains minéraux naturels d'un diamètre maximal de 125 millimètres (...) » constituent l'assiette de ce compartiment de la TGAP. La modification proposée consisterait à viser de façon plus globale les « matériaux d'extraction de toutes origines se présentant naturellement sous la forme de gains, ou obtenus à partir de roches concassées ou fractionnées dont la plus grande dimension est inférieure ou égale à 125 millimètres et dont les caractéristiques et usages sont fixés par décret ». Elle engloberait donc, par exemple, les producteurs de granulats obtenus par concassage.

Une seconde modification de ce 6 du I de l'article 266 sexies consiste à faire entrer dans le champ de la taxe les producteurs ou importateurs de granulats qui les utilisent pour leurs besoins propres (par exemple : un entrepreneur de travaux publics qui extrait lui-même des matériaux d'une carrière pour la construction d'une route à proximité).

Ces modifications résulteraient d'une demande des professionnels afin d'égaliser les conditions de la concurrence fiscale dans le secteur des granulats.

Les modifications proposées au B du III (pour le 6 de l'article 266 septies du code des douanes) ainsi qu'au C du III (pour le 4 du II de l'article 266 sexies , au 6 de l'article 266 octies , au tableau du 1 de l'article 266 nonies et au 3 de l'article 66 decies ) sont des dispositions de conséquence des modifications précédentes.

2. L'acquisition ou l'importation en suspension de la TGAP de certains produits taxables

Au 2 du D du III du présent article, le gouvernement propose de mettre en place un mécanisme d'acquisition ou d'importation des produits polluants normalement soumis à la TGAP (il s'agit en particulier des lubrifiants susceptibles de produire des huiles usagées, des préparations pour lessives, des matériaux d'extraction et des produits phytosanitaires), en suspension de TGAP 70( * ) , au profit des personnes qui les destinent à l'exportation ou à l'expédition vers un autre Etat membre de la Communauté européenne.

Il existe actuellement aux 1 et 3 de l'article 266 decies du code des douanes un mécanisme de remboursement de la TGAP acquittée sur ces produits. Ce mécanisme avait été mis en place afin d'éviter une éventuelle double taxation et de préserver la compétitivité des exportations françaises. Ce mécanisme initialement prévu (et qui demeure) est plus complexe à mettre en oeuvre que le nouveau dispositif proposé.

Plusieurs gardes-fous sont prévus afin de limiter les risques de fraude fiscale.

Cette suspension de TGAP ne peut se faire que dans la limite du montant de la taxe dont le redevable aurait dû s'acquitter si les livraisons de produits en principe soumis à la TGAP et exportés ou expédiés dans un autre Etat de la Communauté européenne l'année précédente avaient été effectivement soumises à la taxe (aux taux de l'année concernée).

Les redevables qui souhaitent bénéficier de ce mécanisme devront produire une attestation certifiant que les produits sont destinés à faire l'objet (en l'état ou après transformation) d'une livraison à l'exportation ou vers un autre Etat membre de la Communauté européenne. Cette attestation, qui devra être visée par les services de la douane, sera remise soit au fournisseur en cas d'acquisition sur le territoire national, soit au service de la douane compétent en cas d'importation ou d'acquisition intracommunautaire.

Si les produits ne recevaient pas la destination qui avait motivé la suspension de TGAP, la TGAP serait due (et le redevable en prend l'engagement dans son attestation).

Le 1 du D du III propose une modification de précision rédactionnelle.

Enfin, le E du III du présent article propose, pour l'application de la TGAP (hors écotaxe), de considérer les échanges entre la France métropolitaine et chacun des départements d'outre-mer comme des opérations d'importation ou d'exportation. Il en serait de même pour les échanges réalisés entre ces départements sauf entre la Guadeloupe et la Martinique.

3. L'obligation d'acquitter la TGAP par virement dès lors que la dette fiscale est supérieure à 50.000 francs

Le IV du présent article prévoit que « le paiement de la taxe doit être fait par virement directement opéré sur le compte du Trésor ouvert dans les écritures de la Banque de France, lorsque son montant excède 50.000 francs ». Si le redevable ne respecte pas cette obligation en s'acquittant de tout ou partie de sa dette par un autre moyen de paiement (espèces, chèque, etc.), il se verra appliquer une majoration de 0,2 % du montant des sommes qui n'auront pas été acquittées par virement.

Ce dispositif s'inspire des règles applicables en matière de TVA :

- l'article 1695 ter du code général des impôts prévoit une même obligation de virement lorsque le chiffre d'affaires réalisé au titre de l'année civile précédente est supérieur à 5 millions de francs hors taxe pour les paiements effectués à compter du 1 er janvier 2000 ; il est également prévu à l'article 1695 quater une obligation de téléréglement à compter du 1 er mai 2001 pour les entreprises dont le chiffre d'affaires réalisé au titre de l'exercice précédent est supérieur à 100 millions de francs hors taxes ;

- l'article 1788 quinquies du même code prévoit que le non-respect de ces obligations entraîne l'application d'une majoration de 0,2 % du montant des sommes dont le versement a été effectué selon un autre mode de paiement.

E. UNE ENTRÉE EN VIGUEUR AU 1 ER JANVIER 2001

Enfin, le V du présent article prévoit l'entrée en vigueur de l'ensemble des dispositifs proposés par les paragraphes précédents (écotaxe mais aussi modifications des compartiments déjà existants de la TGAP) au 1 er janvier 2001.

III. LES MODIFICATIONS PROPOSÉES À L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Lors d'une première réunion et sur proposition du rapporteur général du budget, la commission des finances de l'Assemblée nationale a rejeté le présent article. Au cours d'une seconde réunion, la commission des finances a proposé une série d'amendements qui aboutissent à alléger le poids de l'écotaxe pour l'ensemble des entreprises et en particulier pour celles qui sont les plus intensives en énergie. Ces amendements ont ensuite été votés par l'Assemblée nationale.

1 . La généralisation de la franchise en base de 100 TEP et la mise en place d'un mécanisme favorable aux coopératives agricoles

L'Assemblée nationale, suivant sa commission des finances, a souhaité étendre la franchise en base de 100 TEP à tous les redevables et donc également aux entreprises considérées comme intensives en énergie (>= 25 TEP par million de francs de valeur ajoutée) qui en étaient écartées dans le dispositif gouvernemental.

L'Assemblée nationale a également mis en place un dispositif favorable aux coopératives agricoles : un associé coopérateur pourra transférer à sa coopérative une fraction de sa franchise en base de 100 TEP 71( * ) par an dans la double limite :

- de la quantité de produits énergétiques consommés par la coopérative au profit exclusif de cet associé ;

- et de la part de la franchise « non consommée » par l'associé.

2. L'abaissement des seuils d'accès aux abattement et à la possibilité de contracter des engagements

L'Assemblée nationale, suivant sa commission des finances, a souhaité abaisser à 20 TEP par million de francs de valeur ajoutée (en les confondant) deux seuils existant dans le dispositif gouvernemental :

- le seuil d'intensité énergétique au-delà duquel les entreprises peuvent bénéficier des abattements (actuellement 25 TEP par million de francs de valeur ajoutée) ;

- et celui au-delà duquel elles sont autorisées à contracter un engagement avec l'administration en vue d'obtenir une réduction d'impôt (actuellement 50 TEP par million de francs de valeur ajoutée) 72( * ) .

Le rapporteur général de l'Assemblée nationale estime en effet que les redevables dont l'intensité énergétique de la richesse produite est comprise entre 25 et 50 TEP par million de francs de valeur ajoutée sont lésés par le dispositif gouvernemental : « En effet, ces redevables ne bénéficient pas de la franchise en base de 100 TEP, ne sont pas autorisés à contracter un engagement de réduction des émissions de dioxyde de carbone au regard d'une situation de référence personnalisée, sont en conséquence taxés selon le mode de calcul de la dette fiscale la plus sévère et, de surcroît, bénéficient des coefficients d'abattement les plus faibles (...) ».

Par ailleurs, le coefficient d'abattement supérieur (valable désormais pour les entreprises qui consomment entre 20 et 50 TEP par million de francs de valeur ajoutée) est légèrement abaissé : la formule devient 1/ 60 * (A - 20).

3. Le choix d'une base de référence plus favorable pour le calcul de la taxe due par les entreprises à l'intensité énergétique élevée

L'Assemblée nationale, sur proposition de sa commission des finances, prévoit que pourront être pris en compte, pour le calcul de l'assiette de la taxe des entreprises bénéficiant des abattements mais n'ayant pas conclu d'engagement,

- en 2001, soit (au choix du redevable) la moyenne annuelle des quantités de produits énergétiques reçus au cours des années 1998-200, soit les quantités de 2000 multipliées par le coefficient d'abattement,

- en 2002 et les années ultérieures, soit (toujours au choix du redevable) la moyenne annuelle des quantités de produits énergétiques reçus au titre des trois années précédant celle pour laquelle le redevable a dépassé les 25 TEP par million de francs de valeur ajoutée, soit les quantités de l'année précédant celle pour laquelle le redevable a dépassé les 25 TEP par million de francs de valeur ajoutée multipliées par le coefficient d'abattement.

Il s'agit donc d'offrir au redevable le choix de la référence qui lui est la plus favorable et de lui permettre de bénéficier des efforts qu'il aurait réalisés dans les trois années précédentes.

4. Une plus grande attractivité des engagements

Dans le dispositif gouvernemental, une entreprise qui contracte un engagement bénéficie d'une réduction de taxe égale à la différence entre le réalisé et la situation de référence majorée d'un facteur 2 par rapport au taux de la taxe (à titre d'exemple, le taux de la taxe pour l'électricité était de 13 francs par mégawattheure, le taux de la réduction d'impôt était de 26 francs par mégawattheure).

L'Assemblée nationale a revalorisé ce facteur et instauré une réduction de taxe supplémentaire.

a) Des réductions d'impôt d'ampleur plus importante

Dans la proposition de l'Assemblée nationale, le facteur de réduction de taxe passerait de 2 à 2,5. La réduction de la taxe sera donc calculée sur la base de 650 francs par tonne de carbone évitée (et non 520 francs comme le prévoyait le dispositif initial) alors que la taxe est de 260 francs par tonne de carbone émise. Les taux applicables à l'électricité seraient de 33 francs par mégawattheure (contre 26 francs dans le schéma initial, à comparer avec un taux de la taxe à 13 francs).

b) La prise en compte des efforts déjà réalisés

Considérant que le dispositif proposé par le gouvernement constituait une « prime au profit des entreprises qui feront des efforts de réduction de consommation de produits énergétiques uniquement à l'avenir », la commission des finances a proposé à l'Assemblée nationale de modifier le dispositif pour prendre en compte des efforts déjà réalisés par les entreprises.

C'est pourquoi, l'Assemblée nationale a instauré une seconde réduction d'impôt au bénéfice des entreprises qui auront contracté un engagement sur la période 2002-2006. Cette réduction serait égale, pour chacune des années de l'engagement, à un cinquième des réductions de consommation de produits énergétiques réalisées par le redevable (et dont il pourra apporter la preuve) au cours de la période 1992-2001 multiplié par les taux de réduction définis plus haut (33 francs pour l'électricité et 650 francs pour les autres produits énergétiques).

5. Le plafonnement de la taxe à 0,3 % de la valeur ajoutée en 2001

Suite à l'adoption par l'Assemblée nationale d'un amendement de sa commission des finances (proposant un plafonnement de la taxe à 0,5 % de la valeur ajoutée) et d'un sous-amendement de notre collègue député Augustin Bonrepaux (abaissant le taux de ce plafonnement), le montant de la taxe est plafonné dans chaque entreprise à 0,3 % de la valeur ajoutée en 2001 .

Pour 2002 et les années suivantes, aucune mesure de plafonnement n'est prévue .

Cette mesure est donc conçue comme un dispositif transitoire permettant une entrée dans le dispositif « en douceur ». Selon les estimations du rapporteur général de l'Assemblée nationale données en séance publique, le coût de ce mécanisme serait de 200 millions de francs.

L'inconvénient de ce mécanisme est qu' il supprime toute incitation à moins polluer ou moins consommer au-delà du seuil fixé. D'un strict point de vue environnemental il ne s'agit donc pas d'une solution optimale car elle annule toute incitation à réduire ses consommations d'énergie ou ses émissions de dioxyde de carbone au-delà de ce seuil.

6. Une déclaration annuelle

Sa commission des finances ayant constaté qu'un grand nombre de déclarations et d'échéances pesaient sur les entreprises de moins de 25 TEP par million de francs de valeur ajoutée, l'Assemblée nationale a décidé d'aligner ce régime sur celui des redevables ayant pris un engagement dont l'échéance de paiement est annuelle . Toutefois, afin de garantir l'encaissement du produit de la taxe au cours de l'année au titre de laquelle elle est due, l'Assemblée nationale a proposé de mettre en oeuvre un système de paiement par acomptes avec une régularisation au regard d'une déclaration annuelle unique.

Pour l'année 2001, il est prévu que les redevables s'acquitteront de leur dette fiscale en un seul paiement avant le 15 novembre 2001 au titre des dix premiers mois de l'année et paieront le reliquat (deux mois) avec la déclaration déposée en 2002.

Pour l'année 2002 et les années suivantes, le redevable s'acquittera spontanément de sa dette fiscale en trois acomptes égaux au tiers du montant de la taxe exigible au titre de l'année précédente 73( * ) et qui feront l'objet de paiement au plus tard les 10 avril, 10 juillet et 10 octobre. Les redevables qui ont souscrit un engagement pourront, sous leur responsabilité, réduire le montant de leurs acomptes afin de tenir compte de l'exécution de leur engagement. Toutefois, si l'écart avec la taxe due est supérieur à 10 %, une majoration de 10 % est encourue sur la différence. Enfin, l'écart entre la taxe due et les acomptes versés fait l'objet d' une régularisation versée en même temps que le premier acompte exigible au titre de l'année en cours.

L'Assemblée nationale a également modifié le texte à plusieurs reprises pour substituer à la formule « produits énergétiques passibles de la taxe » la formule plus claire de « produits effectivement soumis à la taxe » (qui permet d'exclure les produits exonérés ou hors champ de la taxation alors que la formule précédente laissait penser que les produits exonérés étaient compris dans cet ensemble des produits passibles de la taxe, c'est à dire potentiellement taxables).

L'Assemblée nationale a également voté, sur proposition de sa commission des finances, l'instauration d'un seuil de perception, de remboursement ou de remise de la TGAP (toutes assiettes confondues) fixé à 400 francs.

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

D'une façon générale, votre commission estime que le vote d'une telle taxe dans un projet de loi de finances rectificative , traditionnellement examiné rapidement par les deux assemblées en raison de la brièveté des délais accordés par le gouvernement, n'est pas satisfaisant.

Un débat plus ouvert aurait été souhaitable , dans le cadre d'un projet de loi spécifique, permettant notamment que plusieurs commissions parlementaires expriment leur avis, des cycles d'auditions plus étoffés, ou, à tout le moins, dans le cadre d'un débat au Parlement sur la politique énergétique de la France. Les implications de l'instauration de cette taxe sur la politique énergétique de la France (avec notamment la taxation de l'électricité nucléaire et hydraulique au même taux que le gaz naturel) nécessitent plus qu'un débat en collectif budgétaire de fin d'année.

Par ailleurs, et d'une façon générale, votre commission ne peut que soulever l'extrême complexité du dispositif proposé, que son passage à l'Assemblée nationale n'a pas contribué à simplifier.

A. UNE TAXE DANGEREUSE AU PLAN ÉCONOMIQUE

1. Des risques de délocalisation


L'application de l'écotaxe à certaines industries grosses consommatrices d'énergie 74( * ) pose des problèmes de compétitivité engendrant des risques de délocalisation en raison de la concurrence internationale constatée dans certains secteurs, qui dépasse le cadre de l'Union européenne. Ces industries pourraient être incitées à délocaliser leurs activités dans des pays où les dispositifs de lutte contre l'effet de serre seraient moins pénalisants. Il convient par ailleurs de prendre en compte les mécanismes adoptés chez nos voisins en tant que contraintes concurrentielles : en Hollande et en Allemagne, la taxation ne s'applique qu'à environ 20 % du total des consommations énergétiques des entreprises. Le dispositif français sera d'une façon générale plus défavorable aux entreprises que ceux mise en place dans les autres pays de l'Union européenne. En outre, il convient de comparer l'environnement fiscal global des entreprises dans un pays et dans l'autre : les entreprises françaises apparaissent plus pénalisées que leurs principales concurrentes européennes.

Des décisions de délocalisation ou de non-implantation d'unités industrielles en France conduiront à une perte d'activité et d'emploi.

Dans ces conditions, où serait le bénéfice pour l'emploi que recherche le gouvernement dans son hypothétique « second dividende » ?

Il convient de préciser, suite au communiqué de presse du 3 octobre 2000 précité qui indiquait que l'écotaxe constituerait une « charge déductible », que l'écotaxe constituera bien, comme tout impôt une, charge comptablement déductible mais elle ne sera en aucun cas une charge fiscalement déductible.

2. Des coûts de gestion disproportionnés tant pour les entreprises que pour les administrations

Les coûts induits de gestion de cette taxe pour les entreprises seront très importants
avec les déclarations à remplir, les comptabilités précises à tenir mais aussi les experts à rémunérer pour établir les fameuses situations de référence. Des estimations réalisées par les entreprises elles-mêmes indiquent que le coût de gestion annuel de la taxe par les entreprises pourrait s'élever à un montant compris entre 0,4 et 2 millions de francs.

Les coûts de gestion pour l'administration seront également très élevés. Le refus d'un mécanisme d'accise (qui aurait été le système le plus simple avec notamment une taxation lors de la mise à la consommation), l'instauration d'un mécanisme déclaratif (qui suppose gestion et contrôle des déclarations) et l'instauration de divers plafonnements (notamment le plafonnement en fonction de la valeur ajoutée qui, en raison du paiement préalable par les redevables nécessitera une gestion complexe des remboursements) conduiront à alourdir ces coûts de perception pour l'administration.

Enfin, les engagements n'étant pas prévus au niveau du groupe mais à celui des entreprises, l'administration chargée du contrôle de ceux-ci sera vraisemblablement débordée : plus de mille engagements devront être conclus en 2001 ... Quelle administration sera chargée de cette lourde gestion ? S'agira-t-il des agents des DRIRE, des agents des délégations régionales de l'ADEME ? En tout état de cause, le manque de moyens humains pour réaliser cette tâche en une année aboutira à d'importants retards dont les entreprises seront certainement les premières à pâtir.

Le Livre Blanc du gouvernement de juillet 1999 soulignait lui-même ce risque en écartant l'éventualité d'une perception de la taxe au niveau des consommateurs : « dans ce cas, les obligations des entreprises, les procédures de contrôle et de recouvrement seraient inutilement compliquées ». C'est pourtant ce qu'a choisi le gouvernement : la complication inutile ...

En outre, votre rapporteur général ne peut que relever « le soin » apporté par le gouvernement aux questions d'échanges d'information entre différents corps d'agents de l'Etat. Le gouvernement demande au Parlement d'entrer dans des détails d'organisation administrative sur lesquels ce dernier ne devrait pas avoir besoin de se pencher, si l'appareil d'Etat fonctionnait harmonieusement.

3. Une finalité purement budgétaire (les 35 heures) que votre commission refuse

Votre commission maintient sa position traditionnelle de refus de l'affectation de la fiscalité environnementale au FOREC 75( * ) .


Elle souligne les deux limites de la théorie du « double dividende » avancée par le gouvernement pour justifier cette affectation :

1- si elle est efficace, la taxe doit avoir un produit décroissant : il est donc absurde d'affecter à des dépenses pérennes, voire croissantes (85 milliards de francs en 2001 et 110 milliards de francs à terme) une recette dont l'objectif est d'atteindre un produit nul ;

2- le second risque consiste à fixer le taux et l'assiette de la taxe en fonction des recettes nécessaires et non en fonction de l'objectif de dépollution .

L'affectation à des dépenses pérennes considérables de la TGAP transforme sa nature : l'objectif de protection de l'environnement passe au second plan, le rendement fiscal devient prioritaire .

C'est du reste la même analyse qu'a récemment faite le Conseil économique et social dans un projet d'avis sur le suivi de l'effet de serre, à propos de l'extension projetée de la TGAP. Comme l'a indiqué M. Jean Gonnard, rapporteur, « la taxation des entreprises est justifiée dès lors qu'elle sert à l'effort de réduction des émissions de gaz polluants, sinon, il s'agit d'un impôt, un simple droit à polluer acheté par les entreprises sans retour pour la collectivité ». Il ajoute « la lutte contre l'effet de serre et la recherche du plein emploi sont deux problèmes distincts qui doivent être traités de façon indépendante ».

B. UNE TAXE INCERTAINE AU PLAN ÉCOLOGIQUE

1. Des exonérations par secteur qui font perdre à la taxe plus de 60 % de son assiette initiale


Plusieurs secteurs sont exonérés de l'écotaxe alors que leur contribution aux réductions de gaz à effet de serre et à la maîtrise de l'énergie est loin d'être négligeables. En particulier, il faut rappeler que le secteur des transports, principal responsable des émissions de dioxyde de carbone, est exonéré de l'écotaxe. Les ménages mais aussi l'administration sont également exonérés de taxe. Le Livre Blanc du gouvernement indiquait pourtant que « s'agissant des consommations des organismes publics et des administrations, il apparaît peu de raisons de ne pas utiliser la taxation comme moyen d'inciter aux réductions d'émissions de gaz à effet de serre » ...

Analyse par secteur

Secteur

Part des GES émis

Part de la consommation d'énergie

Part dans la TGAP

Transports

39 %

25 %

0 %

Ménages

16 %

31 %

0 %

Agriculture

2 %

3 %

négligeable

Tertiaire

11 %

15 %

32 %

Industrie

31 %

28 %

68 %

Source : ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement et Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

Croissance des émissions de CO 2 et N 2 O par secteur sur 1990-2010 en l'absence de mesures nouvelles

Secteur

Croissance en MtC

Energie

+ 3

Industrie

- 6

Transports

+ 10

Bâtiment

+ 2

Agriculture

0

Gaz frigorigènes

+ 4

Déchets

+ 1

2. Des risques d'effets pervers

La décision d'une entreprise de se délocaliser ou de ne pas implanter une unité en France mais dans un autre pays serait néfaste sur le plan économique pour notre pays, notamment en termes d'emplois et d'activité. Mais elle serait aussi absurde d'un point de vue environnemental : le phénomène de l'effet de serre est mondial et la décision d'une entreprise qui se délocalise pour s'implanter dans un pays moins exigeant peut aboutir à augmenter les émissions de gaz à effet de serre au plan mondial. Le bilan pour la lutte mondiale contre l'effet de serre est alors négatif.

Il faut également souligner les risques d'effets pervers du dispositif liés aux effets de seuil existant dans le mécanisme des abattements : un redevable peut être amené à augmenter sa consommation de produits énergétiques ou à ralentir ses efforts d'économies d'énergie dans l'unique but de diminuer sa dette fiscale au titre de l'écotaxe en passant d'une tranche d'abattement à une autre, plus favorable mais qui nécessite une consommation d'énergie supérieure ...

L'écotaxe pourra également induire des comportements d'optimisation des structures juridiques des entreprises puisqu'elle est calculée au niveau de la société : certaines entreprises auront intérêt à filialiser certaines de leurs activités pour réduire globalement leur dette fiscale, sans bénéfice pour l'environnement.

3. Un seul des six gaz à effet de serre est considéré

Certes, le dioxyde de carbone est le principal gaz à effet de serre. Mais le projet de taxation qui laisse de côté les cinq autres gaz à effet de serre, dont le coût de la tonne évitée est beaucoup plus important, n'est pas satisfaisant. Si l'on prend à titre d'exemple le secteur de la chimie, l'essentiel des efforts de réduction des émissions sur la dernière décennie a porté principalement sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre autres que le dioxyde de carbone. Il aurait donc été ecologiquement justifié de prendre également en compte, ne serait-ce que pour les engagements, les efforts réalisés par les entreprises sur les émissions de tous les gaz à effet de serre.

4. L'électricité est taxée sans rapport avec sa contribution au phénomène de l'effet de serre

Le gouvernement français a proposé dans un mémorandum adressé à ses partenaires européens 76( * ) que les taux de taxation applicables à l'électricité produite soient modulés en fonction des combustibles utilisés pour maintenir une incitation à l'optimisation des capacités de production du point de vue de l'effet de serre.

Dans le présent article, il propose tout le contraire puisque l'électricité sera taxée forfaitairement sur la base de la taxation du gaz naturel. Certes, l'objectif de maîtrise de l'énergie annoncé par le gouvernement peut justifier une taxation de cette énergie mais le choix retenu empêchera des phénomènes de substitution d'énergie à fort contenu en carbone vers l'électricité.

Le présent article n'encouragera donc pas la substitution d'une énergie polluante vers une énergie propre.

C. UNE TAXE VULNÉRABLE AU PLAN JURIDIQUE

1. Des arguments constitutionnels


a) Une rupture d'égalité devant l'impôt

Le Conseil constitutionnel veille au respect du principe d'égalité. Il n'interdit pas des mesures fiscales différenciées selon les redevables mais ces différences de traitement doivent être liées à des différences objectives (et rationnelles) de situation et motivées par l'intérêt général et en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit.

Si l'on considère, comme le gouvernement nous invite à le faire, l'objet du présent article comme étant la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre et la maîtrise de l'énergie, il ne semble pas rationnel, à titre d'exemple :

- que le secteur des transports, principale source d'émission de dioxyde de carbone, soit exonéré par la mise hors champ d'application de la taxe aux carburants ;

- que les entreprises les plus intensives en énergie (et souvent les plus fortement émettrices de dioxyde de carbone) soient mieux traitées que celles qui consomment moins d'énergie (grâce à un certain nombre d'atténuations : abattements, réductions d'impôt, plafonnement, etc.) ;

- que l'administration soit exonérée de tout effort.

Il n'a pas été démontré que ces différences de traitement sont justifiées par des objectifs d'intérêt général ou par des différences de situation pertinentes au regard de l'objet de la taxe (maîtrise de l'énergie et réduction des émissions de gaz à effet de serre).

La rupture d'égalité devant l'impôt, dans l'ensemble de cet article, est donc avérée.

b) Le Parlement se dessaisit de son pouvoir de fixer l'assiette de l'impôt au profit d'un expert indépendant

L'article 34 de la Constitution et la jurisprudence du Conseil constitutionnel prévoient que la loi fixe « l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures ». La TGAP relève de cette catégorie des impositions de toute nature.

Si le Conseil constitutionnel a admis que le Parlement pouvait, en matière de taux, ne fixer que des « fourchettes » et déléguer une partie de sa compétence au pouvoir réglementaire, il est interdit au Parlement de déléguer son pouvoir de fixation de l'assiette de l'impôt, a fortiori à un expert indépendant, rémunéré par les redevables . C'est en effet lui qui sera chargé d'établir la situation de référence à partir de laquelle l'imposition sera calculée.

c) La méconnaissance des champs respectifs des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale

De surcroît, cet article semble méconnaître le champ respectif des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale.

En effet, l'article LO. 111-3 du code de la sécurité sociale, issu de l'article 1 er de la loi n° 96-646 du 22 juillet 1996, dispose, dans son II, que « [...] seules des lois de financement peuvent modifier les dispositions prises en vertu des 1° à 5° du I ».

Or, le 2° du I de l'article LO. 111-3 précité dispose que, chaque année, la loi de financement de la sécurité sociale « prévoit, par catégorie, les recettes de l'ensemble des régimes obligatoires de base et des organismes créés pour concourir à leur financement », dont le FOREC fait partie.

L'adoption du présent article aura un impact certain sur la catégorie « impôts et taxes » des recettes prévues par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 puisqu'il en a révisé à la baisse le montant attendu.

Ainsi le gouvernement aurait-il dû inscrire les dispositions du présent article, non dans le présent projet de loi de finances rectificative, mais dans un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2000 qu'il a toujours refusé de prendre, en dépit des recommandations que lui a faites à maintes reprises notre commission des affaires sociales.

Ce faisant, il ne respecte manifestement pas les dispositions de l'article LO. 111-33 du code de la sécurité sociale qui ont valeur organique .

2. Des arguments communautaires

a) Les aides d'Etat

Toute dérogation à une norme est considérée par la Commission comme une aide d'Etat 77( * ) . Les exonérations et atténuations prévues dans ce dispositif pourront donc tomber sous le coup de cette réglementation.

b) Une taxe indirecte à finalité purement budgétaire

Compte tenu des besoins de financement du FOREC, la finalité budgétaire de cette taxe est prépondérante. Or, cette orientation est contraire à l'article 3 de la directive 92/12/CEE 78( * ) qui interdit aux Etats membres d'introduire ou de maintenir une imposition indirecte sur les huiles minérales ne poursuivant pas une finalité spécifique (et donc non-budgétaire).

c) Un projet en contradiction avec le futur cadre européen

Depuis 1997, un projet de directive est à l'étude. Il prévoit une extension aux autres énergies de l'accise actuellement appliquée au pétrole.

L'empilement hétérogène des dispositifs nationaux rend plus improbable encore l'adoption de la directive. La décision de la France, qui pourtant assure la présidence européenne, ne fait qu'aggraver cette confusion.

Quant aux autres modifications de la TGAP proposées, elles résultent pour l'essentiel, d'après les informations recueillies, de demandes des professionnels concernés et n'appellent pas a priori de remarques particulières.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 27

Suppression des droits de sceau perçus à l'occasion des naturalisations, des réintégrations et des libérations d'allégeance française

Commentaire : le présent article prévoit la suppression des droits de sceau perçus à l'occasion des naturalisations, des réintégrations et des libérations d'allégeance française.

I. LE DISPOSITIF EXISTANT


L'article 29 de la loi n ° 82-1126 du 29 décembre 1982 (loi de finances pour 1983) dispose :

« Seront perçus, d'après le tarif et dans la limite du plafond indiqué ci-dessous, sans préjudice des frais d'insertion au Journal Officiel, mais sans addition d'aucun droit d'enregistrement, les droits de sceau établis au profit du Trésor sur les actes suivants :

- Naturalisations 3.000 F

- Réintégration 1.500 F

- Libération 4.500 F
»

Entre-temps, le XV de l'article 5 de l'ordonnance n ° 2000-916 du 19 septembre 2000 portant adaptation de la valeur en euros de certains montants exprimés en francs dans les textes législatifs a remplacé les montants de 3.000 francs, 1.500 francs et 4.500 francs respectivement par les montants de 460 euros, 230 euros et 690 euros.

Selon les informations obtenues par votre rapporteur général, ces sommes correspondent à des plafonds et le ministre chargé du travail a le pouvoir d'accorder des remises sur ces droits qui sont en pratique calculés en fonction du revenu mensuel des demandeurs.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Lors des assises de la citoyenneté qui se sont tenues le 18 mars dernier, le Premier ministre a annoncé la suppression des droits de sceau perçus actuellement à l'occasion des naturalisations, des réintégrations dans la nationalité française et des libérations d'allégeance française.

Le présent article tire les conséquences de cette annonce en abrogeant l'article 29 précité de la loi de finances pour 1983 ainsi que le XV de l'article 5 de l'ordonnance n ° 2000-916 du 19 septembre 2000.

Le coût de cette mesure est évalué à 37 millions de francs.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 27 bis (nouveau)

Fixation des règles relatives à l'assiette, au taux et aux modalités de recouvrement de la cotisation versée à la Caisse de garantie du logement locatif social

Commentaire : le présent article a pour objet de réparer un oubli de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains en ce qui concerne les modalités de financement de la caisse de garantie du logement locatif social.

I. LES DISPOSITIONS DU PRÉSENT ARTICLE


L'article 163 de la loi n°2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains a défini les conditions de fonctionnement et les ressources de la caisse de garantie du logement locatif social.

Cependant, une référence au taux de cotisation a été involontairement supprimée lors de l'adoption définitive du texte par l'Assemblée nationale le 20 novembre 2000.

Le présent article, introduit par voie d'amendement gouvernemental, propose donc, dans son paragraphe I, de réécrire entièrement les articles L. 452-4, L. 452-5 et L. 452-6 du code de la construction et de l'habitation, en modifiant seulement le dernier alinéa de l'article L. 452-4 du code de la construction et de l'habitation pour ajouter que le taux de cotisation ne peut excéder 1,5 % et qu'il est fixé par arrêté des ministres chargés du logement, de l'économie et des finances.

Le paragraphe II précise que les dispositions du I. sont applicables à compter du 1er janvier 2001.

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre commission ne voit pas d'inconvénient à réparer un oubli de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains.

Elle regrette toutefois que les conditions d'examen de ce texte, trop lourd, aient inévitablement entraîné des erreurs et elle craint que ces erreurs, décelées avant même que la loi ne soit promulguée, ne soient que les premières d'une série.

De fait, elle note une véritable improvisation législative : en effet, le présent article est issu d'un amendement gouvernemental qui modifiait des articles du code de la construction et de l'habitation alors qu'ils n'étaient pas encore en vigueur, puisque créés par la loi sur la solidarité et le renouvellement urbains (SRU) qui vient à peine d'être promulguée, après la décision du Conseil constitutionnel intervenue le 7 décembre dernier 79( * ) . La modification de dispositions codifiées, qui n'étaient pas encore en vigueur à la date de l'adoption par l'Assemblée nationale du présent article, est pour le moins insolite.

En outre, votre rapporteur ne juge pas utile de réécrire trois articles du code de la construction et de l'habitation alors que seul le dernier alinéa de l'article L. 452-4, introduit par la loi « SRU » doit être modifié. Il vous proposera donc un amendement rédactionnel de simplification législative.

D'un point de vue formel, votre rapporteur rappelle que le projet de loi de finances rectificative pour 2000 a normalement pour seul objet de contenir des mesures ayant un impact en 2000 , ce qui ne sera évidemment pas le cas des mesures proposées, qui s'appliqueront à compter du 1er janvier 2001.

Il espère que le collectif budgétaire ne tendra pas, du fait de l'inflation législative, à devenir une session de rattrapage pour les textes adoptés dans l'année.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 27 ter (nouveau)

Extension de la détaxe de TIPP sur le GPL et le GNV à toutes les bennes de ramassage de déchets ménagers

Commentaire : le présent article a pour objet de supprimer le seuil de 12 tonnes au-delà duquel une benne de ramassage de déchets ménagers peut bénéficier d'une détaxe sur la TIPP applicable au GPL ou au GNV qu'elle utilise comme carburant : désormais toutes les bennes de ramassage de déchets ménagers, quel que soit leur poids, pourront bénéficier de cette détaxe.

I. LE DISPOSITIF ACTUEL


L'article 265 sexies du code des douanes prévoit différents mécanismes de remboursement de la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP) pesant sur les carburants au profit :

- des chauffeurs de taxi, dans la limite de 5.000 litres par an et par véhicule ;

- des commerçants sédentaires dont le principal établissement est situé dans une commune de moins de 3.000 habitants et qui réalise une partie de son chiffre d'affaires par des ventes ambulantes, dans la limite de 1.500 litres par an et par entreprise.

La TIPP pesant sur le gaz naturel véhicules (GNV) et le gaz de pétrole liquéfié (GPL) est également remboursée :

- aux chauffeurs de taxi, dans la limite de 9.000 litres par an et par véhicules (à compter du 1 er janvier 1999) ;

- aux exploitants de bennes de ramassage de déchets ménagers d'un poids total roulant autorisé égal ou supérieur à 12 tonnes, dans la limite de 9.000 litres par an et par véhicules (à compter du 1 er janvier 2000).

II. LA PROPOSITION DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Notre collègue député Yves Cochet a proposé d'étendre la détaxe applicable aux exploitants de « grosses » (plus de 12 tonnes) bennes de ramassage de déchets ménagers aux plus « petites » (moins de 12 tonnes).

La commission des finances de l'Assemblée nationale a tout d'abord donné un avis défavorable lors de sa réunion du mercredi 29 novembre 2000 sur un amendement initial du même auteur. Cet avis défavorable s'est « transformé » lors de la deuxième séance du jeudi 7 décembre 2000 et après rectification de l'amendement en avis favorable. Le gouvernement a également donné un avis favorable.

Votre commission est favorable à la suppression du seuil de 12 tonnes. Elle s'interroge toutefois sur la portée très limitée du dispositif qui aurait un coût peut-être nul et en tout état de cause vraisemblablement inférieur à 1 million de francs, étant donné le très faible nombre de bennes qui pourraient être concernées.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 27 quater (nouveau)

Crédit d'impôt de 10.000 francs pour l'acquisition d'un véhicule
roulant au GPL ou avec un système mixte électricité-essence

Commentaire : le présent article a pour objet de créer un nouveau crédit d'impôt d'un montant de 10.000 francs au bénéfice des contribuables qui achètent en 2001 et 2001 un véhicule roulant au GPL ou avec un moteur mixte essence-électricité, dit « hybride ».

I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE


Le présent article crée, dans un nouvel article 200 quinquies du code général des impôts 80( * ) , un nouveau crédit d'impôt d'un montant de 10.000 francs dont pourraient bénéficier les contribuables qui ont leur domicile fiscal en France, au titre des dépenses engagées pour l'acquisition à l'état neuf d'un véhicule automobile terrestre à moteur qui fonctionne exclusivement ou non au moyen du gaz de pétrole liquéfié (GPL) ou qui combine l'énergie électrique et une motorisation à essence ou à gazole, dite « hybride ». Sont donc exclues les dépenses afférentes à une « deuxième monte » : seuls les véhicules neufs sont concernés.

Le bénéfice de ce crédit d'impôt est limité dans le temps : les dépenses qui y ouvrent droit doivent avoir été engagées entre le 1 er janvier 2001 et le 31 décembre 2002. Cet avantage fiscal limité à une durée de deux ans doit permettre de donner un « coup de fouet » aux achats de tels véhicules.

Le crédit d'impôt est accordé au titre de l'année au cours de laquelle les dépenses sont engagées, sur présentation des factures. Il ne s'applique pas lorsque les sommes engagées pour l'acquisition du véhicule sont prises en compte dans l'évaluation des revenus.

Comme tout mécanisme de crédit d'impôt (qui se différencie en cela de la simple réduction d'impôt et qui est donc plus favorable notamment pour les ménages non imposés à l'impôt sur le revenu), l'excédent sur l'impôt dû est restitué sous la forme d'un chèque du Trésor Public.

De façon également traditionnelle, il est prévu que « le crédit d'impôt est imputé sur l'impôt sur le revenu dû au titre de l'année au cours de laquelle le prix d'acquisition du véhicule est payé, après imputation des réductions d'impôt mentionnées aux article 199 quater B à 200, de l'avoir fiscal, des crédits d'impôt et des prélèvements ou retenues non libératoires ».

Ce dispositif, issu d'une proposition d'amendement de notre collègue député Yves Cochet a reçu l'avis favorable de la commission des finances et du gouvernement et a été adopté à l'unanimité par l'Assemblée nationale.

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre commission estime nécessaire d'encourager les filières de construction des véhicules propres encore faibles et dont le développement est favorable à la lutte contre l'effet de serre. Les véhicules électriques et ceux roulant au GNV ne sont pas compris dans le dispositif car les premiers bénéficient d'aides particulières et les seconds ne concernent pas encore les véhicules de particuliers.

Le parc français de véhicules roulant au GPL est encore embryonnaire : 150.000 véhicules alors que l'Italie en compte 1,3 million et les Pays-Bas 600.000. Suite à un accident, la production a chuté au début de l'année 2000 : il convient d'encourager sa reprise. Quant aux véhicules hybrides, il n'existe aujourd'hui qu'un seul modèle commercialisé en France.

Le surcoût à l'achat d'un véhicule au GPL est d'ordinaire de 15.000 francs, le crédit d'impôt aura donc un effet incitatif fort puisqu'il réduira aux deux tiers ce surcoût.

Afin de préciser le dispositif, votre commission vous propose un amendement rédactionnel tendant à remplacer la mention de « dépenses engagées » par celle de « dépenses payées ».

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 27 quinquies (nouveau)

Extension du régime du mécénat aux dons à des organismes à gestion désintéressée qui versent des aides aux entreprises en difficulté et aux PME indépendantes

Commentaire : le présent article prévoit d'étendre le régime du mécénat aux dons faits à des organismes agréés par le ministre chargé du budget, dont la gestion est désintéressée et qui ont pour objet exclusif de participer, par le versement d'aides financières non rémunérées, à la création d'entreprises indépendantes, à la reprise d'entreprises indépendantes en difficulté et au financement des entreprises indépendantes de moins de 50 salariés.

I. LE DROIT EXISTANT INCLUT DANS LE RÉGIME DU MÉCÉNAT LES DONS AU PROFIT D'ORGANISMES A GESTION DÉSINTERESSÉE AYANT POUR OBJET EXCLUSIF LE FINANCEMENT DE LA CRÉATION D'ENTREPRISES


Le premier alinéa du 1. de l'article 238 bis du code général des impôts permet aux entreprises assujetties à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés de déduire du montant de leur résultat, dans la limite de 0,225 % de leur chiffre d'affaires , les versements qu'elles ont effectués au profit d'oeuvres ou d'organismes d'intérêt général ayant un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial ou culturel ou concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique, à la défense de l'environnement naturel ou à la diffusion de la culture, de la langue ou des connaissances scientifiques françaises, notamment quand ces versements sont faits au profit d'une fondation d'entreprise, même si cette dernière porte le nom de l'entreprise fondatrice.

Le second alinéa du 1. de cet article précise d'ailleurs que ces dispositions s'appliquent « même si le nom de l'entreprise versante est associée aux opérations réalisées par ces organismes ».

Le 2. de cet article porte à 0,325 % du chiffres d'affaires le plafond de déductibilité des dons à certains organismes, parmi lesquels :

- les fondations et les associations d'utilité publique répondant aux conditions précédentes ;

- les associations cultuelles ou de bienfaisance qui sont habilitées à recevoir des dons et legs ;

- les établissements publics des cultes reconnus d'Alsace-Moselle ;

- et les établissements d'enseignement supérieur ou artistique publics, ou privés à but non lucratif agréés par le ministre chargé du budget, ainsi que par le ministre chargé de l'enseignement supérieur ou par le ministre chargé de la culture.

Enfin, le 4. de l'article 238 bis du code général des impôts étend ce régime du mécénat , dans la limite de 0,325 % du chiffre d'affaires, aux dons faits à des organismes ayant pour objet exclusif de participer, par le versement d'aides financières, à la création d'entreprises , sous réserve que ces organismes :

- répondent « à des conditions quant à leur statut et à leur fonctionnement fixées par décret en Conseil d'Etat ». Parmi ces conditions figurent ainsi actuellement la gestion désintéressée et  l'absence de lien juridique ou économique entre l'entreprise à l'origine du don et l'entreprise bénéficiaire ;

- soient agréés par le ministre chargé du budget.

En d'autres termes, ce dispositif permet à des entreprises de déduire de leur résultat imposable, sous certains plafonds, les dons à la création d'entreprise versés par l'intermédiaire « d'organismes-écran » à gestion désintéressée (associations, syndicats professionnels, établissements publics, régies, etc.).

Ce dispositif est actuellement peu utilisé , puisqu'il ne drainerait qu'une quarantaine de millions de francs par an.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ ETEND LE RÉGIME DU MÉCÉNAT AUX DONS AUX ORGANISMES DONT LA GESTION EST DÉSINTÉRESSÉE ET QUI ONT POUR OBJET LE SOUTIEN FINANCIER AUX ENTREPRISES DE MOINS DE 50 SALARIÉS ET À LA REPRISE D'ENTREPRISES EN DIFFICULTÉ
Le présent article additionnel propose une nouvelle rédaction du 4. de l'article 238 bis du code général des impôts.

Cette nouvelle rédaction inscrit dans la loi deux précisions auparavant apportées par le décret d'application  :

- la gestion des « organismes-écrans » entre les entreprises mécènes et les entreprises bénéficiant des dons doit être désintéressée ;

- les aides apportées doivent être « non rémunérées ».

Par ailleurs, alors que l'ancien dispositif de « mécénat économique » était limité aux dons aux organismes dont l'objet exclusif était de participer à la création d'entreprises, cette nouvelle rédaction étend le régime du mécénat aux dons aux organismes dont l'objet exclusif est de participer à la création d'entreprises, à la reprise d'entreprises en difficulté et au financement d'entreprises de moins de 50 salariés.

En revanche, cette nouvelle rédaction restreint le régime du mécénat aux dons aux organismes qui ne versent des aides qu'à des entreprises indépendantes , au sens suivant : le capital des entreprises bénéficiaires doit être entièrement libéré et détenu de manière continue pour 75 % au moins par des personnes physiques ou par une société répondant aux mêmes conditions dont le capital est détenu, pour 75 % au moins, par des personnes physiques.

Pour le calcul des pourcentages ci-dessus, les participations des sociétés de capital-risque, des fonds communs de placement à risques (FCPR), des sociétés de développement régional (SDR) et des sociétés financières d'innovation (SFI) ne sont toutefois pas prises en compte à la condition qu'il n'existe pas de lien de dépendance au sens du 1 bis de l'article 39 terdecies entre la société en cause et ces dernières sociétés ou ces fonds.

Enfin, la nouvelle rédaction exclut du périmètre des entreprises éligibles les entreprises exerçant à titre principal l'une des activités énumérées à l'article 35 du code général des impôts (activités immobilières, locations d'établissements commerciaux ou industriels, opérations sur des marchés à terme, etc.).
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION
Très attachée au développement du mécénat, votre commission ne peut qu'approuver les orientations générales de ce dispositif, qui pourrait renforcer les réseaux de soutien au développement des PME et à la reprise d'entreprises en difficulté.

Elle constate cependant que cette évolution législative aurait pu intervenir plut tôt puisque le Sénat, à l'initiative de notre collègue Roger Besse, rapporteur spécial des crédits de l'aménagement du territoire, a déjà modifié à plusieurs reprises le 4 de l'article 238 bis du code général des impôts afin de permettre aux organismes qui aident à la reprise d'entreprise de bénéficier de l'agrément du ministre chargé du budget.

En particulier, lors de la discussion de la loi du 25 juin 1999 d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire, le ministre de l'aménagement du territoire avait demandé le retrait de cet amendement. Il est donc particulièrement savoureux de constater que c'est à l'initiative de nos collègues députés « verts » que cette disposition sera finalement inscrite dans notre droit.

La rédaction du présent article appelle toutefois deux remarques :

- en premier lieu, la définition d'une entreprise en difficulté comme une entreprise qui fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire ou dont « la situation financière rend imminente la cessation d'activité » est relativement floue ;

- en second lieu, cet article introduit de facto dans le code général des impôts un nouveau seuil fondé sur deux critères - moins de 50 salariés et indépendance - , qui ne recoupe pas la définition des « petites entreprises » retenue par l'article 6 du projet de loi de finances pour 2001 (moins de 50 millions de francs de chiffre d'affaires et indépendance) : il n'est pas certain que la multiplication de seuils incohérents soit de nature à rendre la législation fiscale plus simple et plus lisible.

Plus généralement, votre commission s'interroge sur la compatibilité de ce dispositif avec la réglementation communautaire en matière d'aides d'Etat.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 27 sexies (nouveau)

Extension de l'exonération du droit de timbre de dimension aux minutes, originaux et expéditions des actes constatant la formation de sociétés coopératives agricoles

Commentaire : le présent article a pour objet de permettre d'étendre l'exonération du droit de timbre de dimension aux minutes, originaux et expéditions des actes constatant la formation de sociétés coopératives agricoles.

I. LE DROIT EXISTANT


Actuellement, d'après les dispositions de l'article 902 du code général des impôts (CGI), sont exonérés du droit de timbre de dimension :

- les mutations à titre onéreux d'immeubles ;

- les actes judiciaires, extrajudiciaires et registres divers ;

- autres pièces et écrits divers.

Au sein de cette troisième catégorie, figurent les minutes, originaux et expéditions des actes constatant la formation de sociétés en nom collectif, en commandite simple, à responsabilité limitée et par actions ainsi que des sociétés civiles à objet agricole.

L'exonération des actes constatant la formation des sociétés civiles à objet agricole s'applique à compter de la date d'entrée en vigueur de la loi n° 95-95 du 1 er février 1995.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté le présent article, à l'initiative de notre collègue député Jean-Louis Dumont, qui vise à étendre l'exonération du droit de timbre de dimension aux actes constatant la formation de sociétés coopératives agricoles.

Il s'agit d'une mesure d'harmonisation du dispositif du droit de timbre. En outre, les sociétés coopératives maritimes et artisanales régies par la loi du 20 juillet 1983, voisines dans leur objet et leur fonctionnement des coopératives agricoles, bénéficient déjà de cette exonération du droit de timbre puisqu'à titre subsidiaire elles empruntent nécessairement les formes de société anonyme (SA) ou de société à responsabilité limitée (SARL).

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Le dispositif d'exonération du droit de timbre de dimension pour les actes constatant la formation de sociétés en nom collectif, en commandite simple, à responsabilité limitée et par actions ainsi que les sociétés civiles à objet agricole, a pour objet de favoriser la création d'entreprises.

A cet égard, il semble opportun d'étendre le bénéfice de cette exonération aux sociétés coopératives agricoles, dans un souci d'harmonisation fiscale mais aussi d'encouragement à la création de coopératives dans le secteur agricole.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 27 septies (nouveau)

Aménagement de la définition des petites et moyennes entreprises pouvant bénéficier de l'exonération de taxe professionnelle dans les zones éligibles à la prime d'aménagement du territoire « tertiaire »

Commentaire : le présent article de rapprocher de la définition communautaire des PME la définition des PME à laquelle il est fait référence dans l'article 1465 B du code général des impôts, relatif aux exonérations de taxe professionnelle dans les zones éligibles à la prime d'aménagement du territoire pour les seules activités tertiaires.

I. LE DROIT EXISTANT

1. Une exonération de taxe professionnelle « d'aménagement du territoire » ...


La loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire du 4 février 1995 a mis en place plusieurs exonérations fiscales réservées aux entreprises implantées dans les différents zonages d'aménagement du territoire.

Parmi ces mesures figure l'exonération de taxe professionnelle prévue à l'article 1465 du code général des impôts. Cette exonération présente les caractéristiques suivantes :

- c'est une exonération facultative, décidée par les organes délibérants des collectivités locales ou des structures intercommunales à fiscalité propre, et qui ne donne pas lieu à une compensation financière de l'Etat ;

- c'est une exonération qui est applicable aux entreprises qui procèdent « soit à des décentralisations, extensions ou créations d'activités industrielles ou de recherche scientifique et technique, ou de service de direction, d'études, d'ingénierie et d'informatique, soit à une reconversion dans le même type d'activités, soit à la reprise d'établissements en difficulté exerçant le même type d'activités » ;

- c'est une exonération qui s'applique dans les zones éligibles à la prime d'aménagement du territoire (la PAT « industrie ») et les territoires ruraux de développement prioritaire.

Aucun critère de taille des entreprises n'est prévu pour les exonérations relevant de l'article 1465 du code général des impôts.

L'article 1465 B du même code, dont le présent article propose une nouvelle rédaction, a pour objet de faire bénéficier de la même exonération de taxe professionnelle (facultative, pour une durée de cinq ans) :

- les seules petites et moyennes entreprises présentant les mêmes caractéristiques que les entreprises visées à l'article 1465 81( * ) ;

- implantées dans les « zones éligibles à la prime d'aménagement du territoire pour les seules activités tertiaires ».

Les lignes directrices des aides à finalité régionale énoncées par la Commission européenne distinguent les zones d'aide à finalité régionale, à l'intérieur desquelles les entreprises quelle que soit leur taille peuvent être aidées, du reste des territoires nationaux, où seules les petites et moyennes entreprises peuvent bénéficier d'aides.

En France, la carte des aides à finalité régionale est la carte de la prime d'aménagement du territoire dite PAT « industrie ». Un autre zonage, dit de la PAT « tertiaire » a cependant été mis en place. Il couvre l'ensemble du territoire national, à l'exception du bassin parisien et de la région lyonnaise. Ce zonage, qui va au delà des lignes directrices communautaires, a été instauré pour éviter d'accorder certaines aides aux entreprises qui s'implantent dans les régions dont les atouts sont déjà tels que les entreprises sont réputées ne pas avoir besoin d'incitations supplémentaires pour venir s'y installer.

C'est dans ce zonage de la PAT « tertiaire » que s'appliquent les dispositions de l'article 1465 B du code général des impôts.

2. ... au bénéfice des petites et moyennes entreprises

Pour l'application de l'article 1465 B du code général des impôts, sont considérées comme des petites et moyennes entreprises (PME) les entreprises « qui remplissent les conditions fixées au deuxième alinéa de l'article 39 quinquies D du code général des impôts », c'est à dire :

- moins de 250 salariés ;

- et un chiffre d'affaires hors taxes inférieur à 140 millions de francs ou un total de bilan inférieur à 70 millions de francs ;

- et qui ne sont pas détenues à plus de 25 % par des entreprises ne répondant pas à ces conditions.

Ces critères ne sont pas conformes à la réglementation communautaire.

En effet, la recommandation de la Commission européenne du 3 avril 1996 (JOCE L107/8 du 30 avril 1996) définit les PME comme les entreprises :

- de moins de 250 salariés ;

- dont le chiffre d'affaires annuel n'excède pas 40 millions d'écus (soit environ 262,2 millions de francs) ou dont le total du bilan annuel n'excède pas 27 millions d'écus (soit environ 177 millions de francs) ;

- et qui respectent le critère d'indépendance tel que défini ci-après.

Sont considérées comme indépendantes « les entreprises qui ne sont pas détenues à hauteur de 25% ou plus du capital ou des droits de vote par une entreprise ou conjointement par plusieurs entreprises ne correspondant pas à la définition de la PME. Ce seuil peut toutefois être dépassé dans deux cas :

- si l'entreprise est détenue par des sociétés publiques de participation, des sociétés de capital à risque ou des investisseurs institutionnels et à la condition que ceux-ci n'exercent, à titre individuel ou conjointement, aucun contrôle sur l'entreprise ;

- s'il résulte de la dispersion du capital qu'il est impossible de savoir qui le détient et que l'entreprise déclare qu'elle peut légitimement présumer ne pas être détenue à plus de 25 % ou plus par une entreprise ou conjointement pas plusieurs entreprises qui ne correspondent pas à la définition de la PME
».

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article, qui résulte d'un amendement présenté à l'Assemblée nationale par le gouvernement, propose de remplacer la définition des PME à laquelle il est fait référence à l'article 1465 B du code général des impôts par une nouvelle définition.

Aux termes de cette nouvelle définition, seraient considérées comme des PME pour l'application de l'article 1465 B du code général des impôts, les entreprises :

- qui ont employé moins de 250 salariés au cours de la période de référence retenue pour le calcul de la base d'imposition ;

- qui ont réalisé au cours de la même période, éventuellement ramenée à douze mois, un chiffre d'affaires inférieur à 262 millions de francs (soit 39,965 millions d'euros), le chiffre d'affaires pris en compte pour une société mère d'un groupe au sens de l'article 223 A du code général des impôts étant la somme des chiffres d'affaires des sociétés membres du groupe ;

- et qui sont indépendantes, au sens où leur capital, entièrement libéré, doit être détenu de manière continue, et pour 75 % au moins, par des personnes physiques. Les participations des sociétés de capital-risque, des fonds communs de placement à risque, des sociétés de développement régional et des sociétés financières d'innovation ne sont toutefois pas prises en compte pour la détermination de ce pourcentage à la condition qu'il n'existe pas de lien de dépendance au sens du 1 bis de l'article 39 terdecies entre la société en cause et ces dernières sociétés ou fonds 82( * ) .

Ces critères sont très proches des critères retenus par la Commission européenne, si ce n'est que la définition proposée ne retient pas le critère  « bilan annuel inférieur à 27 millions d'euros », comme critère alternatif au seul critère de chiffre d'affaires.

III. LA POSITION DE CETTE COMMISSION

Votre commission se félicite de ce que le gouvernement propose d'actualiser des seuils anciens, d'une part, de mettre notre législation en conformité avec la réglementation communautaire, d'autre part.

Il est d'ailleurs étonnant que cette mise en conformité intervienne plus de cinq ans après l'adoption des recommandations de la Commission européenne.

Plus généralement, votre commission regrette le manque d'ambition de cet effort de coordination et de simplification de notre législation, où se multiplient des seuils différents pour les notions de PME ou de « petite entreprise ».

On peut ainsi rappeler que la réglementation communautaire propose également une définition des « petites entreprises » :

- moins de 50 salariés ;

- et chiffre d'affaires inférieur à 7 millions d'euros (soit environ 45,9 millions de francs) ou total du bilan annuel inférieur à 5 millions d'euros (soit environ 32,8 millions de francs) ;

- et indépendance, entendue comme le fait de ne pas être détenue à hauteur de 25 % ou plus du capital ou des droits de vote par une entreprise ou conjointement par plusieurs entreprises ne correspondant pas à la définition de la petite entreprise, ce seuil pouvant toutefois être dépassé dans les deux cas particuliers détaillés supra pour les PME.

Or, le gouvernement n'a pas retenu ces critères pour la définition des petites entreprises éligibles au régime de taxation à taux réduit de la fraction des résultats inférieure à 250.000 francs proposé par l'article 6 du projet de loi de finances pour 2001. En effet, ce dernier régime est réservé aux entreprises indépendantes de moins de 50 millions de francs de chiffre d'affaires (et non 46 millions de francs), sans critère alternatif de taille du bilan ou complémentaire de nombre de salariés.

En revanche, l'article 27 quinquies du présent projet de loi de finances rectificative pour 2000 réserve le bénéfice du régime du mécénat aux dons à des organismes qui ont pour objet exclusif le versement d'aides financières à la création d'entreprise, à la reprise d'entreprises en difficulté et au financement des petites entreprises, ces dernières étant à cette occasion définies comme  les entreprises indépendantes de moins de 50 salariés, sans référence à des critères complémentaires en termes de chiffre d'affaires ou de total du bilan.

En d'autres termes, ces deux dispositifs introduisent deux nouveaux jeux de critères, non conformes à la réglementation communautaire, pour définir la notion de petite entreprise.

S'agissant des dispositions du présent article votre commission remarque toutefois que la définition proposée pour les PME est plus restrictive que la définition européenne des PME, puisqu'elle supprime le critère de la taille du bilan, qui est alternatif au critère du chiffre d'affaires aussi bien dans la législation nationale actuelle que dans la réglementation communautaire.

Selon les premières informations transmises à votre rapporteur général, cette rédaction restrictive résulterait la volonté du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie de ne pas rendre éligibles à l'exonération de taxe professionnelle les entreprises qui auraient un chiffre d'affaires très élevé et un bilan très faible. Il en serait ainsi des sociétés de crédit-bail, pour lesquelles le critère du chiffre d'affaires refléterait mieux la taille de l'entreprise.

Dans l'attente d'éléments d'appréciation plus approfondis sur les entreprises que cette rédaction restrictive rendrait inéligibles à l'exonération de taxe professionnelle, votre commission a réservé son appréciation sur ce dispositif.

Décision de la commission : votre commission vous propose de réserver sa position sur cet article.

ARTICLE 27 octies (nouveau)

Application à compter de l'année 2000 de l'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties pour certains logements en accession à la propriété

Commentaire : le présent article a pour objet d'appliquer dès l'année 2000 la mesure d'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties prévue à l'article 1384 A du code général des impôts et prolongée de cinq ans par l'article 83 de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, qui sera bientôt promulguée.

I. LE DROIT EXISTANT


L'article 1384 A du code général des impôts dispose que certaines constructions neuves affectées à l'habitation principale et financées au moyen de prêts aidés par l'Etat sont exonérés de taxe foncière sur les propriétés bâties pendant une durée de quinze ans à compter de l'année qui suit celle de leur achèvement.

Dans le cadre de la discussion du projet de loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, un amendement d'origine gouvernementale a été adopté, afin de prolonger de cinq ans la durée de l'exonération pour les logements en accession à la propriété situés dans un groupe d'immeuble ou un ensemble immobilier faisant l'objet de mesures de sauvegarde prévues aux articles L. 615-1 et L. 615-2 du code de la construction et de l'habitation.

En application de l'article L. 615-1, le représentant de l'Etat dans le département peut confier à une commission qu'il constitue à cet effet le soin de proposer un plan de sauvegarde visant à restaurer le cadre de vie des occupants d'un groupe d'immeubles bâtis ou d'un ensemble immobilier déterminé, situé dans les zones urbaines sensibles définies au 3 de l'article 42 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire ou dans le périmètre d'une opération programmée d'amélioration de l'habitat (OPAH).

II. LES DISPOSITIONS DU PRÉSENT ARTICLE

Le présent article a pour objet d'appliquer la prolongation d'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties dès l'année 2000 et non en 2001, comme le prévoit l'article 83 de la loi n°2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, afin de prendre en compte les logements dont l'exonération est venue à expiration le 31 décembre 1999.

Il s'agit donc de réparer une lacune dans le dispositif proposé par le gouvernement dans la loi de relative à la solidarité et au renouvellement urbains.

Du fait de l'application en 2000 de ces dispositions, la date à laquelle la commission mentionnée à l'article L. 615-1 du code de la construction et de l'habitation est tenue d'adresser la liste des logements concernés est repoussée du 31 décembre 2000 au 15 février 2001, pour les impositions établies au titre de l'année 2000. Pour les années suivantes, la date est maintenue au 31 décembre.

De surcroît, la prolongation de l'exonération qui s'applique sur cinq années s'interromprait en 2004 et non en 2005.

Compte tenu de l'adoption tardive de ce dispositif, l'exonération de taxe foncière pour l'année 2000 prendrait la forme d'un dégrèvement.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre commission remarque que le présent article est le deuxième article adopté par voie d'amendement gouvernemental dans le projet de loi de finances rectificative qui vise à réparer un oubli de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbain, et que cet article a été adopté avant même la promulgation de cette loi.

Tout en regrettant que les conditions d'élaboration de la loi entraîne ce type d'erreurs, elle ne voit pas d'inconvénient à adopter les dispositions du présent article.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

II. - AUTRES DISPOSITIONS

ARTICLE 28

Fixation des plafonds des redevances cynégétiques

Commentaire : le présent article a pour objet de fixer et de codifier, au sein du code de l'environnement, les plafonds des redevances cynégétiques ainsi que leur mode de recouvrement.

I. LE DROIT EXISTANT

A. NATURE JURIDIQUE DES REDEVANCES CYNÉGÉTIQUES


Les redevances cynégétiques font partie des contributions à la charge des chasseurs et sont acquittées par eux lors de la validation de leur permis de chasser.

Dans sa décision n° 2000-434 DC du 20 juillet 2000, le Conseil constitutionnel, saisi d'une disposition de la nouvelle loi relative à la chasse (loi n° 2000-698 du 26 juillet 2000), a confirmé que les redevances cynégétiques avaient le caractère d'impositions de toutes natures, ce qu'avait d'ailleurs suggéré la Cour des comptes dans son relevé d'informations définitives sur les comptes et la gestion de l'Office national de la chasse du 2 mars 2000.

B. LES REDEVANCES CYNÉGÉTIQUES SONT UNE CONTRIBUTION À LA CHARGE DES CHASSEURS

Les chasseurs ont à leur charge divers droits de timbre, taxes et cotisations, dont le produit est réparti entre le Trésor public, l'Office national de la chasse et de la faune sauvage et les fédérations départementales de chasseurs, soit chaque année près de 1.400 millions de francs, d'après les données fournies par la Cour des comptes.

En 2000, le montant des redevances cynégétiques, qui constituent la plus importante de toutes ces contributions, devrait s'établir à 571 millions de francs.

Le paiement des redevances cynégétiques permet de valider le permis de chasser. Ce paiement s'effectue auprès du comptable du Trésor territorialement compétent.

Il existe trois types de redevances cynégétiques :

- la redevance cynégétique nationale , dont le versement permet de valider le permis pour tout le territoire national ;

- la redevance cynégétique départementale , d'un montant moins élevé, dont le versement permet de valider le permis pour le département dans lequel le visa a été accordé et dans les communes limitrophes des départements voisins ;

- la redevance cynégétique « gibier d'eau » , qui est une redevance spécifique acquittée par les chasseurs de gibier d'eau.

La loi n° 2000-698 du 26 juillet 2000, relative à la chasse, a apporté deux modifications substantielles au dispositif de validation des permis de chasser :

- la validation est désormais obtenue pour l'année civile et non plus pour la saison de chasse ;

- des redevances nationale et départementale temporaires (de neuf jours consécutifs) ont été instaurées.

C. MONTANTS ET PLAFONDS DES REDEVANCES CYNÉGÉTIQUES

Les plafonds des redevances cynégétiques étaient, jusqu'à présent, fixés par l'article R. 223-33 du code rural, modifié, en dernier lieu, par le décret n° 98-757 du 21 août 1998, soit :

- 1.350 francs pour la redevance cynégétique nationale ;

- 275 francs pour la redevance cynégétique départementale ;

- 110 francs pour la redevance cynégétique « gibier d'eau ».

Les montants des redevances cynégétiques actuellement en vigueur, fixés par un arrêté du 17 mai 2000 pour la saison de chasse 2000/2001, correspondent à 94 % du plafond pour les redevances nationales soit 1.270 francs, 91 % pour les redevances départementales, soit 250 francs et 87 % pour les redevances « gibier d'eau », soit 96 francs.

Le produit total des redevances cynégétiques est passé de 380 millions de francs en 1992 à 530 millions de francs en 1999. Toutefois, il est à noter que le nombre de permis de chasse étant en constante diminution, le montant unitaire des redevances a progressé encore plus vite que ce produit total.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE GOUVERNEMENT

Par le présent article, le gouvernement propose de fixer dans la loi, en les insérant dans le code de l'environnement (nouvel article L. 423-21-1 du code de l'environnement), les plafonds et les modalités de recouvrement des redevances cynégétiques.

1. La fixation législative des plafonds des redevances cynégétiques

Les plafonds ainsi fixés sont identiques à ceux que prévoyaient l'article R. 223-33 du code rural, modifié par le décret n° 98-757 du 21 août 1998, soit :

- 1.350 francs pour la redevance nationale ;

- 275 francs pour la redevance départementale ;

- 110 francs pour la redevance « gibier d'eau ».

En outre, conformément aux dispositions de la nouvelle loi relative à la chasse précitée, le présent article fixe également les plafonds des redevances temporaires à des montants équivalant à 60 % des redevances non temporaires respectives, soit :

- 810 francs pour la redevance nationale temporaire ;

- 165 francs pour la redevance départementale temporaire.

En outre, le pouvoir réglementaire demeure compétent pour fixer le montant de chacune des redevances dans le respect des plafonds déterminés par le législateur.

2. Les modalités de recouvrement des redevances cynégétiques

Le I du présent article précise également que la perception des redevances cynégétiques donne lieu à l'apposition de timbres sur le permis de chasser.

3. Entrée en vigueur du nouvel article

Le II du présent article prévoit l'application rétroactive du nouvel article L. 423-21-1 du code de l'environnement à compter du 27 juillet 2000, date d'entrée en vigueur de la loi relative à la chasse, qui a abrogé l'ancienne rédaction de l'article L. 223-16 du code rural, qui était le fondement législatif de l'arrêté du 17 mai 2000 fixant le montant des redevances pour la saison 2000/2001.

4. Fixation en euros des plafonds des redevances cynégétiques

Le III du présent article fixe le montant en euros des plafonds des redevances cynégétiques.

III. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

A. MODIFICATION DES PLAFONDS DES REDEVANCES CYNÉGÉTIQUES


L'Assemblée nationale a adopté un amendement visant à abaisser le montant des plafonds des redevances cynégétiques fixés dans la loi.

Ces nouveaux plafonds s'élèvent à :

- 1.270 francs pour la redevance cynégétique nationale ;

- 762 francs pour la redevance cynégétique nationale temporaire ;

- 250 francs pour la redevance cynégétique départementale ;

- 150 francs pour la redevance cynégétique départementale

temporaire ;

- 96 francs pour la redevance cynégétique « gibier d'eau ».

Ces nouveaux plafonds correspondent de fait aux montants respectifs des redevances cynégétiques fixés par l'arrêté du 17 mai 2000 pour la saison de chasse 2000/2001.

B. OBLIGATION POUR LE GOUVERNEMENT DE REMETTRE AU PARLEMENT UN RAPPORT PRÉCISANT LES CONSÉQUENCES FINANCIÈRES DU TRANSFERT DE LA CHARGE DE L'INDEMNISATION DES DÉGATS DE GIBIER AUX FÉDÉRATIONS DÉPARTEMENTALES DE CHASSEURS

L'Assemblée nationale a également introduit un nouvel alinéa disposant que le gouvernement remettra au Parlement, avant le 30 juin 2001, un rapport précisant les conséquences financières, pour le budget de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage et pour les budgets des fédérations départementales des chasseurs, du transfert de la charge d'indemnisation des dégâts de gibier aux fédérations départementales de chasseurs.

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre commission estime que l'abaissement des plafonds de redevances cynégétiques décidé par l'Assemblée nationale est une bonne initiative.

En effet, le texte initial du gouvernement proposait de fixer dans la loi ces plafonds sans en changer le montant. Or, il s'avère que le montant des redevances cynégétiques effectivement acquittées par les chasseurs ont connu une augmentation sensible ces dernières années. Le produit total des redevances cynégétiques est passé de 380 millions de francs en 1992 à 530 millions de francs en 1999 et le montant unitaire des redevances a progressé plus vite que ce produit total.

La fixation des plafonds des redevances cynégétiques dues par les chasseurs aux montants actuellement fixés par un arrêté du 17 mai 2000 devrait inciter le pouvoir réglementaire, qui demeure compétent pour fixer le montant de chacune des redevances dans le respect des plafonds déterminés par le législateur, à décider une stabilisation, voire une réduction, qui serait la bienvenue, de ces montants.

En outre, la loi précitée relative à la chasse a apporté des modifications quant à l'affectation de ces redevances cynégétiques dont le montant est désormais versé à l'Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) pour être affecté au financement de ses dépenses. Or, l'article 48 de la loi relative à la chasse prévoit qu'à compter du 1 er juillet 2001, les fédérations départementales de chasseurs et la Fédération nationale des chasseurs sont substituées chacune en ce qui la concerne aux droits et obligations de l'Office national de la chasse en matière d'indemnisation des dégâts de grand gibier aux récoltes. Même si les redevances cynégétiques représentent 90 % des recettes de l'ONCFS, il paraît donc logique qu'une stabilisation voire une réduction du montant de ces redevances soit envisagée.

Enfin, votre commission approuve l'obligation faite au gouvernement de remettre au Parlement un rapport relatif aux conséquences financières du transfert de la charge de l'indemnisation des dégâts de gibier aux fédérations départementales de chasseurs.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 29

Fixation du montant du droit d'inscription à l'examen du permis de chasser

Commentaire : le présent article vise à doubler le plafond actuel du droit d'inscription à l'examen du permis de chasser.

I. LE DOUBLEMENT DU PLAFOND DU DROIT D'INSCRIPTION À L'EXAMEN DU PERMIS DE CHASSER


La loi n° 2000-698 du 26 juillet 2000 relative à la chasse a étendu les modalités d'examen du permis de chasser en instaurant, outre l'actuelle épreuve théorique, une nouvelle épreuve pratique.

Le dispositif actuel de l'article L. 423-6 du code de l'environnement (précédemment article L. 223-4 du code rural) prévoit la perception d'un droit d'examen fixé par arrêté ministériel dans la limite de 100 francs.

Le présent article propose le doublement de ces montants à 200 francs, à compter de l'entrée en vigueur de la deuxième loi de finances rectificative, et 32 euros à compter du 1 er janvier 2002. Selon le gouvernement, en effet, l'organisation des nouvelles épreuves de l'examen du permis de chasser induira pour l'Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) un coût évalué à 14 millions de francs pour 40.000 candidats.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a décidé de supprimer cet article et donc de conserver l'actuel montant du droit d'inscription à l'examen du permis de chasser.

Cette suppression a été adoptée à l'initiative du rapporteur général du budget, qui a fait état d'une part de l'importance des réserves financières de l'Office national de la chasse, et d'autre part du caractère modeste du coût induit par le renforcement des épreuves du permis de chasser.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre commission partage l'analyse effectuée par l'Assemblée nationale et estime qu'un relèvement du montant du droit d'inscription au permis de chasser est inutile et inopportun.

Décision de la commission : votre commission vous propose de maintenir la suppression du présent article.

ARTICLE 30

Interceptions des correspondances émises par la voie des télécommunications

Commentaire : le présent article tend à mettre à la charge des opérateurs de réseaux de télécommunications (y compris téléphoniques) le financement des investissements que nécessite la mise en oeuvre de dispositifs de nature à permettre des interceptions justifiées par les nécessités de la sécurité publique, l'Etat devant participer aux dépenses d'exploitation correspondantes, dans des conditions déterminées par décret en Conseil d'Etat.

I. LE DROIT EXISTANT
L'article L.35-6 du code des postes et télécommunications 83( * ) prévoit que le cahier des charges des opérateurs visés par les articles L.33-1 (réseaux de télécommunications ouverts au public) et L. 34-1 (service téléphonique) garantissent une « juste rémunération » des prescriptions exigées de ces derniers au titre de la défense et de la sécurité publique.

Tous les fournisseurs de services de télécommunications autorisés doivent, en effet, prendre, sous le contrôle du ministre responsable, les mesures nécessaires à l'application, en tant que de besoin, des dispositions légales 84( * ) relatives aux interceptions ordonnées par l'autorité judiciaire ou autorisées par le Premier Ministre, pour des raisons de défense et de sécurité publique.

Les « prescriptions », dont la « juste rémunération » doit être garantie par les cahiers des charges des opérateurs, incluent les investissements nécessités par la mise en oeuvre des dispositifs spécifiques rendant possibles les interceptions requises, dont chacune a également un coût particulier.

Tel est le droit actuellement applicable aux réseaux existants, qu'il s'agisse des réseaux fixes de France Telecom ou des réseaux de téléphonie mobile.

Les frais exposés en la matière par les trois opérateurs actuels (France Telecom, SFR et Bouygues) leur sont remboursés, sur la base des factures produites, à partir des crédits évaluatifs du chapitre 44-42 (intervention diverses) du budget de l'économie, des finances et de l'industrie, doté par le présent collectif de 250 millions de francs.

5.000 à 10.000 interceptions seraient autorisées chaque année, selon la commission de contrôle compétente.

II. LES CHANGEMENTS PROPOSÉS

Le présent article met à la charge des opérateurs les investissements qui doivent permettre les interceptions justifiées par les nécessités de la sécurité publique. L'Etat ne participerait plus désormais qu'aux charges d' exploitation correspondantes, dans des conditions déterminées par décret en Conseil d'Etat.

Un amendement de la commission des finances de l'Assemblée nationale est venu préciser que les opérateurs visés par les deux nouveaux alinéas qu'il est proposé d'insérer au début de l'article L.35-6 du code des postes et télécommunications, sont les mêmes que ceux auxquels s'appliquent les dispositions de l'actuel premier alinéa (qui deviendrait le troisième), à savoir ceux qui exploitent des réseaux de télécommunications ouverts au public (article L.33-1) ainsi que les fournisseurs autorisés de services téléphoniques au public (article L.34-1).

Les « autres prescriptions » exigées par la défense et la sécurité publique continueraient de faire l'objet d'une « juste rémunération » prévue par les cahiers des charges, les deux nouveaux alinéas, soumis au vote du Parlement se rajoutant à l'actuel premier alinéa de l'article L.35-6 qu'ils tendent ainsi à modifier, sans se substituer à lui.

Comme l'indique, dans son avis, la commission supérieure du service public des postes et des télécommunications, il semble donc que le dispositif proposé par cet article :

- isole le cas des « interceptions » (dont il n'existe pas, semble-t-il, de définition précise, permettant de les distinguer des « autres prescriptions » tendant aux mêmes fins) ;

- concerne toute extension et toute mise à niveau exigibles dans les réseaux existants (réseaux fixes, GSM..) et tout investissement dans les réseaux qui se mettent en place (boucle radio, câble...) ou à venir (UMTS).

Le développement, très rapide, des réseaux mobiles (GSM), la publication, postérieure au commencement de leur déploiement, des spécifications relatives aux interceptions qui peuvent y être effectuées, ont entraîné des coûts importants (250 millions de francs sont ouverts à ce titre dans le présent collectif).

III. LES JUSTIFICATION SUPPOSÉES

L'exposé des motifs, fort laconique, du présent article précise seulement que la modification proposée de l'article L.35-2 s'inscrit dans la perspective de l'extension ou de la mise à niveau des réseaux existants et de la mise en place de nouveaux réseaux (Boucle locale radio, GPRS, UMTS...).

Il semble que l'Etat, mesurant ce que lui a déjà coûté le développement fulgurant des réseaux mobiles actuels (GSM), veuille tout simplement « arrêter les frais » et en faire assurer le coût par les opérateurs.

Si chaque nouvelle installation d'interception devait être financée par l'Etat, il en résulterait, en effet, une lourde augmentation des charges publiques correspondantes, non seulement pour l'achèvement de la mise en place des réseaux actuels mais aussi, et surtout, pour le déploiement des infrastructures futures.

Le montant des investissements concernés, variables selon la technologie utilisée, pourrait être notamment plus élevé pour la transmission de données que pour le transport de la voix et particulièrement important s'agissant de l'UMTS (du fait de la petite taille des cellules des réseaux résultant du niveau élevé des fréquences empruntées).

L'Etat continuerait toutefois, comme il a été vu :

- de participer au financement des charges d'exploitation occasionnées ;

- d'assurer une « juste rémunération » des prestations assurées au titre des « autres prestations exigées ».

IV. UNE RÉDACTION IMPRÉCISE

Les instances qui ont été amenées à examiner ces article (CSSPPT, ART, Assemblée nationale...) en ont, toutes souligné les imprécisions de sa rédaction.

1. La commission supérieure du service public des postes et télécommunications (CSSPPT) fait allusion, pour sa part, dans l'avis qu'elle a rendu sur ce texte, à des suspicions qui pourraient se faire jour, et qu'il importe de lever, du fait de la crainte :

- de la part des prestataires de ne pas être en mesure de couvrir le coût de leurs obligations ;

- de la part de l'Etat que le prix qui lui serait demandé, au titre de sa participation aux charges d'exploitation correspondantes, soit excessif.

2. L'Autorité de régulation des télécommunications (ART) aurait pour sa part :

- regretté que ne soient précisés ni la nature des moyens, ni les niveaux des investissements mis à la charge des opérateurs, ce qui est un facteur d'incertitude pour ces derniers, susceptible de freiner leur engagement dans la mise en place des nouvelles infrastructures concernées ;

- considéré que la notion d'opérateur inclut les fournisseurs d'accès à Internet et que les interceptions peuvent s'appliquer à l'ensemble des données qui circulent.

3. L'Assemblée nationale, de son côté, a, on l'a vu, précisé le champ des opérateurs concernés qui sont les titulaires d'une licence attribuée dans les conditions prévues par les articles L.33-1 (réseaux de télécommunications ouverts au public) et L.34-1 (fourniture du service téléphonique au public).

Le rapporteur général du budget a souligné, d'autre part, les incertitudes liées à la nature des investissements nécessaires, actuellement difficiles à décrire et impossibles à chiffrer, qui varieront en fonction des réseaux et de la technologie d'interception choisie par l'Etat.

Il a également observé que la répartition entre coûts d'investissement et de fonctionnement risquerait de s'avérer délicate.

4. Votre commission des finances, en ce qui la concerne, souhaite connaître ce que recouvrent « les autres prescriptions exigées par la défense et la sécurité publique » selon les termes de l'actuel premier alinéa, maintenu, de l'article L.35-6 (les prestations correspondants devant continuer à se voir garantir, pour les cahiers des charges, une « juste rémunération »).

En quoi diffèrent-elles de la notion d'« interception » ?

V. LES AUTRES PROBLÈMES SOULEVÉS

A. LES PROBLÈMES DE NATURE JURIDIQUE


Le rapporteur général du budget de l'Assemblée nationale s'est interrogé sur le point de savoir si l'absence de compensation d'une charge résultant d'une obligation imposée à une catégorie d'acteurs économiques privés, pour un motif d'intérêt général, portait atteinte au principe d'égalité devant les charges publiques, reconnu par le Conseil constitutionnel.

France Télécom reçoit bien une rémunération (additionnelle à la rémunération d'interconnexion), financée -il est vrai- par le secteur privé, au titre de ses obligations de service public (service universel), pourquoi n'en irait-il pas de même pour celles supportées par les opérateurs au titre des exigences de la défense et de la sécurité publique ?

Quel sera, d'autre part, le régime des extensions et mises à niveau des réseaux existants ? Sont-elles régies par les dispositions en vigueur des cahiers des charges des opérateurs concernés ? Dans quelle mesure ces documents peuvent-ils être modifiés unilatéralement (dès lors que ni le maintien du service public existant, ni la satisfaction des besoins des usagers ne sont en cause) ?

Du point de vue, enfin, des libertés publiques, le président de la commission des finances de l'Assemblée nationale s'est enquis, à l'occasion de l'examen de ce texte, du contrôle de l'utilisation des équipements correspondants.

B. LE MÉCONTENTEMENT DES OPÉRATEURS

L'association française des opérateurs privés de télécommunications s'est indignée de ce que l'Etat puisse ainsi se « décharger » du financement d'investissements liés à l'accomplissement de ses missions régaliennes de sécurité.

Elle a souligné aussi les nombreuses imprécisions de l'article concernant la nature des investissements, les données interceptées, les acteurs concernés...

France Télécom a, de son côté, fait valoir que les « interceptions constituent des missions étrangères à l'activité des opérateurs ».

La CSSPPT a cru utile, pour sa part, de demander, dans l'intérêt des opérateurs :

- l'instauration d'un système durable en matière d'interception des télécommunications ;

- le respect des usages habituellement suivis dans de pareilles situations, lors de la discussion du montant des rémunérations versées en contrepartie des obligations imposées ;

- la négociation préalable de toutes modifications apportées aux cahiers des charges actuellement en vigueur, conformément aux modalités prévues par la loi.

VI. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

L'identification des assassins du préfet Erignac, grâce au repérage des appels préalables passés à partir de téléphones portables, à proximité du lieu du crime, démontre, s'il en était besoin, l'intérêt de pouvoir recourir, dans des cas exceptionnels, à des techniques d'interception de correspondances émises par la voie des télécommunications.

Cependant, autant il peut se justifier de mettre à la charge des opérateurs, donc, en fin de compte, de l'usager, le financement des coûts imputables aux obligations de service universel, inhérentes au service public des télécommunications, autant cela semble illégitime, s'agissant des prescriptions exigées par la défense et la sécurité publique, même si l'intérêt général est en cause.

S'agissant, par comparaison, des sociétés concessionnaires d'autoroutes, le Conseil d'Etat a annulé, par un arrêt du 30 octobre 1996, des décrets ayant pour objet de les faire participer aux dépenses de la gendarmerie relatives à la surveillance de leurs réseaux, estimant qu'il revenait au contribuable de supporter ces charges, régaliennes par excellence.

Encore, n'était-il question que de fonctionnement et non d'investissements !

Pour quelles raisons par ailleurs est-il jugé nécessaire de légiférer dans une telle précipitation à partir d'un texte aussi flou ? Le décret, en Conseil d'Etat prévu ne doit préciser que les conditions de la participation de l'Etat au financement des charges d'exploitation considérées.

L'avis de l'ART sur le présent article n'a pas été communiqué au Parlement.

Trop d'incertitudes demeurent, par ailleurs, concernant notamment :

- les investissements (leur nature, leur ordre de grandeur, la façon de les distinguer des charges d'exploitation...) ;

- les opérateurs concernés (comment seront traités ceux qui procèdent à une extension de leurs réseaux actuels ? Les fournisseurs d'accès à Internet sont-ils visés ?) ;

- les « autres prescriptions » qui semblent distinguées de la fonction d'interception.

Enfin, d'un point de vue juridique, n'y a-t-il pas :

- rupture d'égalité devant les charges publiques entre les exploitants des réseaux actuels et ceux des prochaines infrastructures faisant appel à des technologies dont certaines nécessiteront des investissements plus coûteux que d'autres ?

- absence de juste contrepartie 85( * ) du surcoût imposé par le législateur aux opérateurs pour l'accomplissement des missions d'intérêt général qui leur incombent, dans le cadre du service public des télécommunications au titre de la défense et de la sécurité publique, alors que France Télécom se voit compenser ses charges de service universel ?

La CSSPPT a suggéré, par exemple, une défiscalisation des dépenses correspondantes ou une prolongation de la durée des licences.

Enfin, comment justifier, l'opportunité de la mise à la charge d'agents économiques privés du financement d'une des missions de l'Etat les plus régaliennes ?

Votre commission peut comprendre le souci du gouvernement de ne pas aggraver les charges publiques mais le secrétaire d'Etat au budget a estimé, devant nos collègues députés, que le prix supplémentaire résultant, pour les opérateurs, de l'obligation qui leur est faite de financer un dispositif d'interception devrait être « raisonnable ».

Dès lors, pourquoi ne pas le faire supporter par l'Etat, ce qui serait plus naturel et plus équitable, d'autant que ce dernier va disposer des revenus confortables tirés de l'attribution des licences UMTS ?

Pour votre commission la rédaction de cet article doit être précisée et l'avis de l'ART lui être communiqué.

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.

ARTICLE 31

Affectation au fonds national pour l'emploi (FNE) d'une partie du produit de la cotisation versée par les employeurs licenciant des salariés âgés de plus de 50 ans

Commentaire : le présent article propose d'affecter au financement des allocations spéciales du fonds national de l'emploi le produit supplémentaire résultant du nouveau barème de la « contribution Delalande » institué par des dispositions réglementaires faisant l'objet d'un recours en annulation.

I. LE DISPOSITIF EN VIGUEUR

A. LA « CONTRIBUTION DELALANDE », UN DISPOSITIF DE PRÉVENTION DES LICENCIEMENTS DES SALARIÉS ÂGÉS

1. L'économie générale du dispositif
La « contribution Delalande »
, du nom de notre collègue député à l'origine de cette disposition, est prévue à l'article L. 321-13 du code du travail.

Elle a été créée par la loi n° 87-518 du 10 juillet 1987 modifiant le code du travail et relative à la prévention et à la lutte contre le chômage de longue durée, afin de protéger les salariés âgés difficilement reclassables du risque du licenciement , et de sanctionner le comportement des employeurs faisant un usage détourné des dispositions favorables prises par le régime d'assurance-chômage pour ces salariés. Il convient en effet de rappeler que le contexte était notamment marqué par la suppression de l'autorisation administrative de licenciement.

Cette contribution a été doublée en 1992 et étendue à toute rupture d'un contrat de travail à partir de 50 ans. De nombreux cas d'exonération sont néanmoins prévus par la loi, notamment pour le premier licenciement intervenant sur une période d'un an dans une entreprise de moins de 20 salariés.
2. La réforme intervenue en 1998
Le décret n° 98-1201 du 28 décembre 1998 a modifié le régime de la « contribution Delalande » en instituant un nouveau barème.

Il a ainsi doublé le montant de la contribution due pour les entreprises de plus de 50 salariés, et l'a augmenté de moitié pour les entreprises de moins de 50 salariés à partir de 55 ans, le nombre de salariés âgés indemnisés par le régime d'assurance-chômage croissant significativement à partir de cet âge. Son montant est fixé à un niveau compris entre un et six mois de salaire brut en fonction de l'âge auquel intervient la rupture du contrat de travail pour les entreprises de moins de 50 salariés, et à un niveau compris entre deux mois et un an de salaire brut pour les entreprises de plus de 50 salariés.

Par ailleurs, la loi n° 99-750 du 8 juillet 1999 tendant à limiter les licenciements des salariés de plus de 50 ans, qui est issue d'une proposition de loi de notre collègue député Alain Belviso et des membres du groupe communiste et apparentés de l'Assemblée nationale, a complété l'article L. 321-13 du code du travail, en créant un nouveau fait générateur du versement de la « contribution Delalande ».

Désormais, celle-ci est due pour toute rupture du contrat de travail d'un salarié âgé de 50 ans ou plus résultant de l'adhésion à une convention de conversion. Par ailleurs, cette loi a modifié un cas d'exonération : en cas de conclusion par l'entreprise d'une convention d'allocations spéciales du fonds national pour l'emploi (AS-FNE), la contribution supplémentaire n'est pas due dès lors que le salarié licencié est admis au bénéfice de cette convention.

Selon le ministère de l'emploi et de la solidarité, les données statistiques sur le poids des salariés de plus de 50 ans dans les licenciements économiques semblent traduire l'impact du relèvement des taux de la « contribution Delalande » à la fin de l'année 1998 : ces salariés représentaient 30,9 % des salariés licenciés au premier trimestre 1999, contre 35,9 % un an auparavant, cette tendance se confirmant au deuxième trimestre 1999 (27,6 % contre 30,2 %). En revanche, il serait encore trop tôt pour évaluer l'impact de la loi du 8 juillet 1999 précitée.
B. ÉLÉMENTS DE BILAN FINANCIER
En application des dispositions de l'article L. 321-13 du code du travail, la « contribution Delalande » est versée par les entreprises aux ASSEDIC et participe au financement des dépenses prises en charge par celles-ci.

Le rendement pour le régime d'assurance-chômage de la « contribution Delalande » s'est élevé à 1,7 milliard de francs en 1996, 1,9 milliard de francs en 1997, 1,6 milliard de francs en 1998 et 2,3 milliards de francs en 1999.

Une partie du montant recueilli en 1999 a été reversée à l'Etat. En effet, l'arrêté interministériel du 1 er avril 1999 fixant les conditions d'adhésion et les droits des bénéficiaires des conventions d'AS-FNE a prévu que le régime d'assurance-chômage reverse à l'Etat 50 % des recettes annuelles encaissées au titre de cette contribution, dans le cadre d'une participation supplémentaire du régime au financement des AS-FNE.

Le montant prévisionnel de cette participation est déterminé chaque année par application du taux de 50 % au montant total annuel de la contribution encaissé deux ans auparavant, cette disposition n'étant toutefois pas applicable aux contributions versées au titre de 1999 et 2000. L'Etat déduit mensuellement cette participation des sommes qu'il verse aux organismes gestionnaires du régime d'assurance-chômage pour le paiement des allocations dues aux bénéficiaires des conventions d'AS-FNE.

L'arrêté interministériel précité a donc mis en place une nouvelle participation du régime d'assurance-chômage au financement des AS-FNE , qui s'ajoute à la prise en charge par l'UNEDIC de 7 à 9 % du salaire journalier de référence prévue par le même arrêté, sur la base d'un protocole d'accord entre l'Etat et les partenaires sociaux concernant l'assurance-chômage et le FNE.

Sur la base de ces dispositions, la participation de l'UNEDIC au financement des AS-FNE au titre de la « contribution Delalande » a été fixée à 1,15 milliard de francs en 1999 et à 1,5 milliard de francs pour 2000.
C. DES DISPOSITIONS CONTESTÉES
Par un recours formé le 4 juin 1999, l'UNEDIC a attaqué devant le Conseil d'Etat les dispositions relatives au financement de la « contribution Delalande » de l'arrêté précité, et demandé son annulation.

Elle contestait en effet l'absence de base législative permettant au gouvernement de modifier le barème de la « contribution Delalande ».

Le ministère de l'emploi et de la solidarité a indiqué que « parallèlement au traitement de ce contentieux, l'Etat s'efforce de réfléchir à un règlement du litige qui l'oppose sur cette question à l'UNEDIC, dans le cadre plus général de la clarification des relations financières entre les deux partenaires, et de l'utilisation qui pourrait être faite de ressources supplémentaires dégagées au bénéfice de l'UNEDIC, notamment en vue de l'amélioration de la couverture des demandeurs d'emploi ».
II. LES DISPOSITIONS DU PRÉSENT ARTICLE
Le présent article tend à valider de façon anticipée - « sécuriser » selon le gouvernement - les dispositions de l'arrêté du 1 er avril 1999 précité, sur lequel l'UNEDIC a formé un recours en annulation.

Afin de ne pas être lié par la décision à venir du Conseil d'Etat, qu'il préjuge donc défavorable pour lui, le gouvernement propose de reprendre les dispositions de l'arrêté du 1 er avril 1999, mais cette fois-ci, en leur donnant une valeur législative.

De surcroît, cette solution présente l'avantage pour lui de rendre inopérant le recours engagé par l'UNEDIC, l'argument de cette dernière - le défaut de base législative de l'arrêté du 1 er avril 1999 - n'ayant désormais plus de fondement.

Le présent article prévoit ainsi que :

- l'UNEDIC participe, à compter de 2001, au financement des allocations spéciales du fonds national pour l'emploi, à hauteur de la moitié du produit annuel de la « contribution Delalande » ;

- pour les années 1999 et 2000, elle y participe à hauteur, respectivement, de 1,15 milliard de francs et 1,5 milliard de francs.
III. LA POSITION DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE
L'Assemblée nationale a adopté un amendement présenté par le gouvernement, qui complète le présent article de manière à y regrouper l'ensemble des dispositions relatives au cofinancement par l'UNEDIC des allocations spéciales du fonds national pour l'emploi.

Il s'agit surtout, pour le gouvernement, de confirmer les modalités de financement desdites allocations selon le mécanisme qu'il souhaiterait voir appliquer au régime d'assurance-chômage.
IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION
D'une manière générale, votre commission rappelle qu'elle est hostile par principe aux validations législatives, d'autant plus que celle qui est proposée par le présent article intervient de façon « préventive ».

Par ailleurs, elle tient à rappeler l'analyse que notre collègue Louis Souvet avait développée, au nom de la commission des affaires sociales, lors de l'examen de la proposition de loi tendant à limiter les licenciements des salariés de plus de cinquante ans, devenue la loi du 8 juillet 1999 précitée 86( * ) .

Quel est le bénéficiaire du produit de la « contribution Delalande » ?

Dans le rapport qu'il avait établi à l'occasion de l'examen de la proposition de loi précitée, notre collègue Louis Souvet a analysé les conséquences de la modification du barème de la « contribution Delalande », qui sont à l'origine des problèmes soulevés par le présent article.

Le rapporteur s'interrogeait ainsi sur « la nature exacte de cette contribution : la « contribution Delalande » constitue-t-elle une contribution de dissuasion ou une contribution de rendement ? Dans le premier cas, l'objectif consiste à dissuader, autant que possible, les licenciements des salariés : l'idéal serait donc que le produit de cette contribution soit quasiment nul, ce qui témoignerait de son efficacité. Dans le second cas, la finalité est tout autre : il s'agit d'accroître le produit d'un prélèvement en majorant son taux et en élargissant son assiette ».

Il poursuivait : « le bénéficiaire final de ces recettes supplémentaires n'est cependant pas encore définitivement connu. D'un strict point de vue juridique, l'UNEDIC est seul bénéficiaire des sommes prélevées au titre de la « contribution Delalande ». L'article L. 321-13 du code du travail prévoit en effet que toute rupture du contrat de travail d'un salarié d'un âge déterminé par décret ouvrant droit au versement de l'allocation d'assurance-chômage de l'UNEDIC entraîne l'obligation pour l'employeur de verser aux ASSEDIC la « contribution Delalande ». Si les recettes supplémentaires iront donc, dans un premier temps, à l'UNEDIC, selon la stricte application de la loi, il n'est cependant pas certain que cet organisme en garde effectivement le bénéfice final ».

Et notre collègue Louis Souvet de conclure : « le gouvernement semble en réalité décidé à prélever sur les sommes qu'il avance à l'UNEDIC au titre des préretraites FNE - versées par l'UNEDIC pour le compte de l'Etat - une somme équivalente au surcroît de recettes induit par le doublement et l'extension de la « contribution Delalande » ».

On ne peut qu'être frappé, au regard de la situation présente, de la
justesse de cette analyse.

Votre commission ne saurait approuver l'atteinte que le gouvernement, par l'intrusion dans le dialogue social que constitue le présent article, porte à la liberté de gestion des partenaires sociaux.

Elle ne peut non plus cautionner son attitude consistant à chercher en permanence à mettre à contribution le régime d'assurance-chômage, ou les régimes sociaux en général, pour financer des actions qui relèvent du budget de l'Etat.

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.

ARTICLE 32

Versement d'une contribution à l'Etat par les organismes collecteurs paritaires agréés au titre du congé individuel de formation et du compte de temps de formation

Commentaire : le présent article propose de verser au budget de l'Etat une contribution de 500 millions de francs provenant des fonds de la formation professionnelle.

I. UN PRÉLÈVEMENT D'AUTORITÉ QUI PONCTIONNE LES FONDS DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE
Le présent article prévoit que le comité paritaire du congé individuel de formation (COPACIF) verse une contribution de 500 millions de francs au budget de l'Etat sur les excédents financiers des organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA)
, qui, en vertu des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 961-12 du code du travail, gèrent les contributions des employeurs au titre du congé individuel de formation (CIF) et du compte de temps de formation (CTF).

Le comité paritaire du congé individuel de formation (COPACIF)

L'article L. 931-1 du code du travail définit le congé individuel de formation (CIF) comme un droit, pour le salarié, de bénéficier d'une formation au cours de sa vie professionnelle, de façon indépendante du plan de formation de l'entreprise.

L'employeur ne peut différer qu'une seule fois le CIF, qui se déroule pendant le temps de travail.

Le CIF est financé par une participation des entreprises égale à 0,20 % des salaires, versée à un organisme paritaire agréé par l'Etat au titre du CIF (OPACIF). Un OPACIF a pour mission statutaire de collecter les contributions des entreprises dues au 28 février de chaque année. Les sommes collectées au titre du congé individuel de formation s'élèvent à environ 3 milliards de francs.

Or, les OPACIF ayant dégagé d'importants excédents financiers dans le passé - 3,5 milliards de francs bruts et 1,9 milliard de francs nets en 1995 -, l'article 29 de la loi de finances pour 1996 a rendu possible la mutualisation de ces excédents , en créant un fonds national habilité à gérer les excédents financiers dont peuvent disposer certains organismes collecteurs paritaires gérant les contributions des employeurs au financement du CIF. La gestion de ce fonds a été confiée au comité paritaire du congé individuel de formation (COPACIF), organisme créé en 1982 et investi d'une mission de coordination en matière de CIF.

L'article 131 de la loi de finances pour 2000 a étendu le champ de compétence du fonds créé par la loi de finances pour 1996 précitée à la gestion des excédents financiers dont disposent les OPCA gérant les contributions des employeurs affectées au financement du CTF.

Le capital de temps de formation (CTF)

Le capital de temps de formation (CTF) a pour objet de permettre aux salariés de suivre au cours de leur vie professionnelle, à leur demande, pendant le temps de travail, des actions de formation prévues au plan de formation de leur entreprise, dans le but de se perfectionner, d'élargir ou d'accroître leur qualification.

Sa mise en oeuvre a été confiée aux partenaires sociaux par la voie d'un accord national interprofessionnel, complété par des conventions de branche ou des accords professionnels étendus.

Le CTF, proposé par la loi n° 93-1313 quinquennale sur l'emploi du 20 décembre 1993, a véritablement été mis en place dans certaines branches et secteurs professionnels à compter de 1996. En effet, après la conclusion par les partenaires sociaux, de l'avenant du 5 juillet 1994 à l'accord national interprofessionnel du 3 juillet 1991, et d'un certain nombre d'accords de branche ou professionnels, la publication de plusieurs textes, légaux et réglementaires, fut nécessaire pour sa mise en place effective, en particulier en ce qui concerne son financement.

L'article 78 de la loi n° 95-116 du 4 février 1995 portant diverses dispositions d'ordre social a confirmé le principe posé par l'avenant du 5 juillet 1994, selon lequel le CTF sera financé , par voie d'accords de branche, sur 50 % au plus de la participation des entreprises au financement du congé individuel de formation (CIF) à hauteur de 0,20 % des salaires . Cette disposition a été codifiée au 1° de l'article L. 951-1 du code du travail.

Les modalités de collecte de la contribution destinée au CTF ont été déterminées par l'avenant du 18 novembre 1996. Dans le cadre du financement des actions de formation professionnelle continue, les entreprises versent à l'organisme paritaire collecteur agréé (OPCA) de la branche professionnelle concernée, avant le 1 er mars de chaque année, la contribution CTF, dont le montant est égal au plus à 0,10 % des salaires de l'année de référence.

Le gouvernement avait précisé que la centralisation des disponibilités excédentaires du CTF permettrait de procéder à l'affectation d'une contribution de 500 millions de francs, versée par le COPACIF au budget de l'emploi par voie de fonds de concours, afin de compenser la diminution des crédits destinés au financement de l'indemnité compensatrice forfaitaire à l'apprentissage 87( * ) .

Votre commission avait alors estimé que cette disposition « ne tend, finalement, à centraliser les disponibilités du CTF auprès du COPACIF que pour mieux opérer un futur prélèvement sur ce dernier au profit du budget de l'Etat ». La justesse de son appréciation apparaît aujourd'hui.

Les choses, toutefois, ne se sont pas passées comme le gouvernement l'avait prévu.

L'article 131 de la loi de finances pour 2000 disposait que les excédents du COPACIF peuvent « exceptionnellement concourir aux actions de l'Etat en matière de formation professionnelle ». Ce prélèvement de 500 millions de francs avait dès lors été qualifié de « volontaire » : puisqu'il devait être opéré à titre exceptionnel, le conseil d'administration du COPACIF y procéderait de son plein gré...

Or, les partenaires sociaux qui composent le conseil d'administration du COPACIF ont refusé de verser cette contribution. Dès lors, comme l'a elle-même indiqué Mme Élisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité, au cours de son audition devant la commission des affaires sociales du Sénat, le 21 novembre dernier, le gouvernement a dû recourir, à l'occasion du présent projet de loi de finances rectificative, à un « prélèvement d'autorité ».

On est ainsi passé d'un prélèvement exceptionnel volontaire à un prélèvement récurrent autoritaire.

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION
A. UNE INCITATION À LA MAUVAISE GESTION

Le gouvernement, pour légitimer ce prélèvement, avancera probablement l'argument selon lequel il mobilise une « trésorerie dormante » au profit de la formation en alternance.

Votre commission observe que de tels prélèvements, en principe « exceptionnels », sont de plus en plus fréquents, et désormais presque annuels.

Ils traduisent également une mauvaise gestion des finances publiques , qui conduit à faire financer des dépenses courantes par des « recettes de poche », à caractère exceptionnel. Par ailleurs, en pénalisant les trésoreries excédentaires, ces ponctions constituent, de fait, une incitation à la mauvaise gestion.

Prélèvements opérés depuis 1996 sur les fonds de la formation continue

En 1996, 1997 et 1998, les fonds de la formation professionnelle continue ont fait l'objet de trois prélèvements exceptionnels :

- au titre du COPACIF

Le comité paritaire du congé individuel de formation (COPACIF) est un fonds national habilité à recueillir les excédents financiers des organismes collecteurs gérant les contributions des employeurs au financement du congé individuel de formation.

En 1996, l'article 29 de la loi de finances pour 1996 a soumis le fonds à une contribution exceptionnelle au budget de l'Etat égale à 60 % de la différence entre, d'une part, le cumul des montants de la trésorerie des fonds au 31 décembre 1995 et des excédents financiers recueillis au 31 mars 1996 et, d'autre part, le montant des sommes versées à des organismes collecteurs, après constatation de leurs besoins de trésorerie entre le 1 er janvier 1996 et le 1 er août 1996. Cette contribution s'est élevée à 1,465 milliard de francs.

- au titre de l'AGEFAL

L'association de gestion du fonds des formations en alternance (AGEFAL), association régie par les dispositions de la loi de 1901, est chargée de réguler le système de financement de l'alternance. Elle a fait l'objet de deux prélèvements :

. l'article 40 de la loi de finances pour 1997 a institué une contribution exceptionnelle au budget de l'Etat égale à 40 % de la trésorerie nette de l'organisme au 31 juillet 1997, soit 1,37 milliard de francs ;

. l'article 75 de la loi du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier a institué une contribution exceptionnelle au budget de l'Etat de 500 millions, avant le 1 er septembre 1998. Le paiement a été effectué le 31 juillet 1998.

Ces trois prélèvements, liés à l'existence d'une trésorerie excédentaire, ont été institués par voie législative, sous forme de contributions exceptionnelles au budget de l'Etat.

Les versements ont été effectués auprès du Trésor Public.

Les prélèvements 1996 et 1997 ont été pris en compte dans l'équilibre des décrets d'avances prévoyant au profit du budget de l'emploi une ouverture de crédits pour financer l'apprentissage et, en 1997, les contrats de qualification.

Le prélèvement de 1998 a contribué à l'équilibre général de la loi de finances.

En 1999, une contribution de 500 millions de francs a été versée par l'AGEFAL, via la procédure de fonds de concours, et rattachée sur le budget de l'emploi, sur la ligne finançant les primes d'apprentissage (chapitre 43-70, article 11).

En 2000, une contribution de 500 millions de francs du COPACIF est prévue, toujours par voie de concours, au bénéfice de la même ligne budgétaire.

Au projet de loi de finances pour 2001, la contribution prévue à ce titre est de 150 millions de francs.

Soit un total de 4.485 millions de francs de 1996 à 2001.

Au regard du caractère récurrent des prélèvements opérés sur les fonds de la formation professionnelle, il apparaît que ces excédents sont structurels. Il conviendrait, dès lors, de revoir le mode de financement des organismes collecteurs de fonds, et de réduire, le cas échéant, les cotisations versées par les entreprises. Il s'agit sans doute du meilleur moyen de faire disparaître les « trésoreries dormantes ».

B. DES EFFETS DOMMAGEABLES POUR LA FORMATION PROFESSIONNELLE
Votre commission ne peut que s'en remettre sur ce point à l'analyse développée par notre collègue Annick Bocandé, rapporteur pour avis des crédits de la formation professionnelle de notre commission des affaires sociales, le 4 décembre dernier 88( * ) .

Elle estimait ainsi que « les conséquences de ces prélèvements successifs sont loin d'être indolores ». Elle rappelait notamment que la situation de trésorerie de l'AGEFAL était aujourd'hui très dégradée, à tel point que « les OPCA ne sont plus en mesure de prendre en charge » les contrats en alternance. Quant au COPACIF, « ses perspectives sont tout aussi préoccupantes », plusieurs milliers de demandes de CIF ne pouvant alors être financées.

Il est dès lors clair que ces prélèvements successifs, ayant fini par assécher la trésorerie des organismes concernés, fragilisent le financement de la formation professionnelle.

De surcroît, il convient de veiller à ce que ce prélèvement soit effectivement affecté au financement de la formation professionnelle, notre collègue Didier Migaud, rapporteur général du budget à l'Assemblée nationale, ayant insisté sur le fait que « cette recette nouvelle serait versée au budget de l'Etat sans pouvoir être affectée au budget de l'emploi, contrairement à ce que permet la procédure des fonds de concours » 89( * ) .

Votre commission rappelle qu'elle s'est désormais fixée une doctrine en ce qui concerne les prélèvements opérés sur les trésoreries d'organismes publics ou parapublics. Si de tels prélèvements peuvent, dans certains cas, être légitimes, leur caractère systématique, en revanche, est le reflet d'une mauvaise gestion.

Lors du prélèvement sur les fonds de l'AGEFAL, décidé en 1998, votre rapporteur général écrivait ainsi : « votre commission vous demande d'autoriser pour la dernière fois un tel prélèvement sur la trésorerie des organismes chargés de collecter les fonds de la formation professionnelle ».

Mettant en oeuvre sa doctrine, votre commission estime légitime et indispensable la suppression du présent article.

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.

ARTICLE 33

Codification du reversement aux collectivités locales de certaines astreintes prononcées par les juridictions administratives

Commentaire : le présent article a pour objet d'affecter au budget général la part de certaines astreintes prononcées par les juridictions administratives qui n'est pas versée au requérant.

I. LE DROIT EN VIGUEUR


La loi n° 80-539 du 16 juillet 1980 relative aux astreintes prononcées en matière administrative a autorisé le juge administratif à prononcer des astreintes pour contraindre l'administration à exécuter une décision de justice.

L'article 5 de cette loi autorise le juge administratif à décider de ne pas faire bénéficier le requérant de la totalité du montant de l'astreinte. Il ajoute que la part qui n'est versée au requérant alimente le « Fonds d'équipement des collectivités locales ».

Plusieurs années se sont écoulées entre le début de l'examen par le Parlement du projet qui allait devenir la loi du 16 juillet 1980 et sa promulgation. Entre temps, le Fonds d'équipement des collectivités locales est devenu le Fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA), en application de l'article 66 de la loi de finances pour 1978.

Les principes qui régissent le FCTVA sont différents de ceux qui s'appliquaient à l'ancien Fonds d'équipement. Ce dernier était une dotation budgétaire répartie entre les collectivités en fonction de critères d'attribution. Les astreintes auraient du venir accroître la masse totale de l'enveloppe, donc augmenter le montant des sommes à répartir.

Dans le régime du FCTVA les attributions sont déterminées en appliquant un taux de compensation forfaitaire au montant des dépenses réelles d'équipement des bénéficiaires du fonds. Le montant total du FCTVA est la somme de l'ensemble des compensations dues au titre de l'exercice.

Avec un tel système, le dispositif prévu par la loi du 16 juillet 1980 était inopérant puisque le produit des astreintes serait venu majorer le montant du FCTVA, mais ces crédits n'auraient pas pu être utilisés puisqu'ils n'auraient constitués la « contrepartie » d'aucun investissement réalisé par une collectivité locale.

En pratique, depuis 1981, le produit des astreintes n'est donc pas étéaffecté au FCTVA mais au budget général.

Les sommes concernées n'ont semble-t-il jamais dépassé 200.000 francs.

II. LE DISPOSITIF PROPOSE

L'article 33 du présent projet de loi de finances, avant son examen en première lecture par l'Assemblée nationale, comporte deux alinéas.

Le I modifie l'article 911-8 du code des juridictions administratives de manière à prévoir que la part des astreintes qui n'est pas versée au requérant alimente non plus le fonds d'équipement des collectivités locales, mais la « dotation globale d'équipement des communes ».

Cette affectation est plus logique. La dotation globale d'équipement des communes est inscrite au budget du ministère de l'intérieur. Elle est répartie entre les communes et les structures intercommunales en application des dispositions de l'article L. 2334-33 et L. 2334-34 du code général des collectivités territoriales. Le gouvernement souhaitait que le produit des astreintes vienne augmenter la masse des crédits à répartir.

Il convient de préciser que le I de cet article constitue en réalité la « deuxième étape » de la codification au sein du code des juridictions administratives de l'article 5 de la loi du 16 juillet 1980. La première étape a été réalisée dans le cadre de l'ordonnance n° 2000-387 du 4 mai 2000 relative à la partie législative du code des juridictions administratives.

L'ordonnance, si elle a pu codifier le principe du non versement au requérant de la totalité des astreintes, n'a pu prévoir l'affectation de la part des astreintes non versées au requérant car il s'agit d'une affectation de recettes qui, en application de l'article 18 de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959 relative aux lois de finances, relève du domaine exclusif des lois de finances.

Le II du présent article abroge l'article 5 de la loi du 16 juillet 1980, dorénavant codifié.

III. LES MODIFICATIONS APPORTEES PAR L'ASSEMBLEE NATIONALE

L'Assemblée nationale a considéré que le caractère modique des sommes en jeu ne justifiait pas que le montant des astreintes non versées au requérant soit affecté à la dotation globale d'équipement des communes. Les députés ont considéré qu'il convenait de continuer à en faire bénéficier le budget général.

IV . LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre rapporteur général considère qu'il serait préférable de revenir à l'esprit de la loi du 16 juillet 1980 et de faire bénéficier les collectivités locales des astreintes non versées au requérant.

A cette fin, il vous proposera un amendement tendant à rétablir la rédaction initiale du présent article.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 34 (nouveau)

Modification du mode de calcul du coefficient d'intégration fiscale des établissements publics de coopération intercommunale à taxe professionnelle unique

Commentaire : le présent article a pour objet de prendre en compte la compensation de la suppression de la part « salaires » de la taxe professionnelle dans le mode de calcul du coefficient d'intégration fiscale des établissements publics de coopération intercommunale à taxe professionnelle unique.

Le présent article résulte d'un amendement présenté par notre collègue député Augustin Bonrepaux lors de l'examen du présent projet de loi de finances rectificative en première lecture par l'Assemblée nationale.

I. LE DROIT ACTUEL

A. LE DISPOSITIF PRÉVU PAR LA LOI DU 12 JUILLET 1999


Le coefficient d'intégration fiscale (CIF), utilisé pour calculer le montant des attributions de dotation globale de fonctionnement (DGF) aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre, est défini au III de l'article L. 5211-30 du code général des collectivités territoriales.

Le CIF est déterminé en rapportant les recettes perçues par l'EPCI aux recettes perçues sur l'ensemble de son territoire par lui-même, ses communes membres et les syndicats auxquels ils appartiennent.

Par conséquent, plus le produit perçu par l'EPCI (le numérateur du CIF) représente une part importante du produit total perçu sur son territoire (le dénominateur du CIF), plus le CIF de l'EPCI est élevé, et plus ses attributions de DGF sont importantes.

Depuis la loi du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale, le numérateur du CIF (les recettes perçues par le groupement) est minoré des dépenses de transferts 90( * ) .

Les dépenses de transfert sont définies au IV de l'article L. 5211-30 du code général des collectivités territoriales : « les subventions, participations, contingents et reversements constatés dans le dernier compte administratif disponible, versés par l'établissement public de coopération intercommunale aux collectivités territoriales, à leurs établissements publics, aux établissements publics locaux non rattachés et aux associations syndicales autorisées » 91( * ) .

Parmi ces dépenses de transfert figurent , pour les établissements publics de coopération intercommunale faisant application du régime fiscal de la taxe professionnelle unique, les attributions de compensation versées par les EPCI à leurs communes membres.

Les attributions de compensation correspondent à la différence entre le produit de la taxe professionnelle désormais perçu par les groupements et le coût des compétences transférées par les communes. Comme il n'y a pas de raison que, à la date du passage à la taxe professionnelle unique, les communes abandonnent des ressources supérieures à la somme dont le groupement a besoin pour exercer ses compétences, la rédaction de l'article 1609 nonies C issue de la loi du 12 juillet 1999 a prévu que la différence soit reversée aux communes.

Le produit de taxe professionnelle pris en compte pour calculer l'attribution de compensation comprend le produit proprement dit, mais également la compensation de la suppression de la part « salaires » de la taxe professionnelle et, le cas échéant, les compensations versées en application de la loi du 14 novembre 1996 relative au pacte de relance sur la ville (PRV) et de la loi du 26 décembre 1996 relative à la zone franche de Corse (ZFC).

Il ressort de ces différents dispositifs que le numérateur du coefficient d'intégration fiscale des EPCI à taxe professionnelle unique est obtenu, dans le droit actuel, de la manière suivante 92( * ) :

numérateur du CIF = produit perçu par l'EPCI - attribution de compensation - autres dépenses de transfert

soit : numérateur du CIF= produit perçu par l'EPCI - ((produit TP + compensation part « salaires » + compensation PRV + compensation ZFC) - coût des compétences transférées) - autres dépenses de transfert

B. LES PROBLEMES POSÉS PAR LA REFORME DE LA TAXE PROFESSIONNELLE

En l'état actuel du droit, la suppression progressive de la part « salaires » de la taxe professionnelle se traduit par une diminution des CIF des EPCI à taxe professionnelle unique.

En effet, le montant de l'attribution de compensation est calculé à la date de passage à la taxe professionnelle unique. Il est ensuite gelé, l'article 1609 nonies C précisant que l'attribution de compensation « ne peut être indexée ».

Par conséquent, la disparition des bases de taxe professionnelle va réduire le montant des recettes perçues par les groupements, sans que le montant de l'attribution de compensation (qui prend en compte le produit de la taxe professionnelle perçu à la date du passage à la taxe professionnelle unique) ne soit quant à lui revu à la baisse.

Il en résultera une baisse du numérateur du CIF d'autant plus importante que l'écart entre le produit de la taxe professionnelle à la date du passage à la taxe professionnelle et le produit pris en compte pour le calcul du CIF au titre d'une année est important 93( * ) .

Par conséquent, plus les recettes de taxe professionnelle d'un groupement liées aux bases « salaires » sont importantes, plus le CIF de ce groupement va baisser.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ


Le présent article propose de neutraliser les effets pervers de la réforme de la taxe professionnelle sur le CIF des EPCI à taxe professionnelle unique en prenant en compte, dans le produit de taxe professionnelle retenu pour le calcul du CIF, les mêmes compensations que celles intervenant dans le calcul de l'attribution de compensation.

De cette façon, la baisse du produit de taxe professionnelle stricto sensu serait compensée par l'augmentation du montant des compensations reçues en contrepartie.

Le numérateur du CIF des EPCI à taxe professionnelle unique serait donc ainsi modifié :

- droit actuel :

numérateur du CIF = produit perçu par l'EPCI - ((produit TP + compensation part « salaires » + compensation PRV + compensation ZFC) - coût des compétences transférées) - autres dépenses de transfert

- dispositif proposé 94( * ) :

numérateur du CIF = produit perçu par l'EPCI + (compensation part « salaires » + compensation PRV + compensation ZFC) - ((produit TP + compensation part « salaires » + compensation PRV + compensation ZFC) - coût des compétences transférées) - autres dépenses de transfert

Ce dispositif devrait être défavorable aux groupements à taxe professionnelle unique dans lesquelles les recettes liées aux bases « salaires » de la taxe professionnelle représentent une faible part des recettes totales. En effet, en 2000, leur CIF a été moins pénalisé par les effets de la disparition de la part « salaires » que les CIF des groupements dans lesquelles les bases « salaires » représentaient une part importante des bases de taxe professionnelle. Ils ont donc bénéficié en 2000 95( * ) d'un avantage relatif qui disparaîtra dès 2001 si les dispositions du présent article entrent en vigueur.

Il convient d'insister sur l'importance de la prise en compte dans le produit fiscal retenu pour calculer le numérateur du CIF des compensations versées au titre de la zone franche de Corse. Les exonérations de taxe professionnelle en Corse sont en effet très importantes et viennent minorer les recettes fiscales des groupements. Elles font l'objet de compensations, qui sont prises en compte dans le calcul des attributions de compensation. Dès lors, dans cette île, la montée en charge de la prise en compte des dépenses de transfert pourrait rapidement se traduire par des CIF négatifs en l'absence de correction du droit actuel.

Le I du présent article modifie la définition du potentiel fiscal des communautés d'agglomération et des communautés urbaines, qui résulte des dispositions du 1° du III de l'article L. 5211-30 du code général des collectivités territoriales.

Le II du présent article modifie la définition du potentiel fiscal des communautés de communes, prévue au 1° bis du III du même article.

La différence entre le 1° et le 1° bis du III de l'article L. 5211-30 résulte de la redevance d'assainissement, qui est prise en compte dans le CIF des communautés d'agglomération et des communautés urbaines, mais pas dans le CIF des communautés de communes.

Si les dispositions du présent article devaient entrer en vigueur, il y aurait donc quatre définitions du mode de calcul du coefficient d'intégration fiscale :

- le CIF des communautés urbaines à fiscalité additionnelle ;

- le CIF des communautés d'agglomération 96( * ) et des communautés urbaines à taxe professionnelle unique ;

- le CIF des communautés de communes à fiscalité additionnelle ;

- le CIF des communautés de communes à taxe professionnelle unique.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Le présent article répond à une nécessité, même s'il conduit à accroître la complexité de la réglementation en vigueur. Il semble en effet nécessaire que la disparition des bases « salaires » n'entraîne pas de transferts de richesse entre les groupements, qui seraient dus soit à la structure du tissu industriel de ces groupements (qui détermine l'intensité en main d'oeuvre des activités implantées sur leur territoire), soit à leurs choix en matière fiscale (niveau du taux de taxe professionnelle).

Par ailleurs, la modification du mode de calcul du CIF qui en résulte intervient suffisamment tôt dans la réforme de la taxe professionnelle pour que ceux qui ont bénéficié d'un petit avantage en 2000 ne soient pas trop pénalisés par le retour à leur situation antérieure.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 35 (nouveau)

Extension du mécanisme de garantie de la dotation globale de fonctionnement des établissements publics de coopération intercommunale

Commentaire : le présent article prévoit d'étendre le mécanisme de garantie de la dotation globale de fonctionnement pour les établissements publics de coopération intercommunale qui « font suite » à un ou plusieurs établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre.

Le présent article est issu d'un amendement présenté à l'Assemblée nationale par notre collègue député Alain Bocquet et les membres du groupe communiste.

I. LE DROIT ACTUEL
Les établissements publics de coopération intercommunale bénéficient, en matière de dotation globale de fonctionnement (DGF), de dispositifs de garantie. Leurs attributions par habitant ne peuvent descendre en dessous d'un plancher.

L'article L. 5211-33 du code général des collectivités territoriales prévoit ainsi que les communautés de communes et les communautés d'agglomération « ne peuvent percevoir, à compter de la troisième année d'attribution de la dotation dans la même catégorie, une attribution par habitant inférieure à 80 % de la dotation par habitant de l'année précédente ».

Le principe est donc celui d'une garantie à 80 % à compter de la troisième année d'existence de la communauté de communes ou d'agglomération.

Toutefois, l'article L. 5211-33 prévoit un régime plus favorable pour les structures intercommunales issues de la transformation d'un établissement public de coopération intercommunale existant. Celles-ci sont en effet assuré de percevoir, au cours des deux premières année de leur passage à la taxe professionnelle unique, une attribution par habitant au moins égale à celle qu'ils ont perçu la dernière année au sein de leur ancienne catégorie.

De plus, lorsqu'une structure intercommunale se transforme pour adopter la taxe professionnelle unique , à compter de la troisième année, sa dotation par habitant ne peut être « inférieure, respectivement, à 95 %, 90 % et 85 % de la dotation par habitant perçue l'année précédente ».

Les dispositions de l'article L. 5211-33 reviennent donc à mettre en place un double régime pour les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre (communautés de communes, communautés d'agglomération ou communautés urbaines), selon qu'ils sont issus d'une transformation ou d'une création ex nihilo :

- les créations ex nihilo n'ont pas de garantie les deux premières années et une garantie à 80 % à compter de la troisième année ;

- les transformations bénéficient d'une garantie à 100 % les deux premières années, à 95 % la troisième année, à 90 % la quatrième année, à 85 % la cinquième année, le droit commun (garantie à 80 %) ne s'appliquant qu'au bout de la sixième année.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ
Le présent article additionnel a pour objet d'étendre le mécanisme de garantie prévu par le sixième alinéa de l'article L. 5211-33 du code général des collectivités territoriales aux établissements publics de coopération intercommunale qui font « suite à un ou plusieurs autres établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre ». Le présent article vise donc les cas où un établissement public de coopération intercommunale n'est pas issu d'une transformation, mais de la dissolution des structures intercommunales existantes 97( * ) .

Les dispositions du présent article additionnel prévoient donc de ne pas considérer les « dissolutions-recréations » comme des créations ex nihilo mais comme des transformations d'un établissement public à fiscalité propre.

Le droit actuel et le dispositif proposé en matière de garantie des EPCI « qui font suite à un ou plusieurs autres EPCI à fiscalité propre »


 

1 ère année

2 è année

3 è année

4 è année

5 è année

6 è année

Droit actuel

DGF calculée à partir du CIF moyen de la catégorie

Pas de garantie

80 %

80 %

80 %

80 %

Dispositif proposé

au moins 100 % de n-1

100 %

95 %

90 %

85 %

80 %

Transformations

au moins 100 % de n-1

100 %

95 %

90 %

85 %

80 %

Le présent article consiste donc à assimiler le processus de dissolution-recréation d'un établissement public de coopération intercommunale à celui de la transformation d'un établissement public de coopération intercommunale existant pour la mise en oeuvre des garanties d'attribution de dotation globale de fonctionnement.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION
A. DES EFFETS SIGNIFICATIFS SUR LA RÉPARTITION DES ATTRIBUTIONS DE LA DOTATION GLOBALE DE FONCTIONNEMENT DES GROUPEMENTS

Votre commission comprend les motivations des auteurs du présent article. En effet, dans certaines circonstances, le processus de transformation des établissements publics de coopération intercommunale est rendu difficile par les périmètres des structures existantes, qui peuvent ne pas correspondre aux projets intercommunaux envisagés par les communes. Par conséquent, la dissolution des établissements publics de coopération intercommunale et la recréation d'un (ou de plusieurs) établissement(s) peuvent, dans certains cas, s'avérer être un mécanisme plus adapté aux contraintes locales.

Votre commission remarque que les dispositions prévues par le présent article sont compréhensibles, dès lors qu'elles visent à assurer l'égalité de traitement entre des établissements publics de coopération intercommunale issus d'une transformation ou d'une substitution et ceux « qui font suite à un ou plusieurs établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre ». Dans ce dernier cas, s'il s'agit d'une création ex nihilo d'un point de vue strictement juridique, il s'agit, dans les faits, d'une transformation .

Cependant, l'extension de la garantie de DGF proposée par le présent article emporte des effets sur les attributions de dotations d'intercommmunalité : elle réduit les sommes réparties en fonction des critères (population, potentiel fiscal coefficient d'intégration fiscale) au sein de la DGF des communautés d'agglomération, qui seront principalement concernées par le présent article.

A l'intérieur de l'enveloppe prévue pour les différentes catégories d'EPCI, la mise en oeuvre de la garantie pour les établissements publics de coopération intercommunale « qui font suite à un ou plusieurs autres établissements de coopération intercommunale à fiscalité propre » entraîne des modifications dans l'attribution des dotations des autres groupements. En effet, l'augmentation des dotations de garantie réduit le montant des sommes réparties en fonction des critères de répartition (population, potentiel fiscal et coefficient d'intégration fiscale) dès lors que les attributions des dotations sont déterminées à « enveloppe constante ». Par conséquent, la « valeur du point » utilisée pour le calcul des attributions de dotations va baisser et va entraîner une diminution des attributions de DGF des groupements qui ne bénéficient pas de la garantie , soit :

- les groupements qui bénéficiaient d'une attribution de DGF supérieure à la garantie , en fonction de leurs critères propres ;

- les groupements nouvellement créés , qui ne bénéficient pas encore des dispositions relatives à la garantie.

B. UN POINT CONNEXE : LES « DISSOLUTIONS-RECRÉATIONS » SERONT-ELLES CONSIDÉRÉES COMME DES TRANSFORMATIONS POUR LES MODALITÉS DE LEUR FINANCEMENT ?

Les conséquences financières de l'extension de la garantie proposée par le présent article peuvent être différentes, selon que l'on considère que le nouvel établissement public de coopération intercommunale est une création ex nihilo () ou est issu de la transformation de groupements préexistants ().

Si le nouvel établissement de coopération intercommunale est considéré comme une création ex nihilo , le financement de son attribution de DGF sera intégralement assuré par le prélèvement sur les recettes de l'Etat prévu par l'article L. 5211-28 du code général des collectivités territoriales, que le Sénat a souhaité voir majoré jusqu'à hauteur de 1,6 milliard de francs pour l'année 2001, contre 1,2 milliard de francs dans le projet de loi de finances présenté par le gouvernement. Le cas échéant, le complément de financement est assuré par un prélèvement sur la dotation de compensation de la taxe professionnelle (DCTP).

Si le nouvel établissement de coopération intercommunale est considéré comme issu d'une transformation d'un ou plusieurs groupements existants, son attribution de DGF est assuré par la DGF des groupements à hauteur des sommes versées au(x) groupement(s) l'année précédante au titre de leur ancienne catégorie, puis, par le prélèvement sur recettes prévu par l'article L. 5211-28 du code général des collectivités territoriales. Dans ce cas, les sommes qui auraient pu être libérées au profit des dotations de solidarité (dotation de solidarité urbaine - DSU - et dotation de solidarité rurale - DSR -) ne le seront pas.

D'après les informations recueillies par votre rapporteur général, la deuxième solution sera vraisemblablement retenue, d'une part, parce que la situation visée par le présent article constitue une transformation dans les faits, et, d'autre part, parce que cette solution évite de peser sur la DCTP, qui constitue la variable d'ajustement des dotations versées aux collectivités locales dans le cadre du contrat de croissance et de solidarité.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 36 (nouveau)

Aménagement du régime fiscal des sociétés mères et filiales pour les groupes bancaires mutualistes

Commentaire : le présent article propose le maintien, pour les seuls groupes bancaires mutualistes, du régime actuel des sociétés mères et filiales, que l'article 7 du projet de loi de finances pour 2001 prévoit par ailleurs de restreindre.

Le 1. du III. de l'article 7 du projet de loi de finances pour 2001, adopté en première lecture par l'Assemblée nationale, mais supprimé par le Sénat, prévoyait de restreindre les conditions d'éligibilité au régime des sociétés mères et filiales.

Partant du principe que ces dispositions seront rétablies dans leur version initiale par l'Assemblée nationale en seconde lecture du projet de loi de finances pour 2001, le présent article additionnel propose de facto de soustraire les groupes bancaires mutualistes aux effets de cette réforme.

I. LE RÉGIME ACTUEL DES SOCIÉTÉS MÈRES ET FILIALES

Le régime des sociétés mères et filiales prévu aux articles 145 et 216 du code général des impôts permet, sur option, à une société, dite « société mère », de retrancher de son résultat imposable les dividendes qu'elle perçoit de ses filiales françaises et étrangères, sous certaines conditions.

Ces conditions portent sur les filiales concernées, qui doivent être assujetties à l'impôt sur les sociétés, mais aussi sur les titres de participation : la participation doit notamment représenter, à la date de mise en paiement des dividendes, au moins 10 % du capital de la filiale, ou avoir un prix de revient d'au moins 150 millions de francs.

En outre, la société mère doit avoir souscrit les titres de participation à l'émission ou prendre l'engagement de les conserver pendant un délai de deux ans. De plus, les titres de participation doivent être nominatifs, ou, à défaut, déposés dans un établissement désigné par l'administration. Enfin, ces titres doivent conférer le droit de vote.

Si ces conditions sont réunies, le régime des sociétés mères et filiales permet à la société mère d'éviter ou d'atténuer la double imposition des dividendes provenant de ses participations. Ce régime avantage principalement les entreprises qui disposent de participations financières importantes, notamment les banques et les sociétés d'assurance.

II. LA RÉFORME DU RÉGIME DES SOCIÉTÉS MÈRES ET FILIALES PROPOSÉE PAR L'ARTICLE 7 DU PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2001 ET SUPPRIMÉE PAR LE SÉNAT

Le 1. du III. de l'article 7 du projet de loi de finances pour 2001 proposait de modifier les seuils d'éligibilité au régime des sociétés mères et filiales.

D'un côté, le seuil de détention du capital devait être abaissé de 10 % à 5 % ; de l'autre, le seuil alternatif de 150 millions de francs devait être supprimé.

En d'autres termes, les participations représentant moins de 5 % du capital de la filiale ne devaient plus être plus éligibles, même si leur prix de revient était supérieur à 150 millions de francs.

Il s'agissait là d'une mesure de rendement , destinée à « financer » la baisse de la contribution sur l'impôt sur les sociétés, à hauteur de 2,1 milliards de francs en année pleine, au détriment notamment des investisseurs institutionnels, comme les banques ou les assurances , qui détiennent souvent des participations dont le montant est relativement élevé, mais qui représentent moins de 5 % du capital des sociétés concernées.

Votre commission avait d'ailleurs montré que la combinaison de l'élargissement de l'assiette et de la baisse du taux de l'impôt sur les sociétés se traduirait au total par des allégements d'impôt en trompe-l'oeil pour les entreprises en 2001.

Votre commission avait également déploré le caractère rétroactif de la réforme proposée. En effet, la mesure devait s'appliquer au premier exercice clos avant le 31 décembre 2000, c'est à dire en pratique, à l'exercice 2000. Comme le pourcentage déterminant le seuil d'application du régime est apprécié à la date de mise en paiement des produits de la participation, ce dispositif se serait appliquée rétroactivement aux distributions intervenues durant l'exercice 2000.

Enfin, votre commission avait souligné que cette réforme méconnaissait les conditions économiques contemporaines, des participations de quelques pour cents pouvant correspondre à de véritables partenariats économiques.

Le Sénat avait ainsi supprimé ce dispositif.

A bien des égards, le présent article témoigne de ce que les craintes du Sénat était parfaitement fondées.

III. LE PRÉSENT ARTICLE : UNE PREMIÈRE EXCEPTION À L'AMÉNAGEMENT DU RÉGIME DES SOCIÉTÉS MÈRES ET FILIALES ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE DANS LE CADRE DU PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2001
L'Assemblée nationale semble s'être rendue compte, avec retard, de certaines des conséquences des dispositions du projet de loi de finances pour 2001 qu'elles avait adoptées en première lecture.

En particulier, l'aménagement du régime des sociétés mères et filiales adopté en première lecture par l'Assemblée nationale pénaliserait fortement les groupes bancaires mutualistes .

En effet, les groupes bancaires mutualistes présentent une structure en « râteau inversé », la caisse centrale étant détenue par des caisses ou des banques régionales.

Or, la participation des caisses ou des banques régionales au capital de la caisse nationale est le plus souvent d'un prix de revient supérieur à 150 millions de francs, de sorte que cette participation était éligible à l'ancien régime des sociétés mères et filiales.

Cependant, cette participation ne correspond pas toujours à plus de 5 % du capital, soit que ce capital soit émietté entre un nombre élevé de caisses ou de banques régionales (53 caisses régionales pour le Crédit agricole, 30 banques pour le groupe Banques populaires), soit que la caisse nationale soit juridiquement une association (comme c'est le cas pour le Crédit mutuel), de sorte que ces participations ne seraient plus éligibles au nouveau régime des sociétés mères et filiales.

Au total, l'aménagement du régime des sociétés mères et filiales adopté en première lecture par l'Assemblée nationale lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2001 serait coûteux pour les groupes bancaires mutualistes en raison de leur structure particulière, alors même que cette structure découle de dispositions législatives expresses :

- l'article 10 de la loi du 13 mars 1917 ayant pour objet l'organisation du crédit au petit et moyen commerce, pour les Banques populaires ;

- l'article 5 de l'ordonnance n° 58-966 du 16 octobre 1958, pour le Crédit mutuel ;

- l'article 6 de la loi n° 88-50 du 18 janvier 1988 relative à la mutualisation de la Caisse nationale de crédit agricole, pour le Crédit agricole ;

- enfin, l'article 10 de la loi n° 99-532 du 25 juin 1999 relative à l'épargne et à la sécurité financière, pour les Caisses d'épargne.

Partant sans doute du principe selon lequel la restriction du régime des sociétés mères et filiales sera rétabli dans sa version initiale lors de l'examen en seconde lecture par l'Assemblée nationale du projet de loi de finances pour 2001, le présent article propose de maintenir le bénéfice du régime actuel pour ces quatre groupes mutualistes.

En fait, la rédaction de cet article permettrait même aux caisses régionales de ces quatre groupes mutualistes de bénéficier, au choix, du critère le plus favorable parmi  :

- le nouveau seuil de détention proposés par l'article 7 du projet de loi de finances pour 2001 (taux de participation au capital supérieur à 5 %) ;

- le seuil de détention actuellement en vigueur (taux de participation au capital supérieur à 10 % ou prix de revient de la participation supérieur à 150 millions de francs).

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre commission se félicite de ce que l'Assemblée nationale reconnaisse et corrige ses erreurs, en proposant de modifier le texte qu'elle a adopté il y a moins d'un mois.

Votre commission rappelle toutefois que les souhaits de l'Assemblée nationale ont été « pleinement exaucés » par le Sénat, qui a supprimé les dispositions incriminées lors de l'examen du projet de loi de finances.

Votre commission déplore ainsi que les présentes dispositions n'aient pas été introduites par l'Assemblée nationale lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2001.

Il en résulte en effet un imbroglio juridique : le Sénat doit se prononcer sur une disposition à ce jour sans objet , puisqu'il a supprimé l'aménagement du régime mère fille, et que ces dispositions n'ont pas encore été examinées en seconde lecture par l'Assemblée nationale.

Compte tenu de cet imbroglio, et dans l'attente d'informations complémentaires relatives aux autres groupes susceptibles d'être dans une situation analogue aux quatre groupes pour lesquels le présent article propose un régime dérogatoire, votre commission a réservé son appréciation sur ce dispositif.

Décision de la commission : votre commission vous propose de réserver sa position sur cet article.

ARTICLE 37 (nouveau)

Dispositions visant à assurer la continuité des délibérations pour les établissements publics de coopération intercommunale ne résultant pas d'une substitution ou d'une transformation d'un groupement préexistant

Commentaire : le présent article prévoit de permettre aux établissements publics de coopération intercommunale ne résultant pas d'une substitution ou d'une transformation de groupement préexistant de bénéficier des délibérations précédemment votées en matière d'exonérations particulières de taxe professionnelle et de taxe d'enlèvement des ordures ménagères.

Le présent article est issu d'un amendement présenté à l'Assemblée nationale par notre collègue député Alain Bocquet et les membres du groupe communiste.

I. LE DROIT ACTUEL
L'article 1639 A ter du code général des impôts prévoit que les délibérations prises en matière de taxe professionnelle par les communes membres d'un établissement public de coopération intercommunale faisant application de la taxe professionnelle unique, et ne résultant pas d'une substitution ou d'une transformation de groupement préexistant :

- lorsque ces délibérations sont prises avant le premier juillet, elles s'appliquent aux opérations réalisées l'année de création de l'établissement public de coopération intercommunale, lorsque cette création est postérieure au 1 er juillet ; donc, si le délai pour la prise des délibérations n'est pas respecté, la loi prévoit la continuité des délibérations antérieures ;

- lorsque ces délibérations concernent les exonérations de taxe professionnelle que les collectivités locales et leurs groupements peuvent prendre « dans les zones définies par l'autorité compétente où l'aménagement du territoire la rend utile », elles sont applicables aux opérations réalisées antérieurement à la date de création de l'établissement public de coopération intercommunale.

Par conséquent, cet article prévoit que les délibérations des conseils municipaux des communes membres en matière d'exonérations de taxe professionnelle continuent de s'appliquer pour l'année en cours, même après la création d'un établissement public de coopération intercommunale à taxe professionnelle unique.

En matière de taxe d'enlèvement des ordures ménagères, le II de l'article 1639 A bis du code général des impôts indique que : « les délibérations des communes et de leurs établissements publics de coopération intercommunale instituant la taxe d'enlèvement des ordures ménagères conformément aux articles 1520, 1609 bis, 1609 quater, 1609 quinquies, 1609 quinquies C et 1609 nonies D doivent être prises avant le 15 octobre d'une année pour être applicables à compter de l'année suivante. Elles sont soumises à la notification prévue à l'article 1639 A au plus tard quinze jours après la date limite prévue pour leur adoption ».

Les délibérations relatives à la taxe d'enlèvement des ordures ménagères doivent donc être prises avant le 15 octobre de l'année qui précède celle de l'entrée en vigueur de ces délibérations.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ
Le présent article vise à permettre aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) issus d'une « dissolution-recréation », de bénéficier de la continuité des délibérations des communes et des établissements publics de coopération intercommunale auxquels ils font suite .

Le dispositif comporte trois parties : le I, relatif aux délibérations prises en matière de taxe professionnelle ; le II, relatif aux délibérations afférentes à la taxe d'enlèvement des ordures ménagères ; le III, relatif à la période transitoire pour la mise en conformité des dispositions relatives à l'établissement de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères avec les exigences de la loi n° 99-586 du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale.

Le I du présent article vise à établir la continuité des délibérations prises par les communes en matière d'exonérations particulières de taxe professionnelle , lorsqu'un établissement public de coopération intercommunale à taxe professionnelle unique est créé, et ne résulte pas d'une substitution ou d'une transformation d'un groupement préexistant.

Le présent article vise donc à étendre au cas des dissolutions-recréations d'EPCI, les dispositions prévues à l'article 1639 A ter du code général des impôts, exposées plus haut.

Le II du présent article vise à établir la continuité des délibérations prises par les communes en matière de taxe d'enlèvement des ordures ménagères . Le 1) prévoit d'ajouter les décisions d'exonération de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères dans la liste des délibérations instituant la taxe et devant être prises par les communes et les établissements publics de coopération intercommunale avant le 15 octobre d'une année pour être applicables à compter de l'année suivante.

Le 2) prévoit une extension du délai légal pour les délibérations afférentes à la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, jusqu'au 15 janvier de l'année qui suit la création d'un établissement public de coopération intercommunale, lorsque celui-ci ne résulte pas d'une substitution ou d'une transformation de groupement préexistant.

Par ailleurs, il précise que, à défaut d'une telle délibération, les délibérations prises par les communes et les établissements publics de coopération intercommunale avant la création du nouvel EPCI demeurent applicables pour l'année qui suit la création de ce dernier. Le nouvel établissement public de coopération intercommunale perçoit alors la taxe d'enlèvement des ordures ménagères « au lieu et place des communes et des établissements de coopération intercommunale dissous ».

Le 3) modifie la rédaction du 2) du II de l'article 1639 A bis en conséquence des modifications proposées plus haut.

Le II du présent article prévoit donc, d'une part, un délai supplémentaire pour les délibérations relatives à la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, et, d'autre part, la continuité des délibérations précédentes en l'absence de nouvelles délibérations, y compris pour celles relatives aux exonérations spécifiques de taxe d'enlèvement des ordures ménagères.

Le III du présent article précise le régime transitoire des établissements publics de coopération intercommunale « ne résultant pas d'une substitution ou d'une transformation de groupement préexistant ».

Il s'agit ici d'un alignement des EPCI issus d'une « dissolution-recréation » en 2000 sur le droit commun des établissements publics de coopération intercommunale , afin de ne pas les pénaliser vis-à-vis des autres groupements. La loi de finances rectificative pour 2000 du 13 juillet 2000 a en effet étendu la période de transition pour la mise en conformité des établissements de coopération intercommunale avec les dispositions de la loi du 12 juillet 1999 relative à l'établissement de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères. Le présent article propose que, au cours de cette période de transition, et en l'absence de délibérations prises par le nouvel établissement public de coopération intercommunale, les délibérations prises par les communes et par les établissements publics de coopération intercommunale dissous demeurent applicables.

Il convient de souligner que les dispositions du II et du III du présent article ne concernent pas uniquement les cas de « dissolution-recréation » d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, mais également les cas de création ex nihilo d'une telle structure. En effet, ces dispositions visent les délibérations prises par les établissements publics de coopération intercommunale dissous, mais également celles qui ont été prises par les communes.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION
Le présent article vise à régler une situation spécifique, qui n'est pas prévue par les dispositions législatives existantes. Il s'agit de la dissolution et de la recréation d'établissements publics de coopération intercommunale. En effet, les dispositions relatives à la coopération intercommunale n'ont prévu que, d'une part, les situations de création ex nihilo d'établissements publics de coopération intercommunale, et d'autre part, les transformations et les substitutions d'une structure existante. Il s'agit, dans le cas de la dissolution-recréation d'un établissement public de coopération intercommunale, d' assurer la sécurité juridique des délibérations relatives à la taxe professionnelle et à la taxe d'enlèvement des ordures ménagères.

Dans le cas visé par le présent article, la dissolution et la création d'un (des) établissement(s) public(s) de coopération intercommunale provoque des difficultés en matière de continuité des délibérations relatives aux exonérations particulières de taxe d'enlèvement des ordures ménagère et de taxe professionnelle. Il s'agit donc de permettre la continuité des délibérations, en l'absence de délibérations du nouvel établissement public de coopération intercommunale dans les délais légaux.

En l'absence des dispositions spécifiques prévues par le présent article, un contribuable local serait fondé à attaquer les délibérations prises par un exécutif local dissous, et qui ne seraient donc plus valables pour le nouvel établissement public de coopération intercommunale. Les délibérations relatives aux exonérations particulières de taxe professionnelle et de taxe d'enlèvement des ordures ménagères ne seraient donc plus applicables. Or, une telle situation serait préjudiciable aux activités économiques implantées sur le territoire de l'établissement public de coopération intercommunale nouvellement créé, qui bénéficiaient de ces exonérations particulières de taxe professionnelle et de taxe d'enlèvement des ordures ménagères.

Votre commission comprend les motivations des auteurs du présent article. En effet, dès lors que le processus de dissolution-recréation d'un établissement public de coopération intercommunale peut être assimilé, en fait, à la transformation d'une structure intercommunale existante, il convient de permettre la continuité des délibérations prises par les structures dissoutes.

Votre commission considère que l'édiction des dispositions prévues par le présent article est nécessaire pour résoudre le problème posé par les dissolutions-recréations d'établissements publics de coopération intercommunale. Elle note cependant que le fait de prendre en compte cette situation emporte des effets pervers. En effet, les dispositions prévues par le présent article peuvent avoir pour conséquences d'encourager les établissements publics de coopération intercommunale à procéder par dissolution-recréation plutôt que par transformation. Dès lors que les avantages liés à la transformation (en matière de garantie des dotations et de continuité des délibérations notamment) sont accordés aux groupements issus d'un processus de dissolution-recréation, ce dernier processus pourrait s'avérer plus avantageux . Il permet en effet de modifier éventuellement le périmètre ou les compétences de l'établissement public de coopération intercommunale. Votre commission souhaite donc que les dispositions prévues par le présent article ne conduisent pas à banaliser le processus de « dissolution-recréation » des établissements publics de coopération intercommunale.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 38 (nouveau)

Achèvement du transfert du contentieux de la transfusion sanguine

Commentaire : le présent article transfère à l'établissement français du sang (EFS) le contentieux de la transfusion sanguine des établissements de transfusion non encore intégrés à l'EFS.

I. LE TEXTE PROPOSÉ PAR LE GOUVERNEMENT


Le présent article a été inséré par un amendement du gouvernement au cours de la discussion à l'Assemblée nationale.

Il s'agit de transférer à l'EFS les « obligations nées de la fourniture de produits sanguins », c'est à dire le contentieux relatif à cette question, pour les personnes morales compétentes dans le domaine du sang humain, du plasma et des dérivés, qui n'ont pas encore fusionnées avec l'EFS. Il s'agit en réalité de structures juridiques qui ont cessé leur activité avant le 1 er juillet 1998, le plus souvent en 1995, mais pour lesquelles courent toujours des actions en justice. Afin d'éviter aux victimes de voir leur action en justice tomber faute de partie adverse, l'EFS se substituerait aux anciennes structures si celles-ci lui transfèrent leurs biens mobiliers et immobiliers « affectés à l'activité de transfusion sanguine ».

La secrétaire d'Etat au budget l'a présenté comme ayant pour but de « préciser les conditions dans lesquelles les contentieux transfusionnels pourront être transférés à l'EFS, afin de garantir le droit des victimes » .

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

A. UN RETARD INCOMPRÉHENSIBLE


Cet article est la reprise « raccourcie » de l'amendement n° II-78 présenté par le gouvernement au cours de la discussion du projet de loi de finances rectificative pour 1999 au Sénat le 20 décembre 1999.

Cet amendement avait été déposé durant le débat et présenté ainsi par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie d'alors, M. Christian Sautter 98( * ) :

« Il s'agit d'un amendement visant à clarifier le statut de contentieux portant sur la transfusion sanguine. Nous en débattons ce soir à une heure tardive, car, vous le savez, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi de finances rectificative pour 1999 comporte, comme je l'ai indiqué dans mon intervention liminaire, une ouverture de crédits de 350 millions de francs en faveur de l'Etablissement français du sang, qui, à compter du 1er janvier prochain, reprendra l'ensemble des activités de transfusion sanguine dans notre pays. En effet, je rappelle que la loi du 1er juillet 1998, qui trouvait d'ailleurs son origine dans une proposition de loi émanant du Sénat, a institué l'Etablissement français du sang et a profondément réformé le secteur de la transfusion sanguine. Elle a notamment prévu que ce nouvel établissement reprendrait les activités de transfusion sanguine existantes, avec les droits et les obligations qui y sont attachés. De ce fait, les contentieux transfusionnels impliquant des centres de transfusion encore en fonctionnement seront automatiquement repris par l'Etablissement français du sang. En revanche, le sort des contentieux impliquant des centres de transfusion aujourd'hui disparus ou dont l'activité de transfusion a cessé n'a pas été réglé par la loi du 1er juillet 1998. Vous comprendrez donc le souci du gouvernement, à la veille de la mise en place de ce nouvel établissement public, d'apporter une réponse à ces questions qui restent en suspens. Certes, cela ne représente qu'un petit nombre de dossiers, mais qui renvoient souvent à des situations difficiles. Il en est notamment ainsi pour des victimes d'une contamination transfusionnelle qui ont obtenu une décision de justice reconnaissant leur droit à indemnisation mais qui ne peuvent la faire exécuter du fait de la disparition ou de l'insolvabilité de la structure responsable. L'amendement du gouvernement vise donc avant tout à transférer à l'Etablissement français du sang les contentieux relatifs aux anciens centres de transfusion sanguine. Par ailleurs, afin de ne pas transférer que des charges, il prévoit aussi le transfert des actifs éventuels des structures en cause. (...) Je conclurai en indiquant que, sur le plan budgétaire, le ministère de l'emploi et de la solidarité estime à 20 millions de francs le montant des charges nettes correspondant à ces transferts ».

Votre rapporteur général s'était alors vivement élevé contre la méthode du gouvernement qui invitait le Sénat à statuer d'un texte compliqué - l'amendement comportait deux autres paragraphes sur les juridictions compétentes - sans avoir eu même une journée pour l'examiner. Il avait estimé que cette méthode n'était digne ni du Parlement, ni des victimes. Le ministre avait alors insisté pour demander en urgence l'adoption de cette disposition. Le Sénat avait suivi sa commission des finances, refusé de décider dans l'urgence et repoussé l'amendement.

Votre rapporteur général se serait attendu à voir cet article repris dans le projet de loi sur la modernisation du système de santé. Oui, mais maintes fois reporté, ce texte ne devrait voir le jour qu'à la mi-2001. Il aurait pu figurer dans le collectif budgétaire de printemps. Il n'y figurait pas. Il aurait pu se retrouver dans le projet de loi de finances pour 2001. Il n'y figurait pas. Il aurait pu être intégré dans le présent projet de loi dès son examen par le conseil des ministres. Il n'y figurait pas.

Ainsi, il a fallu un amendement du gouvernement pour reprendre une mesure proposée un an plus tôt et présentée alors comme une disposition urgente !

Le gouvernement est donc doublement fautif. Il a voulu contraindre le Parlement l'année dernière en présentant comme urgente l'adoption de cette mesure. Il traite de manière cavalière le même Parlement en le faisant statuer à l'occasion d'un amendement de la même mesure, alors qu'il aurait eu plusieurs occasions tout au long de l'année pour la proposer.

Votre rapporteur général tient à dénoncer cette légèreté du gouvernement qui confine à une certaine forme de mépris du Parlement.

B. UNE MESURE UTILE MAIS AVEC DES IMPRÉCISIONS QUI APPELLENT DES RÉPONSES

Le présent article constitue une sécurité juridique pour les victimes et doit donc être considéré comme une mesure utile. Il faudrait cependant s'assurer de son effectivité en raison de la condition - justifiée - de transfert des actifs mise pour valider le transfert du contentieux. Il ne faudrait pas que l'application de cette condition soulève des difficultés, par exemple en raison du changement d'objet d'une association mise en cause.

Par ailleurs, le texte proposé dans le présent article ne traite pas de la question de la juridiction compétente pour l'examen du contentieux transfusionnel. L'amendement proposé en 1999 comprenait deux paragraphes supplémentaires. Le premier prévoyait pour les structures qui ont poursuivi leur activité transfusionnelle après la promulgation de la loi du 4 janvier 1993 ou qui étaient membres d'un groupement d'intérêt public au 30 juin 1999, des modalités conventionnelles de transfert à l'instar de ce que la loi stipule déjà pour les centres de transfusion sanguine. Le second tendait à éviter que le transfert n'induise une modification des compétences des juridictions et prévoyait en conséquence de maintenir la compétence des tribunaux judiciaires. En effet, ceux-ci connaissent des contentieux des associations, or l'EFS est un établissement public administratif dont le contentieux relève des tribunaux administratifs. Ce paragraphe permettait d'éviter que les dossiers ne donnent lieu à nouvelle procédure.

Dans une question préjudicielle, le Conseil d'Etat a estimé que cette question de la compétence ne se posait pas en raison de l'application du fait générateur : si le fait générateur précède la dissolution de la structure en cause dans l'Etablissement français du sang, c'est l'ordre judiciaire qui est compétent ; si le fait générateur est postérieur à cette dissolution, c'est l'ordre administratif en raison du caractère administratif de ce dernier s'agissant du contentieux.

Votre rapporteur général souhaite attirer l'attention sur cette question de la juridiction compétente qui peut créer des obstacles supplémentaires à l'indemnisation des victimes, ballottées d'un ordre de juridiction à un autre, et qui peut susciter des différences de traitement entre victimes. Il souhaite donc harmoniser le contentieux et prévoir qu'il relèvera uniquement de l'ordre judiciaire.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 39 (nouveau)

Création d'une rente viagère en faveur des veuves de harkis

Commentaire : le présent article étend aux veuves de harkis le dispositif de rente viagère créé par la loi de finances rectificative pour 1999.

I. LE TEXTE PROPOSÉ PAR LE GOUVERNEMENT


Le gouvernement a proposé par amendement lors de la discussion de la loi de finances rectificative à l'Assemblée nationale de créer une rente viagère en faveur des « conjoints et ex-conjoints survivants non remariés » des personnes désignées par le premier alinéa de l'article 2 de la loi n° 94-488 du 11 juin 1994, c'est-à-dire 99( * ) les « anciens harkis, moghaznis et personnels des diverses formations supplétives ayant servi en Algérie, qui ont conservé la nationalité française en vertu de l'article 2 de l'ordonnance n° 62-825 du 21 juillet 1962 relative à certaines dispositions concernant la nationalité française » 100( * ) .

Il s'agit en apparence de la reprise de la rente viagère créée par l'article 47 de la loi de finances rectificative pour 1999 (n° 99-1173 du 30 décembre 1999) en faveur des même harkis, moghaznis et personnels des diverses formations supplétives. Elle revêt, elle aussi, des conditions d'âge et de ressources.

La rente viagère proposée par le présent article aurait pour autres conditions :

• le fait d'être conjoint ou bien d'avoir été conjoint mais de ne pas s'être remarié ;

• satisfaire aux conditions de nationalité définies à l'article 9 de la loi n° 87-549 du 16 juillet 1987 relative au règlement de l'indemnisation des rapatriés qui renvoie en fait à l'article 2 de l'ordonnance n° 62-825 du 21 juillet 1962 précitée.

Lors des débats à l'Assemblée nationale, le gouvernement n'a donné aucune indication permettant de connaître : le montant de la rente, les conditions d'âge et de ressources assorties, sa fiscalisation, sa prise en compte pour l'accès aux prestations sous conditions de ressources, son mode de financement, etc.

Cependant, d'après les informations recueillies par votre rapporteur général, les décrets d'application seraient identiques à ceux pris pour la rente viagère adoptée il y a un an. Le décret n° 00-359 du 26 avril 2000 :

• fixe à 60 ans l'âge minimal pour bénéficier de la rente viagère et à 9.000 francs son montant, avec la possibilité d'obtenir une allocation différentielle dans certaines conditions 101( * ) ;

• prévoit que les conditions de ressources seront celles applicables pour le minimum vieillesse, appréciées au niveau du foyer en prenant en compte celles du conjoint, concubin ou partenaire lié par un pacte civil de solidarité ;

• détermine les modalités d'instruction des demandes et de versement de la prestation.

Le coût de cette rente serait de 8 millions de francs par an et ne modifierait qu'à la marge les montages financiers de la rente viagère adoptée en 1999 dont le coût annuel serait alors porté à 65 millions de francs et dont le coût total resterait d'environ 1,5 milliard de francs. 7.000 harkis devraient bénéficier de la rente viagère établie en 1999 et 1.000 conjoints de celle du présent article.

La rente viagère de l'année dernière devait être financée en 1999 et 2000 par l'utilisation de 120 millions de francs solde en déshérence d'un fonds géré par Groupama-vie pour allouer aux rapatriés les arrérages de rentes destinées à compléter les retraites perçues par ailleurs, dans le cadre d'un contrat d'assurance de groupe et dans des conditions définies par une commission paritaire entre l'Etat et l'assureur. Cependant, cette somme n'a pas suffi à financer la rente pour 1999 et 2000, et le présent projet de loi de finances rectificative prévoit une augmentation de 30 millions de francs des crédits affectés aux actions en faveur des rapatriés.

La rente viagère des harkis et celle des veuves devrait donc être financée à partir de 2001 uniquement sur crédits budgétaires.

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION : BIS REPETITA

Cette rente viagère en faveur des conjoints constitue une avancée indéniable qui permettra de venir au secours de veuves qui rencontrent des situations particulièrement délicates. Cependant votre rapporteur général regrette de n'avoir pas été écouté l'année dernière ?

Cette rente pose en effet un problème de fond : les harkis attendent une reconnaissance de la nation plutôt qu'une rente d'assistance

Lors de l'examen de l'article 47 de loi de finances rectificative pour 1999, votre rapporteur général avait ainsi déploré que le gouvernement n'aille pas aussi loin qu'il le devrait 102( * ) : « Le choix de soumettre à condition de ressources le service de cette rente viagère assimile celle-ci de toute évidence à une prestation d'assistance venant en complément du minimum vieillesse.

En revanche, les associations de rapatriés d'origine nord-africaine considéraient leur revendication de rente comme une reconnaissance par la Nation des services militaires rendus par eux, de leur passage sous les drapeaux, de leur participation aux combats d'Algérie, bref de leur qualité d'anciens combattants d'Afrique du Nord.

Dans cette logique, il serait possible d'assimiler une telle rente sans conditions de ressources à la retraite mutualiste du combattant, c'est-à-dire un titre de reconnaissance financière de la participation aux combats matérialisant la dette de la Nation.

Alors que le Parlement a adopté le 5 octobre 1999 la proposition de loi qualifiant les « événements » d'Algérie de « guerre » d'Algérie 103( * ) , et que le présent article se veut le parachèvement de l'oeuvre de reconnaissance de la Nation, il peut paraître paradoxal de refuser aux harkis le symbole qu'ils réclament.

La somme de 9.000 francs n'est pas, comme semble le considérer le gouvernement, un complément de ressources 104( * ) . Elle devrait être, comme l'attendent les harkis et l'exige la justice de l'Histoire, la reconnaissance d'une dette de la Nation toute entière
».

Malheureusement ces remarques valent toujours. Cela signifiera-t-il que l'année prochaine, le gouvernement proposera d'étendre, à nouveau, la rente viagère ? Les lois de 1987 et 1994 avaient eu le mérite d'aborder de manière globale la question de l'indemnisation. Là, le gouvernement préfère opérer par petites avancées successives et trop timides.

Plus de 38 ans de la fin des combats, il est temps que le gouvernement fasse son devoir et étende cette rente de manière définitive en en retirant la condition de ressources. Les contraintes existant en matière de recevabilité financière des amendements interdisent à votre commission d'y procéder. La levée de la condition de ressources ferait passer le coût annuel des deux rentes de 65 à 105 millions de francs.

Le Parlement ne devrait plus avoir à se pencher sur des questions financières relatives à ces heures sombres de notre histoire nationale, eu égard à la dette morale que possède la France vis-à-vis des harkis.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 40 (nouveau)

Rétablissement des prélèvements pour frais de perception sur le produit des impositions sociales



Commentaire : le présent article rétablit les frais de perception sur les impositions recouvrées par les services fiscaux et affectés à la sécurité sociale, pourtant supprimés par le Parlement dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001.



I. LE TEXTE PROPOSÉ PAR LE GOUVERNEMENT

Le présent article, introduit par le gouvernement lors de la discussion à l'Assemblée nationale, propose d'abroger l'article 6 de la loi de financement de la sécurité sociale, texte adopté définitivement par l'Assemblée nationale et actuellement déféré devant le Conseil constitutionnel, donc encore ni publié, ni promulgué.

L'article 6 en question comprend trois paragraphes.

Le premier supprime la retenue pour frais d'assiette et de perception, perçue par les services fiscaux, sur le produit de la contribution sociale généralisée (CSG) sur les revenus du patrimoine versée à la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS), à la caisse nationale d'allocations familiales (CNAF) et au Fonds de solidarité vieillesse (FSV).

Le second paragraphe supprime :

• l'article L. 133-1 du code de la sécurité sociale (frais de perception pour les cotisations recouvrées par le Trésor public) ;

• l'article L. 135-5 du code de la sécurité sociale (frais d'assiette et de recouvrement des impôts et taxes affectés au Fonds de solidarité vieillesse) ;

• le paragraphe III de l'article 1647 du code général des impôts, qui pose le principe général instituant ces frais d'assiette et de recouvrement sur les recettes des organismes de sécurité sociale perçues par les services fiscaux ;

• et l'article 8 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 (frais d'assiette et de recouvrement de la contribution pour le remboursement la dette sociale (CRDS)).

Le dernier paragraphe gage les pertes de recettes du présent article en majorant à due concurrence la taxe sur la valeur ajoutée.

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

A. SUR LA FORME : UN FEUILLETON QUI DEVIENT GROTESQUE

1. Les épisodes précédents


a) Les deux années précédentes

Déjà à l'occasion des lois de financement de la sécurité sociale pour 1999 et 2000 et des lois de finances rectificative pour 1998 et 1999 s'était déroulé un feuilleton équivalent.

Lors de l'examen en première lecture du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999, l'Assemblée nationale avait supprimé le prélèvement sur l'ACOSS à l'initiative de sa commission des affaires culturelles. Cette disposition avait alors été supprimée en seconde délibération à la demande du gouvernement.

Réintroduite en première lecture au Sénat, à l'initiative de la commission des affaires sociales, elle a été maintenue en nouvelle lecture par l'Assemblée nationale, après l'échec de la commission mixte paritaire. Curieusement, bien que le gouvernement ait également demandé une seconde délibération à ce dernier stade de la procédure législative, il n'avait pas alors cru utile de proposer de nouveau la suppression de cette disposition contestée.

En revanche, lors de l'examen du projet de loi de finances rectificative pour 1998, le prélèvement avait été rétabli en première lecture à l'Assemblée nationale. Au Sénat, votre commission des finances, en accord avec la commission des affaires sociales, avait proposé de revenir sur le rétablissement. En nouvelle lecture, l'Assemblée nationale avait repris son texte et donc maintenu les frais de recouvrement.

En 2000, ce cheminement, qualifié de « mascarade » par notre collègue député Germain Gengenwin en 1999 105( * ) , s'est reproduit exactement dans les mêmes conditions : l'Assemblée nationale a supprimé à l'unanimité le prélèvement sur l'ACOSS en première lecture du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 à l'initiative de nos collègues députés Jean-Louis Debré, Philippe Douste-Blazy et José Rossi (ainsi que les membres de leurs groupes) ; le Sénat a maintenu cette suppression ; l'Assemblée a confirmé la suppression lors de la nouvelle lecture et de la lecture définitive.

Faute d'avoir été suivi dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale, le gouvernement a donc proposé à nouveau de maintenir le prélèvement incriminé, par voie d'amendement dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 1999. Il a été suivi à l'Assemblée nationale en première lecture. Le Sénat, fidèle à ses convictions, avait supprimé le rétablissement des frais de recouvrement. Mais en nouvelle lecture et en lecture définitive, l'Assemblée nationale avait suivi le gouvernement 106( * ) .

b) Un nouvel épisode

Lors de l'examen en première lecture de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, le rapporteur de la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale notre collègue député Alfred Recours, a fait adopter malgré un avis défavorable du gouvernement, la suppression de l'ensemble des prélèvements pour frais de recouvrement des impositions sociales. Il a ainsi présenté son amendement 107( * ) : « je crois qu'il faut avoir de la suite dans les idées » même s'il reconnaissait, aveu de dépit par avance, « le gouvernement fera ce qu'il voudra. La commission des finances lorsque nous aurons une loi de finances rectificative, fera de nouveau ce qu'elle veut, mais, en tout cas, il me semblait tout à fait normal de présenter à nouveau cet amendement pour que l'Assemblée reste cohérente et ne se dédise pas par rapport à un vote unanime de tout le Parlement » .

Le Sénat, au cours de la première lecture de la loi de financement de la sécurité sociale a, après un débat avec le gouvernement, adopté conforme cet article qui figure donc la loi adoptée par l'Assemblée nationale en lecture définitive.

Au cours de l'examen du second projet de loi de finances rectificative pour 2000, le gouvernement a donc proposé à l'Assemblée nationale, qui l'a accepté, de maintenir le prélèvement.

2. Une comédie paradoxale

Sur la forme, cette disposition est d'abord paradoxale. En effet, pour la troisième fois, elle tend à rétablir une rédaction, avant même qu'elle ait été juridiquement modifiée, puisque la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 n'est pas encore promulguée.

Ainsi, le présent article est en apparence superfétatoire au regard du droit existant qui n'est pas encore modifié ! Cette approximation juridique prouve qu'il est toujours techniquement délicat de légiférer sur un texte en cours de modification.

Elle met en exergue une fois de plus les difficiles coordinations entre deux textes d'une nature peu éloignée, les lois de finances (initiale ou rectificative) et les lois de financement de la sécurité sociale.

Votre commission des finances estime d'ailleurs choquant que le gouvernement propose de revenir sur une disposition récemment votée en termes conformes par les deux assemblées, avant même son entrée en vigueur, d'une manière « acrobatique ». Il aurait été mieux inspiré de prendre ses responsabilités dans le cadre de la discussion de la loi de financement de la sécurité sociale.

Le cheminement de cette disposition serait également risible si cela n'en devenait pas ridicule pour le Parlement et le gouvernement. En effet, voilà une disposition supprimée trois fois et réintroduite trois fois en deux ans, sur six textes différents, dans des conditions identiques de débat entre le Parlement et le gouvernement et entre les différentes commissions de l'Assemblée nationale.

Sur le même vote, la majorité de l'Assemblée nationale se sera donc déjugée à cinq reprises : suppression en loi de financement de la sécurité sociale pour 1999, rétablissement en loi de finances rectificative pour 1999, suppression en loi de financement de la sécurité sociale pour 2000, rétablissement dans le projet de loi de finances rectificative pour 2000, suppression en loi de financement 2001, rétablissement en seconde loi de finances rectificative 2000 !

Heureusement, à cette inconstance et à cette versatilité, le Sénat a opposé une parfaite continuité, estimant à chaque occasion que les prélèvements ne se justifiaient pas.

B. SUR LE FOND : DES PRÉLÈVEMENTS QUI SOULÈVENT DES DIFFICULTÉS

1. Un article plus large que les années précédentes


A la différence des épisodes des années précédentes, la disposition en question est plus large que le seul problème des frais pesant sur le produit de la CSG sur les revenus du patrimoine traditionnellement abordé.

Ainsi que l'expliquait notre collègue Charles Descours, rapporteur de la commission des affaires sociales sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 108( * ) , l'article 6 « a une portée beaucoup plus vaste que le dispositif adopté lors des deux dernières lois de financement de la sécurité sociale.

La suppression du paragraphe III de l'article 1647 du code général des impôts fragiliserait la base légale de l'ensemble des frais d'assiette et de recouvrement perçus par l'Etat sur les différentes cotisations ou contributions perçues pour le compte de la sécurité sociale. Ce paragraphe dispose en effet : « pour frais de recouvrement, l'Etat effectue un prélèvement sur les cotisations perçues au profit des organismes de sécurité sociale soumis au contrôle de la Cour des comptes (...). Le taux de ce prélèvement et les modalités de remboursement sont fixés par arrêté du ministre de l'économie et des finances ». Or, ce montant est élevé : 1.307,8 millions de francs en 1999 enregistrés sur la ligne 309 des recettes non fiscales.

Le « taux de prélèvement pour frais d'assiette et de recouvrement opéré sur le produit des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine recouvrés pour le compte de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale » a été fixé, par arrêté du 26 août 1998, à 0,5 %.

L'article 6 supprime en second lieu les frais d'assiette et de recouvrement de 0,5 % perçus par l'ACOSS sur la CSG sur les revenus d'activité et les revenus de remplacement à destination du Fonds de solidarité vieillesse (plus de 300 millions de francs en 1999), ainsi que sur la CRDS sur les revenus d'activité et les revenus de remplacement, à destination de la CADES (plus de 170 millions de francs en 1999). Dès lors, la disposition ampute également les recettes du régime général, puisque ces frais d'assiette et de recouvrement sont affectés au Fonds national de gestion administrative
».

Il s'agit donc à travers le présent article d'aborder de manière large la question de l'ensemble des frais prélevés par l'Etat à l'occasion de la perception d'impositions sociales.

2. Clarifier l'ensemble des relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale

Le principe selon lequel l'Etat fait rémunérer ses services lorsqu'il prend en charge le recouvrement de droits, taxes et redevances pour le compte d'autres personnes est bien établi. L'exemple le plus connu est celui des impôts locaux, dont le produit transite par un compte d'avances de l'Etat aux collectivités locales et donne lieu à un prélèvement de 4,4 % pour frais d'assiette et de recouvrement. Le Sénat considère, s'agissant des frais perçus sur le produit des impôts locaux, que la rémunération des services fournis par l'Etat est légitime, mais que ces frais ne sauraient donner lieu à un enrichissement « indu » de l'Etat. A l'occasion de l'examen du projet de loi de finances pour 2000, le Sénat avait adopté un amendement tendant à porter le taux applicable au produit de chacune des quatre taxes directes locales au niveau correspondant au coût réel des travaux d'assiette et de recouvrement. A l'occasion de l'examen du projet de loi de finances pour 2001, le Sénat a adopté un amendement tendant à supprimer la fraction des frais d'assiette et de recouvrement destinée initialement à financer la révision des bases cadastrales, celle-ci étant devenue sans objet. Il faut donc aborder de manière globale et réaliste cette question.

La question des frais de gestion entre l'Etat et la sécurité sociale ne se limite pas aux frais de recouvrement. Elle devrait englober l'ensemble des charges de gestion supportées par l'Etat comme les organismes de sécurité sociale pour le compte de tiers.

L'Etat est le premier à facturer ses frais de recouvrement, mais le dernier à rembourser ce qu'il doit aux organismes de sécurité sociale. L'Etat est ainsi jusqu'à aujourd'hui « gagnant sur tous les tableaux » : il prélève des frais proportionnels pour des tâches (le recouvrement) qu'il assume pour le compte des organismes de sécurité sociale ; mais, dans le même temps, il n'acquitte rien pour la gestion par ces mêmes organismes des prestations sociales de l'Etat comme le revenu minimum d'insertion, l'allocation pour adulte handicapé, l'allocation de parent isolé, etc. Le coût du seul service du RMI s'élèverait à 870 millions de francs. De plus, l'ACOSS supporte le coût en trésorerie des nombreuses avances qu'elle effectue.

Votre rapporteur général estime donc qu'une clarification de l'ensemble de ces relations s'impose à l'évidence.

C'était d'ailleurs l'opinion de notre collègue député Alfred Recours qui demandait au gouvernement de le faire pendant le délai séparant l'examen en première lecture à l'Assemblée nationale du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 et du collectif budgétaire. Il n'en a rien été.

Le gouvernement a indiqué qu'il attendait les conclusions de la Cour des comptes, qui devrait aborder cette question dans le cadre de son prochain rapport sur les lois de financement de la sécurité sociale, en septembre 2001, pour prendre des décisions.

En attendant, votre rapporteur général estime qu'il convient de supprimer cet article afin :

• de confirmer les positions constantes du Sénat sur le sujet ;

• de mettre l'Etat et les organismes de sécurité sociale sur un pied d'égalité en attendant une éventuelle réforme l'année prochaine.

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.

ARTICLE 41 (nouveau)

Autorisation donnée à la caisse de mutualité sociale agricole de Corse d'accorder un plan d'échelonnement de la dette sociale portant sur les cotisations patronales des exercices antérieurs au 31 décembre 1998

Commentaire : le présent article vise à autoriser la caisse de mutualité sociale agricole (CMSA) de Corse à accorder un plan d'échelonnement de la dette sociale portant sur les cotisations patronales des exercices antérieurs au 31 décembre 1998, qui entraîne la suspension des poursuites qu'elle aurait pu engager.

I. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le dispositif d'apurement de la dette sociale des exploitants agricoles de Corse
adopté par l'Assemblée nationale est le résultat d'un amendement déposé par le gouvernement quelques heures à peine avant le début de la séance publique, soit dans la précipitation, sans examen préalable de la commission des finances de l'Assemblée nationale.

A. MISE EN PLACE D'UN DISPOSITIF D'APUREMENT DES DETTES SOCIALES DES AGRICULTEURS INSTALLÉS EN CORSE

Le gouvernement a justifié le dépôt de cet amendement en faisant référence à la situation économique difficile des exploitants agricoles de Corse qui les a amenés à contracter, auprès de la caisse de mutualité sociale agricole de Corse, une dette d'importance croissante qui atteint actuellement un milliard de francs.

Le présent article vise à autoriser la caisse de mutualité sociale agricole de Corse à accorder, aux exploitants agricoles installés en Corse, un plan d'échelonnement de la dette sociale portant sur les cotisations patronales de sécurité sociale des exercices antérieurs au 31 décembre 1998.

Le présent article prévoit notamment que :

- les exploitants agricoles installés en Corse, dont « la viabilité économique de l'exploitation a été démontrée par un audit », peuvent demander à la CMSA de Corse de conclure un plan d'apurement de leurs dettes, antérieures au 1 er janvier 1999, relatives aux cotisations patronales de sécurité sociale ainsi qu'aux pénalités et majorations correspondantes ;

- cette demande entraîne de plein droit une suspension des poursuites engagées par la caisse afférentes auxdites dettes ;

- ce plan d'apurement des dettes peut comporter :

* des mesures de report ou de rééchelonnement des paiements des dettes de cotisations patronales de sécurité sociale constatées au 31 décembre 1998 dont la durée ne peut excéder quinze ans ;

* des remises de dettes de cotisations patronales de sécurité sociale constatées au 31 décembre 1998, dans la limite de 50 % de celles-ci , et qui ne pourront être accordées par la caisse qu'une fois constaté le paiement de la moitié de la dette ou des montants prévus par l'échéancier souscrit par les exploitants agricoles pendant huit ans ;

* des réductions ou suppression des majorations et pénalités de retard afférentes aux cotisations même si le principal n'a pas été réglé.

La contractualisation du plan, qui ne peut intervenir qu'à la demande des exploitants, est encadrée par plusieurs conditions dont le respect doit donner lieu à un examen approfondi de chaque situation.

B. EXCLUSION ET DÉCHÉANCE DU DISPOSITIF

Est exclue du bénéfice des dispositions du présent article toute personne qui aura fait l'objet d'une condamnation pénale définitive pour travail dissimulé, marchandage, prêt illicite de main d'oeuvre ou pour fraude fiscale au cours des cinq années précédant la publication de la présente loi.

Les mêmes motifs survenant pendant la réalisation du plan entraînent la déchéance du bénéfice des dispositions du présent article.

Est également déchue :

- toute personne qui aura sciemment fait de fausses déclarations ou remis des documents inexacts en vue d'obtenir le bénéfice du présent dispositif ;

- toute personne qui, après mise en demeure n'aura pas respecté l'échéancier du plan conventionnel de redressement ;

- toute personne qui ne paiera pas ses cotisations courantes.

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

A. LA DETTE SOCIALE DES AGRICULTEURS INSTALLÉS EN CORSE


Globalement, la dette sociale (incluant les cotisations dues au titre des salariés) des agriculteurs installés en Corse continue de croître, puisqu'elle est passée de 826 millions de francs en 1997 à 1,002 milliard de francs en 1999, en raison notamment des majorations et des pénalités de retard, des cotisations sanctions, mais également du taux de recouvrement qui demeure inférieur à la moyenne nationale.

Pour traiter le problème des nombreux débiteurs de montants importants, le gouvernement avait décidé la mise en place d'une commission régionale regroupant les principaux créanciers ainsi que les représentants de l'administration. Cette commission a été installée le 20 septembre dernier et a pour objet de traiter, individuellement et non par un règlement global, les 320 dossiers d'exploitation ayant déposé une demande d'audit préalable. Si l'audit réalisé démontre la viabilité économique de l'exploitation, la commission a pour mission de formuler des propositions de règlement de la dette, qui seront transmises aux instances dirigeantes des créanciers qui en sont membres.

La mise en place de cette commission s'accompagne de la suspension de toutes les poursuites engagées par les trois créanciers représentés. On ne peut que constater que cette décision, imposée à la caisse de MSA de Corse, n'a pu qu'encourager les exploitants à soumettre leur dossier, sans pour autant que leur propension à effectivement rembourser leurs dettes en soit nettement accrue.

Par ailleurs, cette méthode apparaît peu respectueuse des efforts de la direction de la caisse de MSA de Corse, dont les premières tentatives de recouvrement ont été brutalement stoppées dans l'attente de la mise en place de cette commission.

En outre, la mise en place de cette commission s'est accompagnée d'une déclaration, alors ambiguë, du ministre de l'agriculture et de la pêche, le 4 mai dernier, selon laquelle, il allait disposer prochainement des « moyens juridiques et financiers de régler rapidement et définitivement le problème de l'endettement social agricole ».

La lecture du présent article permet d'éclairer les propos alors ambigus du ministre.

B. L'APPRÉCIATION DE VOTRE COMMISSION

Les principaux éléments d'appréciation du présent article sont les suivants :

- sur la forme : il s'agit d'un amendement déposé par le gouvernement dans la précipitation, quelques heures avant la séance, dans un projet de loi soumis de droit à la procédure d'urgence et sans possibilité d'examen préalable du dispositif par la commission des finances de l'Assemblée nationale ; quand on se remémore les propos tenus par le ministre de l'agriculture et de la pêche le 4 mai dernier lors de la mise en place de la commission régionale visant à traiter la dette sociale des exploitants agricoles de Corse, on est en droit de s'interroger sur les raisons pour lesquelles le gouvernement a attendu le « dernier moment » avant de faire part de ses intentions, pourtant arrêtées depuis bien longtemps ;

- sur le fond : les points suivants doivent être évoqués :

1- ce dispositif crée une inégalité entre les exploitants agricoles installés en Corse et ceux du continent, ce qui est contraire au principe constitutionnel d'égalité des citoyens devant la loi ;

2- ce dispositif aura un coût , évalué à près de 150 millions de francs (apurement de la dette et remise de pénalités), coût qui doit être pris en charge par l'Etat, puisqu'il est précisé dans le présent article que la perte de recettes résultant pour les régimes de sécurité sociale est prise en charge par l'Etat, mais les modalités de cette prise en charge ne sont en rien précisées dans le présent article.

Les informations recueillies par votre rapporteur général auprès des services du ministre de l'agriculture et de la pêche permettent de faire un parallèle avec le financement du plan d'apurement des dettes sociales mis en place par la dernière loi d'orientation pour l'outre-mer, à destination des entreprises installées dans les DOM. Cette loi dispose que la perte de recettes pour les régimes de sécurité sociale résultant de la mise en place de ce plan est compensée par la création, à due concurrence, d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Il est donc évident que le plan d'apurement de la dette sociale prévu par le présent article, dont le coût est estimé à 150 millions de francs par le gouvernement, sera financé par les contribuables ;

3- cette disposition qui a une influence sur les régimes de sécurité sociale aurait également dû figurer en loi de financement de la sécurité sociale ;

4- un contrôle sur place opéré par notre collègue député Charles de Courson, rapporteur spécial des crédits du BAPSA à la commission des finances de l'Assemblée nationale, auprès de la CMSA de Corse avait révélé certains dysfonctionnements inquiétants de celle-ci et les difficultés liées au recouvrement des cotisations sociales et notamment au traitement de la dette sociale antérieure à 1999 (un chiffre a été avancé dans son rapport sur les crédits du BAPSA pour 2001 : il existe à ce jour 200 dossiers de débiteurs de plus de 1 million de francs représentant 60 % du total de la dette) ;

5- ce dispositif d'apurement ne suffira sans doute pas à régler définitivement le problème du paiement des cotisations sociales des agriculteurs corses (le taux de recouvrement des cotisations sociales en Corse demeure très faible : fin mars 1999, le taux des restes à recouvrer est de 62 % alors que la moyenne nationale s'établit à 3,6 %). En outre, le taux de recouvrement des dernières cotisations sociales émises demeure faible : 65 % seulement en 1999 pour les non-salariés, pour une moyenne nationale de 85 %.

6- enfin cet amendement est contraire aux conclusions de la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur l'utilisation des fonds publics et la gestion des services publics en Corse (rapport n° 1077 du 3 septembre 1998) , présidée par Jean Glavany, aujourd'hui ministre de l'agriculture et de la pêche, selon lesquelles les douze plans de désendettement financier en 20 ans en Corse n'avaient été qu'une gageure. Ce plan de désendettement social ne semble pas non plus aller dans le bon sens.

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.

ARTICLE 42 (nouveau)

Mise en place d'une société commune Thomson CSF/DCN

Commentaire : le présent article vise à préciser les conditions de la création et du fonctionnement de la future société commune, détenue à parité par l'Etat et Thomson CSF, chargée de la commercialisation et de la maîtrise d'oeuvre d'ensemble des navires de guerre et des systèmes de combat naval, destinés à l'exportation ou rentrant dans le cadre de programmes de coopération.

Le présent article est issu d'un amendement du gouvernement déposé en cours d'examen à l'Assemblée nationale le 8 décembre 2000. Il a été complété par un sous-amendement de notre collègue député Jean-Michel Boucheron.

Le gouvernement et Thomson CSF ont annoncé, le 10 février 2000, leur intention de créer une société commune, détenue à parité, ayant vocation à assurer la commercialisation et la maîtrise d'oeuvre d'ensemble des navires de guerre et des systèmes de combats navals à l'exportation et pour des programmes en coopération. Sur décision de l'Etat, la société pourra également être maître d'oeuvre d'ensemble de programmes nationaux ayant un potentiel d'exportation.

Les négociations entre l'Etat et Thomson-CSF pour établir l'accord industriel, le pacte d'actionnaires et les évaluations financières relatifs à cette société commune sont en cours d'achèvement.

Le bouclage de ce dossier devient maintenant urgent, afin de fournir un support juridique à la gestion des contrats Horizon et Delta (fourniture de six frégates La Fayette à Singapour) et de participer en bon ordre à la concurrence actuelle sur les marchés de sous-marins en Corée du Sud et au Portugal.

Le présent article additionnel vise à permettre la création et le bon fonctionnement de cette société.

Le paragraphe I vise à accorder la garantie de l'Etat à cette société commune dès lors qu'elle pourra être amenée à prendre des engagements financiers dépassant ses propres capacités. De fait, les deux actionnaires, dont l'Etat, seront amenés à mettre en place un dispositif de caution, avals et garanties. La garantie de l'Etat ne pourra être accordée que sur décision expresse du ministre chargé de l'économie, après avis du ministre chargé de la défense. Le présent texte prévoit que « pour chaque opération concernée », cette garantie sera limitée à la quote-part correspondant à la participation du secteur public au capital de la société commune, Thomson-CSF apportant de son côté une garantie de montant et de portée équivalentes.

Parallèlement, ce paragraphe vise à autoriser l'apport à la société commune du fonds de commerce d'exportation des constructions navales, qui relève actuellement d'une filiale de DCN. Sont expressément exclus les actifs industriels, les brevets et les savoir-faire, qui restent propriété de la seule DCN, devenue « service à compétence nationale » en vertu du décret n° 2000-326 du 12 avril 2000. Le transfert se fera conformément aux modalités de la loi n° 86-912 du 6 août 1986 modifiée relative aux modalités de privatisation , laquelle prévoit notamment l'avis de la commission des participations et des transferts.

Le paragraphe II permet à l'Etat de garantir les engagements que DCN, en tant que principal fournisseur industriel, prendra à l'égard de la société commune. DCN conservera en effet ses compétences en matière d'ingénierie, de construction, d'intégration et d'essais de navires et de systèmes de combat. Les cautions ou garanties à première demande sont actuellement accordées par la SOFRANTEM (Société française de vente et de financement de matériels terrestres et maritimes) qui bénéficie de la garantie de l'Etat pour la réalisation d'études et de matériels en vue de l'exportation seulement.

Ce dispositif sera étendu au bénéfice de DCN, et couvrira également les programmes menés en coopération (et non spécifiquement et pour l'exportation).

Le paragraphe II-2° et le paragraphe III poursuivent la modernisation du régime comptable de DCN, en l'alignant sur les règles comptables des sociétés commerciales. A cet effet, il est proposé d'aligner le régime de l'autofinancement sur le droit commun comptable, en supprimant les limites posées par les lois de finances pour 1968 et pour 1979, qui portent à la fois sur ses composantes et sur son utilisation.

Par ailleurs, le versement au budget général sera désormais calculé conformément aux règles de droit commun applicables à la détermination de l'impôt sur les sociétés. De fait, il sera assis sur la totalité du résultat de DCN, et non plus sur les résultats à l'exportation, conformément aux dispositions de l'article 62 de la loi de finances pour 1979, ( paragraphe II-2°du présent article ).

Le paragraphe IV, issu d'un sous-amendement déposé par nos collègues députés, Jean-Michel Boucheron, Jean-Yves Le Dréau et Jean-Marc Ayrault, a pour objet de permettre aux agents de DCN et de DCN International qui le souhaiteront de rejoindre la société commune sous le régime du détachement. Le détachement d'un fonctionnaire ou d'un militaire dans une entreprise privée n'étant pas une position statutaire de droit commun, une autorisation législative est nécessaire pour autoriser un tel détachement en nombre important. Les détachements seront limités à une période de cinq ans, correspondant à la phase de démarrage de la société commune. Ils peuvent être effectués dans les filiales de la société commune, ainsi que dans la ou les sociétés qui détiendront les participations de l'Etat dans le capital de cette dernière et leurs filiales.

Consciente des enjeux liés à la mise en place de cette « société commune » annoncée depuis le 10 février 2000 et soucieuse d'approfondir son information sur un amendement déposé par le gouvernement en fin de première lecture à l'Assemblée nationale, votre commission a décidé de réserver sa position sur cet article.

Décision de la commission : votre commission vous propose de réserver sa position sur cet article.

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