IV. LA PROPOSITION DE LOI : UNE RÈGLE DE CONFLIT DE LOIS S'ÉCARTANT SUR CERTAINS POINTS DES SOLUTIONS JURISPRUDENTIELLES

La proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale comprend cinq articles. Son principal apport est de poser une règle de conflit de lois en matière d'adoption internationale ( art. 1 er A et art. 1 er ) mais elle contient également des dispositions relatives au Conseil supérieur de l'adoption ( art. 3 ) et à la composition de l'Autorité centrale pour l'adoption ( art. 4 ).

A. LA RÈGLE DE CONFLIT DE LOIS

L'article 1 er A crée un nouveau chapitre dans le code civil relatif aux conflits de lois en matière d'adoption, à l'image du chapitre et de la section existant respectivement en matière de divorce et de filiation.

L'article premier insère dans ce nouveau chapitre un article 370-3 déterminant l'effet en France des jugements étrangers en matière d'adoption internationale et désignant la loi applicable à l'adoption prononcée en France .

Il reprend en premier lieu plusieurs règles admises par la Cour de cassation et par la convention de La Haye.

S'agissant des effets en France des décisions prononcées à l'étranger , il prévoit que l'adoption régulièrement prononcée dans le pays d'origine de l'adopté produit les effets prévus par la loi française, pour l'adoption simple ou l'adoption plénière, lorsque l'adoptant est de nationalité française ou réside en France. Il reprend ainsi la jurisprudence traditionnelle selon laquelle les jugements étrangers relatifs à l'état et à la capacité des personnes sont d'effet direct en France, sous réserve de leur régularité internationale.

Il prévoit ensuite qu'une adoption ayant le caractère d'une adoption simple dans le pays d'origine, car ne rompant pas le lien préexistant de filiation, peut être convertie en adoption plénière sous réserve que les consentements requis aient été donnés expressément en connaissance de cause.

S'agissant du prononcé de l'adoption en France , la proposition développe la qualité du consentement qui doit être donné par le représentant légal du mineur en s'inspirant des dispositions de l'article 4 de la convention de La Haye : ce consentement doit être libre, obtenu sans aucune contrepartie, après la naissance de l'enfant, et éclairé sur les conséquences de l'adoption. A l'inverse de la règle prévue dans la convention de La Haye, ce consentement n'a pas à être donné par écrit. Il est précisé que cette règle ne s'applique qu'aux mineurs dont la loi personnelle reconnaît l'adoption.

Mais toujours sur le prononcé de l'adoption en France, ce texte apporte une innovation importante par rapport à la jurisprudence de la Cour de cassation. Un amendement de M. Gérard Gouzes a rendu impossible l'adoption d'enfants dont le statut personnel prohibe cette institution.

La proposition initiale de M. Matteï se contentait de prévoir, à titre subsidiaire, l'application de la loi française aux conditions et aux effets de l'adoption en " l'absence de législation dans le pays d'origine ", ce qui laissait la porte ouverte à diverses interprétations.

Le texte adopté par l'Assemblée nationale prévoit l'application de la loi française aux conditions et aux effets de l'adoption " lorsque le pays d'origine n'y fait pas obstacle ".

Ce texte, très restrictif, interdit aussi bien le prononcé de l'adoption plénière que de l'adoption simple.

En outre, il applique la loi française aux conditions et aux effets de l'adoption prononcée en France , différant en cela de la jurisprudence qui se réfère depuis 1984 à la loi nationale de l'adoptant. Cette évolution n'aurait pas de conséquence pour un adoptant français. En revanche, un adoptant de nationalité étrangère résidant en France, se verrait ainsi dorénavant appliquer la loi française alors que la jurisprudence actuelle conduirait à l'application de sa propre loi nationale.

B. AUTRES DISPOSITIONS

L ' article 2 opère dans le code civil une coordination qui n'avait pas été faite lors du vote de la loi du 5 juillet 1996.

L'article 3 donne un fondement législatif au Conseil supérieur de l'adoption régi jusqu'à présent par le décret n° 75-640 du 16 juillet 1975. Ce faisant, il modifie sa composition, de manière à assurer une meilleure représentation du milieu associatif et il adapte son fonctionnement et ses missions à l'adoption internationale.

L'article 4 modifie la composition de l'autorité centrale pour l'adoption instituée par la loi n° 96-604 du 5 juillet 1996 pour y associer, avec voix consultative, les représentants des associations de familles adoptives et des organismes autorisés pour l'adoption.

La proposition de loi présentée initialement par M. Jean-François Matteï contenait en outre des dispositions relatives aux conditions et à la procédure de déclaration judiciaire d'abandon des enfants ayant fait l'objet d'un placement, lesquelles n'ont pas été reprises par la commission des Lois de l'Assemblée nationale.

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