N° 198

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2000-2001

Annexe au procès-verbal de la séance du 23 janvier 2001

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN NOUVELLE LECTURE, sur l' épargne salariale ,

Par M. Joseph OSTERMANN,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Alain Lambert, président ; Jacques Oudin, Claude Belot, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Roland du Luart, Bernard Angels, André Vallet, vice-présidents ; Jacques-Richard Delong, Marc Massion, Michel Sergent, François Trucy, secrétaires ; Philippe Marini, rapporteur général ; Philippe Adnot, Denis Badré, René Ballayer, Jacques Baudot, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Gérard Braun, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Jean Clouet, Yvon Collin, Jean-Pierre Demerliat, Thierry Foucaud, Yann Gaillard, Hubert Haenel, Claude Haut, Alain Joyandet, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, Michel Mercier, Gérard Miquel, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Pelletier, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Henri Torre, René Trégouët.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème légis.) : Première lecture : 2560 , 2589 , 2594 et T.A. 559

Commission mixte paritaire : 2778

Nouvelle lecture : 2693 , 2792 et T.A. 610

Sénat : Première lecture : 11 , 63 , 61 et T.A. 23 (2000-2001)

Commission mixte paritaire : 116 (2000-2001)

Nouvelle lecture : 193 (2000-2001)

Entreprises.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

La nouvelle lecture du projet de loi sur l'épargne salariale apparaît à votre rapporteur comme une bonne illustration à la fois des bienfaits de la navette parlementaire et des oppositions qui demeurent entre le Sénat d'une part et le gouvernement et la majorité qui le soutient d'autre part.

L'élaboration de ce texte a résulté d'un long travail préparatoire conduit hors du Parlement. S'il se réjouit de cette concertation utile, votre rapporteur regrette à nouveau que le gouvernement ait déclaré l'urgence sur ce projet de loi, limitant les occasions de débats et d'échanges. En effet, les règles d'examen des amendements en nouvelle lecture ne permettent à l'Assemblée nationale de ne débattre que sur ceux du Sénat acceptés par le Gouvernement. Or , le texte reste imparfait sur des points aussi importants que la notion de groupe ou le régime juridique des fonds communs de placement d'entreprise (FCPE).

L'examen du projet de loi en première lecture dans chaque assemblée fut cependant l'occasion d'un enrichissement marqué et d'une amélioration des différents dispositifs, révélant que le dialogue républicain peut trouver sa place sur nombre de points en apparence techniques mais en réalité de grande portée pour les praticiens de l'épargne salariale et ses bénéficiaires que sont les salariés.

Ainsi, plus de la moitié des amendements adoptés par le Sénat ont été repris par l'Assemblée nationale, la majorité, mais pas la totalité, ayant recueilli l'assentiment du gouvernement. L'élargissement de la notion de groupe, le mode de conclusion des plans d'épargne interentreprises, l'affectation des sommes en déshérence, le calcul de l'intéressement dans les holdings , la validation des accords de réduction du temps de travail ayant prévu une exception à la règle de non substitution entre le salaire et l'épargne salariale, l'extension du délai d'utilisation de la provision pour investissement, la condition de rémunération des dirigeants d'entreprises faisant partie du secteur de l'économie solidaire, la représentation des salariés actionnaires dans les organes dirigeants des sociétés, l'extension du champ du rapport du Conseil supérieur de la participation, et les procédures applicables aux entreprises du secteur public constituent autant de sujets sur lesquels un accord a été trouvé.

Cependant des points de désaccord majeurs demeurent.

Outre quelques sujets particuliers (comme le livret d'épargne salariale ou l'économie solidaire) trois fronts séparent la majorité de l'Assemblée nationale et le Sénat.

Le plan partenarial d'épargne salariale volontaire (PPESV) en constitue le premier. Votre rapporteur estime que ce nouveau produit manque ses objectifs : ni outil de simplification - ses modalités pratiques lui ôtant tout caractère opérationnel - ni instrument d'épargne de long terme.

Deuxième front, l'actionnariat salarié, sur lequel aucune des ouvertures proposées par le Sénat n'a été retenue par l'Assemblée nationale.

Enfin, le thème de la retraite a été la grande victime du débat en nouvelle lecture à l'Assemblée nationale. A l'initiative de votre commission des finances, le Sénat a souhaité aborder franchement la question des retraites. Votre rapporteur reste persuadé que ce projet de loi, qui traite des rapports non salariaux que peuvent nouer l'employé et l'entreprise, constituait une occasion privilégiée de proposer un nouveau produit d'épargne en vue de la retraite. Les fonds d'épargne retraite introduits par le Sénat constituaient des instruments de très long terme, offrant toutes les garanties de sécurité des placements, sans remettre en cause l'équilibre des régimes de retraite par répartition, facultatifs mais conçus sur une base collective. Par frilosité, l'Assemblée nationale n'a pas voulu en débattre, alors que l'actualité même l'aurait imposé. Votre rapporteur ne peut que le regretter.

Au total, estimant que le débat technique est probablement allé aussi loin qu'il était possible, et constatant que les positions de désaccord de principe sur le coeur de ce projet de loi demeurent, votre rapporteur vous proposera de ne pas débattre des articles de ce projet de loi en nouvelle lecture et d'adopter la question préalable.

I. UN MOTIF DE SATISFACTION : LA RÉELLE AMÉLIORATION DES DISPOSITIFS TECHNIQUES

Votre rapporteur s'était fixé comme objectif d'aborder l'examen de ce projet de loi de manière constructive et ouverte. Ainsi, beaucoup de sujets, d'apparence technique mais de portée réelle pour les praticiens comme pour les bénéficiaires des dispositifs d'épargne salariale, ont pu donner lieu à accord entre les deux assemblées, le plus souvent avec l'assentiment, parfois muet, du gouvernement.

S'agissant des initiatives prises par le Sénat, outre les corrections d'erreurs matérielles, les points d'entente sont nombreux.

A l'article 1 er A , la référence gaullienne à la participation a été maintenue. A l'article 1 er , la condition d'ancienneté a été portée de deux à trois mois, retenant ainsi un délai se rapprochant de la durée habituelle des périodes d'essai. A l'article 2 , le salarié peut transférer les sommes qu'il détient dans un plan d'épargne interentreprises (PEI) vers un PEI de même durée minimale de placement auquel a adhéré son employeur ou vers un PEI qui viendrait à être conclu par son entreprise sans que ces sommes soient comptabilisées dans le plafond de 25 % de sa rémunération actuelle et sans qu'elles soient assujetties à la CSG et à la CRDS. A l'article 3 , la préoccupation du Sénat d'éviter une définition trop restrictive de la notion de groupe a été largement prise en compte par l'Assemblée nationale tandis que la disposition évitant la remise en cause des accords existants à la date de promulgation de la loi a été maintenue. A l'article 3 ter , la mise en oeuvre de l'extension de la participation obligatoire aux unités économiques et sociales a été assouplie. A l'article 3 quinquies , la formation des salariés membres des conseils de surveillance des FCPE a été étendue. A l'article 3 sexies , la faculté pour les salariés de décider de manière unilatérale de l'affectation du produit de leur épargne dans le compte épargne-temps a été supprimée.

A l'article 4 , le périmètre de consolidation pour le calcul de l'intéressement dans les holdings a été défini, et une condition de couverture des salariés des entreprises y appartenant a été introduite ; parallèlement, a été retenu le choix d'une validation des accords de réduction du temps de travail ayant prévu une clause relative à l'épargne salariale, tout en proscrivant pour l'avenir de tels accords. A l'article 5 , les modalités de conclusion d'un PEI ont été élargies. L'article 5 bis a permis d'étendre aux coopératives agricoles le bénéfice du PEI. L'article 6 bis a été supprimé au bénéfice de l'article 6 ter qui prévoit que le fonds de réserve pour les retraites recueillera les sommes en déshérence issues de l'épargne salariale.

A l'article 8 , le délai d'utilisation de la provision pour investissement a été porté de un à deux ans.

A l'article 9 , une condition de rémunération des dirigeants des entreprises de l'économie solidaire a été établie. A l'article 10 bis , une formule souple incitant les fonds communs de placement d'entreprise qui le souhaitent à formuler des exigences en matière de prise en compte par le gestionnaire de considérations éthiques a été définie.

A l'article 12 , a été supprimée l'autorisation préalable du règlement pour permettre au conseil de surveillance de décider de l'apport des titres à une offre publique ainsi que la référence à un rapport annuel simplifié ; par ailleurs, le délai pour permettre aux conseils de surveillance de se mettre en conformité avec les dispositions de la loi a été porté de neuf à douze mois. A l'article 13 , a été maintenue la période d'incessibilité pour calculer le pourcentage de capital détenu par les salariés. L'article 13 ter introduit une contrainte pour les entreprises ne respectant pas la clause de " rendez-vous " obligatoire s'agissant de la représentation des salariés actionnaires au conseil d'administration à travers une procédure d'injonction ouverte à tout actionnaire salarié. L'article 13 quater crée également une procédure d'injonction de faire ouverte à toute personne intéressée afin que le rapport annuel contienne les informations légales sur l'état de la participation des salariés au capital de l'entreprise. A l'article 13 quinquies, la consultation préalable des salariés actionnaires devient obligatoire avant une assemblée générale extraordinaire devant se prononcer sur la modification des statuts pour assurer la représentation des salariés actionnaires dans les organes dirigeants. L'article 13 sexies met en place un crédit d'heures pour la participation des salariés mandataires aux assemblées générales.

A l'article 14 , est restreinte la faculté de versement de l'abondement de l'entreprise sous forme de titres. L'article 14 septies étend les missions du Conseil supérieur de la participation. A l'article 15 , la mission de la commission des participations et des transferts est limitée dans le cas d'opérations réalisées en matière d'épargne salariale touchant aux titres d'entreprises du secteur public.

Au total, sur tous les aspects du texte d'origine, le dialogue entre les deux assemblées et le gouvernement a pu conduire à des accords se traduisant par une amélioration, une simplification et une sécurisation des dispositifs d'épargne salariale et d'actionnariat salarié.

Cet enrichissement ne doit pas cependant pas masquer la persistance de désaccords profonds.

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