EXAMEN DES ARTICLES
TITRE PREMIER :

MARCHÉS PUBLICS, INGÉNIERIE PUBLIQUE ET

COMMANDE PUBLIQUE

ARTICLE PREMIER

Régime juridique de l'ingénierie publique

Commentaire : le présent article a pour objet, d'une part, de soumettre aux règles du nouveau code des marchés publics les missions accomplies par les services de l'Etat, des départements et des régions au bénéfice des collectivités territoriales et des établissements publics et, d'autre part, de préciser le régime de l'assistance technique à la gestion communale apportée par les services de l'Etat aux petites communes.

Le présent article comporte trois paragraphes. Le I et le II traitent des prestations d'ingénierie publique intervenant dans le champ concurrentiel réalisées par des collectivités publiques pour le compte d'autres collectivités publiques. Le III traite d'un régime dérogatoire au droit de la concurrence, l'assistance technique à la gestion communale.

I. LES PRESTATIONS D'INGÉNIERIE PUBLIQUE INTERVENANT DANS LE CHAMP CONCURRENTIEL

A. LE DROIT ACTUEL

1. Les règles actuelles en matiere d'ingénierie publique ...

Aujourd'hui, deux dispositions législatives organisent les conditions dans lesquelles une collectivité publique peut apporter à une autre collectivité publique son concours technique :

- l'article 12 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat prévoit que les services de l'Etat , des départements et des régions peuvent apporter leur concours technique aux communes 4 ( * ) qui le demandent pour l'exercice de leurs compétences ;

- l'article 7 de la loi n° 92-125 du 6 février 1992 d'orientation relative à l'administration territoriale de la République dispose que les services déconcentrés de l'Etat peuvent apporter leur appui technique aux collectivités territoriales (communes, départements, régions) et à leurs établissements publics de coopération pour la réalisation de leurs projets de développement économique, social et culturel.

Dans le premier cas, les prestataires de l'aide technique sont plus nombreux (tous les services de l'Etat, régions, départements), dans le second cas, les bénéficiaires sont plus nombreux (toutes les collectivités territoriales et leurs établissements publics de coopération).

Dans les deux cas, l'appui technique est apporté dans les conditions prévues par une convention entre le prestataire et le bénéficiaire.

Le contenu des prestations d'ingénierie qui peuvent être fournies par les services d'une collectivité publique est celui défini par l'article 2 du décret n° 2000-257 du 15 mars 2000 relatif à la rémunération des prestations d'ingénierie réalisées au profit de tiers par certains services des ministères de l'équipement et de l'agriculture : « la conduite d'opération, la maîtrise d'oeuvre, la gestion des services, les prestations de contrôle, d'étude, d'expertise, de conseil et d'assistance dans les domaines de l'aménagement, de l'équipement et de l'environnement, ainsi que le mandat de maîtrise d'ouvrage ».

Le gouvernement ne dispose pas d'information sur le montant des rémunérations versées par les communes aux départements et aux régions en contrepartie de telles prestations.

En revanche, le gouvernement a indiqué à votre rapporteur que les rémunérations versées aux services de l'Etat par les collectivités locales et leurs établissements publics en application tant de la loi de 1983 que de la loi de 1992, s'élevaient pour les exercices 1998, 1999 et 2000 à 1.560 millions de francs par an. Les services de l'Etat fournissent chaque année plus de 30.000 prestations au bénéfice d'environ 22.000 communes et groupements. Le montant moyen de chaque prestation est d'environ 35.000 francs.

Depuis la loi de finances pour 2000, les recettes engendrées par ces missions sont versées au budget général de l'Etat. Elles figurent sur le compte « 901-530 spécification 331-01 et 331-11 ». Les rémunérations perçues sous forme de fonds de concours par les centres d'étude technique du ministère de l'équipement sont inscrites à l'article 20 du chapitre 34-97.

Les prestations ainsi servies aux collectivités locales constituent une part très significative de l'activité de certaines sub-divisions administratives des services déconcentrés du ministère de l'équipement.

2. ... doivent être mises en conformité avec le droit de la concurrence et soumises au code des marchés publics

Le droit actuel ne précise pas que les conventions résultant de l'application de l'article 12 de la loi du 7 janvier 1983 et de l'article 7 de la loi du 6 février 1997 sont des marchés publics. Par conséquent, quel que soit leur montant, elles ont longtemps pu être signées sans passer par les procédures de mise en concurrence prévues par le code des marchés publics.

Cette pratique a été remise en cause par l'arrêt du Conseil d'Etat Communauté de communes du Piémont de Barr du 20 mai 1998, dans lequel était qualifié de marché public un contrat d'ouvrage entre deux établissements publics de coopération intercommunale. Par extension, on peut supposer que cette jurisprudence trouverait à s'appliquer aux conventions prévues par les deux lois précitées, même si le ministre de l'équipement a pu considérer que les prestations techniques de l'Etat étaient « des actes qui concrétisent les concours des services déconcentrés de l'Etat, qui ne sont ni des marchés au sens du code des marchés publics, ni des délégations de service public. Elles doivent être considérées comme des actes administratifs » 5 ( * ) .

Cette évolution jurisprudentielle accompagne l'évolution de la réglementation nationale en matière de droit de la concurrence. Le nouveau code de commerce a intégré les règles résultant de l'ordonnance du 1 er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence et son article L. 410-1 soumet aux règles de la concurrence les activités de production, de distribution et de services des personnes publiques. De même, l'article 3 de la directive n° 92-50 du 18 juin 1992 commande aux pouvoirs adjudicateurs de veiller à ce qu'il n'y ait pas de discrimination entre les différents prestataires de services (dont les prestataires de services d'ingénierie, d'architecture et d'aménagement).

Le Conseil d'Etat est allé plus loin dans un avis du 8 novembre 2000 Société Jean-Louis Bernard Consultant , qui fixe les conditions que doit satisfaire un établissement public administratif pour pouvoir être mis en concurrence, dans des conditions loyales, avec des opérateurs privés. Ces conditions sont les suivantes :

- le prix proposé doit être déterminé en prenant en compte l'ensemble des coûts directs et indirects concourant à la formation du prix de la prestation objet du contrat ;

- ne pas bénéficier, pour déterminer le prix, d'un avantage découlant des ressources ou des moyens qui lui sont attribués au titre de sa mission de service public ;

- pouvoir en justifier, si nécessaire, par ses documents comptables ou tout autre moyen d'information approprié.

Il a été indiqué à votre rapporteur que les services déconcentrés du ministère de l'équipement tenaient, dès à présent, une comptabilité analytique de manière à satisfaire aux critères établis par le Conseil d'Etat.

La réforme du code des marchés publics, réalisée par voie réglementaire, a constitué une « bonne occasion » pour le gouvernement de proposer, dans le plus proche support législatif, la mise en conformité du droit de l'ingénierie publique avec les évolutions du droit et de la jurisprudence.

B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

1. Appliquer le nouveau code des marchés publics

Le I et le II du présent article modifient respectivement l'article 12 de la loi du 7 janvier 1983 et l'article 6 de la loi du 6 février 1992 dans des termes identiques.

Dans les deux cas, il est proposé de supprimer la procédure actuelle (la convention entre les prestataire et le bénéficiaire) et de préciser que les prestations d'ingénierie publiques sont réalisées « dans les conditions prévues par le code des marchés publics ».

Dorénavant, les bénéficiaires des prestations devront passer des marchés avec les services du prestataire (l'Etat, les régions ou les départements) pour ces concours techniques, en respectant les règles et procédures du nouveau code des marchés publics. Les services prestataires devront, de leur côté, respecter le droit de la concurrence pour préparer leurs offres, en identifiant notamment l'ensemble des coûts directs et indirects imputables à ces missions (même pour les prestations inférieures au seuil de mise en concurrence).

S'agissant des services de l'Etat, il a été précisé à votre rapporteur que l'actuel barème de prestation, défini par l'arrêté du 20 avril 2000 précité, serait supprimé.

2. Adapter le droit à la pratique

Les textes proposés par le I et le II du présent article pour l'article 12 de la loi du janvier 1983 et l'article 7 de la loi du 6 février 1992 modifient le champ des prestataires et des bénéficiaires de l'ingénierie publique :

- à l'article 12 de la loi du 7 janvier 1983, il est précisé que les services de l'Etat, des régions et des départements pourront non seulement apporter leur concours aux communes, mais aussi à leurs établissements publics et aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI).

Cette précision permet aux EPCI de pouvoir faire appel aux services des départements et des régions, faculté qu'ils n'ont pas dans le droit actuel. S'agissant des services de l'Etat, les EPCI ne pouvaient jusqu'ici recourir qu'aux services déconcentrés et dans le cadre de leurs « projets de développement économique, social et culturel », en application de l'article 7 de la loi du 6 février 1992. Ils auront désormais accès à l'ensemble des services de l'Etat, pour l'exercice de l'ensemble de leurs compétences ;

- à l'article 7 de la loi du 6 février 1992, il est précisé que les services de l'Etat pouvant accorder un appui technique à un projet de développement économique, social et culturel sont, non seulement les services déconcentrés, mais aussi les « services à compétence nationale de l'Etat ». L'encadré ci-dessous retrace la liste de ces services, dont certains tirent leur qualification d'un texte réglementaire, d'autre pas.

Services à compétence nationale

Services à compétence nationale dans leur statut :

Décret n° 98-829 du 14 septembre 1998 portant création du centre d'évaluation, de documentation et d'innovation pédagogiques (C.E.D.I.P.)

Arrêté du 28 septembre 1998 relatif au comité d'orientation du C.E.D.I.P.

Décret n° 98-980 du 2 novembre 1998 portant création du centre d'études techniques maritimes et fluviales (C.E.T.M.E.F.)

Arrêté du 10 décembre 1998 portant organisation du C.E.T.M.E.F.

Arrêté du 10 décembre 1998 fixant la composition, l'organisation et le fonctionnement du comité d'orientation et des comités thématiques du C.E.T.M.E.F.

Arrêté du 19 avril 1999 portant création du comité des directeurs relatif au C.E.T.M.E.F.

Arrêté du 21 janvier 2000 portant création du service technique des bases aériennes (S.T.B.A.)

Arrêté du 21 janvier 2000 portant création du centre d'études de la navigation aérienne

Arrêté du 21 janvier 2000 portant création du service de l'information aéronautique

Arrêté du 21 janvier 2000 portant création du service du contrôle du trafic aérien

Arrêté du 21 février 2000 portant création du service technique des remontées mécaniques et des transports guidés (S.T.R.M.T.G.)

Services, de fait, à compétence nationale mais non traduits dans les statuts :

Centre d'études sur les réseaux, les transports, l'urbanisme et les constructions publiques (CERTU)

Service d'études techniques des routes et autoroutes (SETRA)

Centre d'étude des tunnels (CETU)

Source : ministère de l'équipement, des transports et du logement

Le présent projet de loi élargit également le champ des établissements publics pouvant bénéficier d'un concours technique des services de l'Etat pour la réalisation d'un projet de développement économique, social ou culturel. Jusqu'ici, cette faculté était ouverte aux seuls établissements publics des collectivités territoriales. Elle le sera désormais pour tous les établissements publics.

Le tableau de la page suivante compare le droit actuel et le droit proposé. Les aménagements proposés permettent surtout d'améliorer la cohérence entre ces deux lois car, en pratique, les chevauchements de champ d'application permettent à toutes les collectivités, et à tous leurs établissements publics, qui souhaitent faire appel aux services de l'Etat, d'un département ou d'une région, de pouvoir bénéficier de leurs prestations. La seule nouveauté véritable est l'ouverture à l'ensemble des établissements publics, y compris les établissements publics de l'Etat, de la faculté de recourir aux services de l'Etat pour la réalisation de projets de développement économique, social ou culturel.

.

LES CHAMPS RESPECTIFS DE L'ARTICLE 12 DE LA LOI DU 7 JANVIER 1983 ET DE LA LOI DU 7 FEVRIER 1992

Prestataires

Bénéficiaires

Services déconcentrés

Services à vocation nationale

Administrations centrales

Départements

Régions

Communes

EPCI

Syndicats mixtes

Communes pour l'exercice de leurs compétences

oui

OUI

oui

OUI

oui

OUI

oui

OUI

oui

OUI

non

NON

non

NON

non

NON

Départements pour

l'exercice de leurs compétences

non

NON

non

NON

non

NON

non

NON

non

NON

non

NON

non

NON

non

NON

Départements pour leurs projets de développement économique, social et culturel

oui

OUI

non

OUI

non

NON

non

NON

non

NON

non

NON

non

NON

non

NON

Régions pour l'exercice de leurs compétences

non

NON

non

NON

non

NON

non

NON

non

NON

non

NON

non

NON

non

NON

Régions pour leurs projets de développement économique, social et culturel

oui

OUI

non

OUI

non

NON

non

NON

non

NON

non

NON

non

NON

non

NON

EPCI pour l'exercice de leurs compétences

non

OUI

non

OUI

non

OUI

non

OUI

non

OUI

non

NON

non

NON

non

NON

ECPI pour leurs projets de développement économique, social et culturel

oui

OUI

non

OUI

non

NON

non

NON

non

NON

non

NON

non

NON

non

NON

Syndicats mixtes pour l'exercice de

leurs compétences

non

NON

non

NON

non

NON

non

NON

non

NON

non

NON

non

NON

non

NON

Syndicats mixtes pour leurs projets de

développement économique, social et culturel

oui

OUI

non

OUI

non

NON

non

NON

non

NON

non

NON

non

NON

non

NON

Autres établissements publics pour l'exercice de leurs compétences

non

NON

non

NON

non

NON

non

NON

non

NON

non

NON

non

NON

non

NON

Autres établissements publics pour leurs projets de développement économique, social et culturel

non

OUI

non

OUI

non

NON

non

NON

non

NON

non

NON

non

NON

non

NON

* Il n'y a pas de ligne commune pour leurs projets économiques, sociaux et culturels car ces projets sont couverts par la ligne « communes  pour l'exercice de leurs compétences.

** En minuscule : le droit actuel ; en majuscule : le dispositif proposé par le projet de loi ; *** En gras souligné : les nouveautés du projet de loi. C. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

1. Renforcer le respect des règles de la concurrence

Le texte proposé par le présent article pour l'article 12 de la loi du 7 janvier 1983 et l'article 7 de la loi du 6 février 1992 prévoit que les prestations d'ingénierie publique fournies par les services de l'Etat, des départements et des régions devront respecter les règles du code des marchés publics. Le respect des règles de la concurrence s'appliquera aux services de l'Etat au dessus du seuil d'appel d'offre, mais aussi en dessous. Dans tous les cas, les prix proposés par les services de l'Etat devront être calculés de manière loyale, de manière à ne pas avantager l'ingénierie publique par rapport aux prestataires privés.

Alors que la jurisprudence, et notamment l'avis précité du Conseil d'Etat du 8 novembre 2000 Société Jean-Louis Bernard Consultants , a précisé les critères que doivent satisfaire les services des collectivités publiques dans le cadre d'une mise en concurrence 6 ( * ) , le texte du présent projet de loi est muet sur ce point

Votre rapporteur considère que, à l'image du dispositif proposé par l'article 3 du présent projet de loi qui confère un caractère législatif à la définition jurisprudentielle de la délégation de service public, il conviendrait de préciser, dans la loi, ces critères de concurrence loyale.

La réaffirmation des principes de concurrence loyale est d'autant plus nécessaire qu'il reviendra aux services de l'Etat chargés du contrôle de légalité de contrôler des marchés pour lesquels les services de l'Etat sont soumissionnaires, cette « double casquette » pouvant être source de conflits d'intérêt.

2. Tenir compte de la diversité des formes de coopération locale

Le texte proposé par le I du présent article pour l'article 12 de la loi du 7 janvier 1983, lorsqu'il traite des structures de coopération locale, est restrictif à deux égards :

- la rédaction proposée ouvre aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) la possibilité de faire appel au concours technique des services de l'Etat, des départements et des régions, mais n'offre pas cette faculté aux autres formes d'établissement publics de coopération locale, et notamment les syndicats mixtes. Or, en pratique, les services de l'Etat travaillent déjà pour de telles structures. Par ailleurs, la rédaction proposée par le présent article pour l'article 7 de la loi du 6 février 1992 permet aux services de l'Etat de travailler pour l'ensemble des établissements publics dans le cadre de projets de développement économique, social et culturel. Par cohérence, il conviendrait d'étendre les dispositions de la loi de 1983 à l'ensemble des « établissements publics de coopération locale », de manière à couvrir tous les établissements publics mentionnés dans la cinquième partie du code général des collectivités territoriales ;

- la loi de 1983 ne prévoit pas qu'une commune puisse fournir des prestations d'ingénierie à une autre commune. Pourtant, en pratique, cette solution pourrait procurer une souplesse au plan local. Elle serait en outre conforme à l'esprit de l'article L. 5111-1 du code général des collectivités territoriales selon lequel « les collectivités territoriales peuvent conclure entre elles des conventions par lesquelles l'une d'entre elles s'engage à mettre à la disposition d'une autre collectivité ses services et ses moyens afin de lui faciliter l'exercice de ses compétences ». Afin d'encadrer ce qui pourrait être considéré comme une dérogation au principe de spécialité territoriale résultant de l'article L. 1111-2 du code général des collectivités territoriales, votre rapporteur vous proposera d'autoriser une commune à faire appel au concours technique des services d'une autre commune, mais seulement lorsque toutes deux appartiennent à un même établissement public de coopération locale.

II. L'ASSISTANCE TECHNIQUE À LA GESTION COMMUNALE

A. LE DROIT ACTUEL

Au sein des prestations d'ingénierie publique fournies par les services de l'Etat aux communes, il existe un régime spécifique dit d' « assistance technique à la gestion communale » (ATGC).

Le champ de cette assistance technique est défini par l'article 15 de l'arrêté du 20 avril 2000 fixant les taux et les modalités de rémunération des prestations d'ingénierie réalisées au profit de tiers par certains services des ministères de l'équipement et de l'agriculture et précisant les modalités de leur intervention :

- la gestion de la voirie communale ;

- le conseil pour l'exercice des pouvoirs de l'autorité municipale au titre de la police de la circulation et du stationnement ;

- l'étude et la direction des travaux d'aménagement ou de modernisation concernant la voirie communale et les ouvrages nécessaires à son exploitation, à l'exclusion des chemins ruraux et lorsque leur montant hors taxe n'excède pas un certain seuil, fixé en 1998 à 176.000 francs par prestation et plafonné à 703.000 francs par an ;

- le contrôle des travaux exécutés en vue de la réalisation de voies dont la commune a décidé le principe du classement dans la voirie communale ;

- le conseil en matière d'aménagement et d'habitat, s'il n'est pas rendu obligatoire par les lois et règlements généraux.

L'originalité de l'assistance technique à la gestion communale par rapport au reste des prestation d'ingénierie publique est double :

- les services de l'Etat sont rémunérés sur une base qui s'établissait à 4,48 francs par habitant et par an en 1998 7 ( * ) . Il s'agit en quelque sorte d'un abonnement, ou d'un droit de tirage, auquel souscrivent les collectivités locales auprès des services techniques de l'Etat. Par définition, un tel système est contraire aux règles de la concurrence puisque les communes ayant souscrit cet abonnement, sont tentées de le « rentabiliser » en faisant le plus souvent possible appel aux services de l'Etat plutôt qu'à des opérateurs privés. Le système du forfait conduit d'ailleurs à déconnecter le montant des rémunérations perçues par les services de l'Etat du coût des services rendus ;

- le champ de l'assistance technique est, en droit, très limité et concerne des prestations qui ne sont le plus souvent pas susceptibles d'être satisfaites par l'initiative privée puisqu'elles relèvent pour une large part de l'exercice de prérogatives de puissance publique.

Par exemple, les pouvoirs de police de la conservation du domaine public ne peuvent être délégués qu'à une autorité publique dûment investie pour établir des constats à la suite d'infractions portant atteinte à la voirie publique. Les pouvoirs de police de la circulation ne peuvent même pas être délégués au représentant d'un groupement de communes. Les maires des communes de petite taille, qui ne disposent pas des personnels nécessaires, sont donc quasiment dans l'obligation de se tourner vers les services de l'Etat.

Par ailleurs, les petites communes, voire les petites structures intercommunales, ne disposent pas toujours des moyens techniques nécessaires à la définition de leurs besoins, à la préparation de consultations, ou au contrôle de l'exécution d'un contrat. Elles ont besoin des conseils de techniciens qualifiés, afin de pouvoir être en mesure de faire ensuite appel à l'initiative privée pour satisfaire leurs besoins.

Lorsqu'une commune entre dans le système de l'ATGC, les services de l'Etat se comportent, pratiquement, comme s'ils étaient les services de la commune et interviennent dans des délais très brefs en cas d'urgence ou de risque. Le gouvernement a indiqué à votre rapporteur, en réponse à son questionnaire, que « sur la base d'évaluations faites dans quelques départements, on peut estimer le temps moyen passé par commune à l'équivalent de six à dix journées de travail par an 8 ( * ) (dont environ 60 % de temps de contrôleurs, 10 % d'ingénieur et technicien, 15 % de chefs d'équipe, 5 % de dessinateur). Cette mission est répartie sur dix à cinquante interventions par an et par commune de personnels de catégories diverses sur place, par courrier et par téléphone ».

Il convient de souligner que le champ de l'assistance technique à la gestion communale englobe cependant un domaine dans lequel les agents de l'Etat sont conduits à réaliser des opérations de maîtrise d'oeuvre, et donc d'agir dans un domaine où l'initiative privée pourrait trouver à s'exercer : il s'agit de l'étude et la direction des travaux d'aménagement ou de modernisation concernant la voirie communale et les ouvrages nécessaires à son exploitation (même si l'existence d'un plafond, à un niveau peu élevé laisse penser que l'initiative privée serait peu intéressée par l'obtention de ces « marchés »).

Les rémunérations perçues par les services de l'Etat en contrepartie des prestations d'assistance technique à la gestion communale s'élèvent à environ 110 millions de francs par an 9 ( * ) , acquittés par environ 34.000 communes et 1.350 structures de coopération locale.

B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : CONFORTER L'EXISTENCE DE L'ASSISTANCE TECHNIQUE À LA GESTION COMMUNALE

La soumission des prestations d'assistance technique à la gestion communale (ATGC) aux mêmes règles que les autres prestations d'ingénierie publique, c'est-à-dire celles du code des marchés publics, aurait pour conséquence, même pour des prestations dont le coût est inférieur au seuil d'appel d'offres, de contraindre les petites communes à passer des contrats pour chacune des prestations aujourd'hui réalisées par les services de l'Etat dans le cadre de l'ATGC.

Outre que ces communes seraient dans l'incapacité technique de satisfaire à cette obligation, et que l'Etat devrait tarifer ses prestations à prix coûtant, cette procédure entraînerait des lourdeurs contraires à l'esprit de l'ACTP, qui repose sur le principe selon lequel l'Etat se comporte comme s'il était un service technique de la commune, notamment avec la même réactivité en cas d'urgence.

C'est pourquoi le gouvernement a souhaité modifier la loi du 6 février 1992 relative à l'administration territoriale de la République et insérer dans ce texte un article 7-1 destiné à déroger au droit de la concurrence afin de garantir la pérennité du régime de l'ACTP, et notamment la possibilité de conserver le régime du forfait. Le III du présent article propose une rédaction pour l'article 7-1 de la loi de 1992.

Ainsi, il est prévu que les communes et les groupements « bénéficient, à leur demande » 10 ( * ) d'une « assistance technique, fournie par les services de l'Etat » dans les domaines de « la voirie, de l'aménagement et de l'habitat », qui sont les trois domaines dans lesquels l'ATGC s'exerce actuellement.

Pour pouvoir demander l'assistance technique, les communes et les groupements doivent ne pas disposer, « du fait de leur taille et de leurs ressources, des moyens humains et financiers nécessaires à l'exercice de leurs compétences ».

Pour accorder l'assistance technique, l'Etat doit se fonder sur des « raisons de solidarité et d'aménagement du territoire ». Cette référence à la solidarité et à l'aménagement du territoire est destinée à faire entrer l'assistance technique dans le champ des « services d'intérêt économique général » au sens de l'article 16 du Traité sur l'Union européenne. Cette qualification permet aux Etats-membres de déroger aux règles de la concurrence.

Ainsi, le texte proposé pour l'article 7-1 de la loi du 6 février 1992 ne prévoit pas que l'assistance technique est fournie dans les conditions prévues par le code des marché public (comme dans la rédaction proposée pour l'article 7 de cette loi et pour l'article 12 de la loi du 7 janvier 1983). Au contraire, le texte renvoie à un décret en Conseil d'Etat qui « fixe les modalités de rémunération de cette assistance ».

Selon les indications fournies à votre rapporteur, le décret devrait reprendre le régime du forfait en vigueur actuellement, et donc éviter que les communes et leurs groupements n'aient à passer un contrat à chaque fois qu'ils ont besoin de faire appel aux services de l'Etat. Le montant de ce forfait pourra rester avantageux pour les communes, puisque les services d'intérêt économique général n'ont pas l'obligation d'équilibrer leurs coûts.

C. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION : PRECISER LE RÉGIME DE L'ASSISTANCE TECHNIQUE À LA GESTION COMMUNALE

A terme, l'assistance technique à la gestion communale a vocation à disparaître à mesure que l'intercommunalité se développera. On peut en effet espérer que cette dernière permettra au plus grand nombre de communes d'appartenir à une structure dont la taille sera suffisante pour se doter des moyens techniques nécessaire à la réalisation des tâches aujourd'hui confiées aux services de l'Etat (qui perçoivent une rémunération en contrepartie).

Aujourd'hui, et même si elle doit être encadrée afin d'être compatible avec le droit de la concurrence, l'assistance technique reste nécessaire. Toutefois, le régime mis en place par le III du présent article pour l'article 7-1 de la loi du 6 février 1992 mérite d'être précisé.

1. Élargir la liste des prestataires de l'assistance technique

« Service d'intérêt économique général », l'assistance technique doit être proposée, pour des raisons de solidarité et d'aménagement du territoire, à toutes les communes situées sur le territoire national par les services de l'Etat.

Pour autant, il ne semble pas justifié que ces prestations soit fournies uniquement par les services de l'Etat puisque l'article L.1111-2 du code général des collectivités territoriales dispose en effet que « les communes, les départements et les régions (...) concourent avec l'Etat (...) à l'aménagement du territoire ».

En pratique, on constate que les services techniques des collectivités locales et des structures intercommunales disposent de compétences au moins équivalentes à celles des services de l'Etat.

Dès lors, il convient d'ouvrir aux collectivités locales et aux établissements publics de coopération intercommunale qui le souhaiteraient la faculté d'offrir aux communes une assistance technique dans des conditions comparables à celles proposées par l'Etat.

Cette possibilité n'est pas de nature à élargir la dérogation au droit de la concurrence que constitue l'assistance technique mais à permettre, dans certaines communes, que l'assistance soit apportée par les services des départements et des régions plutôt que par les services de l'Etat.

2. Préciser les catégories de « groupements » concernées par l'assistance technique

Le texte proposé par le III du présent article pour l'article 7-1 de la loi du 6 février 1992 (qui traite de l'assistance technique à la gestion communale) fait référence, dans son premier alinéa, aux communes et à leurs « groupements ». La référence aux groupements est particulièrement vague 11 ( * ) et, depuis la loi du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale, le législateur s'emploie à préciser la catégorie de groupements dont il s'agit. Il conviendrait d'en faire de même ici.

Votre rapporteur souhaite n'exclure du bénéfice de l'assistance technique aucune structure qui pourrait en avoir besoin et dont les membres sont en totalité ou en partie des communes. C'est pourquoi il vous proposera d'ouvrir le bénéfice de l'assistance technique aux établissements publics de coopération locale auxquels appartiennent des communes.

3. Préciser les critères d'éligibilité à l'assistance technique

Le texte proposé pour l'article 7-1 de la loi du 6 février 1992 renvoie au pouvoir réglementaire la détermination des « critères auxquels doivent satisfaire les communes et groupements » pour bénéficier de l'assistance technique (critère de « taille » et de « ressources »), le « contenu » de l'assistance technique et les « modalités de rémunération » de cette assistance.

Le choix du pouvoir réglementaire peut se comprendre : il appartient en effet à l'Etat de décider par lui-même à qui, et dans quelles conditions il souhaite apporter une assistance technique (dont le coût est supérieur aux recettes qu'elle engendre).

Le renvoi au pouvoir réglementaire est moins compréhensible dès lors que l'on étend, comme le propose votre rapporteur, la possibilité de fournir l'assistance technique aux collectivités locales et aux établissements publics de coopération intercommunale. Dans ces conditions, il ne s'agit plus de l'organisation interne des seuls services de l'Etat, mais également des services des collectivités territoriales 12 ( * ) .

Par ailleurs, les critères d'éligibilité à l'assistance technique ne sont pas sans conséquences sur la manière dont s'administrent les collectivités locales bénéficiaires. L'organisation des services d'une commune peut ne pas être la même selon que cette commune a droit, ou non, à l'assistance technique.

Pour l'ensemble de ces raisons, votre rapporteur vous proposera un système de détermination de l'éligibilité à l'assistance technique différent de celui proposé par le gouvernement. Plutôt que de renvoyer à un décret la définition des bénéficiaires de l'ATGC (la loi se bornant à indiquer que les critères d'éligibilité seront déterminés en fonction de la taille et de la richesse des communes), il est proposé que seules les communes de moins de 9.000 habitants 13 ( * ) (et les établissements publics de coopération locale auxquels elles appartiennent) puissent bénéficier de l'ATGC.

Lorsque ces communes demanderont à bénéficier de l'assistance technique, il appartiendra aux prestataires de déterminer si des raisons de solidarité et d'aménagement du territoire justifient que l'assistance leur soit accordée.

Ainsi, dans le système qui vous sera proposé, le droit de la concurrence s'appliquera intégralement au delà de 9.000 habitants, et l'assistance technique sera réservée aux seuls communes et groupements qui en ont vraiment besoin.

De plus, la fixation de ce seuil revient à véritablement dégager l'intention du législateur, tandis que le renvoi à un décret (prévu par le projet de loi) ne permet pas de déterminer dans quel esprit cette dérogation au droit de la concurrence est mise en place.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 2

Unification des contentieux relatifs aux marchés publics

Commentaire : le présent article a pour objet de préciser que tous les marchés passés en application du code des marchés publics ont le caractère de contrats administratifs.

Aujourd'hui, le régime du contentieux des marchés publics est très confus, notamment du fait de la jurisprudence du Tribunal des conflits, dont l'arrêt Commune de Sauve du 5 juillet 1999 considère que la soumission de contrats aux règles du code des marchés publics « ne saurait leur conférer à elle seule le caractère de contrats administratifs ».

En d'autre termes, les contrats soumis au code des marchés publics :

- sont des contrats administratifs, soumis au juge administratif, lorsqu'ils comportent des clauses exorbitantes du droit commun ;

- des contrats de droit privé, soumis au juge judiciaire, lorsqu'ils ne comportent pas de telles clauses.

Cette incertitude est préjudiciable au justiciable car la détermination du juge compétent peut nécessiter des procédures parfois longues. De plus, le partage de ce contentieux entre deux ordres de juridictions peut aboutir à des interprétations jurisprudentielles différentes des règles issues du code des marchés publics. Pour les collectivités locales, le risque existe qu'un contrat de droit privé, qui n'aurait pas été soumis au contrôle de légalité, soit requalifié en contrat administratif et soit, dès lors, entaché d'un vice de procédure.

Le présent article propose, pour remédier à cette incertitude, d'unifier le contentieux des contrats soumis au code des marchés public en le confiant au juge administratif, à l'exception des litiges pour lesquels le juge judiciaire était compétent et qui ont été portés devant lui avant l'entrée en vigueur des dispositions du présent projet de loi.

Le choix du juge administratif plutôt que du juge judiciaire peut s'expliquer par le fait que le juge administratif est compétent pour juger tous les contrats, qu'ils comportent ou non des clauses exorbitantes du droit commun, alors que le juge judiciaire ne peut jamais juger des contrats comportant des clauses exorbitantes du droit commun.

Sur le fond, le juge administratif appliquera les mêmes textes que le juge judiciaire (il applique d'ailleurs déjà le droit de la concurrence communautaire et interne). On peut cependant remarquer que le juge administratif a la réputation d'être plus « favorable » aux collectivités publiques tandis que le juge judiciaire est réputé plus « enclin » à déceler des cas de favoritisme dans l'attribution des marchés publics.

Il convient, en outre, de souligner que la qualification de contrat administratif ne signifie pas que les collectivités publiques pourront plus facilement introduire des clauses exorbitantes du droit dans leurs contrats de marché publics. La seule différence entre la situation actuelle et la situation qui résultera du dispositif proposé par le présent article sera que l'existence de telles clauses n'entraînera plus de changement d'ordre de juridiction pour le contentieux de ces contrats, puisqu'ils relèveront tous du juge administratif.

Le dispositif proposé par le présent article conduit cependant à s'interroger sur trois points en particulier :

Le régime du contentieux des contrats d'assurance

Si le présent article devait être définitivement adopté, les contrats d'assurance des collectivités et établissements publics seraient soumis au juge administratif. Jusqu'ici, les contrats d'assurance étaient certes soumis au code des marchés publics en application des dispositions de la directive « services » n° 92-50 du 18 juin 1992, mais, lorsque ces contrats ne comportaient pas de clauses exorbitantes du droit commun 14 ( * ) , ils relevaient du juge judiciaire.

Dans le droit actuel, et dans l'hypothèse où un contrat d'assurance comporterait des clauses exorbitantes du droit commun, celles-ci ne pourraient en aucun cas être contraires au code des assurances. En effet, les collectivités locales ne peuvent imposer dans un contrat de telles clauses seulement si une législation spéciale (telle que le code des assurances) ne s'y oppose pas. Le dispositif proposé ne modifie en rien cette situation.

La différence entre le droit actuel et le droit proposé par le présent article tient au fait que, désormais, le juge administratif sera le seul juge des contrats d'assurance des collectivités locales. C'est à lui qu'il appartiendra de concilier l'application des dispositions du code des assurances avec celles du code des marchés publics et, le cas échéant, de faire primer les dispositions du code des assurances, qui a valeur législative, sur celles du code des marchés publics, qui n'a que valeur réglementaire.

On peut cependant observer que, s'il appliquera les mêmes textes que le juge judiciaire, le juge administratif sera libre de faire évoluer sa jurisprudence dans le sens qu'il entend. Des contrats concernant le même risque pourront donc se voir appliquer des jurisprudences différentes, selon qu'ils ont été souscrits par une collectivité locale ou un particulier.

Les contrats de services financiers

En matière bancaire et de services financiers, il n'existe pas de code dont la valeur serait supérieure à celle du code des marchés publics. Pour autant, la modification du juge compétent pour les contrats passés dans ces domaines ne devrait pas avoir pour effet de permettre aux collectivités publique de modifier le contenu de ces contrats en y introduisant des clauses exorbitantes du droit commun.

Il convient tout d'abord de rappeler que la plupart des services financiers ont été exclus du champ du nouveau code des marchés publics. Le 5° de l'article 3 du nouveau code des marchés publics prévoit que les dispositions de ce code ne s'appliquent pas « aux contrats qui ont pour objet des emprunts ou des engagements financiers, qu'ils soient destinés à la couverture d'un besoin de financement ou de trésorerie, des services relatifs à l'émission, à l'achat, à la vente ou au transfert de titres et instruments financiers ».

Dans les domaines qui restent dans le champ d'application du code des marchés publics, la modification du juge compétent ne changera rien à la manière dont le contenu des contrats est négocié entre la collectivité publique et l'établissement financier. Aujourd'hui, soit il résulte de la négociation entre les deux parties que ces contrats ne comportent pas de clauses exorbitantes de droit commun, et ils sont de la compétence du juge judiciaire, soit ils comportent de telles clauses, et ils sont de la compétence du juge administratif. Dans le dispositif proposé, tous les contrats seront soumis au juge administratif, mais cela n'influera en rien sur le fait qu'il comportent ou non des clauses exorbitantes du droit commun.

Cependant, l'unification du contentieux au profit du juge administratif laisse ouverte la possibilité d'une remise en cause par celui-ci du corpus jurisprudentiel établi par le juge judiciaire.

Le contrôle de légalité des marchés passés en application des dispositions du code des marchés publics

Aujourd'hui, seuls sont soumis au contrôle de légalité les marchés qui ont le caractère de contrats administratifs, soit que ce caractère ait été défini par la loi, soit que les contrats comportent des clauses exorbitantes du droit commun. Les autres marchés sont des contrats de droit privé relevant du juge judiciaire.

En pratique, pour les contrats d'un montant très important, il est fréquent que les préfets se saisissent des délibérations des collectivités relatives à ces contrats, exerçant ainsi un contrôle de fait sur ces actes.

Dès lors que, comme le propose le présent article, tous les marchés passés en application du code des marchés publics seront définis par la loi comme des contrats administratifs, ils seront tous soumis au contrôle de légalité. Cette évolution a deux conséquences :

- elle renforce le contrôle de l'Etat sur les actes des collectivités territoriales ;

- elle se traduira, si le présent article est adopté dans sa rédaction actuelle, par un « encombrement » des services de l'Etat chargés du contrôle de légalité puisque tous les marchés des collectivités locales, quel que soit leur montant, devront être contrôlés.

Décision de la commission : votre commission a décidé de s'en remettre à la commission des lois saisie pour avis.

ARTICLE 3

Définition de la délégation de service public

Commentaire : le présent article a pour objet d'inscrire dans la loi la définition jurisprudentielle de la délégation de service public.

Le présent article intervient à la suite de la publication au Journal officiel du nouveau code des marchés publics. Le gouvernement a considéré qu'il convenait d'insérer dans la loi une définition de la délégation de service public, afin de bien la distinguer des contrats de marchés publics.

Cette définition est introduite dans la loi dite « loi Sapin », n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques, et à l'article L. 1411-1 du code général des collectivités territoriales, qui définit son régime pour les collectivités locales et leurs établissements publics.

La définition retenue reprend la définition jurisprudentielle de la délégation de service public et désigne « un contrat par lequel une personne morale de droit public confie la gestion d'un service public dont elle a la responsabilité à un délégataire public ou privé, dont la rémunération est substantiellement liée aux résultats de l'exploitation du service ».

Décision de la commission : votre commission a décidé de s'en remettre à la commission des lois saisie pour avis.

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 3

Distribution de gaz combustibles hors réseau de transport

Commentaire : le présent article additionnel tend à soustraire les concessionnaires de réseaux autonomes de distribution de gaz combustible à l'obligation selon laquelle 30 % au moins du capital des opérateurs agissant pour le compte de communes non alimentées en gaz naturel, ou en attente de desserte, doit être détenu ou contrôlé par l'Etat ou des établissements publics.

Certaines communes ne disposant pas d'un réseau public de gaz naturel, soit ne figurent pas dans le plan de desserte prévu par la loi n° 98-546 du 2 juillet 1998, soit y sont visées, mais ne sont pas encore alimentées (le délai maximum prévu étant de 3 ans), soit ne sont pas éligibles à ce plan, car elles ne satisfont pas aux exigences de rentabilité précisées par le décret n° 99-278 du 12 avril 1999.

La loi précitée de juillet 1998 donne la possibilité à ces communes et à leurs groupements de concéder leur distribution de gaz à une entreprise ou une société d'économie mixte agréée par le ministre chargé de l'énergie.

Encore faut-il, selon ce même texte, que l'opérateur satisfasse aux conditions prévues par le quatrième alinéa de l'article 8 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946, c'est-à-dire que son capital soit détenu ou contrôlé à hauteur de 30 %, par l'Etat ou des établissements publics.

Cette exigence paraît singulièrement anachronique à l'heure où la directive européenne du 22 juin 1998 réclame l'ouverture à la concurrence du marché français du gaz.

Elle est même incompatible avec nos obligations communautaires. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle le gouvernement avait prévu de la supprimer dans l'article 31 du projet de loi portant modernisation du service public du gaz naturel.

Le présent article additionnel tend cependant à n'affranchir de cette règle que les réseaux non connectés de distribution de gaz combustibles (c'est à dire surtout le propane).

Il ne s'agit aucunement de soustraire, par la même occasion, les opérateurs concernés aux conditions de sécurité exigées par le décret n° 99-278 du 12 avril 1999 (les sociétés ou entreprises agréées doivent disposer d'une organisation adaptée et d'un personnel technique qualifié leur permettant de respecter les prescriptions obligatoires en la matière). Le seul objectif visé par le présent article additionnel est donc de faciliter le recours par des communes isolées (en montagne notamment) à une énergie propre et d'un coût raisonnable.

Un pas serait ainsi franchi dans la transposition de la directive communautaire du 22 juin 1998. L'aménagement du territoire serait conforté. Les exigences de sécurité seraient respectées. Les intérêts de Gaz de France seraient ménagés, s'agissant de réseaux nouveaux, non connectés , de distribution de gaz combustibles (non naturels en très grande majorité).

La rédaction du présent article additionnel, s'agissant de problèmes complexes, est sans doute perfectible. L'essentiel est donc ici d'ouvrir la navette parlementaire, comme l'a suggéré notamment le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, afin de trouver une solution à un problème auquel il s'est déclaré très sensible lors de l'examen de ce projet par l'Assemblée nationale 15 ( * ) .

Décision de votre commission : votre commission vous demande d'adopter cet article additionnel.

ARTICLE 3 bis

Certification de la date de dépôt des offres

Commentaire : le présent article tend à modifier l'article 16 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration afin de préciser, par symétrie avec le régime des marchés publics, qu'il ne peut y avoir de dérogation à l'obligation relative au délai de remise des offres dans le cas des délégations de service public.

Le présent article a été introduit à la suite de l'adoption par l'Assemblée nationale d'un amendement présenté par notre collègue député Yves Deniaud, avec l'avis favorable du gouvernement.

Décision de la commission : votre commission a décidé de s'en remettre à la commission des lois saisie pour avis.

ARTICLE 4

Aménagement du régime de la sous-traitance

Commentaire : le présent article a pour objet d'interdire la sous-traitance de la totalité d'un marché public, de limiter la sous-traitance en chaîne en réservant la possibilité de paiement direct aux seuls sous-traitant de premier rang (les sous-traitants du cocontractant) et de mettre en place une régime de garantie des sommes dues aux sous-traitants d'un sous-traitant.

Il s'agit d'une modification de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance.

Décision de la commission : votre commission a décidé de s'en remettre à la commission des lois saisie pour avis.

ARTICLE 4 bis

Déclaration des sous-traitants auxquels le soumissionnaire à un marché envisage de recourir

Commentaire : le présent article a pour objet de faire obligation au soumissionnaire à un marché public de déclarer à l'acheteur public la totalité des sous-traitants auxquels il entend recourir. Cette obligation est également mise en place en cas de recrutement de sous-traitants en cours de marché.

Le présent article a été introduit à la suite de l'adoption par l'Assemblée nationale d'un amendement présenté par le gouvernement.

Décision de la commission : votre commission a décidé de s'en remettre à la commission des lois saisie pour avis.

ARTICLE 5

Extension du régime de publicité et de mise en concurrence de certains contrats

Commentaire : le présent article a pour objet soumettre aux obligations de publicité et de mise en concurrence prévues par la loi n° 91-3 du 3 janvier 1991 relative à la régularité et à la transparence des procédures de marchés la passation des contrats des organismes ne relevant pas du code des marchés publics mais devant cependant se conformer aux dispositions des directives communautaires relatives aux marchés publics.

Votre rapporteur tient à relever que la rédaction ici proposée « oublie » de faire figurer la Banque de France dans la liste des personnes publiques non soumises au code des marchés publics mais qui doivent se conformer aux règles de publicité et de mises en concurrence prévues par les directives. Il souhaite que cet « oubli » puisse être réparé.

Décision de la commission : votre commission a décidé de s'en remettre à la commission des lois saisie pour avis.

ARTICLE 5 bis

Délégation du conseil municipal au maire concernant les marchés sans formalités préalables

Commentaire : le présent article a pour objet de tenir compte de la disparition, dans le nouveau code des marchés public, de la formule des marchés négociés et de l'apparition des marchés sans formalités préalables et d'en tirer les conséquences dans le code général des collectivités territoriales.

Le présent article, dont l'objet est rédactionnel, résulte d'un amendement présenté par notre collègue députée Nicole Bricq, rapporteur au nom de la commission des finances, qui a reçu l'avis favorable du gouvernement.

Décision de la commission : votre commission a décidé de s'en remettre à la commission des lois saisie pour avis.

ARTICLE 5 ter

Quart réservataire au bénéfice des sociétés coopératives et des associations

Commentaire : le présent article prévoit que lorsque les marchés visés par le code des marchés publics font l'objet d'un allotissement et portent, en tout ou partie, sur des prestations susceptibles d'être exécutées par des sociétés coopératives et des associations visant, à promouvoir l'emploi de personnes rencontrant des difficultés particulières d'insertion, ou l'esprit d'entreprise indépendante et collective, à lutter contre le chômage ou à protéger l'environnement, un quart des lots fait l'objet d'une mise en concurrence de ces structures coopératives et associatives.

Le présent article a été introduit à la suite de l'adoption par l'Assemblée nationale d'un amendement présenté par le gouvernement. Tant sur la forme que sur le fond, sa rédaction mérite, pour le moins, d'être réexaminée.

Décision de la commission : votre commission a décidé de s'en remettre à la commission des lois saisie pour avis.

* 4 Le gouvernement a indiqué à votre rapporteur que les départements et les régions ne pouvaient, en application de l'article L. 1111-2 du code général des collectivités territoriales, apporter leur concours technique qu'aux seules communes situées sur leur territoire.

* 5 Réponses du ministre, in JO Questions Assemblée nationale du 26 février 1996, p. 1061.

* 6 Le prix proposé doit être déterminé en prenant en compte l'ensemble des coûts directs et indirects concourant à la formation du prix de la prestation objet du contrat ; ne pas bénéficier, pour déterminer le prix, d'un avantage découlant des ressources ou des moyens qui lui sont attribués au titre de sa mission de service public ; pouvoir en justifier, si nécessaire, par ses documents comptables ou tout autre moyen d'information approprié.

* 7 Ce montant est revalorisé chaque année en fonction de l'évolution de la valeur de l'index d'ingénierie de l'année précédente par rapport au niveau de cet index en 1997.

* 8 Votre rapporteur relève que, dans les subdivisions de l'équipement comportant un grand nombre de petites communes, l'ACTP occupe une grande partie de l'activité des agents, ce qui pourrait laisser penser que leur « coeur de métier » ne suffit plus à les occuper à plein temps.

* 9 Soit moins de 10 % du total des rémunérations perçues par l'Etat en contrepartie de prestations d'ingénierie.

* 10 Votre rapporteur déduit de cette rédaction qu'on ne pourrait refuser l'assistance technique à une commune ou un groupement éligible qui la demanderait.

* 11 D'autant plus que, dans le second alinéa, il est fait référence non pas aux « groupements » mais aux « groupements de communes ». Par conséquent, alors que le premier alinéa semblait englober tous les groupements auxquels appartiennent des communes (donc les syndicats mixtes), le deuxième alinéa parait plus restrictif et semble ne viser que les groupements dont seules des communes sont membres.

* 12 L'article 72 de la Constitution prévoit que les collectivités locales s'administrent librement « dans les conditions prévues par la loi », et non par décret .

* 13 Au delà de 9.000 habitants, les communes disposent généralement des services techniques dont elles ont besoin.

* 14 Le gouvernement, en réponse à une question de votre rapporteur, a jugé « fort improbable » l'éventualité de l'existence dans un contrat d'assurance d'une clause exorbitante du droit commun.

* 15 In JO Débats Assemblée nationale, 2 mai 2001, pages 2581 à 2583.

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