CHAPITRE DEUX

PRÉSENTATION PAR AGRÉGAT

La réforme de l'ordonnance organique relative aux lois de finances définie par la loi du 1 er août 2001 a notamment pour objet de passer d'un budget de moyens, ou d'instruments, à un budget orienté vers les missions et les résultats.

Dans ce cadre, même si la réforme n'est censée être pleinement opérationnelle que pour le budget 2006, l'analyse des crédits au travers de la grille des « agrégats » accompagnés de leurs objectifs et de leurs indicateurs d'ores et déjà définis par le ministère des Affaires étrangères suscite certaines observations.

Dix objectifs pour le ministère des Affaires étrangères

• Action diplomatique

- « contribuer à la sécurité internationale »

- « promouvoir la paix et la démocratie »

- « construire l'Europe »

- « affirmer le rôle de la France dans les instances multilatérales »

- « renforcer la présence de la France dans le monde »

- « communiquer, expliquer l'action extérieure et valoriser l'image de la France »

• Activités consulaires

- « développer l'appui aux français de l'étranger »

- « améliorer l'accueil des étrangers en France »

• Coopération internationale

- « assurer le rayonnement de la France et de la francophonie »

- « soutenir la coopération technique et l'aide au développement »

Source : Bleu 2002

A. AGRÉGAT 1 : « PERSONNEL, MOYENS ET ÉQUIPEMENT DES SERVICES » : LE TIERS DES MOYENS DU MINISTÈRE

En l'état actuel, ce qui correspond plutôt à un « moyen » ou à un « instrument » de mise en oeuvre de la politique extérieure de la France constitue encore un « agrégat » à lui-seul.

Pour le ministère des Affaires étrangères, la répartition de ses moyens par missions ou programmes apparaît comme un objectif encore lointain, source de « difficultés considérables », dans la mesure où « la nomenclature budgétaire ainsi que l'organisation des réseaux à l'étranger ne permettent qu'imparfaitement la ventilation des missions par agrégat ».

Cette situation reflète bien la difficulté générale qui a précisément justifié la réforme de l'ordonnance organique : passer d'un budget de moyens à un budget de missions. La « politique » budgétaire menée actuellement se réduit trop souvent à la seule gestion de ces moyens, c'est à dire en fait à celle des effectifs du département : leurs rémunérations, leurs moyens de fonctionnement, leur mobilité (ou son refus) 11 ( * ) . Sans méconnaître cette indispensable prise en compte, votre rapporteur estime souhaitable de parvenir à terme à une réallocation de l'agrégat « Personnel, moyens et équipement des services ». Celui-ci ne saurait constituer une « mission » à lui seul, mais devra être réparti en fonction des missions auxquelles il participe.

1. « Missions », « objectifs », « indicateurs »

a) Objectif ou moyen ?

En l'état actuel, l'agrégat 1 comporte quatre « composantes » : l'« action diplomatique », l'« action consulaire », la « coopération internationale », et un « pôle de gestion transversale ».

Le bleu 2002 fait apparaître pour la première fois un début de répartition des effectifs par « composantes ». Celle-ci s'établit comme suit pour 2001 :

- Action diplomatique : 25 % (2.308 agents en 2000)

- Action consulaire : 19 % (1.744 agents en 2000)

- Coopération internationale : 28 % (2.360 agents en 2000)

- Pôle de gestion transversale : 28 % (2.494 agents en 2000)

De fait, à l'exception de la composante « pôle de gestion transversale », plus difficile à ventiler, on voit mal ce qui s'oppose à rattacher les trois premières composantes à chacun des agrégats concernés.

Cela éviterait d'ailleurs d'assigner ensuite à ces composantes une cible intitulée « néant »....

La composante « pôle de gestion transversale » fait en revanche l'objet d'une définition particulièrement concrète, détaillée et soignée de ses « objectifs » et « cibles ». Ceci traduit bien l'importance donnée par le ministère, et son ministre, à la gestion de son administration et sa réforme.

b) La « grande réforme » du ministère : un bilan mitigé

Plusieurs chantiers ont été ouverts, plus ou moins concomitamment, concernant les méthodes de gestion de l'administration centrale et des services à l'étranger, et se traduisent à ce jour par des bilans divers.

Pilotée par un Comité de management réuni autour du ministre, la modernisation de la gestion du ministère et du réseau à l'étranger se traduit par une profonde réforme des procédures budgétaires et comptables, qui laisse parfois les postes plus désorientés que la centrale.

La réforme comptable , initiée en 1996, devait être généralisée à l'ensemble du réseau en 2002. Tous les ambassadeurs deviendront à terme ordonnateurs secondaires uniques des dépenses de l'Etat, quelle que soit la nature de celles-ci ; le trésorier-payeur-général pour l'étranger deviendra le comptable unique des opérations de l'Etat à l'étranger ; l'ordonnancement de délégation sera substitué à l'ordonnancement provisionnel, pour déboucher, à terme, sur une véritable déconcentration.

La réforme semble avoir toutefois pris un certain retard, puisqu'elle ne concerne à ce jour que 43 pays, soit une centaine de postes sur les 166 du réseau. La date-butoir est désormais repoussée à 2004 (ou 2005, suivant les services auteurs des réponses...).

En 2002, la réforme comptable sera étendue à 40 pays supplémentaires, soit une cinquantaine de postes. En 2001, la masse des crédits délégués représente désormais plus de la moitié de l'ensemble des crédits mis en place à l'étranger (soit 1,4 milliard de francs sur 2,7 milliards de francs). Un petit tiers de ces crédits -400 millions de francs- sont déconcentrés.

Le projet de budget 2002 poursuivra la mise en oeuvre de la déconcentration des crédits des services à l'étranger , avec de nouveaux transferts entre l'article 31 (crédits délégués) et l'article 41 (crédits déconcentrés) du chapitre 37-90 affectés aux Moyens généraux des services.

La globalisation des moyens de fonctionnement, introduite en 1994, a été progressivement étendue au cours des années. En 2001, elle concerne 58 % du total des moyens de fonctionnement à l'étranger. Elle enregistrera à nouveau un progrès notable en 2002 avec l'intégration de la rémunération des recrutés locaux dans le chapitre des moyens de fonctionnement.

Cette réforme a manifestement amélioré la souplesse, la rationalité, l'efficacité de la gestion des postes à l'étranger, en limitant les mouvements de crédits entre l'administration centrale et les postes, et donc les coûts et les délais induits.

Des centres de gestion uniques (CGU) avaient été institués en janvier 1996 sur les postes pilotes. Ils visent à amener les chefs de services des différentes administrations représentées localement (MAE, Trésor, DREE, SCTIP, DATAR, Intérieur), à améliorer en commun la gestion de trois dossiers : rémunération du personnel local, regroupement des chats locaux sur les réseaux informatiques, regroupement des services sur un site géographique unique. Votre rapporteur regrette que cette expérience, de nature à optimiser l'utilisation des deniers publics, n'ait pas semblé être développée.

Il apparaît que, sur le terrain, la mise en oeuvre concrète de toutes ces différentes réformes n'est pas exempte de difficultés.

Il semble d'abord souhaitable de développer et généraliser dans les meilleurs délais le logiciel COREGE , mieux adapté, et de parvenir à une simplification accrue des procédures budgétaires et comptables.

Plus généralement, un effort important est consenti pour moderniser les instruments de travail, avec la mise en réseau de l'ensemble des agents du département : celle-ci suppose l'interconnexion de l'ensemble des logiciels sur un serveur unique et la modernisation des applications informatiques. Il s'agit d'une entreprise gigantesque, loin d'être achevée. Aucun moyen nouveau n'est pourtant prévu à ce titre en 2002.

Ensuite, la déconcentration des crédits de subventions destinées notamment à des associations semble s'accompagner localement de certaines difficultés de gestion.

Enfin, les Centres culturels et de coopération à autonomie élargie mis en place à compter de 1996 sont désormais en totale contradiction avec la réforme comptable. Leur suppression sera d'ailleurs définitivement acquise courant 2002.

Pour être réussie, la déconcentration des crédits nécessite un renforcement des services administratifs, financiers et comptables à l'étranger, ce qui ne va pas dans le sens du mouvement actuel. Elle implique en outre un effort important au niveau de l'évaluation et du suivi des opérations ainsi mises en oeuvre. Elle risque enfin d'accentuer les effets des mouvements de parité franc dollar, ce qui constituera une contrainte supplémentaire pour le budget du ministère.

Ceci conduit à formuler quelques réserves liées à la difficulté de mener de front plusieurs réformes de gestion concomitantes, voire parfois concurrentes.

En revanche, certaines autres évolutions structurelles, rendues indispensables par celles du monde contemporain, ne paraissent pas encore suffisamment prises en compte : ouverture du département sur l'extérieur, avec un renforcement des mobilités extérieures (autres que sur des postes « institutionnels » ou multilatéraux) et de l'accueil de personnels non diplomates, renforcement des compétences et de la formation économique et financière, mise en oeuvre plus systématique des capacités d'analyse prospective.

Personnel, moyens et équipement des services : Missions et objectifs
Source : Bleu 2002, Vert 2001

1. Action diplomatique

Mission générale :

« Représenter la France dans le monde, dans le cadre de relations bilatérales et multilatérales, négocier et préparer les conventions et les traités, informer le gouvernement »

Moyens :

- ministères, administration centrale

- 151 ambassades

- 17 représentations permanentes et 4 délégations auprès d'organisations multilatérales

- 3 ambassadeurs en mission (Moldavie, Mongolie, Erythrée)

- 1 chargé d'affaires (Afghanistan) (en résidence à Islamabad)

- 2 bureaux de liaison (Pristina, Banja Luka)

- 1 section des intérêts français (Bagdad)

Objectifs et cibles : Néant

2. Action consulaire

Mission générale :

« Administration des Français nés hors de France et des Français expatriés, protection des biens et des personnes à l'étranger, information du public sur les législations des pays étrangers. Administration des étrangers désirant se rendre en France ».

Moyens :

- administration centrale

- Direction des Français à l'étranger et des étrangers en France (DFAE)

- Maison des Français de l'étranger

- Mission pour l'adoption internationale

- OFPRA

- Service de l'état civil de Nantes

- services à l'étranger

- 121 sections consulaires auprès d'ambassades

- 99 consulats généraux et consulats de plein exercice

- 11 postes détachés

- 501 agences consulaires (consuls honoraires)

Public :

- 1,7 million de français expatriés, dont 1 million environ immatriculé

- 2 millions de demandes de visa par an

- 39.779 demandes d'asile en 2000

- 102.508 réfugiés résidant en France

Objectifs et cibles :

1. « Limiter le risque d'erreur en matière de délivrance de visas »

A ce titre, le ministère envisage de « redéployer les effectifs » et d'améliorer l'accueil du public ».

Ainsi, le nombre de dossiers par agent et par an, en zone de risque migratoire élevé, évalué à 4.000 en 2.000, devrait passer à 3.400 en 2002.

Le nombre cumulé de postes concernés par des mesures d'amélioration de l'accueil du public, évalué à 71 en 2000, devrait atteindre 112 en 2002.

2. « Réduire le délai de délivrance des actes d'état-civil »

Le délai moyen de satisfaction de la demande devrait passer de 5 jours en 2000 à 2 en 2002 pour les actes informatisés, et de 11 à 7 jours pour les registres manuels.

3. « Améliorer l'instruction de la demande d'asile »

Le délai moyen de traitement de la demande devrait passer de 170 jours en 2000 à 150 en 2002, et le taux de convocation pour un entretien de 50 % à 100 %.

3. Coopération internationale

Mission générale :

« Conception, programmation, mise en oeuvre et évaluation des projets et des programmes de coopération internationale, dans les domaines culturels et scientifiques, technique et au développement ; développement de la francophonie » ; tutelle de l'AEFE « dont l'action est décrite dans l'agrégat 12 »

Instruments :

- Direction générale de la coopération internationale et du développement (DGCID)

- Service des affaires francophones

- Agence pour l'Enseignement du français à l'étranger (AEFE)

Objectifs et cibles : Néant

4. Pôle de gestion transversale

Mission générale :

« Mise en oeuvre et contrôle de la gestion des ressources humaines, de la gestion financière, des fonctions logistiques, de l'équipement et des communications »

Instruments :

Administration centrale

Objectifs et cibles :

1. Moderniser la gestion des ressources humaines

Priorités :

- renforcer la formation aux langues étrangères, aux NTIC et aux fonctions à l'étranger

- renforcer la mobilité fonctionnelle et géographique des agents

- améliorer la qualité de l'évaluation

- améliorer la gestion des recrutés locaux, notamment en matière de formation professionnelle

2. Moderniser les communications entre services centraux et postes à l'étranger

- mise à niveau technologique et sécurisation : mise en place d'un réseau Intranet généralisé, développement des applications informatiques, augmentation de la capacité des serveurs centraux

3. Mieux gérer le patrimoine immobilier

- maintenance préventive

- adaptation du parc immobilier

- maîtrise des coûts d'entretien

4. Améliorer l'efficacité de la gestion

- renforcer la déconcentration des dépenses à l'étranger

- renforcer le contrôle interne et les outils de gestion déconcentrés

- mettre en oeuvre une contractualisation d'objectifs et de moyens, d'abord avec les établissements publics sous tutelle, puis avec les services : constitution d'un état des lieux, définition des domaines d'activité, analyse des coûts.

* 11 Certains responsables en arrivent donc à estimer que « le budget n'est pas mauvais, car il nous permet de satisfaire à peu près toutes les demandes de nos agents »...

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