Loi de finances pour 2002 - Tome III - Annexe 43 - Défense : Dépenses ordinaires

TRUCY (François), Rapporteur spécial

RAPPORT GENERAL 87 (2001-2002) - TOME III - Annexe 43 - COMMISSION DES FINANCES

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Table des matières




N° 87

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2001-2002

Annexe au procès verbal de la séance du 22 novembre 2001

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi de finances pour 2002 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

Par M. Philippe MARINI,

Sénateur,

Rapporteur général.

TOME III

LES MOYENS DES SERVICES ET LES DISPOSITIONS SPÉCIALES

(Deuxième partie de la loi de finances)


ANNEXE N° 43

DÉFENSE :

DÉPENSES ORDINAIRES
Rapporteur spécial : M. François TRUCY

(1) Cette commission est composée de : MM. Alain Lambert, président ; Jacques Oudin, Gérard Miquel, Claude Belot, Roland du Luart, Mme Marie-Claude Beaudeau, M. Aymeri de Montesquiou, vice-présidents ; MM. Yann Gaillard, Marc Massion, Michel Sergent, François Trucy, secrétaires ; Philippe Marini, rapporteur général ; Philippe Adnot, Bernard Angels, Bertrand Auban, Denis Badré, Jacques Baudot, Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Gérard Braun, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Jean Clouet, Yvon Collin, Jean-Pierre Demerliat, Eric Doligé, Thierry Foucaud, Yves Fréville, Adrien Gouteyron, Hubert Haenel, Claude Haut, Alain Joyandet, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, François Marc, Michel Mercier, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Pelletier, René Trégouët.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 3262 , 3320 à 3325 et T.A. 721

Sénat
: 86 (2001-2002)


Lois de finances.


PRINCIPALES OBSERVATIONS

1. La professionnalisation des armées : un « accomplissement » globalement réussi

Objectif premier de la loi de programmation qui s'achève, la « professionnalisation » des armées s'est accomplie de manière « globalement » satisfaisante.

Il convient de saluer l'ampleur de cette réforme, assise sur des suppressions massives d'emplois et des mesures conséquentes de reconversion et d'incitation au départ. Aucun ministère civil n'a, à ce jour, été en mesure de réussir une telle démarche.

A nouveau d'ailleurs, le ministère de la Défense donne l'exemple en étant le premier à achever les négociations syndicales relatives à l'application des 35 heures pour les effectifs civils, et le premier à mettre en oeuvre, enfin, la jurisprudence Berkani visant à intégrer, sauf décision contraire, les personnels contractuels dans les effectifs de la fonction publique.

A moins de 1 % près, l'objectif global des effectifs budgétaires est donc respecté : la Défense emploiera en 2002 un effectif budgétaire de 436.221 personnes, soit le cinquième des effectifs civils.

Quelques ajustements doivent toutefois être soulignés au regard des effectifs réels et des objectifs plus détaillés, qui, s'ils perdurent, pourraient constituer des facteurs de perturbation, au regard du « modèle d'armée 2015 » : un peu plus de militaires du rang que prévu, beaucoup plus de gendarmes, et beaucoup moins de personnels civils. Certains secteurs spécifiques, comme les médecins, les informaticiens, les atomiciens ou les plongeurs-démineurs apparaissent d'ores et déjà vulnérables, voire franchement déficitaires.

2. Mais une consolidation qui reste entièrement à faire

Les motifs d'inquiétude concernent les perspectives. Certes, la professionnalisation est « accomplie ». Mais elle n'est pas consolidée pour autant.

Pour seulement préserver l'acquis, il faudra vraisemblablement consentir un effort budgétaire supplémentaire considérable. En d'autres termes, pour avoir la même chose, et donner donc le sentiment qu'on ne fait pas mieux, il faudra payer davantage.

Au-delà des soucis ponctuels, mais réels, de recrutement, apparaissent surtout des difficultés de fidélisation. Celle-ci se heurte en effet à la concurrence forte d'un marché de l'emploi civil conjoncturellement à la hausse, mais aussi, de façon plus structurelle, à une moindre attractivité du métier, s'agissant des conditions de vie et de rémunération. La comparaison est renforcée par la mixité désormais fonctionnelle des effectifs civils et militaires, parfois au sein d'un même bureau. A cet égard, la loi des 35 heures constitue un écueil redoutable.

La comparaison avec les « collègues » des armées de l'OTAN n'est pas davantage enviable. La dépense de fonctionnement (rémunération et charges sociales comprises) consentie sur la tête du soldat français est du même ordre que celle du soldat allemand, près de deux fois moins élevée que celle du soldat britannique, et près de trois fois moins élevée que celle du soldat américain. De fait, au cours des derniers exercices, les Etats-Unis et le Royaume-Uni ont augmenté de 2 % en termes réels leurs dépenses annuelles de rémunérations et de fonctionnement.

En réalité, il est illusoire de penser que le pouvoir d'achat du titre III pourra rester constant dans la durée. Les personnels ayant fait le choix de servir dans une armée professionnelle ont le droit d'être plus exigeants à l'égard du fonctionnement et de l'équipement des forces, et ce niveau d'exigence ne cessera vraisemblablement de monter à l'avenir.

3. Le dérapage structurel du titre III ne pourra plus être financé par prélèvement sur le titre V

L'analyse de l'évolution du titre III au cours de l'exécution de la programmation fait apparaître un dérapage des dépenses, systématiquement financé, en loi de finances initiale comme en exécution, par un prélèvement sur les crédits d'équipement du titre V.

Or les facteurs de ce dérapage ne pourront que se maintenir, voire se renforcer, au cours de la prochaine législature et de la prochaine loi de programmation.

Sur l'ensemble de l'actuelle programmation, la mise en oeuvre de la professionnalisation a représenté un coût d'accompagnement, sans doute plus lourd que prévu, de l'ordre de 17 milliards de francs. La consolidation de la professionnalisation imposera des mesures au moins équivalentes.

Mais le dérapage du titre III est également lié à la non-prise en compte d'un élément pourtant incontournable : les mesures globales touchant l'ensemble de la fonction publique, qui ont pesé de manière conséquente sur le poste rémunérations et charges sociales et continueront de le faire, sans doute de façon croissante.

Il résulte surtout du refus constant d'inscrire en loi de finances initiale les dépenses de fonctionnement correspondant à la participation de la France à des opérations extérieures (notamment sur le théâtre des Balkans). Prévues et répertoriées, ces opérations, dont le coût annuel a été constamment supérieur à 3 milliards de francs, n'en ont pas moins pour autant constamment été financées en cours d'exécution seulement, par prélèvement sur les crédits d'équipement du titre V : soit, sur la durée de la programmation, l'équivalent du coût d'un deuxième porte-avions nucléaire.

Non conforme à l'esprit du droit budgétaire, ce procédé a largement contribué au non respect de la loi de programmation, s'agissant des crédits d'équipement.

En tout état de cause, pour la prochaine législature, nécessité au moins fera loi, car les reports du titre V, largement utilisés au cours de l'actuelle législature, seront alors totalement asséchés, pour faire vraisemblablement place à une crise des paiements.

4. Le budget 2002 traduit « une attention toute particulière » à l'égard de la condition militaire

Le projet de budget 2002 comporte un incontestable effort en faveur de la « condition militaire ». Mais intervenant bien tardivement, certes à la veille d'échéances électorales importantes, cet effort ne saurait être suffisant pour répondre à des demandes qui peuvent être qualifiées de légitimes. Il reste en tout cas globalement inférieur de moitié à celui qui est consenti pour les budgets civils : le titre III de la Défense progresse en effet de 2,3 %, alors que ceux des budgets civils augmentent en moyenne de 5,1 %.

Il comprend en outre pour partie l'incontournable prise en compte des mesures Sapin relatives au point d'indice et à la revalorisation des bas salaires, qui représentent un total de 1,3 milliard de francs, soit la moitié de la totalité des moyens nouveaux du titre III.

Certes élargi cette année à l'ensemble des forces armées, et non plus seulement, comme en 2001, à la Gendarmerie, au Service de Santé et à la Délégation générale pour l'Armement, il ne concerne toutefois que les sous-officiers, et laisse de côté totalement les officiers.

5. De fait, la progression des moyens consacrés à l'activité des forces demeure limitée et ne permet pas d'atteindre les normes de la programmation

L'alourdissement sensible du poste rémunérations et charges sociales a fortement pesé sur les crédits d'entretien programmé et de fonctionnement courant, soumis à la portion congrue au sein du titre III pendant toute la durée de la programmation, alors même que celui-ci prélevait par ailleurs une dîme croissante sur les crédits d'équipement militaire.

La baisse la plus sensible concerne les moyens liés à l'activité des forces, amputées de plus de un milliard de francs sur la période de programmation, soit 10 % du montant initial de 1997.

De fait, les taux d'activité des armées françaises sont aujourd'hui inférieurs aux normes arrêtées par la loi de programmation.

Le budget 2002 prévoit bien une majoration des crédits de fonctionnement hors rémunérations et charges sociales. Mais les deux tiers de cet effort sont en réalité financés par des mesures d'économies et de transfert, et ne correspond donc pas véritablement à des moyens nouveaux. Et le tiers du montant ainsi globalement disponible bénéficiera à la Gendarmerie.

Au total, les taux d'activité de nos forces armées seront légèrement améliorés, certes, mais pas dans une proportion de nature à leur permettre d'atteindre l'objectif OTAN, et moins encore celui des forces britanniques.

6. La Gendarmerie prélève une part croissante des moyens de fonctionnement affectés à la Défense, sans pour autant qu'un terme soit mis à la dégradation de sa situation

Au total, sur l'ensemble de la période de programmation, les coûts de fonctionnement de la Gendarmerie (y compris RCS), qui auront connu la croissance la plus forte, auront représenté un cinquième du total de l'enveloppe globale du titre III, soit l'équivalent des dépenses de l'armée de l'Air et de la Marine réunies.

En 2002, la Gendarmerie est la seule à bénéficier de la création de postes de sous-officiers -au-delà de la cible de programmation, qui aura été majorée en définitive de 700 postes. C'est elle qui bénéficiera au premier chef des primes de qualification pour les sous-officiers confirmés (4.200 sur le total de 6.000). Le tiers enfin des moyens nouveaux dégagés pour le fonctionnement, soit 460 millions de francs, sera attribué à la Gendarmerie (la moitié étant affectée au financement du surcoût des loyers lié à l'installation en zones sensibles).

Pour autant, la situation de la Gendarmerie semble avoir atteint un seuil critique.

La détérioration de la situation sécuritaire, et l'élévation du niveau d'exigence en matière de sécurité publique, vont au-delà d'une simple évolution conjoncturelle. Il faudra inévitablement en tenir compte, comme il faudra également trouver une réponse aux demandes relatives à l'application des 35 heures. La Gendarmerie, à cet égard au moins, se sent nécessairement plus proche de la Police que de l'Armée.

CHAPITRE PREMIER

BILAN GLOBAL DE LA PROFESSIONNALISATION

I. L'ÉVOLUTION DES EFFECTIFS

La loi de programmation militaire 1997-2002 a organisé le passage progressif d'une armée mixte, au sein de laquelle les appelés occupent une part importante, à une armée professionnelle, composée de militaires de carrière ou sous contrat et de jeunes volontaires.

Cet objectif a été globalement atteint, au moins en termes d'effectifs budgétaires.

Il convient de saluer l'ampleur de cette réforme assise sur des suppression massives d'emplois et des mesures conséquentes de reconversion et d'incitation au départ. Aucun ministère civil n'a, à ce jour, été en mesure de réussir une telle démarche.

A. LE FORMAT PRÉVU POUR 2002 SERA GLOBALEMENT ATTEINT

1. Un objectif budgétaire atteint à 1 % près

Sur la période 1997-2002, il était prévu une diminution globale des effectifs (appelés compris) de - 23,2 %.

Celle-ci résultait de deux évolutions : d'une part, la suppression des appelés (201.498 postes) et la déflation des postes d'officiers et de sous-officiers , d'autre part la professionnalisation des forces armées par la création de 47.975 postes de militaires du rang (MDR), de 27.171 postes de volontaires et de 9.276 postes de civils .

Avec le projet de budget pour 2002, dernier de la programmation, cet objectif est quasiment atteint. Les effectifs budgétaires du ministère de la Défense (hors comptes de commerce) s'établissent, pour 2002, à 436.221 emplois, contre 440.206 prévus en loi de programmation militaire.

Ceci correspond à un léger déficit de l'ordre de 4.000 postes, soit moins de 1 % de la cible visée.

2. Près de cent vingt mille suppressions de postes en cinq ans

Le projet de budget pour 2002 conduit globalement à la suppression nette de 9.922 emplois, dont les 22.818 derniers appelés.

L'annuité 2002 est la plus limitée en matière de réduction d'effectifs, après une moyenne de 25.000 suppressions de postes par an durant les cinq premières années de la professionnalisation.

Hors appelés, le solde des créations et suppressions d'emplois est de + 12.896 postes, soit une augmentation des effectifs de la Défense nettement supérieure à celles rencontrées durant les cinq premières années de professionnalisation (évolution moyenne par an hors appelés de 10.300 postes).

3. Des effectifs réels légèrement en-deçà des effectifs budgétaires



B. AVEC DES RÉUSSITES INÉGALES SELON LES CATÉGORIES ET LES SECTEURS

1. Militaires du rang : une réalisation quasi parfaite

Le budget 2002 prévoit la création de 8.141 postes de militaires du rang, finalisant ainsi les ouvertures de postes nécessaires à la profession-nalisation.

Entre 1996 et 2002, les effectifs budgétaires de militaires du rang auront plus que doublé, passant de 44.552 en 1996 à 92.184 en 2002, soit une création de 47.632 emplois.

Sur l'ensemble de la programmation, ces créations concernent surtout l'armée de Terre (+ 35.268 postes) et l'armée de l'Air (+ 11.286 postes).

S'agissant des effectifs réalisés, on relève un déficit notable de militaires du rang dans la Marine pour les spécialités de protection-défense, les conditions d'emploi (port d'armes) exigeant une sélection plus sévère à l'engagement, et pour celle des marins-pompiers, peu attractive. De fait, le déficit global par rapport à l'objectif de programmation s'élève à 15 %. La situation est un peu moins préoccupante dans l'armée de l'Air, pour laquelle ce déficit atteint 9 %.

Il reste que le recrutement de militaires du rang constitue un réel enjeu et présente des difficultés croissantes pour les armées professionnelles, en France, comme d'ailleurs aux Etats-Unis et au Royaume-Uni.

L'évolution de la situation à cet égard au cours des prochains exercices, surtout si le marché de l'emploi civil confirme sa bonne tenue, devra être suivie avec la plus grande attention.

2. Officiers et sous-officiers : des situations légèrement divergentes

Les effectifs de sous-officiers seront légèrement supérieurs (+ 0,6 %) à la cible fixée par la loi de programmation militaire, essentiellement en raison de la création, dont la nécessité s'est clairement avérée en cours d'exécution, de postes supplémentaires dans la Gendarmerie et pour le service de Santé. Les effectifs d'officiers sont à peu près réalisés.

a) Sous-officiers : créations supplémentaires dans la Gendarmerie et au service de Santé des armées.

La loi de programmation prévoyait une déflation de 15.532 postes de sous-officiers sur six ans (2.600 postes par an en moyenne) ; compte-tenu des mesures arrêtées au budget 2002, 14.312 suppressions de poste auront été effectuées sur la période.

Les effectifs budgétaires de sous-officiers atteindront donc 200.156 postes en 2002 contre 199.296 prévus en loi de programmation, soit 1.110 postes de plus .

Cette situation résulte notamment de la création, en 2001 et 2002, de 1.405 postes de gendarmes hors programmation et, en 2002, de 200 postes de militaires infirmiers techniciens des hôpitaux des armées (MITHA) supplémentaires, permettant au service de Santé de renforcer ses effectifs hospitaliers.

Par ailleurs, la réforme de la scolarité de l'école Polytechnique a transformé le statut administratif des 400 élèves officiers de 3 ème année en le rattachant au corps des sous-officiers comme c'est le cas des élèves officiers des autres écoles militaires.

Ces créations de postes sont partiellement compensées par d'autres mesures telles que la transformation, à la demande de l'armée de l'Air et de la Marine, de postes de sous-officiers en postes d'officiers.

b) Officiers : quasiment le format prévu

La loi de programmation militaire prévoyait une déflation totale de 267 postes, toutes armées confondues, sur la période 1997-2002. En 2002 les effectifs budgétaires s'établiront à 37.738 postes, soit un déficit de 451 postes par rapport aux prévisions.

La raison principale de cet écart est due aux élèves de 3 ème année de l'école Polytechnique, qui, administrativement, passent de la catégorie « officiers » à la catégorie « sous-officiers ». Les 51 autres postes, qui représentent le déficit réel, constituent le solde de diverses mesures d'ajustement, à la hausse ou à la baisse, durant les six annuités d'exécution de la programmation.

Cette situation générale recouvre des évolutions beaucoup plus divergentes entre les armées et la Gendarmerie. Au total, de 1996 à 2002, 1.669 postes d'officiers auront été supprimés dans l'armée de Terre, 439 postes dans l'armée de l'Air, et 27 postes dans la Marine. A l'inverse, les effectifs d'officiers auront augmenté dans la Gendarmerie (1.353 postes).

Il faut relever la confirmation de déficits qui pourraient devenir préoccupants chez les médecins officiers du service de Santé, notamment dans les spécialités anesthésie, réanimation, urgences, et radiologie, compte tenu de départs importants, liés à la concurrence du secteur privé.

3. Volontaires et effectifs civils : un sujet de préoccupation

a) Les effectifs civils : 2.028 postes vacants

La loi de programmation militaire prévoyait une croissance forte des effectifs civils sur la période, ceux-ci devant passer de 73.747 postes en 1996 à 83.023 en 2002, soit environ 10.000 postes supplémentaires.

Cette évolution avait pour objet de transférer, sur des emplois de personnel civil, des fonctions à caractère administratif ou technique auparavant tenues par du personnel militaire, ce dernier étant désormais réorienté vers des fonctions opérationnelles.

La comparaison des effectifs civils prévus au budget 2002 avec les effectifs inscrits en programmation fait apparaître un déficit de 2.028 postes , résultant de mesures hors programmation, inscrites au budget depuis 1997, qui modifient le périmètre de la Défense.

Les mesures d'adaptation des moyens aux besoins représentent en effet un écart négatif de 3.240 emplois. Ce chiffre global résulte de variations positives et négatives.

Le total des mouvements de transferts aboutit à un solde positif de 3.982 emplois résultant principalement de l'intégration du secrétariat d'État aux Anciens combattants en 2000 (+ 1.980 postes), des mesures de budgétisation de la Direction des constructions navales-étatique (+ 1.468 postes de personnels civils) et des gendarmes d'autoroute ainsi qu'en 2002, de la titularisation des contractuels de catégories C et D, agents de droit privé rémunérés sur des crédits de fonctionnement par l'Etat, conformément à la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 , qui transcrit la jurisprudence Berkani du Tribunal des conflits en date de 1996.

Ce solde positif est compensé d'une part par différentes mesures d'adaptation aux structures (- 2.770 emplois), dont la « revue de programmes » (- 1.575 emplois à la DGA et à l'état-major de la Marine) et l'abandon du rendez-vous citoyen (- 750 emplois).

Il est compensé d'autre part par diverses mesures d'adaptation des effectifs aux besoins (- 3.240 emplois), qui recouvrent notamment le développement de la sous-traitance, par redéploiement des crédits correspondant à 1.620 emplois, et par des mesures de transformation d'emplois et de repyramidage visant à ajuster les emplois budgétaires aux besoins identifiés en gestion.

Mais il correspond aussi à de réelles difficultés de recrutement, et surtout de fidélisation des recrues, notamment dans certains secteurs comme le transport, « les métiers de bouche » et la surveillance. De fait, les vacances d'emplois ont constitué un sujet de préoccupation récurrent depuis 1998.

La réalisation des emplois budgétaires de personnels civils se heurte à trois difficultés majeures :

- les délais d'organisation des concours

- l'insuffisance des candidatures dans certains corps ou dans certaines spécialités techniques

- le manque d'attractivité de certaines régions, comme l'Ile de France et le Nord-est.

- l'interdiction d'embauche appliquée depuis plusieurs années aux ouvriers de l'Etat 1( * ) . Cette interdiction sera enfin levée en 2002, à hauteur de 700 ouvriers de l'Etat, en liaison avec la mise en oeuvre des 35 heures.

b) Les volontaires : l'objectif n'est pas atteint

Les volontaires constituent une composante à part entière de l'armée professionnelle depuis la loi n° 99-894 du 22 octobre 1999 portant organisation de la réserve militaire et du service de défense .

Disposant d'un statut militaire à part entière, les volontaires en service dans les armées, dans la gendarmerie nationale et dans les services communs des armées font partie intégrante des effectifs militaires et peuvent occuper des emplois opérationnels ou techniques très diversifiés et des fonctions de soutien ou à caractère scientifique. Outre-mer, les volontaires servent dans les unités du service militaire adapté (SMA).

La loi de programmation a fixé à 27.171 les postes de volontaires pour 2002. Les premières créations sont intervenues au budget 1999, 6.500 postes ont été créés en 2000 et 7.000 postes en 2001.

Le projet de budget pour 2002 prévoit la création de 6.538 postes nouveaux, dont 4.178 pour la gendarmerie et 2.360 pour les armées, soit un total de 24.788 postes créés sur la période, permettant ainsi d'atteindre 91 % de la cible visée par la loi de programmation.

C'est la Gendarmerie qui a bénéficié de la majorité des emplois budgétaires créés sur la période (15.203 postes soit 61 %) ; ces emplois s'avèrent en effet indispensables à la réalisation du Plan de redéploiement et de renforcement des unités territoriales . Toutefois, elle ne parvient pas à recruter à hauteur des postes ouverts, actuellement pourvus à hauteur des deux-tiers seulement.

En 2001, le recrutement de volontaires se poursuit malgré la baisse du taux de sélection. Au 1 er août 2001, les 18.250 postes ouverts pour la Défense, dont 11.025 pour la gendarmerie nationale, ont été honorés à 78 % seulement.

Au total, la réalisation des effectifs de civils et de volontaires n'a pas été aussi rapide que souhaitée. Cet écart non négligeable par rapport aux objectifs est lié à la reprise du marché civil de l'emploi, à la nécessité de disposer d'un certain niveau de formation initiale et à la spécificité de la condition militaire, dont les contraintes sont évidemment peu concurrentielles à l'époque des 35 heures.

4. Des résultats contrastés selon les armées.

D'une façon générale, les forces armées devraient atteindre leurs formats respectifs. Cette évolution globale masque toutefois des différences entre les armées : un format supérieur à l'objectif pour la Gendarmerie (100,3 %), proche de l'objectif pour l'armée de l'Air (98 %) et sensiblement inférieur pour l'armée de Terre (97,4 %) et la Marine (96,4 %).

L'armée de l'Air et la Marine ont quasiment atteint leur cible d'officiers et de volontaires. Elles sont en-deçà de la cible d'effectifs de sous-officiers prévus par la loi de programmation militaire (respectivement -676 et - 746 postes). Ces deux armées ont préféré un nombre de militaires du rang supérieur à la cible initiale, pour un recrutement de civils et volontaires très sensiblement inférieur.

L'armée de Terre n'atteint pas sa cible d'effectifs de militaires du rang (- 1.211) ni celle de civils (- 2.457 postes). Elle est en-deçà de sa cible d'officiers (- 288) et de sous-officiers (-588). En revanche, elle dépasse légèrement sa cible de volontaires (+ 44 postes). Ces écarts sont notamment liés à l'abandon du rendez-vous citoyen, qui représente une diminution de 1.200 militaires du rang, à des transferts de postes vers les Services communs résultant du regroupement sur un chapitre budgétaire des postes permanents à l'étranger, mais aussi à des déflations supplémentaires.

Contrairement aux autres armées, la Gendarmerie dépasse sa cible de sous-officiers de 1.556 postes du fait des mesures de créations de postes hors programmation. Elle en-deçà de sa cible de volontaires à moins (1.029) postes et de sa cible de civils à moins (241 postes). Elle atteint quasiment sa cible d'officiers .

Pour leur part, les Services communs ont dépassé la cible initiale du fait de diverses mesures de transfert : intégration du secrétariat d'État aux Anciens Combattants, regroupement des postes permanents à l'étranger (195 postes pour l'armée de l'Air, 357 pour l'armée de Terre, 143 pour la Marine et 21 pour la Gendarmerie), création de la poste interarmées, rattachement de la direction du Service national au Secrétariat général pour l'administration et intégration de la Direction des constructions navales-étatique.

5. Un taux d'encadrement satisfaisant

Le taux d'encadrement des armées a évolué conformément aux objectifs prévus par la loi de programmation -à un point près pour l'armée de l'Air et la Marine- et se rapproche des taux en vigueur dans les armées occidentales comparables.

Il est réalisé par une diminution du nombre d'officiers et de sous-officiers plus faible que celle appliquée aux autres personnels militaires, toutes catégories confondues (militaires du rang, appelés et volontaires).

II. LE COÛT DE LA PROFESSIONNALISATION

Les objectifs de la professionnalisation ont notamment été atteints grâce à la mise en oeuvre d'importantes mesures d'accompagnement.

A. LES MESURES D'ACCOMPAGNEMENT

1. Hausse des rémunérations des militaires du rang

La revalorisation de la rémunération des militaires du rang entreprise le 1 er juin 1997 a entraîné une augmentation des crédits de rémunérations de 117,7 millions d'euros (772 millions de francs). cette mesure a été complétée à partir de 1998 par la mise en oeuvre de l'accord salarial pour la fonction publique conclu le 10 février 1998. Une nouvelle revalorisation du point d'indice ainsi que des mesures en faveur des bas salaires sont intervenues à compter du 1 er mai et du 1 er juillet 2001 (Plan Sapin). La rémunération minimale est ainsi passée de l'indice 253 à l'indice 258 fin 2001.

Hors primes liées à l'activité, la rémunération d'un militaire du rang professionnel au premier indice de solde est passée de 625,04 euros (4.100 francs) par mois au début de la période de programmation à 1.052,52 euros (6.727 francs) aujourd'hui. 2( * ) Il s'y ajoute différents avantages en nature (hébergement, alimentation, réduction SNCF).

Eléments de comparaison :

Le soldat américain

Les militaires du rang, sous-officiers et officiers ont bénéficié d'une nouvelle augmentation générale des soldes de 3,7 % à compter du 1 er janvier 2001 après les augmentations du 1 er janvier 2000 (4,8 % pour tous les militaires) et du 1 er juillet 2000 (pour certaines catégories en proie à des difficultés de fidélisation et de recrutement).

La rémunération du militaire américain est constituée essentiellement de :

- la Basic Pay ou solde de base ;

- la Basic Allowance for Housing (BAH) ou allocation logement ;

- la Basic Allowance for Subsistence (BAS) ou allocation de subsistance.

S'y rajoutent un certain nombre de soldes et de primes telles que

- la Flight Pay ou solde à l'air ;

- la Sea Pay ou solde à la mer ;

- la Hazardous Duty Pay ou solde de risque ;

- la Proficiency Pay ou solde de compétence ;

et de majorations diverses.

D'autres facteurs difficilement quantifiables accompagnent ces rémunération : l'exemption d'impôt sur la BAH et la BAS, accès gratuit aux soins pour le conjoint et les enfants, accès aux « Commissary and Exchange Facilities », gratuité des frais de décès et des plan d'assurance vie.

Le militaire américain bénéficie également de l'accès à une formation et à une éducation professionnelle en parallèle de la fonction occupée au sein de l'armée, de l'aide à l'éducation des vétérans, du remboursement d'une partie des frais alloués à l'habillement et d'allocations de voyage et de transport.

2. Aides aux départs et à la reconversion

a) Les pécules

La loi n° 96-1111 du 19 décembre 1996, relative aux mesures en faveur du personnel militaire dans le cadre de la professionnalisation, a institué un pécule au profit des officiers et sous-officiers désirant quitter le service, dès lors qu'ils disposent de l'ancienneté requise pour bénéficier d'une retraite à jouissance immédiate et qu'ils se trouvent à plus de trois ans de la limite d'âge de leur grade. Le montant du pécule, non imposable, est égal à quarante-cinq mois de solde budgétaire pour le militaire se trouvant à plus de 10 ans de la limite d'âge. Il est réduit de 10 % en 1999 et 2000 et de 20 % en 2001 et 2002.

En 2002, près de 53,7 millions d'euros (248 millions de francs) seront consacrés aux pécules de toute nature, traduisant ainsi la poursuite de l'effort engagé en 1997 en faveur de ce type d'aide au départ

- 39,33 millions d'euros pour les pécules dits 1996

- 9,4 millions d'euros au titre des pécules article 5

- 1,47 millions d'euros pour les pécules Direction des constructions navales

- 2,44 millions d'euros au titre des pécules antérieurs à 1996 .

Au total, sur la période 1997-2002, la Défense aura consacré près de 552,3 millions d'euros (3,6 milliards de francs) aux pécules du régime de la loi du 19 décembre1996 .

S'y ajoutent 64,18 millions d'euros (421 millions de francs) au titre des pécules versés aux militaires bénéficiant des dispositions des articles 5 et 6 de la loi n° 75-1000 ainsi que 10,37 millions d'euros (68 millions de francs) relatifs aux pécules mis en place par la Délégation générale pour l'armement, soit un total général de 627 millions d'euros (4,1 milliards de francs).

b) Les congés de reconversion

La loi du 19 décembre 1996 a institué un congé de reconversion d'une durée maximale de six mois pouvant être prolongé, en position de non-activité, par un congé complémentaire, de six mois également. Pendant ces congés, le militaire, totalement libéré des obligations du service, peut se consacrer intégralement à sa reconversion tout en gardant une rémunération complète pendant le premier semestre, amputée ensuite de l'indemnité pour charges militaires et des primes liées au service.

En 2000, 7.210 congés de reconversion et 978 congés complémentaires ont été accordés pour les trois armées et la Gendarmerie.

c) Les départs d'officiers et de sous-officiers dans la fonction publique

La loi du 19 décembre 1996 a prorogé jusqu'au 31 décembre 2002 l'article 3 de la loi n° 70-2 du 2 janvier 1970 . A ce titre, les officiers et les sous-officiers de carrière des grades de major et d'adjudant-chef peuvent être recrutés directement, après une période de détachement, dans les emplois vacants de l'État et des collectivités territoriales.

Pour donner aux militaires désireux de poursuivre leur carrière dans la fonction publique les meilleures chances d'intégration, des journées d'information et de préparation des candidatures sont organisées depuis 1998. L'augmentation du nombre de départs constatés à ce titre en 1999 se poursuit : il a concerné 325 militaires en 2000.

d) Les départs en retraite avec pension du grade supérieur

Selon les articles 5 et 6 de la loi n° 75-1000 du 30 octobre 1975 , l'officier qui a acquis des droits à pension de retraite à jouissance immédiate, après 25 ans de service, peut demander à être admis au bénéfice d'une pension calculée sur les émoluments de base afférents au grade supérieur.

La loi du 19 décembre 1996 a prorogé l'application de ces dispositions jusqu'au 31 décembre 2002 et institué en outre l'attribution d'un pécule réduit des quatre-cinquièmes aux militaires de carrière concernés. En 2001, 571 officiers bénéficieront de ces dispositions.

B. BILAN FINANCIER DE LA PROFESSIONNALISATION

1. L'augmentation des coûts de rémunérations et charges sociales : près de 12 milliards de francs sur la période

De 1996 à 2002, les crédits budgétaires de rémunérations et charges sociales du ministère de la Défense ont augmenté de 1,8 milliards d'euros (11,8 milliards de francs), soit + 15,2 %.

Cette forte augmentation est liée pourprès de moitié à la politique salariale dans la fonction publique (45 %), pour plus du quart à des mesures modifiant le périmètre initial de la programmation 3( * ) (26 %) et pour un quart seulement aux mesures strictement liées à la professionnalisation.

La seule professionnalisation a entraîné une hausse pérenne des crédits de rémunération de 451 millions d'euros qui résulte de deux facteurs :

- le coût des créations d'emplois de militaires du rang, de civils et de volontaires, supérieur à celui des emplois d'appelés et de cadres militaires supprimés. Le surcoût en rémunérations et charges sociales des mesures d'effectifs représente 297 millions d'euros (1,95 milliards de francs) sur la période ;

- le coût des aides au départ (50 millions d'euros - 328 millions de francs) et à la reconversion (3 millions d'euros - 20 millions de francs), celle de la mensualisation des militaires du rang (125 millions d'euro), et enfin l'augmentation des crédits consacrés à la nouvelle politique de réserves (22 millions d'euros -144 millions de francs) représente globalement une hausse de 200 millions d'euros (1,31 milliard de francs).

A contrario, la transformation de crédits de rémunérations et de charges sociales en crédits de fonctionnement consacrés à l'externalisation en loi de finances 2000 s'est traduite par une diminution des charges de 45 millions d'euros (295 millions de francs).

2. L'économie sur les crédits de fonctionnement : moins de 5 milliards de francs

De 1996 à 2002, les crédits budgétaires du titre III hors rémunérations et charges sociales ont diminué globalement de 686 millions d'euros (4,5 milliards de francs).

Les économies liées à la professionnalisation des effectifs s'élèvent à 800 millions d'euros (5,25 milliards de francs).

Une économie optique supplémentaire de 208 millions d'euros (1,4 milliard de francs) est liée à différentes « mesures de périmètres ».

Parallèlement, les mesures d'accompagnement de la professionnalisation ont représenté un coût supplémentaire de 52 millions d'euros (341 millions de francs).

Divers ajustements et actualisation ont amené enfin à un surcoût de 270 millions d'euros (1,8 milliard de francs)

C. LES FACTEURS INÉLUCTABLES DE PROGRESSION DES DÉPENSES DU TITRE III

La croissance plus forte que prévue des dépenses du titre III , qui a dû être financée par des prélèvements croissants sur le titre V , résulte exclusivement de celle du poste rémunérations et charges sociales.

Ainsi, sur la période de programmation, les crédits de rémunérations et charges sociales ont augmenté en valeur de 1,8 milliard de francs (près de 12 milliards de francs), soit une progression de 15,2 %, deux fois supérieure à celle de l'ensemble du titre III.

Celle-ci est liée à plusieurs facteurs, qui recouvrent à la fois une relative sous-estimation du coût de la professionnalisation des armées, la non-prise en compte de l'impact des mesures générales fonction publique et le poids récurrent de la participation de la France à des opérations militaires sur les théâtres extérieurs (OPEX).

1. Le coût de la professionnalisation des armées

Au total, sur la période 1997-2002, le coût des mesures d'accompagnement de la professionnalisation aura représenté, pour les seuls crédits de rémunérations et de charges sociales et hors « mesures d'effectifs » -aides au départ, reconversion, réserves, sous-traitance, mensualisation des militaires du rang et des élèves officiers-, un total de 155 millions d'euros (plus de 1 milliard de francs). Ceci correspond à moins de 10 % de l'augmentation totale du poste rémunérations et charges sociales sur la période (en loi de finances initiale).

L'effet des « mesures d'effectifs » de la programmation, c'est-à-dire le solde net des mesures de créations de postes de civils, militaires du rang et volontaires, et des suppressions de postes de sous-officiers, d'officiers et d'appelés, s'élève pour sa part à 297,2 milliards d'euros (soit 1,95 milliard de francs), ce qui explique 16,5 % de l'augmentation du poste rémunérations et charges sociales sur la période.

Au total, l'effet « professionnalisation » a représenté 451 millions d'euros (2,96 milliards de francs) sur la période de programmation, soit le quart de l'augmentation du poste rémunérations et charges sociales.

2. L'impact des mesures générales fonction publique

Sur la période 1997-2002, l'ensemble de ces mesures peut être évalué à 815 millions d'euros (5,4 milliards de francs), hors mesures catégorielles, prise en compte du GVT et accords salariaux spécifiques.

Ceci correspond à 45 % de l'augmentation totale du poste rémunérations et charges sociales sur la période de programmation (en loi de finances initiale).

3. Les modifications de périmètre

Les changements de périmètre non prévus, voire exclus par la programmation, ont représenté, sur la durée de la programmation, 471 millions d'euros (3,09 milliards de francs), soit un peu plus du quart (26,2 %) du total de la progression du poste RCS .

Il s'agit notamment des mesures de budgétisation de DCN , des gendarmes d'autoroutes , de la cotisation patronale au Fonds spécial des ouvriers industriels de l'Etat , de la CSG , et de l'intégration du secrétariat d'Etat aux Anciens combattants .

4. La participation à des opérations militaires sur des théâtres extérieurs (OPEX)

Le surcoût des dépenses de fonctionnement liées à la participation à des opérations militaires sur des créations extérieures, financé en totalité en cours d'exécution par prélèvement sur le titre V, a atteint en moyenne 450 millions d'euros par an (près de 3 milliards de francs), soit, sur l'ensemble de la période 1997-2002, l'équivalent du coût d'un second porte-avions nucléaire.

De fait, sur la durée de la programmation, ces dépenses ont été croissant : 286 millions d'euros en 1998, 447 millions d'euros en 1999, 438 millions d'euros en 2000 et 422 millions d'euros en 2001 (estimation au 30 juin).

La professionnalisation est « accomplie ». Mais elle n'est pas consolidée pour autant.

Pour seulement préserver l'acquis, il faudra vraisemblablement consentir un effort budgétaire supplémentaire considérable car au-delà des soucis ponctuels, mais réels, de recrutement, apparaissent surtout des difficultés de fidélisation. Celle-ci se heurte à la concurrence forte d'un marché de l'emploi civil conjoncturellement à la hausse, mais aussi, de façon plus structurelle, à une moindre attractivité du métier, s'agissant des conditions de vie et de rémunération. La comparaison est renforcée par la mixité désormais fonctionnelle des effectifs civils et militaires, parfois au sein d'un même bureau. A cet égard, la loi des 35 heures constitue un écueil redoutable.

La comparaison avec les « collègues » des armées de l'OTAN n'est pas davantage enviable. La dépense de fonctionnement (rémunération et charges sociales comprises) consentie sur la tête du soldat français est du même ordre que celle du soldat allemand, près de deux fois moins élevée que celle du soldat britannique, et près de trois fois moins élevée que celle du soldat américain.

De fait, au cours des derniers exercices, les Etats-Unis et le Royaume-Uni ont augmenté de 2 % en termes réels leurs dépenses annuelles de rémunérations et de fonctionnement sans pour autant arriver à atteindre leurs objectifs de recrutement pour les militaires du rang.

En réalité, il est illusoire de penser que le pouvoir d'achat du titre III pourra rester constant dans la durée. Les personnels ayant fait le choix de servir dans une armée professionnelle ont le droit d'être plus exigeants à l'égard du fonctionnement et de l'équipement des forces, et ce niveau d'exigence ne cessera d'augmenter à l'avenir.

III. LES MOYENS DE FONCTIONNEMENT

A. UNE ÉVOLUTION CONTRAINTE PAR LA HAUSSE DES DÉPENSES DE RÉMUNÉRATIONS

Sur l'ensemble de la durée de programmation, les dotations initiales du titre III ont été généralement supérieures aux crédits prévus par la loi de programmation, et les dépenses nettes effectives ont, elles aussi, été très supérieures aux dotations initiales.



Ainsi, sur la durée de la programmation, pour un montant total des dotations prévues par la loi de programmation de 95,22 milliards d'euros (624,6 milliards de francs), le montant des dotations initiales s'est élevé en définitive à 95,42 milliards de francs (626 milliards de francs), soit un écart de l'ordre de 1,5 milliard de francs.

Sur les cinq premières années de la programmation, entre les dotations initiales et les dépenses nettes effectives, l'écart s'élève à 4,1 milliards d'euros (27 milliards de francs).

B. PORTION CONGRUE POUR LES DÉPENSES DE FONCTIONNEMENT

1. Charges de rémunérations et crédits de fonctionnement : un effet de ciseaux

La mise en oeuvre de la professionnalisation des armées au cours de l'actuelle loi de programmation s'est traduite par un niveau d'effectifs globalement respecté, mais à un coût nettement supérieur aux prévisions initiales.

Il en a résulté que l'alourdissement sensible du poste rémunérations et charges sociales a fortement pesé sur les crédits d'entretien programmé et de fonctionnement courant, soumis à la portion congrue au sein du titre III, alors même que celui-ci prélevait par ailleurs une dîme croissante sur les crédits d'équipement militaire.



Du budget 1997 au projet de budget 2002, les dépenses de rémunérations et de charges sociales auront progressé de près de 9 milliards de francs (+ 11,5 %), tandis que les moyens d'entretien et de fonctionnement courants auront été amputés de 3,2 milliards de francs (- 13,1 %), au prix d'une regrettable détérioration des taux d'activité des forces.

Cette baisse moyenne de 13 % de l'ensemble des crédits de fonctionnement et d'entretien courant recouvre elle-même des évolutions très divergentes selon les postes.

2. Evolutions divergentes pour les postes de fonctionnement

a) Baisse des dépenses d'alimentation et hausse des coûts de carburants

Les dépenses de carburants ont augmenté de 36 % sur la période (+ 814 millions de francs) en raison de l'évolution des cours du baril et du dollar.

Les dépenses d'alimentation ont diminué de 39 %, compte tenu de la réduction des effectifs liée à la professionnalisation.

Au total, entre 1998 et 2002, alors que les effectifs budgétaires ont diminué de 21,2 % (plus de 90.000 emplois en moins), les crédits budgétaires affectés à l'alimentation ont été réduits de près de 35 % (moins 142 millions d'euros, soit 931 millions de francs).

Une exception notable toutefois doit être relevé, qui concerne la Gendarmerie, dont les effectifs ont progressé de 2,6 %, et les crédits d'alimentation de 14,8 %. Cette évolution s'explique par le fait que la part des effectifs nourris gratuitement, faible à l'origine, est en augmentation constante sur la période.

La baisse sensible des dépenses d'alimentation appelle toutefois une appréciation nuancée. La diminution globale de 142 millions d'euros (931 millions de francs) correspond en effet pour près d'un tiers, non pas à la réduction des effectifs, mais à une réduction des crédits de 23 millions d'euros (951 millions de francs) en 2001 et en 2002, compensée en gestion par prélèvement sur la réserve financière excédentaire du Compte des subsistances militaires (CST n° 904-01).

Si l'on exclut ce procédé de gestion, la baisse des crédits d'alimentation s'établit en réalité à 96 millions d'euros (630 millions de francs), soit une diminution de 22,2 % à peu près parallèle à celle des effectifs.

b) Le bénéfice de l'entretien programmé des matériels et de l'activité des forces

Les crédits destinés à l'entretien programmé des matériels ont été le plus fortement réduits : ils sont passés de 326 millions d'euros (2.138 millions de francs) à 57 millions d'euros (374 millions de francs), soit une chute de 62 %, en raison, il est vrai, du transfert de certaines dépenses liées au « maintien en conditions opérationnelles » sur le titre V.

La baisse la plus « sensible » concerne en réalité les moyens de fonctionnement courant et d'activité , amputés de plus de un milliard de francs (150 millions d'euros) sur la période de la loi de programmation, soit 10 % du montant initial de 1997.

De fait, après avoir été constamment supérieurs depuis 1990 à 16 % du total des crédits du titre III, au terme d'une légère progression entre 1990 et 1997, date à laquelle ils représentaient près de 17 % du total, les crédits de fonctionnement et d'activité sont « tombés » à moins de 15 % du total en 2001.

Au sein même des crédits d'activité et de fonctionnement, l'existence de besoins incompressibles en matière d'entretien immobilier et de sous-traitance notamment a conduit à un prélèvement regrettable sur les taux d'activité des armées, aujourd'hui inférieurs aux objectifs du modèle d'armée 2015.


Evolution des moyens de fonctionnement hors RCS *

LFI 1997

LFI 1998

LFI 1999

LFI 2000

LFI 2001

PLF2002

MF

Meuros

MF

Meuros

MF

Meuros

MF

Meuros

MF

Meuros

MF

Meuros

Alimentation

2 967

452

2 752

420

2 433

371

2 263

345

1 881

287

1 817

277

Carburants

2 256

344

2 361

360

2 051

313

2 053

313

2 647

404

3 070

468

Entretien programmé du matériel

2 138

326

1 807

275

1 323

202

1 109

169

815

124

374

57

Autres fonction-
nements et activité
des forces

17 143

2 613

16 331

2 490

15 333

2 338

15 528

2 367

15 510

2 364

16 103

2 455

Total

24 503

3 735

23 250

3 544

21 139

3 223

20 942

3 193

20 853

3 179

21 364

3 257

IV. LES BESOINS SOUS-ESTIMÉS DE LA GENDARMERIE

La période de programmation a également été marquée par l'apparition des besoins nouveaux -ou sous-estimés- en matière de sécurité intérieure. De fait, la part des ressources affectée à la Gendarmerie s'est avérée plus importante que prévue initialement.

Sur la période de programmation 1997-2002, le total des dépenses de fonctionnement cumulées s'établit comme suit, en milliards de francs courants :

- Armée de Terre : 184,0 milliards de francs, soit 30,0 % du total

- Services communs : 148,4 milliards de francs, soit 24,2 % du total

- Gendarmerie : 124,9 milliards de francs, soit 20,4 % du total

- Air : 77,9 milliards de francs, soit 12,6 % du total

- Marine : 77,3 milliards de francs, soit 12,6 % du total

Il en ressort que les coûts de fonctionnement (y compris RCS) de la Gendarmerie auront représenté un cinquième du total des dépenses du titre III , soit l'équivalent des dépenses de l'armée de l'Air et de la Marine réunies.

Cette situation reflète bien l'évolution intervenue au cours de la période, marquée par une progression plus importante des crédits de fonctionnement de la Gendarmerie, au regard de ceux des trois armées, demeurés pratiquement stables, voire décroissants.



CHAPITRE II

LE BUDGET 2002 : PRIORITÉ À LA CONDITION MILITAIRE

I. ÉVOLUTION GÉNÉRALE DU TITRE III

A. UNE ÉVOLUTION INFÉRIEURE À CELLE DES BUDGETS CIVILS

Le projet de budget de la Défense pour 2002 s'élève à 37,6 milliards d'euros (246,6 milliards de francs), pensions comprises et à 28,9 milliards d'euros (189,3 milliards de francs) hors pensions.

Avec 16,5 milliards d'euros hors pensions (107,98 milliards de francs), le titre III occupe une part croissante et désormais prépondérante au sein du budget militaire (57,1 % en 2002, contre 55,8 % en 2001), 53,5 % en 1997 et 46,9 % en 1991.

Part du titre III dans le budget de la Défense

1990

46,1 %

1997

53,5 %

2001

55,8 %

2002

57,1 %

A nouveau, en 2002, le titre III devrait augmenter de 2,3 %, tandis que les crédits d'équipement (hors reports) diminuent de 1,7 %.

Cette progression importante reste toutefois inférieure de moitié à celle de l'ensemble des titres III des budgets civils, majoré de 5,1 %.

B. LA PART PRÉPONDÉRANTE DES RÉMUNÉRATIONS ET CHARGES SOCIALES

Au sein même du titre III, les dépenses de rémunérations et de charges sociales n'ont cessé d'augmenter depuis le début de la mise en oeuvre de l'actuelle loi de programmation. En 2002, la progression atteint encore 2,2 %, au terme d'une majoration de 11,2 % sur l'ensemble de la période de programmation.

Parallèlement, les crédits affectés aux dépenses d'entretien et de fonctionnement ont été constamment réduits : moins 19 % sur la période 1997-2001. Le projet de budget 2002 marque un coup d'arrêt tardif à cette tendance lourde, avec une légère progression de 1,9 %, soit un quasi-maintien des crédits en francs constants.

La part occupée par les dépenses de rémunérations et charges sociales est donc clairement prépondérante au sein du titre III (plus de 80 % du total), au détriment de la part dévolue aux dépenses de fonctionnement et d'entretien courant, aujourd'hui limitée à moins de 20 %.



Répartition des postes du titre III

 
 
 

(en pourcentage du total)

 

1991

1997

2001

2002

RCS

71,9

76,0

80,3

80,2

Entretien et fonctionnement

28,1

24,0

19,7

19,8

II. EFFECTIFS ET RÉMUNÉRATIONS

Les crédits de rémunérations et charges sociales prévus pour 2002 s'élèvent à 13,2 milliards d'euros (86,6 milliards de francs), en progression de 2,2 % par rapport à l'exercice précédent. Ils représentent 80,2 % du total du titre III et plus du tiers (36 %) du total du budget de la Défense.

En 2002, la dernière année de réalisation de la programmation militaire s'accompagne en effet d'un plan exceptionnel d'amélioration de la condition des personnels, civils et militaires.

A. EVOLUTION DES EFFECTIFS

Les effectifs budgétaires du ministère de la Défense (hors comptes de commerce) s'établissent pour 2002 à 436.221, soit 9.922 emplois de moins qu'en 2001. Ceci représente un peu plus du cinquième du total des effectifs publics.

Hors suppression des appelés, les créations nettes d'emplois s'élèvent en 2002 à 12.896 postes, correspondant à la sixième et dernière année de programmation.

1. Les suppressions d'emplois budgétaires

a) Poursuite de la réduction des emplois d'officiers et de sous-officiers

La réduction du nombre d'officiers et de sous-officiers se poursuit globalement.

Le nombre total de sous-officiers diminuera de 2.158 postes (après une diminution de 2.482 postes en 2001). Les suppressions de postes concernent uniquement les forces armées : armée de Terre (moins 1.393 postes après moins 933 en 2001), Marine (moins 945 après moins 1.015 en 2001) et armée de l'Air (moins 1.246 après moins 9.767 en 2001).

La diminution des effectifs d'officiers se poursuit également dans les armées, conformément à la programmation : armée de Terre : moins 245 ; Marine : moins 32 ; Air : moins 70.

b) Disparition des derniers appelés

L'exercice 2002 verra la suppression définitive des appelés (- 22.818 postes). De fait, la Marine et l'armée de l'Air n'incorporent plus d'appelés depuis février 2001.

Le Conseil des ministres du 27 juin 2001 a décidé d'anticiper la fin des incorporations à partir de juin 2001. Le décret du 27 juin 2001 a, de fait, libéré de manière anticipée et progressive les appelés encore sous les drapeaux avant le 30 novembre 2001, et ceux des formes civiles du service national avant le 31 mai 2002.

Les appelés qui souhaitent poursuivre des activités militaires peuvent souscrire un volontariat service long avant la date de leur libération anticipée, et jusqu'au terme de leurs obligations, avant le 31 décembre 2002.

Au total, 201.498 postes budgétaires d'appelés auront été supprimés depuis le début de la loi de programmation militaire.

2. Les créations d'emplois budgétaires

a) Recrutements soutenus de militaires du rang et de volontaires

Les recrutements de militaires du rang sont très soutenus en 2002 : 8.141 emplois supplémentaires sont prévus, essentiellement au profit de l'armée de Terre (5.884) et de l'armée de l'Air (2.191). Les recrutements effectués en 2001 devraient permettre de pourvoir au 31 décembre la totalité des postes budgétaires inscrits en loi de finances initiale. Cette situation devrait se poursuivre en 2002.

Parallèlement, 6.538 emplois nouveaux de volontaires sont inscrits au budget dont près des deux tiers au profit de la Gendarmerie (4.178 postes).

b) Création exceptionnelle de postes de sous-officiers pour la Gendarmerie et le service de Santé

Une exception est faite au mouvement général de suppression des sous-officiers en faveur de la Gendarmerie, qui bénéficie à nouveau de 44 postes budgétaires supplémentaires (après 470 postes nouveaux en 2001, et une diminution de 966 postes en 2000). Au total, la Gendarmerie aura bénéficié de 700 postes supplémentaires par rapport à l'objectif fixé initialement par la programmation. Parallèlement, les effectifs d'officiers sont également renforcés de 213 postes en 2002.

De même, le service de Santé bénéficiera également d'une mesure non prévue en programmation de création de 200 postes de sous-officiers infirmiers pour renforcer les effectifs hospitaliers.

3. Des incidences très différenciées selon les armées et les services

L'armée de Terre continue de diminuer fortement ses effectifs (- 12.406 en 2002). En effet, elle conserve l'essentiel des appelés encore aujourd'hui en poste (soit 17.111 sur un total de 22.818) et ceux-ci seront définitivement supprimés avant 2002. Parallèlement, elle bénéficie de la création de 5.884 postes de militaires du rang (soit les trois quarts du total prévu) et de 320 postes de civils. Elle perd également 1.393 postes de sous-officiers et 453 postes d'officiers.

La Marine perd 856 postes : 945 postes de sous-officiers, 149 postes d'officiers et 625 postes d'appelés, et bénéficie de 571 postes de volontaires et de 255 postes de civils.

On rappellera que la Marine est marquée par un déficit important des engagés de courte durée, dû aux difficultés de recrutement dans les spécialités protection-défense et marins-pompiers. Au total, en fin de programmation, le déficit d'effectifs pour les militaires du rang atteint en fin de programmation 15 %.

L'armée de l'Air , qui perd 1.059 appelés, 1.246 sous-officiers et 187 officiers, reçoit 2.191 postes de militaires du rang, 999 postes de volontaires et 320 postes de civils, ce qui lui permet d'afficher au total une création nette de 1.025 créations budgétaires.

On rappellera qu'en fin de programmation, le déficit d'effectifs pour les militaires du rang atteint 9 %.

La Gendarmerie bénéficie également de 1.032 créations nettes de postes. Si elle perd 3.502 postes d'appelés, elle bénéficie d'ouvertures de postes dans toutes les autres catégories : 4.178 volontaires, 99 civils, 213 officiers et 44 sous-officiers.

Il faut souligner ici à nouveau la difficulté qu'éprouve la Gendarmerie à recruter des volontaires (gendarmes-adjoints) à la hauteur des postes ouverts depuis novembre 2000. En l'état actuel, le rythme mensuel est de 500 recrutements alors que l'objectif est de 750.

D'importantes créations de poste caractérisent également les « services divers » : administration centrale, services de renseignement, postes à l'étranger, notamment. Au total, ils bénéficient de 1.639 postes supplémentaires. Ne perdant aucun appelés, ils reçoivent 526 postes supplémentaires d'officiers, 537 postes de sous-officiers, 19 postes de militaires du rang et 557 postes de civils.

a) Reprise des recrutements des ouvriers civils de l'Etat

Malgré le recul important des effectifs civils réalisés en 2000 et 2001, le budget 2002 prévoit la création de 1.075 emplois budgétaires de personnels civils titulaires. Plus de la moitié (524) bénéficieront à la Gendarmerie. Le Service de santé des armées disposera également de 171 emplois nouveaux dans le cadre de la mise en place des 35 heures. Les armées se partageront les 551 postes restant : 256 pour l'armée de Terre, 141 pour la Marine, 154 pour l'armée de l'Air.

Par ailleurs, le ministère de la Défense a obtenu pour 2002 la dotation en crédits correspondant à 900 emplois d'ouvriers d'Etat vacants, permettant une reprise significative des recrutements. Cette mesure est liée à la mise en oeuvre des 35 heures dans les effectifs civils.

b) Mise en oeuvre de la loi « Berkani » du 12 avril 2001

Le nombre des emplois budgétaires de contractuels augmentera de 1.617 postes. Cette augmentation résulte uniquement de l'ouverture de 2.266 postes correspondant à la mise en oeuvre, dès 2002, de la loi du 12 avril 2001 sur les emplois « Berkani » 4( * ) . Elle est partiellement compensée par la suppression de 649 postes provenant de la titularisation de personnels contractuels, dans le cadre des différents plans de titularisation et de résorption de l'emploi précaire.

B. MESURES CATÉGORIELLES

Le budget 2002 traduit un effort tout particulier et sans précédent en direction de la « condition militaire ».

De fait, le montant des mesures catégorielles inscrites au budget 2002 atteint 79 millions d'euros (518,2 millions de francs).

Les difficultés rencontrées au cours de la dernière phase de la professionnalisation, pour recruter mais aussi conserver les recrues dans certaines catégories ou certains secteurs, ont clairement souligné la nécessité de renforcer l'attractivité et la fidélisation des postes offerts par la Défense. En outre, les exigences nouvelles constatées en matière de sécurité publique impliquent un effort particulier en direction de la Gendarmerie, non prévu par la loi de programmation .

De fait, outre les mesures relevant du plan Sapin (revalorisations salariales et mesures prises en faveur des bas salaires), le budget 2002 prévoit d'importantes mesures catégorielles.

Ces mesures ont pour objet de consolider l'assise d'une armée désormais professionnelle, s'efforçant dans un premier temps de fidéliser les jeunes officiers.

Pour préserver dans la durée ce nécessaire effort qui n'en est qu'à ses tout débuts, il conviendra vraisemblablement de renforcer les moyens qui lui sont consentis. A cet égard, le contenu et l'ampleur du fonds de consolidation prévu par la prochaine loi de programmation seront déterminants .

1. Mesures en faveur des personnels militaires

a) Mesures générales en faveur des bas salaires

L'application des mesures en faveur des bas salaires concernant l'ensemble de la fonction publique se traduit par l'inscription de 24,5 millions d'euros (160,7 millions de francs) au budget 2002.

b) Mesures catégorielles limitées aux sous-officiers

Pour les personnels militaires, les mesures catégorielles bénéficient à l'ensemble des forces armées, et non plus seulement, comme en 2001, à la Gendarmerie, au Service de santé et à la Délégation générale pour l'armement.

Ne bénéficiant toutefois qu'aux seuls sous-officiers, elles constituent seulement un début de réponse aux attentes justifiées du monde militaire, et devront impérativement être renforcées et surtout élargies.

En 2002, les sous-officiers bénéficient donc de 29,54 millions d'euros (193,8 millions de francs) de mesures nouvelles visant à améliorer l'attractivité du métier pour les plus jeunes, et à renforcer la fidélisation pour les plus anciens.

- jeunes sergents : 14,5 millions d'euros (95,1 millions de francs). Ceci, conjugué à l'attribution de points d'indice supplémentaires dans le cadre du Plan Sapin, devrait se traduire par une augmentation de 328 francs de la solde mensuelle ;

- sous-officiers confirmés : 12 millions d'euros (78,7 millions de francs), correspondant à la création de 6.000 primes de qualification, dont 4.200 pour la Gendarmerie, soit 984 F/mois environ par bénéficiaire, et 1,8 million d'euros (11,8 millions de francs), correspondant à l'attribution de 600 échelles IV pour les sous-officiers de l'armée de Terre ;

- deux spécialités particulières bénéficient en outre de mesures spécifiques :

* atomiciens de surface de la marine : 0,26 million d'euros (1,8 million de francs), correspondant à l'attribution de 56 primes ;

* maîtres-contrôleurs de la sécurité aérienne de l'armée de l'air : 0,98 million d'euros (6,4 millions de francs), correspondant à une revalorisation de l'indemnité spéciale de sécurité aérienne.

c) Poursuite du plan de revalorisation de la condition des médecins militaires

Enfin, le plan de valorisation de la condition des médecins militaires entamé en 2001 se poursuit avec 2,6 millions d'euros (17 millions de francs) de mesures nouvelles, correspondant d'une part à la consolidation de l'indemnisation des gardes de nuit (versement d'une indemnité forfaitaire de 5.000 francs aux médecins effectuant plus de trois gardes de plus de douze heures en un mois) et d'autre part à l'amélioration du déroulement de carrière (surnombre de 120 médecins principaux).

Perspectives et conditions d'application des 35 heures
pour les effectifs militaires

Les dispositions du statut général des militaires conduisent à parler de « temps d'activités et d'obligations professionnelles » plutôt que de « temps de travail » pour les militaires :

Par déduction de ce qui est énoncé à l'article 12 (1) , il ne peut être question de durée réglementaire du temps de travail, puisque les militaires doivent pouvoir être disponibles pour raison de service en tout temps et en tout lieu .

En conséquence, l'application des 35 heures hebdomadaires ou des 1.600 heures annuelles n'est pas directement et statutairement transposable aux militaires.

En référence à l'article 19 (2) , la spécificité du métier militaire (disponibilité, mobilité, entraînement, pénibilité...) est prise en compte par le versement d'une indemnité pour charges militaires (ICM) ou, le cas échéant, par le versement d'indemnités plus spécifiques. Ainsi, par exemple, la participation à une opération extérieure est prise en compte par le versement d'une indemnité spéciale de séjour à l'étranger.

Sans remettre en cause la disponibilité statutaire qui est perçue comme légitime, le débat sur la conciliation de l'engagement professionnel avec la vie personnelle se développe au sein des armées. La mise en place des 35 heures pour les salariés du secteur privé et pour les fonctionnaires relance cette réflexion.

Dans ce contexte, le ministère de la Défense va prendre des mesures d'accompagnement de cette dynamique sociale au profit des militaires.

Cette question est le thème central de réflexion des travaux du Conseil supérieur de la fonction militaire du 30 novembre 2001.

(1) « Les militaires peuvent être appelés à servir en tout temps et en tout lieu... »

(2) « ... les militaires peuvent en outre bénéficier d'indemnités particulières allouées en raison de la nature des fonctions exercées ou des risques courus. (...) Une indemnité pour charges militaires tenant compte des sujétions propres à la fonction militaire leur est également allouée.. ».

Source : Réponse au questionnaire budgétaire.

Dernière minute : l'amendement du Gouvernement

Le Gouvernement vient de déposer - 30 novembre 2001 - un amendement aux articles de la deuxième partie, portant sur les crédits de la défense.

Il consiste à financer la mise en oeuvre de « mesures relatives au temps d'activité et d'obligation professionnelle des militaires », à hauteur de 122 millions d'euros (800 millions de francs).

Le détail de ces mesures et leurs conséquences concrètes pour les intéressés n'est pas donné.

Il est financé exclusivement par une nouvelle réduction , à due concurrence, des crédits d'équipement du titre V - dont près de 30 millions d'euros sur le nucléaire, 25 millions d'euros sur l'équipement des armées, et 10,9 millions d'euros sur l'Espace.

Cet amendement, lourd, n'a été examiné ni par l'Assemblée nationale, ni par la commission des finances du Sénat.

2. Mesures en faveur des personnels civils : mise en oeuvre immédiate des 35 heures

Les crédits relatifs à l'emploi de personnels civils sont marqués par la mise en oeuvre, dès le budget 2002, des mesures relatives à l'aménagement et à la réduction du temps de travail. Le ministère de la Défense est le seul jusqu'à présent à avoir passé un accord-cadre avec l'ensemble de ses organisations syndicales.

a) Mesures en faveur des bas salaires

L'application des mesures Sapin en faveur des bas salaires représente au total 24,84 millions d'euros (163 millions de francs).

b) La mise en oeuvre des 35 heures

La mise en oeuvre des 35 heures se traduit d'une part par le recrutement de 171 personnels au Service de santé, correspondant à des créations budgétaires, par 1.100 recrutements supplémentaires de fonctionnaires sur des postes précédemment gelés, et par 900 autorisations d'embauche d'ouvriers d'Etat.

Le volet indemnitaire d'accompagnement représente 7,5 millions d'euros (49 millions de francs).

Les heures supplémentaires seront forfaitisées à concurrence de 16 heures par la création, au plan ministériel, d'une indemnité nouvelle « d'administration générale et de technicité » (5,3 millions d'euros, soit 35 millions de francs). Le régime des astreintes sera étendu aux fonctionnaires et aux contractuels (1,2 million d'euros, soit 8 millions de francs). Les congés annuels seront normalisés pour les personnels administratifs des services déconcentrés (1 million d'euros, soit 6,6 millions de francs).

Globalement, l'ensemble des mesures liées à la mise en place de la réduction du temps de travail représente un total de 28 ,4 millions d'euros (186 millions de francs).

Accord 35 heures pour les personnels civils de la Défense
Principaux points

. passage de 39 heures à 35 heures de la durée hebdomadaire du travail, sans diminution ni gel des rémunérations ;

. décompte annuel de la durée du travail (1.600 heures de travail effectif), sans préjudice des heures supplémentaires susceptibles d'être effectuées ;

. organisation du temps de travail selon des cycles prédéterminés, modifiables selon les nécessités du service (cycle de référence : 38 H, soit 7 h 38 mn de travail par jour) ;

. possibilité de prendre 18 jours d'ARTT sur l'année, dont 9 à disposition, qui viennent s'ajouter aux 25 jours de congés actuels ;

. institution d'un compte épargne-temps dans un cadre qui doit être défini au niveau de l'ensemble de la fonction publique (10 jours à reporter dans la limite de deux ans).

c) Mesures catégorielles diverses

Différentes mesures catégorielles sont prises à hauteur de 6,2 millions d'euros (40,7 millions de francs) : amélioration des régimes indemnitaires des personnels administratifs d'encadrement de l'administration centrale et des services déconcentrés, reconnaissance de la technicité de certaines fonctions, des compétences acquises et des contraintes liées à l'organisation du travail.

C. MESURES D'ACCOMPAGNEMENT DE LA PROFESSIONNALISATION ET D'ADAPTATION DE L'OUTIL INDUSTRIEL

Institué par l'actuelle loi de programmation militaire, le Fonds d'accompagnement de la professionnalisation regroupe les moyens consacrés au financement des mesures d'accompagnement de la professionnalisation, essentiellement sous forme d'incitations au départ et à la mobilité (pécules, indemnités de départ, congés de reconversion).

L'ensemble des mesures prévues à ce titre au budget 2002 s'élève à 281 millions d'euros (1.843 millions de francs).

1. Aides aux départs : vers une sortie en sifflet

En 2002, dernières année de mise en oeuvre de la professionnalisation, l'ensemble des mesures d'incitation au départ des personnels militaires, en sensible diminution, devrait représenter 52 millions d'euros (341,1 millions de francs, contre 2.329 millions de francs en 2001).

• La dotation pour les pécules rénovés s'élèvera à 48 millions d'euros (315 millions de francs).

Elle correspond à l'attribution de 599 pécules officiers et de 876 pécules sous-officiers. Cette dotation est en nette diminution du fait de la réduction des besoins, et avant l'extinction du dispositif prévu pour 2002.

• La dotation pour l'indemnité de départ des sous-officiers et des caporaux-chefs est fixée à 1,1 million d'euros (7,2 millions de francs), soit un montant identique à celui de 2001.

• La dotation pour les congés complémentaires de reconversion est reconduite à 2,7 millions d'euros (17,7 millions de francs). Ceci permettra à 524 sous-officiers et caporaux-chefs de prolonger leur congé de reconversion au-delà de 6 mois par période complémentaire de formation d'une durée moyenne de 4 mois.

2. Mesures d'adaptation et de restructuration

Les mesures d'adaptation et de restructuration liées à la professionnalisation bénéficieront de 18,3 millions d'euros (120 millions de francs) en 2002, répartis comme suit :

• 9,8 millions d'euros (64 millions de francs) pour la reconversion des militaires et le recrutement des militaires de rang ;

• 8,5 millions d'euros (55,8 millions de francs) pour financer des surcoûts liés à la transition et aux restructurations.

Parallèlement au Fonds d'accompagnement de la profession - nalisation, des crédits ont été mis en place dans le cadre des restructurations concernant plus spécifiquement le personnel civil.

Les mesures destinées à favoriser les départs et la mobilité du personnel civil liés à l'adaptation industrielle de la Direction des constructions navales sont financées à partir des crédits du Fonds d'adaptation industrielle qui sera doté en 2002 de 67,7 millions d'euros (444 millions de francs). Par ailleurs, 90 millions d'euros (590 millions de francs) seront consacrés aux aides au départ et à la mobilité du personnel civil dans le cadre des restructurations des services et armées (dégagement des cadres).

3. Le nécessaire renforcement des réserves

Le Fonds d'accompagnement disposera également de 28,3 millions d'euros (185 millions de francs) pour les réserves.

Cette dotation représente 6,1 millions d'euros (40 millions de francs) supplémentaires, venant s'ajouter aux 22,2 millions d'euros (145 millions de francs) attribués depuis 1997.

Cette augmentation des crédits répond à la nécessité pour une armée professionnelle de disposer de réservistes entraînés et capables d'apporter rapidement leur concours aux militaires professionnels. Il est l'objet de la loi n° 99-894 du 22 octobre 1999 portant organisation de la réserve militaire et du service de défense.

La loi de programmation militaire avait fixé à 100.000 l'objectif d'effectifs de réservistes : 50.000 pour la Gendarmerie, 28.000 pour l'armée de Terre, 6.500 pour la Marine, 8.000 pour l'armée de l'Air et 7.500 pour les services communs.

Ces objectifs sont loin d'être atteints, notamment pour ce qui concerne les militaires du rang.

Elle recouvre 4,6 millions d'euros (30 millions de francs) de crédits de rémunérations et de charges sociales et de 1,5 million d'euros (10 millions de francs) de crédits de fonctionnement.

Globalement, 67,2 millions d'euros (441 millions de francs) seront consacrés aux réserves au projet de loi de finances 2002.



III. LES CRÉDITS HORS RÉMUNÉRATIONS ET CHARGES SOCIALES

A. EVOLUTION GÉNÉRALE DES CRÉDITS : UNE MAJORATION CETTE FOIS SUPÉRIEURE À CELLE DES CRÉDITS DE RÉMUNÉRATIONS ET CHARGES SOCIALES

En 2002, les crédits du titre III hors rémunérations et charges sociales passeront de 3.179 millions d'euros (20,8 milliards de francs) à 3.257 millions d'euros (21,4 milliards de francs), ce qui représente une augmentation brute de 2,5 %, la première depuis l'entrée en vigueur de la programmation.

En rupture complète avec les exercices précédents, cette évolution est même supérieure à celle des seuls crédits de rémunérations et charges sociales, majorés de 2,3 %.

Cette évolution générale est particulièrement sensible pour la Gendarmerie, dont les crédits de fonctionnement courant augmentent de 11,5 %, pour une progression de 4,6 % des crédits de rémunération et des charges sociales.

On ne la retrouve pas en revanche pour l'armée de Terre et la Marine : la baisse globale des crédits de fonctionnement résulte de la diminution considérable des crédits d'entretien programmé des matériels (respectivement - 69,3 % et - 60,1 %), partiellement lié à un transfert de charges vers le titre V.

1. Les crédits d'alimentation

Les crédits d'alimentation continuent de diminuer (- 3,37 % en 2002), en raison d'une part de la diminution des effectifs, mais également d'un nouveau ponctionnement prévu en gestion 2002 à hauteur de 23 millions d'euros, sur le Compte de subsistances militaires . Seule la dotation de la Gendarmerie progresse, du fait de l'élargissement renforcé du nombre de bénéficiaires potentiels.

2. Les crédits de carburants

Les crédits de carburants sont majorés au total de 3,37 %, pour tenir compte d'une part de l'évolution du prix du baril et surtout de la volonté d'améliorer le taux d'activité des forces, particulièrement malmené au cours des récents exercices budgétaires, du fait d'une dotation initiale insuffisamment calibrée au regard de l'évolution constatée du cours du baril exprimé en dollars.

En réalité, la poursuite de la chute du cours du baril enregistré depuis l'automne 2001 pourrait l'amener en deçà du niveau retenu pour la construction du budget (soit 0,99 euros pour un dollar et 22 dollars le baril), et permettre dès lors une économie de constatation non négligeable.

En 2000, pour une dotation initiale de 266,65 millions d'euros, la consommation effective de carburants a été de 342,9 millions d'euros, soit un écart de 76,2 millions d'euros (500 millions de francs).

De même, en 2001, l'écart devrait se situer à 60,8 millions d'euros (399 millions de francs). La charge est évidemment plus lourde pour l'armée de l'Air, en « déficit » de 40,7 millions d'euros (267 millions de francs), soit le quart de sa dotation initiale.

De fait, un premier décret d'avances a déjà ouvert 15,24 millions d'euros (100 millions de francs) de crédits supplémentaires pour l'armée de l'Air, et 7,62 millions d'euros (50 millions de francs) pour l'armée de Terre. Le reliquat, soit 25,43 millions d'euros (167 millions de francs) pour l'Air et 13,83 millions d'euros (91 millions de francs) pour la Terre, devrait en principe être ouvert en collectif.

Le principal bénéficiaire de ce poste est évidemment l'armée de l'Air, qui est également celle qui est la plus touchée par la dérive du cours du baril. Sa dotation est majorée de 5,41 % (+ 11,04 millions d'euros, soit 72,5 millions de francs).

3. Les crédits d'entretien programmé

Les crédits d'entretien programmé sont inscrits à la fois au titre III et au titre V du budget, avec une propension croissante au cours de la programmation à les transférer sur le titre V.

Leur affectation varie selon les armées.

a) Armée de l'Air

Les crédits du titre III servent à l'achat de petites pièces de rechanges, au financement de la maintenance et à l'entretien courant du matériel. Les crédits du titre V sont essentiellement destinés à financer l'achat de pièces de rechanges et d'outillages afférents à de « gros matériels » (volants de rechange pour les programmes, achats de moteurs de rechange), et entraînant une indisponibilité prévisible et de longue durée du matériel.

Dans le cadre de l'optimisation de la maintenance des matériels aériens, les articles 11 et 13 du chapitre 5521 concernant le maintien en conditions opérationnelles des matériels seront fondus au sein de l' article 61 « Matériels aéronautiques de soutien des forces entretenus par la SIMMAD 5( * ) .

En 2002, les crédits d'entretien programmé inscrits au titre III sont progressivement supprimés et, partiellement seulement, transférés au titre V, qui prendra totalement en charge les dépenses correspondantes.

Les majorations enregistrées sur le titre V concernent essentiellement la dotation affectée au « nucléaire ».

b) Armée de Terre

Les crédits d'entretien programmé inscrits sur le titre III , (chapitre 34-20), financent les opérations de maintenance et de réparation que la Direction centrale du matériel de l'armée de Terre (DCMAT) et la Direction centrale des télécommunications et de l'informatique (DCTEI) « sous-traitent » au secteur privé industriel :

- l'article 34-20-21 « Terre. Entretien programmé par DCMAT » permet ainsi de financer les contrats de maintenance des matériels et des simulateurs terrestres, la visite détaillée des munitions et différentes taxes ,comme l'octroi de mer .

- l'article 34-20-22 « Terre. Entretien programmé par DCT » est destiné à financer les contrats de maintenance et de réparation des matériels et des logiciels du domaine des télécommunications et de l'informatique.

Les crédits du titre V permettent, quant à eux, l'acquisition de l'ensemble des rechanges indispensables au soutien des matériels terrestres et des équipements de transmission d'infrastructure, assuré par l'armée de Terre. Ils sont répartis sur deux articles du chapitre 55-21 « Entretien programmé des matériels » , géré pour l'un (art. 22) par la DCTEI , pour l'autre (art. 23) par la DCMAT .

L'ensemble des crédits d'entretien programmé des matériels aériens, inscrits au titre V, chapitre 55-21, article 21, est géré par la Structure intégrée de maintenance des matériels aériens de la Défense (SIMMAD).

Celui-ci détient également et gère les « stocks Etat ». Les matériels aériens concernés sont les hélicoptères Puma, Gazelle, Couguar, et Fennec et quelques avions TBM 700. L'article permet de subvenir à l'entretien de certains systèmes d'armes montés sur ces appareils.

c) Marine

La durée de vie des bâtiments, initialement prévue de vingt cinq à quarante ans selon les types de bâtiments, dépasse désormais ces prévisions de cinq ans ou plus, pour pallier le retard pris dans les programmes de renouvellement. Cette situation entraîne une augmentation des dépenses en fin de vie, consécutives au vieillissement des bâtiments, à l'obsolescence de certains matériels et à des difficultés dans l'approvisionnement des rechanges.

La réduction des crédits d'entretien programmé inscrit au titre III pour 2002 (- 60 %) touche essentiellement les articles gérés par le Service de soutien de la flotte (SSF) responsable de l'entretien des navires (article 36) et de l'entretien des munitions (article 37).

A structure budgétaire constante, la réduction représente encore 23,8 millions d'euros (- 52,5 %).

Elle recouvre les mesures suivantes :

- une réduction de 0,957 million d'euros au titre des mesures prévues par la loi de programmation ;

- trois transferts budgétaires :

* le premier de 2,5 millions d'euros vers la Direction du personnel militaire pour permettre la formation de pilotes de l'aéronavale à Meridian (Etats-Unis) ;

* le second de 0,914 million d'euros vers la Direction du commissariat pour lui permettre d'assurer le fonctionnement des magasins des rechanges et le soutien des unités à terre en remplacement de DCN ;

* le dernier de 0,007 million d'euros en provenance de l'armée de Terre et de l'armée de l'Air pour leur participation au budget d'entretien des matériels des services de transmission interarmées (STIA) sous commandement marine.

- un abattement net de 22,8 millions de francs lié à l'augmentation des dotations du titre V défense consacrées au maintien en condition opérationnelle des matériels.

Les crédits du titre V sont affectés à la Force océanique stratégique (FOST), à la flotte de surface et à l'aéronautique navale.

S'agissant de la FOST, un aménagement des cycles de maintenance et un processus de réduction des coûts ont été mis en oeuvre afin d'optimiser les ressources destinées à assurer l'entretien des sous-marins nucléaires lanceurs d'engins (SNLE). La priorité a été donnée au maintien des conditions de sécurité (classique et nucléaire) et à la disponibilité opérationnelle.

La dotation affectée à la flotte de surface augmente de 20 % en euros constants. Cette augmentation traduit le retour à une situation de gestion stabilisée pour l'entretien flotte faisant suite aux réductions conjoncturelles opérées en 2001 pour un montant équivalent.

La couverture en autorisations de programme avait en effet été réduite à deux mois de gestion au lieu de six mois et, en crédits de paiement, la Direction des constructions navales n'avait pas été en mesure d'utiliser les crédits prévus en 2000.

Enfin, le projet de loi de finances 2002 prend en compte le financement de l'entretien des installations techniques des ports et des pyrotechnies, inclus dans l'entretien programmé des matériels, transférées par DCN pour un montant de 23 millions d'euros en crédits de paiement et 27 millions d'euros en autorisations de programme.

La montée en puissance du Service de soutien de la flotte et le changement de statut de la Direction des constructions navales devraient contribuer à améliorer la disponibilité de la flotte.

La dégradation de la disponibilité des aéronefs a conduit à la mise en place de la SIMMAD , dont l'objectif est de restaurer en trois ans la disponibilité des aéronefs (60 % en 2001, 67 % en 2002, 75 % en 2003).

d) Gendarmerie

Les crédits d'entretien programmé des matériels concernent trois types de dépenses :

- le maintien en conditions opérationnelles (MCO) des moyens informatiques ;

- le maintien en conditions opérationnelles du réseau RUBIS de radiocommunications ;

- le maintien en conditions opérationnelles des matériels aériens de la gendarmerie, assuré par la SIMMAD.

4. Les crédits de fonctionnement courant

L'attention est clairement portée en 2002 sur les crédits de fonctionnement courant, dont la régression constante au cours de la programmation avait fini par se traduire par une détérioration inquiétante des taux d'activité des forces.

Ces crédits sont aujourd'hui majorés de 6,05 % pour l'ensemble du budget de la Défense, ainsi répartis :

- Air : + 10,7 %

- Terre + 3,84 %

- Marine + 6,41 %

- Gendarmerie + 12,6 %

- Services communs + 1,45 %

B. UN EFFORT OPTIQUEMENT MAJORÉ PAR L'EFFET DE MESURES D'ÉCONOMIES ET DE TRANSFERT

Le supplément de crédits accordé à hauteur de 78 millions d'euros est optiquement majoré par diverses mesures d'économie et de transfert -qui ne peuvent en aucun cas être assimilées à des « mesures nouvelles »-, pour un total de 122 millions d'euros, répartis comme suit :

- 76 millions d'euros (498 millions de francs) d'économies en raison de la réduction du format des armées et du parc des équipements ;

- 10,7 millions d'euros (70,2 millions de francs) d'économies en raison de la réduction des besoins liée à la revue de programmes de 1998 ;

- 35 millions d'euros (230 millions de francs) de transferts de charges d'entretien au titre V (qui ne bénéficie pas nécessairement du total des crédits correspondant).

Le total des 200 millions d'euros ainsi obtenus bénéficie en priorité à la Gendarmerie : 70 millions d'euros, soit plus du tiers du montant des « crédits disponibles », lui sont ainsi affectés.

Cette majoration correspond toutefois pour moitié (34,3 millions d'euros) au financement du surcoût des loyers lié à l'installation en zones sensibles. On pourra regretter ici que, de façon incohérente, les 10 millions de francs prévus en loi de finances initiale 2001 aient été annulés par le collectif de juin... Le solde, soit 35,6 millions d'euros (233 millions de francs) est réparti comme suit : moyens de fonctionnement associés aux postes de gendarmes (6,3 millions d'euros), solde des surcoûts de fonctionnement induits par les mesures décidées en Conseil de sécurité intérieure (21,3 millions de francs), légère augmentation des crédits consacrés aux réserves (0,9 million d'euros).

C. UNE REMONTÉE DES TAUX D'ACTIVITÉ INSUFFISANTE POUR ATTEINDRE LES OBJECTIFS

Au total, compte tenu d'une mesure de 23 millions d'euros « à titre non reconductible », les crédits d'activité des armées sont majorés comme suit :

- armée de Terre : + 28,7 millions d'euros

- armée de l'Air : + 12,3 millions d'euros

- Marine : + 12,3 millions d'euros

Cet effort devrait permettre d'atteindre 89 jours de sortie sur le terrain pour l'armée de Terre (contre 80 aujourd'hui, 100 pour la norme OTAN, 110 à 150 pour l'armée britannique), 97 jours à la mer pour les bâtiments de marine (contre 94 aujourd'hui, 100 pour la norme OTAN, 150 pour les britanniques) et de poursuivre le renforcement qualitatif de l'entraînement des pilotes, qui réalisent déjà le nombre d'heures de vol requis (180 heures par pilote contre 211 pour les britanniques), soit un niveau qui reste en-deçà des objectifs.

CHAPITRE III

LA CHARGE CROISSANTE DES OPÉRATIONS EXCEPTIONNELLES

I. LES OPÉRATIONS EXTÉRIEURES

Pour le seul titre III, le « surcoût » des opérations extérieures a sensiblement augmenté depuis le début de la loi de programmation : 286,5 millions d'euros (1.879 millions de francs) en 1998, 447 millions d'euros (2.933 millions de francs) en 1999, 438 millions d'euros (2.874 millions de francs) en 2000, et 422 millions d'euros (2.768 millions de francs) estimés au 30 juin 2001.

Pour 2001, les coûts se répartissent comme suit :

- Kosovo et Albanie : 205 millions d'euros (1.345 millions de francs) ;

- ex-Yougoslavie (Bosnie et Croatie) : 119 millions d'euros (780 millions de francs) ;

- ensemble des autres opérations : 89 millions d'euros (584 millions de francs).

Les forces françaises engagées actuellement sur différents théâtres d'opérations mobilisent 10.750 militaires, dont plus de la moitié au Kosovo (5.891) et un peu plus du quart en Bosnie et Croatie (2.823) 6( * ) .

Pour 2001, les dépenses relevant du seul titre III (rémunérations et fonctionnement) ont été couvertes par le décret d'avances du 8 octobre 2001 . Elles ont été entièrement financées par un nouveau prélèvement sur les crédits d'équipement des forces armées.

Cette méthode doit à nouveau être vivement récusée. Connues, répertoriées et récurrentes, les dépenses de fonctionnement liées aux opérations extérieures doivent impérativement être inscrites et financées en loi de finances initiale -hors programmation militaire- plutôt que par prélèvement sur le titre V en cours d'exécution budgétaire.

En tout état de cause, nécessité au moins fera loi, car l'assèchement certain des marges éventuelles sur le titre V au cours des futurs exercices budgétaires rendra désormais impossible un procédé aussi contestable.

II. LES MISSIONS DE SERVICE PUBLIC

Les armées françaises sont de plus en plus sollicitées par des opérations souvent lourdes de sécurité civile ou de service public national, pour un coût au total non négligeable.

A. PRINCIPALES OPÉRATIONS DE SÉCURITÉ CIVILE ET DE SERVICE PUBLIC NATIONAL

1. Participation aux plans Polmar et Orsec

Les dépenses supplémentaires supportées par les armées au titre de leur intervention dans le cadre, d'une part, du plan Polmar de lutte contre la pollution marine provoquée par la catastrophe de l'Erika et, d'autre part, du plan Orsec d'assistance à la population victime des tempêtes de la fin de l'année 1999, sont respectivement de 41 millions d'euros (269 millions de francs), dont 18,3 millions d'euros (120 millions de francs) au titre du plan Polmar mer , et 22,7 millions d'euros (149 millions de francs) au titre du plan Polmar terre, et 11,4 millions d'euros (75 millions de francs).

Au plus fort de leur intervention, des moyens importants ont été engagés : plus de 10.000 hommes, sept bâtiments de la Marine nationale, soixante hélicoptères, six avions de transport, une centaine d'engins lourds du génie et mille cinq cents groupes électrogènes.

2. Inondations dans la Somme

Le plan Orsec a été déclenché fin mars 2001 dans le cadre des inondations dans la vallée de la Somme : 100 puis 200 hommes ont participé à cette opération de début avril à fin juin, totalisant ainsi 13.500 journées de travail.

Le surcoût pour l'armée de Terre s'est élevé à 0,38 million d'euros (2,5 millions de francs).

Pour la période du 3 avril au 1 er juin 2001, le personnel de l'armée de l'Air a fourni 850 journées de travail. Le bilan financier de cette opération s'élève à 0,21 million d'euros (1,4 million de francs), dont 0,04 million d'euros (260.000 francs) de dépenses supplémentaires.

3. Feux de forêts

Chaque année, les armées apportent leur contribution à la lutte contre les feux de forêts dans le sud de la France. Les chiffres communiqués sont ceux de l'année dernière. En 2000, la campagne a début le 27 juin pour se terminer le 14 septembre. Pour cette période, l'armée de l'Air a effectué 1.128 journées de travail, le potentiel d'utilisation d'aéronefs a été de 43 h 45, le coût de cette campagne a été évalué à 0,46 million d'euros (3 millions de francs), dont 0,41 million d'euros (2,7 millions de francs) au titre des dépenses supplémentaires.

Dans le cadre de la lutte contre les incendies de forêts, 120 hommes en moyenne de l'armée de Terre ont été engagés de fin juin à fin septembre 2000 (10.800 journées). En 2001, 200 hommes en moyenne sont engagés depuis la fin du mois de juin.

Pour ce qui concerne la Marine , sa participation à la lutte contre les feux de forêts a été de 34 hommes par jour de la mi-juin à la mi-septembre.

4. Opération « VIMY »

Huit cent militaires ont participé à l'opération « VIMY » (transport de munitions dangereuses, chimiques notamment du dépôt de munitions de Vimy à Suippes) entre le 10 et le 21 avril 2001, ce qui correspond à 9.000 journées de travail pour un coût de 0,11 million d'euros (720.000 francs).

5. Participation au plan Vigipirate

Pour l'année 2000, la dépense constatée au titre des armées a atteint 5,44 millions d'euros (35,7 millions de francs), les effectifs mensuels moyens déployés ayant porté sur 689 hommes par mois.

Pour l'année 2001, le plan Vigipirate a été renforcé depuis le 11 septembre. Le surcoût prévisionnel supporté par les armées est de 7,93 millions d'euros (52 millions de francs).

6. Surveillance des côtes et frontières

Les unités nautiques de la gendarmerie départementale et de la gendarmerie maritime ont respectivement effectué, au cours de l'année 2000, 6.426 et 3.795 services de surveillance côtière, consacrant à cette activité 74.229 et 99.387 heures/gendarmes. Il ne peut être dressé de bilan concernant la surveillance exécutée à terre par les unités de la gendarmerie, cette mission ne pouvant être discriminée du service de surveillance générale réalisé par les personnels affectés dans les unités implantées sur le littoral.

De même, la mission de surveillance des frontières ne peut être extraite du service de surveillance générale des unités frontalières.

Dans le domaine de la lutte contre l'immigration clandestine par voie maritime, les unités de la Marine dont l'activité s'est accentuée depuis le 2 mars 2001, suite à l'échouement du caboteur « East Sea » sur la côte varoise le 17 février 2001, ont effectué 900 heures pour les bâtiments de surface et 808 heures de vol pour les aéronefs.

Le surcoût prévisionnel est de 0,09 million d'euros (590.000 francs). De plus, la veille des sémaphores de la côte méditerranéenne a été renforcée, nécessitant la mobilisation permanente de 19 personnes supplémentaires (évaluation du coût annuel : 0,96 million d'euros (6,3 millions de francs).

7. Surveillance des transferts de fonds liés à l'euro fiduciaire (opération « Staterre »)

La participation des armées à la mise en place de l'euro consiste principalement à assurer la garde des centres de stockage des euros et des francs lorsque ces derniers seront retirés de la circulation, ainsi que diverses missions de transport en métropole et dans les départements d'outre-mer.

Pour la Gendarmerie , il s'agit essentiellement d'une mission de sécurisation des transports de fonds pour l'approvisionnement en pièces et billets de La Poste, des banques et du Trésor public, ainsi que des commerçants à partir du 1 er décembre 2001.

L'ensemble de cette opération concerne globalement 65.000 hommes pour la Gendarmerie (escortes, sécurisations, préparations des transferts...) et environ 2.200 hommes par jour pour les armées (essentiellement pour des gardes statiques).

B. L'IMPACT SUR LE BUDGET DE LA DÉFENSE

Les surcoûts liés aux opérations d'assistance ont été pris en charge par le budget de la Défense.

Le dossier Polmar est en cours d'examen et sera susceptible de donner lieu à remboursement de l'Etat dans le cadre de la procédure judiciaire en cours.

Les surcoûts de Staterre en rémunérations et charges sociales, soit 21,1 millions d'euros (138 millions de francs), sont couverts intégralement par les crédits ouverts en décret d'avance du 8 octobre 2001 . Les surcoûts en fonctionnement et en équipement sont financés par redéploiements internes.

Pour le plan Vigipirate , les surcoûts feront l'objet d'une demande d'abondement de crédits en gestion 2002.

Votre rapporteur a toujours estimé que ces missions, pas nécessairement conformes à la notion d'armée professionnelle, mais sans doute nécessaires pour une meilleure intégration de l'armée dans la société civile, devaient en tout état de cause faire l'objet d'un financement spécifique, et ne pas se traduire par une surcharge financière qui pourrait être qualifiée d'indue. La couverture du surcoût de Staterre et, en tout cas en prévision, de Vigipirate renforcé , constitue à cet égard une amélioration bienvenue.

AUDITION DE M. ALAIN RICHARD,
ministre de la Défense

Commission des finances - 24 octobre 2001

Avant de procéder à la présentation des principales caractéristiques du projet de budget de la Défense pour 2002, M. Alain Richard, ministre de la Défense , a tenu à souligner que les événements du 11 septembre dernier, les interrogations qu'ils pouvaient susciter, et les réflexions qui en découlaient, ne remettaient aucunement en cause l'économie et la pertinence du budget présenté, objet d'un accord entre le Président de la République et le Premier ministre. Il a notamment considéré que le défi actuel concernait d'abord la protection intérieure et l'efficacité dans la recherche des réseaux. A ce titre, les besoins militaires ne pouvaient être que de nature complémentaire, et ne constituaient qu'un « fragment » de l'action anti terroriste. En tout état de cause, les récents événements ne se prêtaient, selon lui, à faire disparaître ou à remettre en cause ni le contexte, ni les défis, ni les objectifs dont la définition avait présidé à l'élaboration du présent projet de budget et, plus généralement, de l'actuelle loi de programmation militaire.

Abordant ensuite rapidement le bilan de cette loi de programmation , M.  Alain Richard a estimé que la quasi-totalité des objectifs avait été atteint, notamment en ce qui concerne les effectifs. Les engagements extérieurs des forces françaises ont confirmé la pertinence globale des choix effectués dans la conception du modèle d'armée 2015, tout en révélant la nécessité de certaines adaptations. L'engagement dans les Balkans a en outre confirmé la nécessité de poursuivre la consolidation et le renforcement de l'Europe de la défense.

Le projet de budget 2002 se traduit par une progression de 1,6 % des « crédits disponibles ». Celle-ci privilégie le titre III, majoré de 2,3 % à 16,5 milliards d'euros, tandis que le titre V ne progresse que de 0,7 % pour les crédits de paiement, portés à 12,4 milliards d'euros, complétés par 411 millions d'euros de reports disponibles, soit un niveau global de 12,8 milliards d'euros, inférieur à celui des autorisations de programme (13,01  milliards d'euros).

M. Alain Richard a souligné que l'évolution du titre III traduisait l'achèvement de la professionnalisation des forces, avec la réalisation à 99 % du niveau d'emplois budgétaires prévu par la loi de programmation, soit 436.000 emplois réalisés, pour 440.000 emplois programmés. Il a relevé que les écarts par rapport à la loi de programmation, limités à moins de 1 % de l'objectif final, ne concernaient pour l'essentiel que les civils, avec un déficit de 2.000 postes, et les volontaires, avec un déficit de 2.400 postes. Il a par ailleurs rappelé que les moindres dépenses ainsi réalisées avaient permis d'accroître le recours à l'externalisation. M. Alain Richard a évoqué les difficultés, désormais croissantes, de recruter dans un contexte de reprise du marché du travail, et relevé à cet égard le caractère particulièrement ambitieux du niveau de recrutement prévu pour 2002, avec 35.900 militaires et 3.750 civils, soit un seuil jamais atteint jusqu'à présent.

De fait, un effort particulier sera consenti en 2002 pour améliorer l'attractivité des carrières, avec la mise en oeuvre de plus de 38 millions d'euros de mesures indemnitaires nouvelles d'une part, et par le biais, d'autre part, d'un renforcement des moyens de fonctionnement de nature à accroître les taux d'activité des forces.

M. Alain Richard a par ailleurs précisé qu'un effort particulier serait consenti en direction de la gendarmerie, avec la création de 700 postes supplémentaires de sous-officiers et de 200 postes d'officiers. En outre, les services de renseignement bénéficieront de 200 emplois supplémentaires.

Abordant ensuite l'analyse des crédits du titre V, affectés à l'équipement des forces armées, le ministre a estimé que le niveau prévu pour 2002, soit 12,4 milliards d'euros pour les crédits de paiement et 13 milliards d'euros en autorisations de programme, était de nature à permettre de réaliser en fin de période à 94 % le niveau global des crédits prévus par la loi de programmation, cette estimation s'appliquant aux crédits votés en loi de finances initiale, et non aux crédits consommés.

M. Alain Richard a en effet reconnu la difficulté, récurrente pour les dépenses d'équipement, de consommer la totalité des crédits votés initialement, compte tenu notamment de la complexité et de la durée des programmes d'armement, et des difficultés de conclusion de contrats réunissant souvent plusieurs partenaires.

Abordant ensuite rapidement le contenu physique des principaux programmes, le ministre a d'abord évoqué la poursuite des programmes de renouvellement des forces stratégiques ASMP-A (missile air-sol moyenne portée amélioré ; SNLE-NG (sous-marin nucléaire-nouvelle génération) ; simulation et enfin missile M51. Il a souligné que ce dernier programme, certes retardé par des difficultés de négociations entre l'Etat et l'EADS, se déroulait néanmoins au niveau de prix prévu par la DGA (Direction générale de l'Armement). S'agissant des programmes, considérés comme essentiels, relatifs aux fonctions de commandement, communication, conduite des opérations et renseignement, M. Alain Richard a estimé satisfaisant le déroulement des programmes Hélios et Syracuse, en dépit des difficultés de coordination européenne.

S'agissant des capacités de projection des forces, il s'est félicité du quasi-aboutissement du programme ATF (avion de transport du futur), même si l'on ne pouvait exclure qu'un au moins des neufs partenaires soit amené à différer son choix. Parallèlement, il a souligné que le programme NTCD (nouveaux transports de chalands de débarquement) était en phase de réalisation, dans le cadre d'un partenariat réussi entre la DCN (direction des chantiers navals) et les Chantiers de l'Atlantique. S'agissant enfin des moyens de frappe dans la profondeur, M. Alain Richard a d'abord rappelé que le programme Rafale se poursuivait conformément aux engagements pris. Il a surtout tenu à souligner le caractère significatif du développement d'un missile de croisière européen (le SCALP/EG), différent des Tomahawk américains actuellement utilisés, considérant que le choix britannique de s'engager avec la France sur la réalisation d'un missile européen n'était pas "indifférent". Il a précisé que ce missile serait disponible pour l'armée de l'Air, à partir de 2003 et la Marine, en 2005. Enfin, il s'est également félicité de voir les Australiens et les Espagnols choisir le Tigre comme hélicoptère de combat de l'armée de terre , qui était en concurrence avec l'Apache américain.

M. Alain Richard a ensuite indiqué qu'un effort particulier serait accompli, dans le cadre du budget 2002, en direction des crédits d'entretien et de réparation, afin d'améliorer les taux de disponibilité des matériels, qui pouvaient effectivement être qualifiés d'insatisfaisants. A cet égard, la réorganisation des services de maintenance, avec la mise en place de la SIMMAD (Structure intégrée de maintenance des matériels aéronautiques et de défense) et du SSF (Service de soutien de la flotte) devrait utilement contribuer, à terme, à cette nécessaire amélioration.

Abordant enfin l'important sujet de l'Europe de la défense, M. Alain Richard a indiqué que le prochain sommet de Bruxelles prévu pour la mi-novembre devrait en principe aboutir à déclarer l'Union européenne opérationnelle en matière de traitement de crise. Une conférence d'amélioration des capacités devrait également faire le point prochainement. A cet égard, le ministre a estimé que si le niveau quantitatif des effectifs et des armements était atteint, les capacités de commandement de communication, d'information et de transports, demeuraient encore insuffisantes. Il a déclaré à cet égard que la France entendait apporter dans ces domaines une contribution complémentaire, étant entendu que cet effort supposait des moyens importants, mais nécessaires pour préserver tout à la fois l'autonomie européenne vis-à-vis de l'OTAN et la maîtrise industrielle en la matière.

Concluant, M. Alain Richard, ministre de la défense , a estimé que dans un contexte macro-économique tendu, et dans le cadre contraint d'une politique économique et budgétaire soucieuse de préserver la rigueur budgétaire, le budget de la défense pour 2002 pouvait être considéré comme maîtrisé financièrement et constituait un « compromis justifié » entre les différents objectifs poursuivis.

Un débat s'est ensuite engagé avec les membres de la commission.

M. Alain Lambert, président , a souhaité obtenir des précisions sur l'hypothèse, évoquée par le ministre dans d'autres enceintes, d'une demande américaine de renforcement de la présence européenne dans les Balkans.

M. Alain Lambert, a ensuite fait état de l'annonce de la sortie imminente d'un rapport public particulier très sévère de la Cour des comptes à l'égard du GIAT (Groupement des industries d'armements terrestres), de la SNPE (Société nationale des poudres et des explosifs) et de la DCN (Direction des constructions navales) et soulignant la « décrépitude de l'état de nos munitions ». Il a souhaité connaître l'analyse du ministre sur ce point.

Evoquant enfin le rapport annuel de la Cour des comptes sur l'exécution du budget 2000, M. Alain Lambert s'est inquiété de voir la Cour estimer que l'importance des engagements cumulés des trois dernières années risquait de peser lourdement sur les besoins en crédits de paiement au cours des prochains exercices budgétaires.

M. Maurice Blin, rapporteur spécial de l'ensemble du budget de la défense et des crédits d'équipement militaire , a d'abord relevé que l'objectif de maîtrise de la dépense publique marquait plus spécifiquement le budget de la Défense, et que celui-ci lui semblait, de façon d'ailleurs récurrente, payer un tribut particulièrement lourd à l'équilibre du budget général, pour lequel il paraissait continuer de représenter une variable d'ajustement privilégiée.

Relevant ensuite la priorité donnée par le budget 2002 à la « condition militaire », M. Maurice Blin a souligné la progression toujours supérieure des dépenses de fonctionnement par rapport aux dépenses d'équipement, qui apparaissaient elles-mêmes comme la variable d'ajustement du budget militaire. Le décret d'avances du 8 octobre dernier constitue une nouvelle illustration de cette démarche, puisque l'intégralité des dépenses de fonctionnement liées à la participation de la France à des opérations extérieures (soit 3,4 milliards de francs) a été financée par prélèvement à due concurrence sur les crédits d'équipement militaire.

M. Maurice Blin a ensuite rappelé qu'en 2000, les Etats-Unis et la Grande-Bretagne consacraient encore près de trois points de produit intérieur brut (PIB respectivement 2,9 % et 2,3 %) à leur effort de défense, tandis que la France se situait désormais très en-deça de deux points (1,8 %) et l'Allemagne au voisinage de un point (1,1 %). Il s'est inquiété à cet égard de voir se creuser, entre les quatre pays occidentaux, un écart de nature à remettre en cause la cohésion et la cohérence de la défense européenne.

Interrogeant ensuite le ministre sur l'important projet A400 M (avion de transport du futur), il a souhaité avoir confirmation de l'engagement italien, et surtout connaître la nature de la position allemande, notamment du Bundestag, dont l'autorisation constitue un préalable à l'engagement des dépenses.

Saluant les efforts accomplis par le ministère dans le cadre de l'exercice 2000 pour réduire le montant des reports, M. Maurice Blin s'est toutefois interrogé sur la signification de la notion de crédits « disponibles » dans le cadre de la présentation d'un projet de loi de finances initiale, dès lors que ceux-ci incluent des crédits reportés de l'exercice précédent et donc déjà votés. De fait, il a rappelé que, compte non tenu des reports, la progression du budget de la défense se limitait à 0,2 %, contre une moyenne de 2,5 % pour l'ensemble des budgets civils, tandis que les seuls crédits d'équipement diminuaient de 2,5 %.

Evoquant ensuite les retards constatés sur de nombreux programmes et le vieillissement des matériels, le rapporteur spécial a souhaité savoir s'il était possible d'évaluer le coût de ces retards. Il s'est ensuite interrogé sur la réalité du risque de voir se produire des « ruptures capacitaires » pour certains équipements, parfois majeurs, entre 2002 et 2005.

M. Maurice Blin a souhaité ensuite obtenir des précisions sur la nature des demandes américaines formulées dans le cadre des opérations en Afghanistan.

Il s'est également interrogé sur le niveau de réalisation des objectifs de la Force de réaction rapide européenne, prévue pour être opérationnelle en 2003.

Il a enfin souhaité savoir si la recapitalisation du GIAT, annoncée à hauteur de 4 milliards de francs, « dans le cadre d'un collectif », interviendrait avant la fin de l'année et si elle se ferait au prix d'une nouvelle ponction sur les crédits d'équipement militaire du titre V.

M. François Trucy, rapporteur spécial des crédits du titre III, a souhaité obtenir des précisions sur le bilan des expériences d'externalisation, celui-ci ayant fait l'objet d'une analyse plutôt critique de la Cour des comptes dans le cadre de l'examen de l'exécution 2000.

Il a également souhaité connaître l'opinion du ministre sur le rapport de MM. Charles Cova et Jean-Nöel Kerdraon, députés, sur l'entretien de la flotte.

Il s'est ensuite inquiété de l'absence de mesures indemnitaires nouvelles en direction des jeunes officiers. Il a par ailleurs souhaité connaître les perspectives d'application des 35 heures aux militaires, et obtenir des précisions sur la rumeur, selon laquelle les gendarmes bénéficieraient, à ce titre, d'un treizième mois.

M. François Trucy a évoqué, enfin, « l'affaire » des pistolets Beretta défectueux livrés à la gendarmerie, souhaitant connaître le coût et les délais de remplacement du matériel concerné, et la nature des responsabilités engagées.

M. Jacques Baudot, rapporteur spécial des crédits des Anciens combattants, a regretté le manque de lisibilité de certains crédits affectés aux anciens combattants et désormais fondus au sein du budget de la défense, notamment ceux relatifs à la politique de la mémoire. Il a ensuite souhaité obtenir des précisions sur l'avenir des deux bases aériennes de Ochey et Toule-Rozières, situées en Meurthe-et-Moselle, s'agissant notamment des possibilités de vente des terrains aux collectivités locales intéressées.

M. Roland du Luart s'est interrogé sur le niveau quantitatif et qualitatif actuel de la réserve, s'inquiétant de l'insuffisance des effectifs, actuellement très inférieurs à l'objectif fixé. Il a évoqué la récente proposition de Jean-Pierre Chevènement, tendant à rétablir le service militaire pour dix semaines. Il s'est enfin félicité du renforcement des moyens de la gendarmerie, tout en soulignant que, sur le terrain, il apparaissait que cet effort ne suffirait pas à compenser la mise en place de l'ARTT (aménagement et réduction du temps de travail).

M. Jacques Chaumont a souhaité savoir si la France menait une politique spécifique en matière de systèmes d'armements à l'égard des PECO (pays d'Europe centrale et orientale), candidats à la fois à l'Union européenne et à l'OTAN. Il s'est interrogé ensuite sur les conséquences du « zèle arménien » sur le bon déroulement des contrats commerciaux d'armement en cours avec la Turquie.

M. Jean-Philippe Lachenaud a souhaité obtenir des précisions sur l'hypothèse évoquée de la construction, au niveau européen, d'un porte-avions « mutualisé ». Il a par ailleurs souhaité connaître le niveau de l'aide apportée au plan européen (Plan Konver et Programme plurirégional de défense) à la mise en oeuvre de la professionnalisation et de la restructuration des armées.

M. Yann Gaillard a souhaité confirmer le sentiment de malaise croissant de la gendarmerie ressenti par les élus locaux.

M. Michel Moreigne , à son tour, a souligné cette détérioration, particulièrement sensible dans le monde rural profond. Tout en saluant l'importance de l'effort consenti en termes de mesures indemnitaires, il a estimé que celui-ci ne serait pas suffisant. Evoquant l'exemple du camp militaire de la Courtine, il a également souhaité savoir s'il était envisagé de développer les villages de combat.

M. Jean-Pierre Demerliat a souhaité obtenir des précisions sur le délai et les modalités de transfert de l'ancienne base aérienne de Romanet à la ville de Limoges, s'inquiétant notamment des modalités de gardiennage et de prise en charge des réparations des dégâts causés par les tempêtes de fin 1999.

Enfin, M. François Marc s'est interrogé sur le bien-fondé de la priorité donnée par les américains au développement des équipements à très haute technologie, au détriment peut-être du facteur humain, compte tenu de la nature des menaces actuelles. Parallèlement, il a souhaité savoir si l'apparition de ces menaces justifiait une réorientation de l'effort français de défense.

En réponse à ces questions, M. Alain Richard, ministre de la défense , a apporté les précisions suivantes :

- l'opération actuellement menée par les Etats-Unis à l'encontre des infrastructures du réseau El Qaïda et des moyens militaires talibans est de nature très limitée. Les Etats-Unis ont dix ou vingt fois les moyens de la mener seuls, sans aucune contribution extérieure. Quatre groupes aéronavals, dotés chacun de quatre-vingt avions de combat, sont actuellement présents en mer d'Arabie, mais moins de la moitié d'un groupe est actuellement utilisé. La demande américaine adressée à cinq pays, dont la France, la Grande-Bretagne et l'Allemagne, est de nature politique. Elle se traduit pour la France par une participation aux instances de planification. En tout état de cause, l'efficacité militaire commande un recours exclusif à des équipements américains. La France reste en mesure de fournir, de façon immédiatement disponible, une dizaine d'avions projetables dans un délai de dix jours, et sept à huit mille hommes projetables dans un délai de trois semaines.

S'agissant de la présence dans les Balkans, il peut être envisagé un retrait des moyens américains de l'ordre de 5 % à 10 % de l'effort global.

S'agissant du GIAT, le ministre a indiqué que ce rapport serait rendu public le lendemain. Il a rappelé qu'il avait préconisé, pour sa part, de façon constante, une réduction des surcapacités du GIAT, tout en prenant les mesures d'accompagnement nécessaires : recapitalisation, respect des engagements de l'Etat au niveau des commandes, mesures de reconversion sociale. La recapitalisation, prévue à un niveau un peu inférieur à quatre milliards de francs, est actuellement examinée, notamment par le ministère de l'économie et des finances.

La transformation du statut de la DCN fera également l'objet de mesures présentées dans le cadre du collectif de fin d'année ;

- l'amélioration conséquente du niveau des engagements sur la fin de l'actuelle loi de programmation exercera inévitablement une pression sur les crédits de paiement des prochains exercices budgétaires ;

- les chiffres de comparaison internationale évoqués sont incontestables. Mais les pays cités ne se situent pas dans la même catégorie de responsabilité internationale. Par ailleurs, les Etats-Unis incluent dans leur effort de défense la totalité de leurs dépenses de recherche. En outre, l'Allemagne est actuellement handicapée par l'ampleur du coût de la réunification. Dans ce cadre, la France et la Grande-Bretagne ont choisi d'exercer un effet d'entraînement ;

- s'agissant du projet de l'A-400-M, le vote du Bundestag constitue certainement une échéance majeure. Le ministre de la défense allemand a assuré son homologue français qu'il présenterait au Bundestag la totalité de la commande prévue, soit 73 appareils.

- le ministre a reconnu que des problèmes de « soudure » pourraient intervenir au cours des prochaines années sur certains équipements, comme les avions de transport.

Le degré de vieillissement des équipements est toutefois inégal. Ainsi, le parc français de chars de combat est aujourd'hui le plus récent de l'ensemble des partenaires européens. Par ailleurs, l'importance des commandes passées récemment remédiera nécessairement aux difficultés actuelles, à condition d'être couvertes en temps voulu par les crédits nécessaires.

L'externalisation s'applique désormais à des fonctions plus intégrées de soutien des armements. De ce fait, les expériences menées rencontrent davantage de difficultés. Celles-ci toutefois ne remettent pas en cause le bien-fondé du principe de l'externalisation.

Le rapport parlementaire sur l'entretien de la flotte repose sur un constat qui n'est pas contestable. Celui-ci a déjà conduit la défense à mettre en oeuvre depuis deux ans la plupart des propositions émises, suivant une orientation qui se traduit nécessairement par la remise en cause des intérêts acquis de la D.C.N.

Dans le cadre d'une enveloppe budgétaire contrainte, les mesures de revalorisation de la situation de personnels bénéficieront par priorité en 2002 aux jeunes sous-officiers, conformément aux souhaits des représentants du personnel. Des mesures devront être prises en 2003 en direction des jeunes officiers.

La nature radicalement spécifique des conditions d'emploi des forces armées et notamment de la gendarmerie exclut le transfert des dispositions de l'ARTT. Toutefois la nécessité de garantir la qualité de son intégration au sein du monde civil, et le souci de renforcer l'attractivité de ce métier, impliquent que des mesures soient prises. Celles-ci feront l'objet en novembre de travaux du Conseil supérieur de la fonction militaire. Différentes mesures d'allègement et de réduction du temps de travail seront mises à disposition des commandants d'unités, qui détermineront leur emploi en fonction des contraintes opérationnelles. Le recours à des mesures indemnitaires permettra de pallier la nécessaire limitation des mesures liées aux temps d'activité ;

- les pistolets Beretta défectueux vont être progressivement remis en état, dans un délai qui ne devrait pas excéder neuf mois. Le défaut, constaté au niveau de la culasse, met en cause Beretta seul, qui a livré ces pièces au GIAT ;

- les mesures de restructuration du réseau des bases aériennes définies en 1996 par le précédent gouvernement, après concertation avec les élus locaux, seront mises en oeuvre intégralement ;

- les villages de combat pourront être développés dans les camps militaires ;

- le niveau actuel des réservistes est inférieur à 30.000, pour un objectif fixé à 100.000. Le déficit est particulièrement élevé chez les sous-officiers et les militaires du rang. Y remédier ne relève pas d'une augmentation de crédits, mais d'une amélioration de l'information adressée aux jeunes ;

- les PECO (Pays d'Europe centrale et orientale) constituent à l'évidence une forte priorité en matière de relations d'armement. Ces pays sont toutefois handicapés par la faiblesse de leurs moyens financiers, et bénéficient de livraisons gratuites de matériel américain. La mise en oeuvre de relations commerciales constitue un des objectifs importants de nos attachés de défense locaux ;

- le dialogue en matière d'armement avec la Turquie n'est pas totalement rompu ;

- la construction mutualisée d'un porte-avions européen, ou seulement franco-britannique, n'est pas d'actualité dans la mesure où elle se heurte à des questions de souveraineté, nécessairement plus sensibles s'agissant de grands pays ;

- la reconversion des industries de défense et la restructuration des armées ont bénéficié de crédits européens mobilisés, dans le cadre de la réforme des fonds structurels, qui n'a pas exclu ce type d'interventions ;

- les événements du 11 septembre 2001 ne conduisent pas à remettre en cause la nature des menaces ou les catégories d'emploi des forces. Il n'y a pas contradiction entre le renforcement du renseignement technologique et technique et le niveau du renseignement humain. Ces deux aspects sont totalement complémentaires, et interviennent d'ailleurs conjointement dans le cadre de l'opération en cours en Afghanistan.

Les choix américains comportent une évidente composante de soutien à l'industrie nationale. En tout état de cause, la maîtrise de la haute technologie demeure une garantie fondamentale de la souveraineté nationale ou européenne, d'une part, et du caractère opérationnel de nos équipements d'autre part.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 20 novembre 2001 , sous la présidence de M. Alain Lambert, président, la commission a ensuite procédé à l' examen de l'exposé d'ensemble et des dépenses en capital du budget de la défense et de l'article 32 du projet de loi de finances , sur le rapport de M. Maurice Blin, rapporteur spécial .

M. Maurice Blin, rapporteur spécial, a d'abord rappelé que l'examen du budget de la défense pour 2002 s'inscrivait dans un double contexte : la fin de l'actuelle loi de programmation militaire, dont il convenait de dresser le bilan avant de s'engager dans la prochaine, et la nécessaire analyse des événements du 11 septembre 2001, s'agissant des évolutions potentielles de la « nature de la menace ».

Il a considéré que les principales données du budget 2002 confirmaient la tendance lourde relevée tout au long de l'exécution de la loi de programmation qui s'achève. Rappelant que le budget de la défense avait constamment constitué la variable d'ajustement privilégiée de l'équilibre budgétaire général, il a regretté qu'il n'ait jamais bénéficié des « dividendes de la croissance », pourtant considérables sur la durée de la législature.

Précisant que, de 1996 à 2002, la part du budget de la défense dans le budget de l'Etat avait diminué de 12,3 % à 10,9 %, tandis que la part de l'effort militaire dans le PIB régressait de 2,41 % à 1,89 %, M. Maurice Blin, rapporteur spécial , a souligné qu'avec 29,3 milliards d'euros (y compris les reports autorisés), le budget de la défense devenait en 2002 le cinquième poste de dépenses de l'Etat, après l'éducation nationale, les charges communes -qui comprennent la charge de la dette- les concours de l'Etat aux collectivités locales et l'Emploi et solidarité.

M. Maurice Blin, rapporteur spécial, a ensuite souligné, que de façon relativement inusitée, et en tout état de cause contraire au strict droit budgétaire, le Gouvernement incluait dans sa présentation du budget 2002 des reports de crédits de l'exercice 2001, pour un montant total de 2,7 milliards de francs, ce qui lui permettait d'afficher un montant de crédits « disponibles » sensiblement plus élevé.

De fait, M. Maurice Blin, rapporteur spécial , a précisé que hors reports, le budget 2002 s'établissait à 189,2 milliards de francs, soit une croissance limitée à 0,2 %, inférieure à celle de l'inflation prévue (+ 1,6 %), et correspondant à moins du dixième de ce qui était prévu en moyenne pour les budgets civils (+ 2,5 %).

Soulignant que l'exercice 2002 était marqué par un effort particulier en direction de la « condition militaire », avec une progression de 2,3 % du titre III, il a noté que cette évolution restait toutefois inférieure de moitié à celle des budgets civils (+ 5,1 %), et correspondait en outre pour moitié à l'inéluctable prise en compte des mesures « Sapin ». Précisant que, si un réel effort était fait en termes de mesures catégorielles, généralisées cette fois à l'ensemble des armées et services, celles-ci ne concernaient que les sous-officiers pour l'essentiel, il a estimé que ces mesures ne pouvaient constituer qu'un début de réponse, face à l'ampleur des besoins justifiés qui commençaient tout juste à s'exprimer.

M. Maurice Blin, rapporteur spécial, a considéré qu'en revanche, le montant des crédits d'équipement militaire prévus pour 2002 ne pouvait, en aucun cas, être considéré comme satisfaisant, dès lors qu'il traduisait une nouvelle encoche par rapport aux objectifs fixés par la loi de programmation militaire, même révisée, et présentait surtout un écart considérable avec l'annuité en principe retenue pour 2003 par la prochaine loi de programmation.

Ainsi, hors reports, l'écart entre les crédits initiaux du budget 2002 et le niveau prévu par la loi de programmation révisée s'établit à 7,21 milliards de francs, et l'écart avec le niveau envisagé pour 2003 s'établit à 6,3 milliards de francs.

M. Maurice Blin a par ailleurs indiqué que l'analyse de la répartition des moyens prévus pour 2002 conduisait à souligner la remontée structurelle de l'agrégat nucléaire, dont l'effet d'éviction sur les autres grands programmes risquait de progresser, compte tenu de l'effet conjoint de la modernisation simultanée des vecteurs, des missiles et des charges, et de la montée en puissance de la simulation. Parallèlement, M. Maurice Blin a déploré le relatif « sacrifice » des moyens affectés à l'Espace, notamment en cours d'exécution budgétaire. Rappelant que cette situation était notamment liée à une visibilité difficile sur l'évolution des programmes, en raison de multiples défaillances de la coopération européenne, le rapporteur spécial a néanmoins estimé que cette carence pouvait être coûteuse à terme, notamment en termes d'autonomie.

Plus généralement, M. Maurice Blin, rapporteur spécial, a déploré qu'au sein même du budget de la défense, les dépenses d'équipement aient elles-mêmes toujours servi de variable d'ajustement à des dépenses de fonctionnement en constante progression et désormais prépondérantes.

Il a ainsi rappelé que les dépenses de fonctionnement liées à la participation de la France à des opérations extérieures, que le ministre de l'économie et des finances avait toujours refusé d'inscrire en loi de finances initiale, avaient constamment été financées en cours d'exécution, au prix d'un prélèvement sur les crédits d'équipement du titre V équivalent en cinq ans au coût d'un second porte-avions nucléaire.

Au total, M. Maurice Blin, rapporteur spécial , a estimé que l'exécution globale de la loi de programmation se solderait vraisemblablement par un déficit de crédits d'équipement correspondant à une annuité complète, et par une détérioration des matériels plus importante que prévue.

Il a précisé, à cet égard, que, fin 2001, les plus hauts responsables militaires reconnaissaient désormais qu'il y aurait, sinon ruptures de capacités d'ores et déjà avérées, du moins « érosion des matériels », « inquiétude sur la cohérence des forces » et surtout « dégradation du modèle d'armée 2015 ».

En conclusion, M. Maurice Blin, rapporteur spécial, a considéré que, à l'abord de la prochaine loi de programmation militaire, les armées françaises se trouvaient confrontées à une double difficulté : une réalisation en termes physiques d'ores et déjà moins favorable que prévue, et une dernière dotation en autorisations de programme, comme en crédits de paiement, présentant un écart sensible avec les dotations en principe arrêtées pour 2003 par le chef de l'Etat et le Premier ministre.

Abordant ensuite rapidement le secteur public des industries d'armement, M. Maurice Blin a estimé que la réforme nécessaire n'avait pas été menée à terme.

Il a indiqué que, malgré une dépense budgétaire d'ores et déjà considérable, ni la restructuration de la direction des constructions navales (DCN) ni celle de GIAT-Industries n'était acquise, estimant que, dans les deux cas, la mutation, difficile, notamment parce qu'elle exigeait d'abord celle des personnels, ne se ferait pas sans une nouvelle et forte contribution budgétaire. Il a rappelé que, sur la période 1997-2002, le coût de restructuration de la DCN avait déjà représenté 3,3 milliards de francs et que, depuis sa création en 1990, le groupe GIAT-Industries avait totalisé 24 milliards de francs de pertes, obligeant l'Etat, actionnaire unique, à verser 18,5 milliards de francs au titre de sa recapitalisation, au prix, là encore, d'un prélèvement important sur le titre V. M. Maurice Blin a indiqué qu'une nouvelle recapitalisation, de l'ordre de 4 milliards de francs, avait été évoquée pour la fin de l'exercice, mais ne figurait pas dans le cadre du collectif de fin d'année qui venait d'être déposé par le gouvernement.

Enfin, le rapporteur spécial, a considéré que la dérive française s'inscrivait dans le cadre d'une évolution européenne fragilisée.

Tout en soulignant que la politique européenne de défense avait franchi, il y a deux ans, une étape décisive au sommet d'Helsinki de décembre 1999, avec l'adoption du principe d'une « force de réaction rapide » européenne, M. Maurice Blin, rapporteur spécial, a estimé que, un an avant la date envisagée pour sa mise en place opérationnelle, de nombreux points sensibles et stratégiques, dont l'insuffisance avait été concrètement soulignée sur le théâtre du Kosovo, restaient encore à améliorer, en particulier en matière de défense antimissile, de forces opérationnelles spéciales, de renseignement, de communications de combat et de transport aéroporté.

Considérant que les conditions, et même le succès, de la mise en place d'une défense européenne étaient en réalité étroitement dépendants d'un degré minimum de convergence des choix budgétaires -et donc en réalité politiques- des Etats membres, M. Maurice Blin a relevé l'écart croissant, dans ce domaine, entre la France et le Royaume-Uni d'un côté et l'Allemagne, l'Italie, l'Espagne de l'autre, mais, surtout, entre le Royaume-Uni et la France. Il a ainsi précisé qu'en termes d'effort de défense en pourcentage de PIB, ainsi qu'en termes de dépenses par soldat de fonctionnement comme d'équipement, l'écart entre la France et le Royaume-Uni était désormais plus élevé que celui, souvent très faible, entre le Royaume-Uni et les Etats-Unis.

M. Maurice Blin, rapporteur spécial , s'est ensuite inquiété de voir la coopération en matière de programmes d'armement marquer le pas. Il a estimé, en particulier, que de sérieuses incertitudes menaçaient la participation de l'Allemagne et de l'Italie au projet d'avion de transport futur (A 400-M).

Il a enfin considéré que les événements du 11 septembre 2001 n'étaient pas sans conséquences sur les perspectives de l'Europe de la défense, estimant que l'accélération considérable donnée par les américains au programme de l'avion de combat américain Joint Strike Fighter pesait sur les perspectives de développement du Rafale et de l'Eurofighter, rebattait considérablement les cartes de l'industrie européenne et constituait un exemple qui devait être médité. Soulignant également qu'il convenait d'être attentif au repositionnement politique évident de certains partenaires européens -le Royaume-Uni, certes, mais aussi l'Italie- autour des Etats-Unis, il a considéré que le sursaut américain constituait un défi, sinon un écueil, pour une Europe de la défense encore en gestation.

Concluant, M. Maurice Blin a estimé que la seule analyse budgétaire conduisait à un état des lieux préoccupant. Qu'en effet, si, dans un contexte géostratégique profondément évolutif, la professionnalisation des armées françaises était acquise, elle restait à consolider et à s'inscrire dans la durée et que la modernisation des équipements avait subi successivement encoches, reports et annulations de crédits, aboutissant en fin de loi de programmation à un « trou » de l'ordre de 80 milliards de francs, et se traduisant par l'érosion des matériels, la dégradation de la cohérence des forces, et des perspectives de ruptures capacitaires au cours de la prochaine législature.

Il a souligné que, du seul point de vue budgétaire, la professionnalisation des armées, pour être seulement consolidée, impliquait une charge supplémentaire importante sur le titre III. Que le lancement de commandes importantes en fin de programmation risquait fort de se traduire, au cours de la prochaine législature, par la nécessité de renforcer considérablement le niveau des crédits de paiement, sauf à aboutir à une véritable crise des paiements. Que l'adaptation de notre industrie d'armement n'avait pas été menée à terme et que le coût pour l'Etat, compte tenu de la nécessaire prise en compte des considérations liées au maintien de l'emploi et à l'aménagement du territoire serait onéreux - sans pour autant d'ailleurs qu'il revienne nécessairement au budget de la défense, dont ce n'était pas la vocation, de le supporter indéfiniment.

Qu'en d'autres termes, les conditions générales d'exécution de l'actuelle loi de programmation conduisaient à souligner l'ampleur des charges accumulées, qui conduiraient mécaniquement, et en dehors de tout choix politique de renforcement de notre effort militaire, à une sensible augmentation des dépenses militaires au cours de la prochaine législature, sauf à remettre en cause définitivement le modèle d'armée 2015.

M. Philippe Marini, rapporteur général , a considéré que l'analyse des crédits d'équipement militaire constituait le point le plus crucial de l'examen budgétaire 2002, à cause de son poids prépondérant dans les dépenses publiques d'équipement dont il illustrait parfaitement le sacrifice, mais compte tenu aussi de sa signification profonde, en termes d'exercice de la responsabilité de l'Etat.

Il a relevé que les conditions d'exécution des crédits d'équipement militaire tout au long de la durée de l'actuelle loi de programmation, l'état actuel de l'équipement de nos forces armées, et les perspectives de livraison des principaux programmes engagés révélaient un risque de décrochage de la France, sans pour autant que la défense européenne, en principe mise en route à Helsinki en décembre 1999, paraisse en mesure de prendre le relais.

Il a souhaité obtenir des prévisions sur l'écart apparaissant d'ores et déjà entre le montant des crédits d'équipement inscrit en loi de finances initiale 2002, et celui prévu pour 2003, première annuité budgétaire de la prochaine loi de programmation.

Il s'est par ailleurs interrogé sur l'ampleur des marges d'économies potentiellement liées à la réorganisation des industries françaises d'armement, en particulier celle de la direction des constructions navales, qui fait l'objet d'un article spécifique dans le projet de loi de finances rectificative déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale.

Relevant que les responsables gouvernementaux continuaient d'affirmer que la loi de programmation militaire avait été respectée à 94 %, M. Eric Doligé a souhaité obtenir des précisions sur le chiffrage de l'écart constaté en fin de période.

M. René Trégouët s'est vivement inquiété à son tour de la détérioration de la situation des industries d'armement française et européenne. Il s'est interrogé par ailleurs sur l'éventualité d'un projet de porte-avions européen, ou à tout le moins franco-britannique.

Indiquant qu'il avait récemment effectué un stage au sein de l'entreprise EADS, M. Philippe Adnot a souligné la gravité des conséquences, pour les industriels concernés, des reports et annulations de crédits correspondant aux grands programmes d'armement.

M. François Marc s'est interrogé sur l'ampleur des économies d'échelle et des synergies potentielles liées à la construction d'une défense européenne. Concernant l'importance de l'effort d'armement américain, et le poids des industriels de ce secteur, il s'est inquiété de la capacité américaine à adhérer aux accords de désarmement. Il s'est enfin interrogé sur l'adéquation des systèmes de défense actuels à la nature de la défense, telle que perçue actuellement.

Evoquant l'importance des annulations et des reports de crédits intervenus sur les dépenses d'équipement, et l'ampleur de leur taux de sous-consommation, M. Alain Lambert, président , s'est interrogé sur la propension du gouvernement à utiliser ceux-ci comme instrument de régulation budgétaire. Il s'est également inquiété de l'écart qui lui paraissait se creuser entre le niveau de l'effort de défense britannique et celui de la France.

Répondant aux différents intervenants, M. Maurice Blin, rapporteur spécial , a d'abord souhaité insister sur la divergence croissante des positions des différents partenaires européens, ne serait-ce qu'en termes d'effort budgétaire, estimant qu'on ne pouvait exclure un risque de « dislocation » de l'Europe de la défense. Il s'est particulièrement inquiété du retard pris par l'Allemagne, certes freinée par la charge de la réunification. Evoquant le risque non négligeable de voir l'Allemagne se soustraire au projet de l'A-400 M, compte tenu des divergences fortes au sein du Bundestag, M. Maurice Blin a estimé que, comme elle l'avait toujours fait historiquement, dans un sens ou dans l'autre, c'était à l'Allemagne qu'il revenait, en définitive, de donner le ton à toute construction européenne, et que la réticence allemande « plombait » aujourd'hui l'Europe de la défense.

Sur l'hypothèse d'un porte-avions européen ou franco-britannique, M. Maurice Blin a estimé que ce projet, évoqué effectivement, se heurtait toutefois à des divergences notamment liées aux modalités de catapultage et d'appontage des appareils.

S'agissant enfin des conditions de réalisation de la loi de programmation militaire, le rapporteur spécial a tenu à apporter plusieurs précisions.

Si l'on s'en tient aux seules lois de finances initiales, et si l'on se réfère à un objectif exprimé en francs 1997, le taux de couverture de la loi de programmation initiale, s'agissant des crédits d'équipement, atteint 92,7 %, et le taux de couverture de la loi de programmation corrigée par la revue de programme 95,7 % - soit les taux généralement évoqués par le gouvernement.

Mais l'article 2 de la loi de programmation mentionne explicitement les « dépenses », et non les crédits initiaux. Il convient donc bien, en toute rigueur, d'examiner, au regard des montants prévus par la loi de programmation, le montant des dépenses exécutées. De même convient-il de rapporter le montant des crédits annuels, à l'objectif fixé par la loi de programmation exprimé en francs courants, et non en francs 1997. Dans ce cadre, sur les quatre premières années d'exécution, compte tenu des annulations et des reports, le taux d'exécution par rapport à la loi de programmation révisée est de 90,4 % (et de 88,3 % par rapport à la loi de programmation initiale). Si l'on retire en outre de ce montant les dépenses non prévues, voire expressément exclues par la loi de programmation, notamment la participation de la défense au budget civil de recherche et de développement (B.C.R.D), les crédits d'entretien programmé du matériel, les cotisations patronales au Fonds spécial des pensions des ouvriers de l'Etat, et la compensation des pertes subies par la direction des constructions navales sur des contrats à l'exportation, on arrive à un taux d'exécution inférieur à 88 % si l'on se réfère à la revue de programmes et inférieur à 86 % si l'on se réfère à la loi de finances initiale.

De même, compte non tenu de ces différentes dépenses dites de « bourrage », et en appliquant aux crédits initiaux 2002 le taux d'exécution constaté en 2000, il apparaît que l'écart avec le niveau fixé pour 2003 par la prochaine loi de programmation risque d'être proche de 10 milliards de francs.

La commission a procédé ensuite à l'examen des dépenses ordinaires du budget de la défense et de l'article 31 du projet de loi de finances, sur le rapport de M. François Trucy, rapporteur spécial.

M. François Trucy, rapporteur spécial
, a d'abord tenu à souligner que, au terme de la loi de programmation, la professionnalisation des armées s'était accomplie de manière globalement satisfaisante et qu'il convenait de saluer l'ampleur de cette réforme, assise sur des suppressions massives d'emplois et des mesures conséquentes de reconversion et d'incitation au départ. Il a rappelé qu'à ce jour aucun ministère civil n'avait été en mesure de réussir une telle démarche.

Il a précisé que le ministère de la Défense était à nouveau le premier à achever les négociations syndicales relatives à l'application des 35 heures pour les effectifs civils, et le premier à mettre en oeuvre la jurisprudence Berkani visant à intégrer, sauf décision contraire des intéressés, les personnels contractuels dans les effectifs de la fonction publique.

Tout en indiquant que l'objectif global des effectifs budgétaires était respecté à 1 % près, puisque la Défense emploiera en 2002 un effectif budgétaire de 436.221 personnes, soit le cinquième des effectifs civils, M. François Trucy , rapporteur spécial, a toutefois estimé nécessaire de souligner l'existence de certains décalages au regard des objectifs plus détaillés : un peu plus de militaires du rang que prévu, beaucoup plus de gendarmes, et moins de personnels civils. Il a indiqué que certains secteurs spécifiques, comme les médecins, les informaticiens, les atomiciens ou les plongeurs-démineurs apparaissaient d'ores et déjà vulnérables, voire parfois franchement déficitaires.

M. François Trucy, rapporteur spécial , a considéré ensuite que, si la professionnalisation était « accomplie », il restait à la consolider. A cet égard, il a estimé que, pour seulement préserver l'acquis, il faudrait vraisemblablement consentir un effort budgétaire supplémentaire considérable. Il a notamment indiqué qu'au-delà des soucis ponctuels de recrutement, apparaissaient surtout des difficultés de fidélisation, liées à la concurrence forte d'un marché de l'emploi civil conjoncturellement à la hausse, mais aussi, de façon plus structurelle, à une moindre attractivité du métier, s'agissant des conditions de vie et de rémunération. Il s'est particulièrement inquiété de « l'effet 35 heures ».

Le rapporteur spécial , a souligné par ailleurs que la comparaison avec les « collègues » des armées de l'OTAN n'était pas davantage enviable, précisant que la dépense globale de fonctionnement consentie sur la tête du soldat français, certes du même ordre que celle du soldat allemand, était près de deux fois moins élevée que celle du soldat britannique, et près de trois fois inférieure à celle du soldat américain.

De fait, M. François Trucy, rapporteur spécial , a estimé illusoire de penser que le pouvoir d'achat du titre III pourrait rester constant dans la durée, si toutefois l'on souhaitait préserver les acquis de la professionnalisation.

M. François Trucy, rapporteur spécial , a ensuite rappelé que le dérapage des dépenses du titre III au cours de l'exécution de la programmation avait été systématiquement financé, en loi de finances initiale comme en exécution, par un prélèvement sur les crédits d'équipement du titre V. Il a souligné que les facteurs de ce dérapage ne pourraient que se maintenir, voire se renforcer, au cours de la prochaine législature, et de la prochaine loi de programmation, qu'il s'agisse du coût de la consolidation de la professionnalisation, de l'incidence des mesures générales fonction publique, ou de la participation de la France à des opérations militaires extérieures.

Sur ce dernier point, M. François Trucy, rapporteur spécial, a de nouveau vivement critiqué le refus constant d'inscrire en loi de finances initiale les dépenses de fonctionnement correspondant à la participation de la France à des opérations extérieures, indiquant que ces opérations, constamment financées en cours d'exécution par prélèvement sur les crédits d'équipement du titre V, à hauteur de 3 milliards de francs environ chaque année, représentaient sur la durée de la programmation l'équivalent du coût d'un deuxième porte-avions nucléaire.

Il a considéré à cet égard que, non conforme à l'esprit du droit budgétaire, ce procédé avait largement contribué au non respect de la loi de programmation, s'agissant des crédits d'équipement.

Tout en soulignant que le projet de budget 2002 comportait un incontestable effort en faveur de la « condition militaire », M. François Trucy, rapporteur spécial , a estimé qu'intervenant bien tardivement, cet effort ne saurait être suffisant pour répondre à des demandes qui pouvaient être qualifiées de légitimes. Il a relevé que cet effort restait en tout cas globalement inférieur de moitié à celui qui était consenti pour les budgets civils : le titre III de la Défense progresse en effet de 2,3 %, alors que ceux des budgets civils augmentent en moyenne de 5,1 %.

Il a précisé en outre que cet effort correspondait pour partie à l'incontournable prise en compte des mesures « Sapin » relatives au point d'indice et à la revalorisation des bas salaires dans la fonction publique, lesquelles représentaient un total de 1,3 milliard de francs, soit la moitié du total des moyens nouveaux du titre III.

Il a enfin souligné que, si les mesures catégorielles étaient élargies cette année à l'ensemble des forces armées, et non plus limitées, comme en 2001, à la Gendarmerie, au Service de Santé et à la Délégation générale pour l'Armement, elles ne concernaient toutefois que les sous-officiers, laissant totalement les officiers de côté.

Rappelant ensuite que l'alourdissement sensible du poste rémunérations et charges sociales avait fortement pesé sur les crédits d'entretien programmé et de fonctionnement courant, et notamment les moyens liés à l'activité des forces, amputées de plus de un milliard de francs sur la période de programmation, soit 10 % du montant initial de 1997, M. François Trucy a indiqué que de fait, les taux d'activité des armées françaises étaient aujourd'hui inférieurs aux normes OTAN.

Indiquant que, tenant compte de cette dérive, le budget 2002 prévoyait effectivement une majoration des crédits de fonctionnement hors rémunérations et charges sociales, M . François Trucy, rapporteur spécial, a précisé que les deux tiers de cet effort étaient en réalité financés par des mesures d'économies et de transfert, ne correspondant donc pas à des moyens nouveaux, et que le tiers du montant ainsi globalement disponible bénéficierait à la gendarmerie.

Il a relevé que si, au total, les taux d'activité de nos forces armées devraient être ainsi légèrement améliorés, cette progression ne suffirait pas à leur permettre d'atteindre l'objectif OTAN, et moins encore celui des forces britanniques.

M. François Trucy, rapporteur spécial , a enfin souligné que les besoins de la gendarmerie prélevaient une part croissante des moyens de fonctionnement affectés à la défense. Il a ainsi précisé qu'au total, sur l'ensemble de la période de programmation, les coûts globaux de fonctionnement de la gendarmerie représentaient un cinquième du total de l'enveloppe globale du titre III, soit l'équivalent des dépenses de l'armée de l'air et de la marine réunies. Il a indiqué qu'en 2002, la Gendarmerie serait la seule à bénéficier de la création de postes de sous-officiers -au-delà de la cible de programmation, majorée en définitive de 700 postes, et la principale bénéficiaire des nouvelles primes de qualification attribuées aux sous-officiers confirmés (4.200 sur le total de 6.000), comme des moyens nouveaux dégagés pour le fonctionnement, dont le tiers lui serait attribué.

M. François Trucy, rapporteur spécial , a relevé que pour autant, la situation de la gendarmerie semblait avoir atteint un seuil critique, que les mesures prises ne lui paraissaient pas suffisantes à résoudre. Il a en effet considéré que la détérioration de la situation sécuritaire, et l'élévation du niveau d'exigence en matière de sécurité publique, devaient être prises en compte, de même que les demandes relatives à l'application des 35 heures.

Concluant, il a déploré à son tour la rigueur particulière appliquée au budget de la défense, en dépit des opportunités offertes par la croissance économique au cours des précédents exercices budgétaires, estimant que l'assombrissement des perspectives conjoncturelles ne permettrait plus nécessairement de dégager les marges indispensables au seul maintien de l'acquis de la professionnalisation.

M. René Trégouët a souligné la préoccupation des élus locaux face au malaise croissant de la gendarmerie, notamment justifié par une réelle insuffisance de leurs moyens de fonctionnement.

M. Auguste Cazalet s'est interrogé sur d'éventuelles perspectives de restructurations et de regroupement des services de police et de gendarmerie, et sur l'hypothèse d'une prise en compte concrète des contraintes spécifiques de disponibilité et d'horaires de travail par la gendarmerie.

Suivant l'avis de ses rapporteurs, la commission a alors décidé de proposer au Sénat le rejet des crédits du ministère de la Défense.

ARTICLE 31

Mesures nouvelles. Dépenses ordinaires des services militaires

I.- Il est ouvert au ministre de la défense, pour 2002, au titre des mesures nouvelles sur les dépenses ordinaires des services militaires, des autorisations de programme s'élevant à la somme de 56.788.021 euros, applicables au titre III « Moyens des armes et services ».

II.- Pour 2002, les crédits de mesures nouvelles de dépenses ordinaires des services militaires applicables au titre III « Moyens des armes et services » s'élèvent au total à la somme de 246.833.729 euros.

Exposé des motifs :

La comparaison des crédits ouverts en 2001 à ceux prévus pour 2002 au titre des dépenses ordinaires militaires (mesures nouvelles) figure au II de la partie « Analyses et tableaux annexes » du présent projet de loi.

Les justifications par chapitre sont présentées dans l'annexe « Services votés-Mesures nouvelles » relative au budget de la défense.

Décision de la commission : votre commission vous propose de rejeter cet article

MODIFICATIONS APPORTÉES PAR
L'ASSEMBLÉE NATIONALE

PRISE EN COMPTE DE LA RÉFORME DES FONDS SPÉCIAUX

Les crédits du titre III ont été abondés de 608.540 euros (4 millions de francs) pour tenir compte de la réforme des fonds spéciaux adoptée par l'Assemblée nationale lors de l'examen du budget des services généraux du Premier ministre.

La majoration de ces crédits porte d'une part sur le chapitre 31-12 « personnels civils non ouvriers-indemnités et allocations diverses », article 10 « ministre et secrétaire d'Etat » pour 580.642 euros (3,80 millions de francs), soit une multiplication par cinq de la dotation initiale (115.361 euros - 756.720 francs).

Elle porte d'autre part sur le chapitre 34-01 « S.G.A. (secrétariat général pour l'administration) - D.G.S.E. (direction générale de la sécurité extérieure) - D.P.S.D. (direction de la protection et de la sécurité de la défense) - P.P.E. (postes permanents à l'étranger) - D.S.N. (direction du service national) - D.I.C.O.D. (délégation à l'information et à la communication de la défense) - C.G.A. (contrôle général des armées) - A.P. (affaires pénales) - entretien et achat de matériels - fonctionnement et entretien immobilier ». Seuls les crédits de l'article 22 « Secrétariat général pour l'administration - représentation et réceptions » sont abondés à hauteur de 27.898 euros (183.000 francs), correspondant à 3,6 % de la dotation initiale.

Cet amendement ne modifie pas la position de la commission.


1 Le recrutement des personnels civils affectés dans les armées est centralisé par la Direction de la fonction militaire et du personnel civil pour les titulaires et les contractuels. Il est assuré localement par les armées pour les ouvriers de l'Etat, dans la limite des autorisations d'embauche accordées au ministère de la Défense par le ministère de l'Economie et des Finances.

2 A titre de comparaison, avec des régimes certes très différents, la rémunération annelle d'un soldat de 1 ère classe américain est de 14 300 euros (93 802 francs), celle d'un militaire du rang de seconde classe de l'armée de Terre britannique de 19 999 euros (111 506 franc), celle d'un 1 ère classe de la Royal Air Force de 16 888 euros (110 778 francs), et celle d'un matelot de la Navy de 16 999 euros (111 506 francs)

3 Notamment la budgétisation des gendarmes d'autoroutes, la budgétisation de la partie étatique de la DCN et l'intégration du Secrétariat d'État aux Anciens combattants.

4 Personnels contractuels des catégories C et D jusqu'à présent comptabilisés hors emplois fonction publique et devant être inscrits dans les effectifs de la fonction publique conformément à la jurisprudence « Berkani » issue de la décision du Tribunal des conflits du 25 mars 1996, sauf s'ils choisissent de retourner à leur statut d'agent de droit privé.

Le ministère de la Défense est le premier ministère à clarifier la situation des personnels concernés .

5 Structure intégrée de maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques de la Défense.

6 Les forces de présence dans les DOM-TOM et les forces prépositionnées en Afrique ne sont pas comptabilisées.


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